Cour d'appel de Douai, Sociale d salle 3, 28 mai 2021, n° 18/01387

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, soc. d salle 3, 28 mai 2021, n° 18/01387
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 18/01387
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Tourcoing, 24 avril 2018, N° 16/00526
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DU

28 Mai 2021

1685/21

N° RG 18/01387 – N° Portalis DBVT-V-B7C-RSBN

LG/AA

RO

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de TOURCOING

en date du

25 Avril 2018

(RG 16/00526 -section 2)

GROSSE :

aux avocats

le 28 Mai 2021

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

— Prud’Hommes-

APPELANT :

M. A X

[…]

[…]

Représenté par Me Julie PENET, avocat au barreau de LILLE- Substitué par Me Aurélie COUSIN, avocat au barreau de LILLE.

INTIMÉE:

SAS FRANS BONHOMME

Z I N°[…]

[…]

Représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI – Assistée par Me Corinne GABBAY, avocat au barreau de PARIS.

DÉBATS : à l’audience publique du 04 Mars 2021

Tenue par C D

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

E F

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

C D

: CONSEILLER

I J-K : CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Mai 2021,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par E F, Président et par Charlotte GERNEZ , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 04 Juin 2020.

EXPOSE DU LITIGE :

La Société FRANS BONHOMME est spécialisée dans la distribution de canalisations plastiques et de leurs accessoires.

Elle applique à son personnel la convention collective du Négoce des Matériaux de Construction.

Suivant contrat à durée indéterminée à effet au 9 juin 2011, elle a engagé Monsieur A X en qualité de Chef de Magasin, coefficient 250, statut Agent de maitrise, niveau IV et lui a, à cet effet, accordé une large délégation de pouvoirs ( hygiène et sécurité, personnel, code de la route et coordination des transports, conduite d’engins).

Le salarié a, dans un premier temps, été affecté à l’établissement de Douai, puis, à compter du 1er décembre 2012, a exercé ses fonctions au sein de l’établissement de Marcq en Baroeul.

A plusieurs reprises au cours de l’année 2014, la direction de l’entreprise a fait part au salarié de son mécontentement quant à sa façon de gérer le dépôt de Marcq en Baroeul.

A compter du 1er août 2014, le salarié a été placé en arrêt maladie pour syndrome anxio dépressif.

Son arrêt a été prolongé à plusieurs reprises. Il n’a, par la suite, plus repris son poste.

Au cours du mois d’août 2014, la société FRANS BONHOMME, invoquant les lacunes professionnelles de Monsieur X, lui a proposé de l’affecter au poste de chef magasinier au sein du dépôt de Lesquin en lui précisant que cette mutation lui permettrait de mieux appréhender les bases du métier sans que ni sa rémunération, ni son coefficient n’en soient modifiés.

Le 14 août 2014, le salarié a adressé un courrier de réclamation en faisant valoir que cette proposition constituait une mesure de rétrogradation et en dénonçant les pressions exercées sur sa personne par Messieurs Y et Defresne afin de l’inciter à accepter celle-ci.

Le 4 septembre 2014, dans un courrier en réponse, la direction de la société FRANS BONHOMME a contesté les accusations portées par Monsieur X en déclarant que la mutation proposée n’avait aucun caractère disciplinaire.

Le 24 novembre 2014, Monsieur X a sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie. Le 2 avril 2015, la CPAM lui a opposé un refus de prise en charge.

Le 10 juillet 2015, à l’issue de deux visites médicales de reprise, le salarié a été déclaré inapte au poste de chef de magasin dans l’entreprise FRANS BONHOMME. Apte à poste similaire dans un environnement différent.

Le 18 juillet 2015, la société FRANS BONHOMME a soumis à l’intéressé trois propositions de reclassement qui les a refusées.

Estimant ne pas être en mesure de le reclasser la société FRANS BONHOMME a alors mis en place une procédure de licenciement .

Le 11 août 2015 , Monsieur X s’est vu notifier la rupture de son contrat de travail pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Contestant la légitimité de cette mesure, il a , le 4 novembre 2016, saisi le conseil des prud’hommes de Tourcoing afin d’obtenir la condamnation de son ancien employeur au paiement de diverses sommes et indemnités.

Suivant jugement en date du 25 avril 2018, la juridiction prud’homale l’a débouté de l’intégralité de ses demandes et l’a condamné aux dépens.

Le 17 mai 2018 , Monsieur X a interjeté appel de cette décision dans les conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées entre les parties.

Par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état la clôture de la procédure a été prononcée au 4 juin 2020. Compte tenu de la crise sanitaire l’audience de plaidoirie est intervenue le 4 mars 2021.

