Cour d'appel de Grenoble, 16 décembre 2009, n° 08/05145

  • Cigarette·
  • Licenciement·
  • Production·
  • Interdiction·
  • Solvant·
  • International·
  • Silicium·
  • Site·
  • Chef d'équipe·
  • Bâtiment

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 16 déc. 2009, n° 08/05145
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 08/05145
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu, 3 novembre 2008, N° F08/00023

Sur les parties

Texte intégral

RG N° 08/05145

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU MERCREDI 16 DECEMBRE 2009

Appel d’une décision (N° RG F 08/00023)

rendue par le Conseil de Prud’hommes de BOURGOIN-JALLIEU

en date du 04 novembre 2008

suivant déclaration d’appel du 10 Décembre 2008

APPELANTE :

La S.A.S. PHOTOWATT INTERNATIONAL prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

38300 BOURGOIN-JALLIEU

Représentée par la SCP REQUET CHABANEL (avocats au barreau de LYON) substitué par Me AULIARD (avocat au barreau de LYON)

INTIME ET APPELANT INCIDENT :

Monsieur A X

XXX

38300 BOURGOIN-JALLIEU

Comparant et assisté par Me Alain FESSLER (avocat au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, faisant fonction de Président,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Madame Astrid RAULY, Conseiller,

DEBATS :

A l’audience publique du 19 Novembre 2009,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller, chargé du rapport, en présence de Madame Astrid RAULY, Conseiller, assistés de Madame Simone VERDAN, Greffier, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 16 Décembre 2009, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 16 Décembre 2009.

Notifié le :

Grosse délivrée le :

RG 08 5145 ES

A X a été engagé le 1er septembre 1999 par la société PHOTOWATT INTERNATIONAL en qualité d’opérateur de production, classification ouvrier. En 2003, il a été promu responsable d’équipe, classification agent de maîtrise d’atelier N4E3. Il percevait au moment de son licenciement une rémunération mensuelle de 2.327 €.

Il a été licencié pour faute grave le 24 janvier 2008 au motif qu’il avait été surpris fumer une cigarette dans les toilettes de l’entreprise le 7 janvier 2008.

A X a contesté son licenciement devant le conseil de prud’hommes de Bourgoin Jallieu, saisi le 21 février 2008. Par jugement du 4 novembre 2008, la juridiction prud’homale a décidé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, a condamné la société PHOTOWATT INTERNATIONAL à lui verser :

—  4.000 euros d’indemnité de licenciement,

—  4.360,54 euros d’indemnité de préavis plus les congés payés afférents,

—  500 euros d’indemnité pour frais irrépétibles, a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné l’employeur aux dépens.

La société PHOTOWATT INTERNATIONAL a relevé appel le 10 décembre 2008 de ce jugement qui lui a été notifié le 18 novembre 2008. Elle demande à la cour d’infirmer cette décision, de débouter A X de ses demandes et de le condamner au paiement d’une indemnité de 750 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle explique qu’elle a pour activité la fabrication de modules photovoltaïques dans ses installations classées soumises aux dispositions de la loi du 19 juillet 1976 et aux arrêtés préfectoraux des 16 décembre 1999 (interdiction permanente de fumer dans les zones de risques incendie) et 25 janvier 2006 qui définissent ou font référence à une zone de sécurité comprenant les bâtiments de production et de stockage à l’intérieur desquels il est strictement interdit de fumer, qu’elle utilise dans son processus de production, notamment pour le sciage du silicium, des solvants et d’autres substances inflammables stockées dans les ateliers, que l’interdiction de fumer est signalée par des pictogrammes à l’entrée du site, mentionnée dans le règlement intérieur qui est affiché et rappelée sur d’autres affiches et que les consignes avaient été évoquées lors d’une réunion des responsables de production en novembre 2007 à laquelle A X avait assisté.

Elle fait valoir que celui-ci avait été surpris le 7 janvier 2008 par le responsable de production B C et avait reconnu les faits qui s’étaient déroulés dans les toilettes, elles-mêmes situées dans la zone de sécurité, attenantes à l’atelier de sciage du silicium où il y avait une citerne de plusieurs centaines de litres de solvant, qu’il était interdit de fumer dans l’ensemble de cette zone, qu’un abri avait été spécialement aménagé pour les fumeurs en 2007, abri situé à 40 secondes de distance à pied du poste de A X.

Elle met en exergue la qualité de responsable d’équipe confiée à l’intéressé, chargé lui-même de faire respecter les consignes d’hygiène et de sécurité et estime que l’argumentation adverse destinée à minimiser la faute démontrait à elle seule le manque de compréhension de ses responsabilités par A X.

A X interjette appel incident, demande à la cour de juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner son ancien employeur à lui verser, en plus des indemnités de rupture dont la confirmation est sollicitée, 25.000 euros de dommages intérêts et 2.000 euros d’indemnité pour frais irrépétibles.

Il conteste la présentation des faits exposée dans la lettre de licenciement, soutient que la signalétique avait été mise en place après son licenciement et surtout que, suite aux questions de sa hiérarchie, il avait reconnu de lui-même avoir fumé une cigarette dans les toilettes.

Il fait valoir que le problème d’odeur de cigarette dans les toilettes était ancien et récurent et qu’il avait persisté après son licenciement, qu’il n’y avait aucun danger dans ce lieu confiné et protégé de l’atelier, que d’autres personnes avaient commis la même faute mais n’avait pas subi la même sanction.

