Cour d'appel de Grenoble, 30 janvier 2014, n° 12/04331

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 30 janv. 2014, n° 12/04331
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 12/04331
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Grenoble, 11 juillet 2012, N° F10/1358

Sur les parties

Texte intégral

RG N° 12/04331

N° Minute :

Notifié le :

Grosse délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU JEUDI 30 JANVIER 2014

Appel d’une décision (N° RG F10/1358)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 12 juillet 2012

suivant déclaration d’appel du 16 Juillet 2012

APPELANTE :

SAS DBX, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

Représentée par Me Dominique BRET, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIME :

Monsieur C Y

XXX

XXX

Comparant et assisté de Me Annette H, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Gilberte PONY, Président,

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller,

Madame Astrid Z, Conseiller,

Assistés lors des débats de Monsieur Hichem MAHBOUBI, Greffier.

DEBATS :

A l’audience publique du 28 Novembre 2013.

Madame Z a été entendue en son rapport.

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 30 Janvier 2014.

L’arrêt a été rendu le 30 Janvier 2014.

RG N° 12 04331 AR

C Y a été embauché par la SAS DBX. le 4 mars 1991 en qualité d’analyste programmeur à temps plein.

Le 1er avril 2000, il a été positionné à l’indice 2.1 de la convention collective applicable des bureaux d’étude technique (Syntec).

La société a changé d’actionnaire principal et de dirigeant à compter du 6 décembre 2004.

A la suite de difficultés économiques, elle a réduit son effectif de 12 à 8 salariés en 2006 et a cédé ses actions à la société TGL consultant, dirigée par Monsieur A qui est devenu président de la société DBX. Le 17 janvier 2007 , elle a transféré le siège social et les services administratifs à Paris, la production et le poste de C Y restant localisés à Grenoble.

C Y a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 16 février 2009 pour stress professionnel avec syndrome anxiodépressif et insomnie.

Le 7 janvier 2010, il a été déclaré temporairement inapte à son poste de travail par le médecin du travail.

Le 21 janvier 2010 le médecin du travail a émis un nouvel avis d’inaptitude à tous les postes dans l’entreprise.

Le salarié a été examiné à nouveau, par le médecin du travail à la demande de l’employeur. Après s’être déplacé dans les locaux de l’entreprise, il a rendu, le 19 février 2010, un nouvel avis d’inaptitude.

L’employeur a proposé le 25 février 2010, le reclassement du salarié sur un poste de développeur informatique n’impliquant pas de déplacements et a contesté l’inaptitude devant l’inspecteur du travail qui a estimé que la proposition de reclassement n’était pas conforme à l’avis d’inaptitude.

Divers courriers ont été échangés entre l’employeur et le salarié.

Ainsi, par courrier du 2 mars 2010 le salarié a indiqué à son employeur que la cause de ses arrêts de travail était en relation directe avec ses conditions de travail et par courrier du 16 mars 2010 il a précisé que l’origine de son arrêt de travail était liée « aux changements de management de la société depuis ses deux rachats et la transformation de l’agence en centre de profit avec une volonté de transférer l’activité sur Paris. La direction n’a de cesse de mettre sur les salariés une pression terrible ».

Par courrier du 12 avril 2010, C Y a refusé la proposition de reclassement faisant valoir qu’elle n’était pas conforme aux avis et décision de l’autorité administrative.

Le 20 avril 2010, la société DBX l’a convoqué à un entretien préalable fixé au 4 mai 2006 à Paris, puis, C Y l’ayant informée qu’il n’était pas possible de s’y rendre, elle l’a convoqué à nouveau par lettre du 5 mai 2010, pour un nouvel entretien préalable fixé au 18 mai 2010.

Le 3 juin 2010 la société DBX a notifié au salarié son licenciement pour refus de la proposition de reclassement.

C Y a contesté son licenciement en saisissant le 26 août 2010 le conseil des prud’hommes de Grenoble.

Par jugement du 12 juillet 2012, le conseil des prud’hommes de Grenoble a :

— condamné la SAS DBX à payer à C Y les sommes suivantes :

-3660,88 euros de complément de salaire pour la période du 1er février 2010 au 19 mars 2010,

—  2831,29 euros de complément d’indemnité de licenciement sur base réelle,

—  8241,70 euros de salaire du 21 février 2010 jusqu’à la fin du contrat de travail outre congés payés afférents de 824,17 euros,

—  41'000 euros de rappel de salaire sur requalification du positionnement de C Y et non-respect des dispositions conventionnelles outre 4100 euros de congés payés afférents,

—  46'000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné à la société DBX de remettre l’attestation Pôle l’emploi et les bulletins de paye rectifiés,

— fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 2258 euros,

— débouté C Y du surplus de ses demandes et la société de sa demande conventionnelle,

— laissé à chacune des parties la charge de ses dépens.

Appel de cette décision a été interjeté le 16 juillet 2012 par la société DBX.