Aux termes de ses écritures régulièrement transmises via le RPVA, le 7 août 2018 ( conclusions d’appelant ) et auxquelles il y a lieu de se référer pour une parfaite connaissance des moyens et prétentions développés, Monsieur X conclut à la réformation du jugement entrepris .

Il demande à la cour de :

• constater, dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

' condamner la SAS FRANS BONHOMME au paiement des sommes suivantes :

'11 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, nets de charge sociales CSG et CRDS ;

' 3 509,28 euros au titre de l’indemnité de préavis ;

' 350,92 euros au titre des congés payés afférents;

• dire et juger que les créances de nature salariale emporteront intérêts au taix légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation en première instance ;

• dire et juger que les cérances de nature indemnitaire emporteront intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

• débouter la SAS FRANS BONHOMME de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

• condamner la SAS FRANS BONHOMME au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code ed procédure civile,

• condamner la SAS FRANS BONHOMME aux éventuels dépens ;

• dire et juger qu’à défaut d’exécution spontanée de la décision à intervenir, les frais inhérents à l’exécution forcée, en ce compris ceux résultants de l’application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 sera supporté par le débiteur.

Suivant conclusions régulièrement adressées via la messagerie électronique, le 29 octobre 2018, la SAS FRANS BONHOMME conclut à la confirmation de la décision entreprise dans toutes ses dispositions.

Elle demande à la cour de :

• la dire recevable et bien fondée en ses conclusions ;

• déclarer Monsieur X mal fondé en son appel et l’en débouter ;

• débouter Monsieur A X de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions ;

• le condamner à lui régler la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

• condamner Monsieur X en tous les dépens.

SUR CE, LA COUR:

Sur la légitimité du licenciement opéré et les demandes subséquentes

Monsieur X expose en premier lieu que son inaptitude est directement liée aux manquements de son employeur. Il soutient à ce titre qu’il a été soumis à des conditions de travail déplorables étant contraint d’effectuer de nombreuses heures supplémentaires, sans disposer des moyens nécessaires pour mener à bien ses missions . Il déclare que cette situation a eu un impact négatif sur sa santé. Il ajoute qu’en août 2014, la société lui a proposé de nouvelles fonctions de chef magasinier à Lesquin, ce qui constitue ni plus ni moins une rétrogradation. Il relève que les motifs avancés par la SAS FRANS BONHOMME pour justifier de cette proposition ( absence de propreté des lieux, défaut de participation aux bons résultats de l’entreprise, insuffisance professionnelle), sont parfaitement fallacieux et non fondés et ne sauraient légitimer une réduction de ses responsabilités.

Il fait valoir par ailleurs que son employeur, à l’issue de sa déclaration définitive d’inaptitude n’a pas mené de recherches loyales et sérieuses de reclassement.

Il estime en conséquence que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La SAS BONHOMME conteste être à l’origine d’une dégradation des conditions de travail du salarié. Elle explique que ce dernier manquait d’implication dans ses missions qu’il n’accomplissait que partiellement. Elle précise qu’afin d’aider l’intéressé au vu des difficultés rencontrées, elle lui a proposé, à son retour d’arrêt maladie, de le muter temporairement sur le magasin de Lesquin, non à titre de rétrogradation mais comme mesure d’accompagnement destinée à lui permettre de

développer ses aptitudes. Elle indique qu’il s’agissait là d’une mesure prise dans l’intérêt du service et non d’une sanction.

Elle affirme par ailleurs avoir parfaitement satisfait à son obligation de reclassement et a, dans ce cadre, été en mesure de soumettre 3 postes à Monsieur X qu’il a refusés.

Elle considère en conséquence, les prétentions émises par l’appelant comme étant parfaitement infondées .

Sur l’existence de manquements imputables à l’employeur à l’origine de l’inaptitude constatée.

Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu’il est démontré que l’inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée.

En l’espèce, la cour constate, à l’instar des premiers juges, que Monsieur X invoque une dégradation de ses conditions de travail, sans apporter le moindre élément probant sur ce point, se contentant de produire un seul et unique mail daté du 26 mars 2014, adressé depuis sa messagerie personnelle à sa hiérarchie à 23h11, et auquel, il lui a été répondu, dès le lendemain, que son envoi était incomplet ( dépourvu des pièces jointes annoncées) et qu’il travaillait trop tard.

Cet échange ne permet aucunement de conclure que le salarié effectuait régulièrement des heures supplémentaires et exécutait de façon habituelle ses missions jusqu’à des heures indues. En outre il y a lieu de relever que l’employeur manifeste dans son message sa désapprobation quant aux horaires de travail tardifs du salarié.