Il s’estime victime de son propre aveu et d’une sanction totalement disproportionnée au regard de son comportement professionnel exemplaire depuis 1999, de sa progression hiérarchique et du témoignages de ses collègues sur ses qualités professionnelles.

Sur quoi :

Attendu que la matérialité des faits n’est pas contestée ;

Que même si A X n’a pas fumé une cigarette à l’intérieur de l’atelier sciage lui-même, il résulte des éléments produits au dossier et retenus par les premiers juges que A X a fumé dans le local des sanitaires qui ouvre sur cet atelier, que ces sanitaires se trouvent inclus non seulement dans le site où l’employeur avait édicté une consigne générale d’interdiction de fumer, mais aussi dans une zone de risque incendie justifiée par le danger inhérent au stockage de produits inflammables à l’intérieur de ce même périmètre et notamment en raison de la présence d’une citerne de solvant à l’intérieur l’atelier ;

Que c’est donc avec pertinence que le conseil de prud’hommes a considéré que la société PHOTOWATT justifiait de son obligation de faire respecter une interdiction de fumer qui découlait de la loi et des autorisations administratives d’exploitation, cette réglementation n’étant d’ailleurs nullement remise en cause par le salarié intimé ;

Attendu qu’il n’est pas sérieusement contestable que cette interdiction était connue de l’intéressé en raison :

— de son inscription sur le règlement intérieur du 15 novembre 2004 (interdiction de fumer sur l’ensemble du site et dans tous les locaux sauf dans les zones fumeurs réservées à cet effet), sur les notes de service n°2007-001 et 2007-12 diffusée à tout le personnel et affichées, notes prévoyant, d’une part, que la zone unique de pause fumeur située à l’extérieur des bâtiments de production et des bureaux, identifiée et dédiée à cet usage depuis le 1er février 2007, était maintenue, d’autre part, qu’il était interdit de fumer sur l’ensemble du site à compter du 1er janvier 2008,

— de la présence de panonceaux d’interdiction de fumer dès l’entrée du site ;

Que l’employeur démontre au moyen de documents destinés aux organes de représentation du personnel, de mails émanant d’un membre du CHSCT et des attestations de D E (chef d’équipe), de F G et de B C (directeur de production), que des dérives avaient été constatées en 2007 sur le respect de ces règles concernant les zones fumeurs, qu’un plan à échéance en janvier 2008 avait été proposé prévoyant notamment de demander aux chefs d’équipe de maîtriser leur personnel : 'le fumeur doit avertir avant de partir en pause', que durant le dernier trimestre 2007, compte tenu du constat d’odeurs de cigarettes et de mégots dans les toilettes situées dans le secteur sciage, B C avait indiqué en présence du personnel de production et de tous les responsables des secteurs, donc de A X, que 'la personne qui ne respectait pas les règles n’avait pas sa place dans l’entreprise’ ;

Attendu que le salarié H Y a été licencié pour faute grave le 12 juin 2009 pour avoir été surpris en train de fumer des substances illicites une nuit de mai 2009 dans une zone non autorisée ; que I Z (opérateur de production N2E1) a été sanctionné le 1er septembre 2009 par une mise à pied disciplinaire de 6 jours pour avoir fumé le 19 août précédent dans une zone non-fumeur à l’extérieur du bâtiment ;

Que A X ne démontre toutefois pas que ces deux personnes avaient un niveau hiérarchique comparable au sien alors que les responsabilités de chef d’équipe exercées par A X supposaient son implication personnelle dans le respect des règles d’hygiène et de sécurité ; que pour Y. Y, les circonstances étaient aggravées par un fait susceptible de constituer une infraction délictuelle ; que F. Z fumait à l’extérieur du bâtiment selon l’attestation de J K ;

Que ces exemples démontrent l’effectivité de mesures prises dans l’entreprise pour faire appliquer et respecter la réglementation en cause par les réfractaires, ce qu’également relevé le premier juge ;

Attendu que A X produit le témoignage de L M-N selon lequel, au 28 septembre 2009, trois personnes avaient commis la même faute que l’intéressé mais n’avaient pas été licenciés ; que non seulement l’auteur de cette attestation ne précise pas leur nom, ce qui ne permet pas de savoir s’il s’agissait d’autres salariés que MM Y et Z mais ne précise pas non plus si ces faits avaient été connus de l’employeur au 28 septembre 2009 ;

Que le caractère prétendument discriminatoire de la sanction n’est donc pas établi;

Attendu que le premier juge a également relevé avec pertinence le caractère isolé et unique du fait reproché ; que l’ancienneté de A X dans la société sans aucun antécédent disciplinaire, comme son parcours professionnel qui témoigne de ses qualités et de son engagement dans l’entreprise, corroborés par les attestations de cinq de ses collègues, subordonnés et ancien supérieur, comme sa franchise à reconnaître la matérialité des faits doivent également être pris en compte en sa faveur pour apprécier la proportionnalité de la sanction ;

Que son comportement analysé dans son conteste et dans sa globalité ne rendait effectivement pas impossible son maintien dans l’entreprise y compris pendant l’exécution du préavis ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a estimé que les faits ne constituaient pas une faute grave mais une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Attendu que le calcul des indemnités de rupture ne donne pas lieu à contestation à titre subsidiaire ;

Attendu qu’il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles ; que chacune conservera la charge de ses dépens en cause d’appel ;

PAR CES MOTIFS

la Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Déboute la SAS PHOTOWATT INTERNATIONAL et A X du surplus de leurs demandes ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens en cause d’appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Monsieur VIGNY, Président, et par Madame VERDAN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Grenoble, 16 décembre 2009, n° 08/05145