Cour d'appel de Grenoble, 23 mars 2009, n° 08/04047

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 23 mars 2009, n° 08/04047
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 08/04047
Décision précédente : Tribunal de commerce de Vienne, 8 septembre 2008, N° 2008R45

Texte intégral

R.G. N° 08/04047

F.L.

N° Minute :

Grosse délivrée

le :

à :

SCP GRIMAUD

Me RAMILLON

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU LUNDI 23 MARS 2009

Appel d’une Ordonnance de référé (N° R.G. 2008R45)

rendu par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 09 septembre 2008

suivant déclaration d’appel du 22 Septembre 2008

APPELANTE :

Société MICHELIN LIFESTYLE LIMITED poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

GRANDE BRETAGNE

représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour

assistée de Me FOURMENT, avocat au barreau de PARIS substitué par Me RASLE, avocat au même barreau

INTIMEE :

S.A. AM CONCEPT poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

représentée par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour

assistée de Me ROULLET, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Françoise X, Président,

Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller,

Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller,

Assistées lors des débats de Mme Hélène LAGIER, Greffier.

DEBATS :

A l’audience publique du 09 Février 2009, Madame X a été entendue en son rapport.

Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu à l’audience de ce jour.

La société MICHELIN LIFESTYLE Ltd a consenti par contrat du 10 octobre 2005 à la S.A. AM CONCEPT une licence portant sur l’utilisation de la marque MICHELIN aux fins de fabriquer et de commercialiser en Europe, des sièges-auto pour enfants.

La société MICHELIN LIFESTYLE Ltd a adressé les certificats de licence à la S.A. AM CONCEPT à la fin de l’année 2007.

La S.A. AM CONCEPT n’ayant pas respecté les engagements de payer les royalties, elle a été mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 février 2008 ; par autre lettre recommandée avec accusé de réception du 1er mai 2008, la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd a fait jouer la clause de résiliation de plein droit et indiqué qu’à défaut de paiement avant le 15 mai 2008, il serait mis fin aux relations entre les parties ; un courrier recommandé avec accusé de réception du 21 mai 2008 a constaté la cessation de la licence.

De manière quasi-concomitante, les résultats non satisfaisants des crashs tests qui ont été réalisés par l’organisme ADAC sur le modèle COCKPIT fabriqués par la S.A. AM CONCEPT ont été publiés par le Touring Club de GENÈVE le 28 mai 2008 et dans la revue QUE CHOISIR du mois de juin 2008.

Par acte du 1er juillet 2008, la S.A. AM CONCEPT a fait assigner la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd devant le juge des référés du Tribunal de Commerce de VIENNE pour faire désigner un expert qui aurait pour mission d’examiner les sièges litigieux.

Par ordonnance du 9 septembre 2008 le juge des référés a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd et ordonné une expertise.

La société MICHELIN LIFESTYLE Ltd a interjeté appel de cette décision le 22 septembre 2008.

Elle conteste l’appréciation du premier juge selon laquelle la clause attributive de compétence ne concernerait que les demandes en paiement présentées devant les juridictions du fond.

Elle fait valoir qu’en application de l’article 33 du contrat de licence, la demande de la S.A. AM CONCEPT relève de la compétence exclusive des juridictions anglaises, conformément aux dispositions de l’article 23 du Règlement du Conseil de l’Union Européenne du 22 décembre 2000.

Elle soutient que la seule restriction au caractère exclusif de la compétence des juridictions anglaises concerne les procédures visant à l’obtention d’une ordonnance de faire ou de ne pas faire, et que la demande d’expertise in futurum fondée sur l’article 145 du nouveau code de procédure civile ne peut entrer dans cette catégorie.

Elle prétend que si aux termes de l’article 24 de la Convention de BRUXELLES la clause attributive de juridiction ne fait pas obstacle au pouvoir reconnu au juge des référés par l’article 145 du nouveau code de procédure civile, la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd n’est pas concernée par la mesure d’instruction ; elle est étrangère à la publication des résultats des tests contestés par la S.A. AM CONCEPT qui pouvait faire publier un droit de réponse, et c’est elle, société MICHELIN LIFESTYLE Ltd dès lors que les produits incriminés portent la marque MICHELIN, qui subit le préjudice résultant de la publication des 'résultats catastrophiques'.

Elle conteste la référence faite par le juge des référés à la bonne administration de la justice et assure, à titre subsidiaire, que la mesure est dénuée d’intérêt, la S.A. AM CONCEPT ne justifiant d’aucun motif légitime de faire procéder contradictoirement avec elle à une nouvelle série de tests.