L’appelant n’apporte aucun témoignage venant corroborer ses dires, ne produit aucun document permettant d’attester d’une absence de moyens pour la réalisation de ses missions ou même un courrier de réclamation en ce sens, et ne transmet aucune donnée, notamment chiffrée, permettant d’apprécier sa charge de travail.

Les quelques remarques dont il a fait l’objet de la part de ses supérieurs portant sur la qualité de son travail ne revêtent pas un caractère illégitime au regard des constatations reprises à l’appui des dites observations ( notamment nombreux produits en rupture de stocks faute de commandes effectuées dans les délais), des mentions contenues dans son entretien annuel d’évaluation du 19 mars 2013 où des lacunes d’organisation étaient déjà pointées et du témoignage de Monsieur G H , magasinier ayant travaillé sous l’autorité de Monsieur X durant plusieurs années ,qui relate qu’il devait régulièrement accomplir le travail administratif de son supérieur, que celui-ci était désordonné et n’aidait pas le personnel en place. ( Pièce 26 intimée).

La proposition, d’ailleurs postérieure à l’arrêt maladie, de muter le salarié sur le site de Lesquin en qualité de chef magasinier ne s’inscrit pas dans une démarche disciplinaire mais apparaît bien comme une solution envisagée par l’employeur afin de remédier aux difficultés constatées sur le dépôt de Marcq en Baroeul, consistant à dispenser au salarié une formation pratique axée sur les fondamentaux et à affecter parallèlement un autre de ses employés sur le site pour remédier aux désordres relevés. La mutation proposée n’a d’ailleurs pas été imposée à Monsieur X, la société FRANS BONHOMME s’est contentée de prendre acte de son refus .

Aucun élément de la procédure ne vient confirmer que la démarche de la SAS BONHOMME se serait accompagnée de pressions afin d’inciter le salarié à accepter cette nouvelle affectation, les propos de l’appelant ayant été fermement démentis par ses supérieurs Messieurs Z et Y dans des mails transmis à l’employeur ( pièces 7 et 8 intimée).

S’il est d’évidence que Monsieur X a mal vécu cette remise en cause de ses compétences, cette seule circonstance ne permet pas de retenir que l’employeur a agi en dehors de ses prérogatives ou de

façon inappropriée et a, ainsi, contribué à la dégradation de son état de santé.

Aucune pièce médicale ne permet d’ailleurs de faire de lien entre les avis d’inaptitude et les conditions de travail de Monsieur X.

Il y aura lieu, en conséquence, d’approuver les premiers juges, ayant retenu que Monsieur X ne démontrait pas que son inaptitude avait pour origine un manquement de son employeur.

Sur le manquement de l’employeur à son obligation de reclassement :

L’article L 1226-2 du code du travail, dans sa version en vigueur à l’époque, énonce que lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise.

L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

En l’espèce, il est constant que Monsieur X, à l’issue de deux visites médicales de reprises et après étude de poste réalisée le 26 juin 2015, a été déclaré inapte au poste de chef de magasin dans l’entreprise FRANS BONHOMME. Apte à un poste dans un environnement différent. »

La partie intimée, qui n’appartient pas à un groupe, justifie avoir procédé à des recherches de reclassement au sein de la société, conformément aux préconisations médicales qui lui ont permis d’identifier les emplois suivants ( pièce 16 ' liste des emplois disponibles au sein de l’entreprise) :

• un poste de chef de magasin au dépôt de Meaux ( 77) ;

• un poste de chef de Magasin, au dépôt de Compiègne ( 60)

• un poste d’employé commercial et administratif au dépôt de Montelimar ( 26).

Comme l’a parfaitement relevé le conseil des prud’hommes, deux des postes offerts étaient strictement identiques à celui occupé par Monsieur X et aucun d’entre eux n’entrainaient de baisse de rémunération .

Le salarié les a refusées.

Dans ces circonstances, et alors qu’il n’existait pas d’autres postes disponibles correspondant aux aptitudes et capacités de Monsieur X il ne peut être considéré que la SAS FRANS BONHOMME a manqué à son obligation de reclassement.

Le jugement entrepris ayant conclu en ce sens, sera de ce fait également confirmé sur ce point.

Sur les frais non répétibles et les dépens :

L’équité commande de ne pas faire application en cause d’appel, des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur A X sera, en revanche, condamné aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement et contradictoirement, par arrêt mis à disposition par le greffe,

Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à faire application, en cause d’appel, des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne Monsieur A X aux dépens d’appel.

Le Greffier, Le Président,

C.GERNEZ V.F

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