L’appelante sollicite la réformation de la décision entreprise et demande à la cour

— de dire et juger que :

— le licenciement de M. Y est bien fondé sur un motif réel et sérieux lié à son inaptitude à tout emploi dans l’entreprise,

— il n’a jamais acquis la qualification de position 2.3 coefficient 150,

— il a toujours été rempli de ses droits salariaux conformément à ses fonctions réelles et à sa classification dans la convention collective,

— étant absent pour maladie depuis le 16 février 2009, il n’a jamais été en mesure de prendre ses congés payés acquis durant l’exercice de 2009/ 2010 et 2010/ 2011,

— étant licencié pour inaptitude, il ne pouvait prétendre à effectuer un préavis,

— pour la période du 1er février 2010 au 19 mars 2010 il a été rempli de ses droits,

— il en va de même jusqu’au 2 juin 2010, date de son licenciement,

— il a bien été pris en charge par la portabilité de la prévoyance et pris en charge par Pôle emploi.

En conséquence, de :

— débouter C Y de toutes ses demandes,

— donner acte à la société DBX qu’elle s’en rapporte sur le calcul de l’indemnité de licenciement à hauteur de 2831,29 euros,

— lui donner acte qu’elle a réglé au titre de l’exécution provisoire la somme de 20'322 euros,

— condamner C Y à lui rembourser 17'490,71 euros outre intérêts de droits à compter du 31 juillet 2012, date du règlement.

Sur le licenciement, la société DBX développe sur 6 pages de conclusions la chronologie des faits et insiste sur ses recheches de solutions de reclassement. Elle soutient qu’elle a proposé un aménagement du temps de travail et du contenu du poste avec une rémunération et un statut inchangés ; que le médecin du travail s’est déplacé sur les lieux sans prévenir le chef d’entreprise ; que la société DBX avait la volonté de connaître les causes précises de l’inaptitude pour tenter d’y remédier et conserver le salarié dans ses effectifs mais que malheureusement le 18 mars l’inspecteur du travail a confirmé l’inaptitude à tout poste.

Elle souligne que M. Y n’a évoqué que le 2 mars 2010 ce qui lui posait problème dans l’entreprise.

Elle soutient encore que la contestation de la visite médicale de reprise était fondée et que la société n’a reçu aucune réponse du médecin du travail à ses demandes pour parvenir au reclassement de M. Y qu’elle voulait conserver dans ses effectifs en raison de sa grande expérience, sa connaissance des produits et des clients de l’entreprise.

Elle estime que M. Y s’est retranché derrière les avis émis par la médecine et l’inspection du travail pour inviter à deux reprises la société à le licencier.

Sur la qualification et les rappels de salaires, l’appelante fait valoir que la position 2.1 coefficient 110 correspond aux fonctions qu’a toujours exercées le salarié en qualité d’analyste ; que c’est ce qui lui a été rappelé par M. A au terme d’un courrier du 19 février 2007, que le salarié n’a pas contesté ; que C Y reconnaissant lui-même que sa fonction était celle d’un analyste le 31 juillet 2009 lors de l’évaluation de ses performances ; que la fonction d’analyste est celle mentionnée dans la décision de l’inspection du travail ; que si M. Y avait revendiqué une autre fonction, il n’aurait pas manqué de le préciser à l’inspecteur du travail ; que la qualification revendiquée nécessite que le salarié ait une position de commandement, ce qui n’est pas le cas ; qu’il ne prenait aucune initiative.

Sur la remise de l’attestation pôle l’emploi et sur la portabilité de la mutuelle, elle soutient que le salarié a été rempli de ses droits et n’a subi aucun préjudice.

Sur le complément de salaire du 1er février 2010 au 19 mars 2010, elle soutient que les compléments de salaires lui ont été versés.

Sur le préavis : elle souligne qu’il n’est pas dû en cas de licenciement pour inaptitude.

Sur le complément d’indemnité de licenciement elle s’en rapporte au jugement.

Sur le paiement des salaires à compter du 21 février : elle souligne que cette demande fait double emploi avec celle pour la période du 1er février au 19 mars et estime que seul l’avis d’inaptitude du 19 février 2010 peut être prise en compte, soulignant que C Y a été pris en charge au titre de l’arrêt maladie.

Sur les congés payés : elle fait valoir que le salarié était absent depuis le 16 février 2009 jusqu’au licenciement.

Reconventionnellement elle sollicite le remboursement de la somme de 17'490,71 euros.

C Y, intimé sollicite la confirmation de la décision entreprise sur le licenciement et la condamnation de la société à lui verser les sommes suivantes :

—  3618,9 euros à titre d’indemnité de congés payés,

-2204 euros de complément de salaire pour la période du 1er février 2010 au 19 mars 2010,

—  2831,29 euros de complément d’indemnité de licenciement,

—  6774 euros de préavis outre congés payés afférents de 677,40 euros,

—  8241,70 euros de salaire du 21 février 2010 jusqu’à la fin du contrat de travail outre congés payés afférents de 824,17 euros,

—  4500 euros de dommages-intérêts pour défaut de mise en place de la portabilité de la mutuelle et résistance abusive,

—  3500 euros pour dommages-intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles,

—  2500 euros de dommages-intérêts pour remise tardive de l’attestation Pôle emploi et préjudice moral,

—  56'553,90 euros de rappel de salaire sur base coefficient 170 outre 5655,39 euros de congés payés afférents,

—  11'577,91 euros au titre du complément d’indemnité de licenciement,

—  10'881,06 euros de complément d’indemnités de préavis et congés payés afférents 1088,10 euros,

—  46'000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Il réclame en outre la condamnation sous astreinte de 50 euros par jour de retard et la

rectification des bulletins de paye et attestation pôle emploi.