Elle demande en conséquence à la Cour d’infirmer l’ordonnance déférée, de renvoyer la S.A. AM CONCEPT à mieux se pourvoir et de la condamner à lui payer la somme de 8.000 € par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

— o0o-

La S.A. AM CONCEPT répond que l’article 23 du Règlement Communautaire du 22 décembre 2000 réserve dans le cas où les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, la compétence de ce tribunal ou de ces tribunaux est exclusive, sauf convention contraire des parties.

Elle précise que la traduction faite par la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd d’un élément de la clause contenue dans l’article 33 du contrat du 10 octobre 2005 qui prévoit une exception à la compétence des tribunaux anglais, à savoir que chaque partie pouvant toutefois engager des procédures devant d’autres juridictions afin d’obtenir 'injunctive relief’ n’est pas conforme.

Selon la S.A. AM CONCEPT, obtenir 'injunctive relief’ n’est pas obtenir comme soutenu en première instance par la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd une injonction, ou devant la Cour, 'des ordonnances de faire ou ne pas faire', mais c’est obtenir 'un jugement avant faire droit en urgence'.

Elle ajoute qu’en application du paragraphe 31 du Règlement du Conseil de l’Union Européenne le juge des référés est compétent pour prendre les mesures provisoires ou conservatoires prévues par la loi d’un État membre.

Elle en déduit que la juridiction française du référé est dans tous les cas compétente.

Elle assure que la mesure d’expertise contradictoire est utile puisque la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd, sur la base d’essai non contradictoires, a pris seule la décision de rappeler tous les sièges, sans pour autant les lui payer.

Elle conclut à la confirmation de l’ordonnance du 9 septembre 2008 et à la condamnation de la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et une indemnité de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

L’article 23 du Règlement du Conseil Européen du 22 décembre 2000 dispose que :

'Si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État membre sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties'.

En l’espèce, les parties s’accordent sur la traduction suivante de l’article 33 du contrat de licence :

'Le présent Contrat est régi par le droit anglais et sera interprété conformément à celui-ci. Les parties font irrévocablement attribution de compétence exclusive aux tribunaux anglais, chaque partie pouvant toutefois engager des procédures devant d’autres juridictions afin d’obtenir injunctive relief et seulement à cette fin'

Que le terme anglais de 'injunctive relief’ soit traduit par 'injonction', 'ordonnance de faire ou ne pas faire’ ou 'jugement avant faire droit en urgence', il est certain que l’adjectif 'injunctive’ se rapporte au terme 'injunction’ qui a le même sens que le terme français 'injonction'.

Il n’est pas possible de retenir que la mesure d’expertise sollicitée par la S.A. AM CONCEPT corresponde à une 'injonction’ ou à un 'jugement avant faire droit en urgence’ ; en effet, la demande d’expertise qu’elle a formulée devant le juge des référés est fondée expressément sur les dispositions de l’article 145 du nouveau code de procédure civile, à savoir, par l’existence d’un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont dépend la solution d’un litige.

Il n’y a aucune notion d’injonction ou de jugement avant dire droit en urgence dans une décision ordonnant une expertise, a fortiori lorsque la mesure est demandée en application des dispositions de l’article 145 du nouveau code de procédure civile.

Quant au paragraphe 31 du Règlement du Conseil de l’Union Européenne prévoyant que les mesures provisoires ou conservatoires peuvent être demandées aux autorités judiciaires d’un État membre même si la compétence sur le fond est dévolue à une juridiction d’un autre État, il ne peut autoriser la S.A. AM CONCEPT sur le fondement des dispositions de l’article 145 du nouveau code de procédure civile, à saisir la juridiction française et à attraire la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd, dès lors qu’il n’existe aucun litige potentiel entre les deux sociétés, sur la qualité des sièges en cause.

Il en résulte que l’exception au principe de la compétence des juridictions anglaises n’est pas admissible et que le juge des référés a reconnu à tort sa compétence.

Les circonstances de la cause ne justifient ps l’application des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme l’ordonnance déférée et statuant à nouveau,

Dit n’y avoir lieu à référé,

Rejette la demande de la société MICHELIN LIFESTYLE Ltd sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne la S.A. AM CONCEPT à tous les dépens de première instance et d’appel et autorise la S.C.P GRIMAUD, avoués, à recouvrer directement contre elle, les frais avancés sans avoir reçu provision.

PRONONCÉ par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Nouveau code de procédure civile,

SIGNÉ par Madame X, Président, et par Madame LAGIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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