Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 1, 28 février 2020, n° 17/03226

  • Poste·
  • Reclassement·
  • Licenciement·
  • Refus·
  • Recherche·
  • Employé·
  • Médecin du travail·
  • Planification·
  • Indemnité·
  • Titre

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Douai, soc. c salle 1, 28 févr. 2020, n° 17/03226
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 17/03226
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Roubaix, 18 septembre 2017, N° 16/00269
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DU

28 Février 2020

296/20

N° RG 17/03226 – N° Portalis DBVT-V-B7B-RA54

PL/CH

RO

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de ROUBAIX

en date du

19 Septembre 2017

(RG 16/00269 -section 5)

GROSSE :

aux avocats

le 28 Février 2020

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

— Prud’Hommes-

APPELANT :

M. Z Y

[…]

[…]

Représenté par Me Fabrice DANDOY, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

SAS SATELEC

[…]

[…]

Représentée par Me Matthieu LAMORIL, avocat au barreau d’ARRAS

DÉBATS : à l’audience publique du 11 Décembre 2019

Tenue par A B

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Audrey CERISIER

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

A B : PRÉSIDENT DE CHAMBRE

E F

: X

C D : X

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Février 2020,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par A B, Président et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 27 novembre 2019.

EXPOSE DES FAITS

Z Y a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 28 avril 1980 en qualité de monteur électricien par la société SATELEC. A la date de son licenciement il occupait le même emploi, percevait un salaire mensuel brut moyen de 2261€ et était assujetti à la convention collective des ouvriers des entreprises de travaux publics. L’entreprise employait de façon habituelle au moins onze salariés.

A la suite d’un arrêt de travail consécutif à une maladie professionnelle, il a fait l’objet d’une première visite médicale de reprise le 29 janvier 2016 à la suite de laquelle médecin du travail a conclu à son inaptitude au poste qu’il occupait. Lors de la seconde visite médicale organisée le 15 février 2016, le médecin du travail a émis un avis d’inaptitude définitive au poste de monteur électricien et à l’aptitude du salarié à occuper un poste sans contrainte physique, susceptible de correspondre à un emploi administratif.

Après avoir eu l’accord du médecin du travail sur l’un des deux postes identifiés au titre de l’obligation de recherche de reclassement et après avis des délégués du personnel, la société l’a proposé à Z Y qui l’a refusé par courrier en date du 21 avril 2016.

Z Y a été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 avril 2016 à un entretien le 12 mai 2016 en vue de son licenciement pour inaptitude définitive et impossibilité de reclassement. A l’issue de cet entretien, son licenciement lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 mai 2016.

Les motifs du licenciement tels qu’énoncés dans la lettre sont les suivants :

«Après des recherches de reclassement et après avoir consulté les Délégués du Personnel le 02 mars 2016, nous vous informons par la présente que nous sommes contraints de poursuivre la procédure engagée en notifiant votre licenciement pour les motifs suivants :

Impossibilité de reclassement consécutif à votre inaptitude professionnelle constatée par le médecin du travail et refus de reclassement

En effet, après que la médecine du travail ait rendu les avis médicaux suivant :

le 29.01.16 : «Inapte au poste, apte à un autre (art. R4624-31 du C.T.) : Inapte au poste de monteur électricien. A revoir dans 15 jours après étude de poste et des conditions de travail.,

le 15.02.16 : «Inapte au poste, apte à un autre (art. R4624-31 du C.T.) : Inapte définitif au poste de monteur électricien, travail sous tension et conduite nacelle. Apte à un poste sans contraintes physiques particulières : pas de taches imposant les bras au-dessus du pian des épaules, pas de postures courbées en avant et pas de position agenouillée, pas de port de charges lourdes supérieures à 10 kg. Un poste de type administratif pourrait correspondre aux capacités restantes.»,

nous avons entrepris l’ensemble des démarches nécessaires, tant en interne qu’au niveau du Groupe, afin d’identifier les éventuelles possibilités de reclassement.

C’est ainsi que nous avons identifié deux postes correspondant à votre profil :

-un poste de magasinier (suivi du parc petit outillage de moins de 10 kg) au Service des Moyens SATELEC d’HENIN BEAUMONT,

-un poste d’employé administratif (intégration de la cellule d’appels téléphoniques et planification de rendez-vous), en détachement pour SATCOMPTAGES, dans les locaux de SATELEC TOURCOING.

Nous avons soumis ces deux postes à La Médecine du Travail qui a retenu le poste d’employé administratif comme répondant à vos capacités restantes. Nous vous avons donc proposé le 12 avril 2016 une offre de reclassement sur ce poste, pour lequel vous auriez bénéficié des formations nécessaires, et ce sans modification de votre lieu de travail et de votre contrat de travail soit :

Société SATELEC TOURCOING (en détachement pour SATCOMPAGES) :

Emploi : Employé Administratif

Définition du poste : Intégration de la Cellule d’appels téléphoniques et de planification de rendez-vous :

Téléphoner aux clients d’ERDF pour convenir de l’intervention des monteurs de la société SATCOMPTAGES dans le cadre des changements des compteurs électriques LlNKY

Saisie informatique des rendez-vous pris.

(une formation spécifique vous sera délivrée pour vous familiariser avec l’usage du logiciel d’ERDF)

Convention Collective : Travaux Publics

Lieu de travail : SATCOMPTAGES (dans les locaux de SATELEC TOURCOING)

Salaire & Niveau : Salaire de base & Niveau précédents confirmés

Cependant, vous avez, par courrier du 21 avril 2016, refusé cette proposition de reclassement.

Malgré nos recherches, nous n’avons pu vous proposer d’autres postes.

Compte tenu de votre déclaration d’inaptitude à votre poste de travail dans l’entreprise, de votre refus de proposition de reclassement, et de l’impossibilité de votre reclassement, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour inaptitude physique.»

Par requête reçue le 9 septembre 2016, le salarié a saisi le Conseil de Prud’hommes de Roubaix afin de faire constater l’illégitimité de son licenciement et d’obtenir le versement d’indemnités de rupture.

Par jugement en date du 19 septembre 2017, le Conseil de Prud’hommes l’a débouté de sa demande et l’a condamné au paiement de 100 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Le 3 octobre 2017, Z Y a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 30 mars 2018 les procédures n° 17/03226 et 17/03625 ont été jointes.

Par ordonnance en date du 27 novembre 2019, la procédure a été clôturée et a été fixée l’audience des plaidoiries.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 21 décembre 2017, Z Y sollicite de la Cour l’infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la société SATELEC au paiement de

4522 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

452,20 euros au titre des congés payés y afférents

27184 euros à titre d’indemnité spéciale de licenciement

50000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appelant expose que la société SATELEC a manqué à son obligation de reclassement, qu’elle appartenait au groupe Fayat, l’une des plus grandes entreprises françaises du bâtiment et des travaux publics, que les recherches de reclassement ont consisté exclusivement en une diffusion d’une lettre circulaire datée du 16 février 2016, qu’il a refusé le poste proposé car il nécessitait des compétences en informatique qu’il n’avait pas, ayant été employé sur des chantiers pendant 36 ans, que son refus n’est donc pas abusif, que son contrat de travail était modifié du fait de la modification de ses

fonctions, qu’au moment de son licenciement il était âgé de 62 ans et ne pouvait retrouver un emploi.

Selon ses conclusions en réplique reçues au greffe de la cour le 20 mars 2018, la société SATELEC intimée sollicite de la cour la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de l’appelant à lui verser 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société intimée soutient que le licenciement est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse, qu’elle a loyalement mis en 'uvre les recherches de reclassement en cherchant un emploi disponible adapté aux capacités de l’appelant, qu’après avoir recueilli l’avis du médecin du travail, un poste a été proposé au salarié, qu’elle a contacté l’ensemble des sociétés du groupe, que les recherches se sont prolongées durant deux mois, que l’appelant ne justifie d’aucun préjudice résultant de la perte de son emploi.

MOTIFS DE L’ARRET

Attendu en application de l’article L1226-12 du code du travail qu’il résulte de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que le motif y énoncé est l’absence de toute autre possibilité de reclassement à la suite du refus par l’appelant du poste d’employé administratif qui lui était proposé ;

Attendu toutefois que le poste d’employé administratif au sein de la cellule d’appels téléphoniques et de planification de rendez-vous, proposé au titre du reclassement, et consistant à organiser par téléphone auprès des clients des interventions destinées à changer leurs compteurs d’électricité, constituait une modification d’un élément essentiel du contrat de travail ; qu’en effet, le salarié était jusque-là employé en qualité de monteur électricien, relevant d’une catégorie d’emploi différente, et travaillait sur des chantiers ; que dans son courrier en date du 21 avril 2016, l’appelant soulignait en outre l’impossibilité dans laquelle il se trouvait d’occuper un tel poste compte tenu de son niveau scolaire et de sa totale incompétence en matière informatique ; que son refus était donc légitime ;

Attendu qu’à la suite de ce refus, la société ne démontre pas qu’elle se soit livrée à la moindre recherche dans le cadre de son obligation de reclassement, considérant en réalité que le refus par l’appelant était dépourvu de toute légitimité ; qu’une telle constatation se déduit tant de l’absence de communication du moindre courrier de nouvelles recherches postérieurement au 21 avril 2016, date du refus de l’appelant, que de la lettre de convocation à l’entretien préalable datée du 26 avril 2016, envoyée dès le lendemain de la réception de la lettre de refus de l’appelant, et dans laquelle l’employeur en tirait comme conséquence l’obligation dans laquelle il se trouvait d’engager la procédure de licenciement ;

Attendu que le licenciement de l’appelant a donc été prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement ;

Attendu en application de l’article L1226-14 du code du travail qu’il n’existe pas de contestation sur le montant de l’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents et de l’indemnité spéciale de licenciement, la société n’en discutant que le principe ; qu’il convient en conséquence de faire droit à la demande ;

Attendu en application de l’article L1226-15 du code du travail que l’appelant ne démontre pas avoir subi un préjudice lui permettant de solliciter une indemnité d’un montant supérieur à celui prévu par

les dispositions légales précitées ; qu’il convient en conséquence de lui allouer la somme de 27132 euros ;

Attendu qu’il ne serait pas équitable de laisser à la charge de l’appelant les frais qu’il a dû exposer devant le conseil de prud’hommes et en cause d’appel, et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu’il convient de lui allouer une somme de 2500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement déféré

ET STATUANT A NOUVEAU

DIT que le licenciement de Z Y a été prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte ;

CONDAMNE la société SATELEC à verser à Z Y

4522 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

452,20 euros au titre des congés payés y afférents

27184 euros à titre d’indemnité spéciale de licenciement

27132 euros à titre d’indemnité en application de l’article L1226-15 du code du travail

2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

LA CONDAMNE aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

N. BERLY P. B

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 1, 28 février 2020, n° 17/03226