Sur le licenciement, il fait valoir que le motif invoqué dans la lettre de licenciement est le refus de la proposition de reclassement alors que la décision du 18 mars 2010 de l’inspection du travail confirme que la proposition du poste formulée par la société n’était pas compatible avec les éléments médicaux et la dégradation des conditions de travail.

Il souligne que le refus d’une proposition non conforme à l’état de santé de salarié ne peut justifier le licenciement et relève que la société manque de communiquer l’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon validant la décision de l’inspecteur du travail.

Il indique en outre que la société a cantonné ses recherches au sein de l’entreprise alors qu’elle appartient à un groupe.

Il soutient enfin que la dégradation de son état de santé est la conséquence de la dégradation de ses conditions de travail liée à la mise en place d’une direction tricéphale qui imposait ordres et contre ordres avec une communication à distance dans des termes de plus en plus virulents, une exigence de compte rendu systématique aux trois membres de la direction.

Sur la date de reprise du paiement du salaire, il souligne que la société l’a elle-même convoqué à une visite de reprise pour le 7 janvier 2009 ; qu’elle ne saurait soutenir ne pas avoir été informée de ces deux visites, l’initiative de la prise de rendez-vous étant sans intérêt ; que le simple fait pour la médecine du travail d’avoir accédé à la demande de la société qui a sollicité une nouvelle procédure de reprise le 29 janvier 2010 ne saurait valoir reconnaissance d’une irrégularité ; que dès lors la société devait reprendre le paiement des salaires à compter du 21 février 2010.

Sur la qualification et le non-respect du minimum conventionnel, C Y soutient que sa qualification de chef de projet depuis 2006 résulte de ses bulletins de paye ; qu’à la reprise de la société par les dirigeants de Teamnet, il a été indiqué qu’il occupait des fonctions d’ingénieur analyste et que c’est désormais sa qualification qui lui serait attribuée ; qu’il y a eu modification unilatérale du contrat de travail ; qu’il lui était demandé de gérer des projets chez des clients, de superviser et contrôler le travail d’autres ingénieurs, notamment de l’équipe au Maroc.

Il souligne que le coefficient 110 n’existe pas dans la convention collective Syntec ; que le premier coefficient est 115 compte tenu de son âge ; que la convention collective prévoit qu’un ingénieur d’études ou de recherche est au coefficient 130 ; que le cadre ayant plus de six ans d’ancienneté est au coefficient 150 position 2.3 ; qu’il aurait dû bénéficier de la position 3.1 coefficient 170 compte tenu de ses fonctions.

Sur les droits issus de la convention collective, il souligne que la convention collective prévoit des congés supplémentaires d’ancienneté et des primes de vacances ; que la société n’a pas respecté ses dispositions ; qu’il aurait dû bénéficier de 27 jours de congé et de primes de vacances.

Sur la remise tardive des documents de fin de contrat, il fait valoir qu’il a été contraint de saisir le juge des référés.

Sur la portabilité des droits à prévoyance et mutuelle, il souligne que la société ne lui a pas proposé la portabilité de ses droits alors que sa santé était précaire ; qu’elle n’a pas exécuté l’ordonnance de référé ; qu’il n’a donc pas pu être couvert pendant neuf mois.

Sur le complément de salaire de la période du 1er février 2010 au 19 mars 2010, il fait valoir que la société DBX a perçu pour cette période le complément de salaire de la prévoyance mais ne lui a pas reversé ces sommes.

Sur le complément d’indemnité de licenciement, il souligne que la convention collective fixe à un tiers de salaire par année d’ancienneté le montant de l’indemnité de licenciement ; qu’il avait 19,3 années d’ancienneté au jour de la fin de la relation contractuelle avec un salaire brut de 2258 euros ; qu’il avait droit à 14'370 euros ; que la société qui ne conteste pas son calcul, reste lui devoir 2831,29 euros outre intérêt de retard à compter de juin 2010.

Sur le préavis, il réclame l’application de la convention collective soit trois mois de salaire compte tenu de son statut de cadre avec une ancienneté supérieure à deux ans.

Il soutient qu’il n’a pas été informé de ses droits à DIF mais ne formule pas de demande à ce titre.

DISCUSSION

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l’audience sans modification ;

Sur la reprise du paiement du salaire

Attendu que le salarié a été en arrêt de travail à compter du 16 février 2009 pour stress professionnel avec syndrome anxiodépressif et insomnie ; que par courrier du 7 décembre 2009 le médecin du travail a adressé à l’employeur une convocation à lui remettre, à se présenter le 7 janvier 2010 ;

que le 7 janvier 2010, le médecin du travail a immédiatement informé l’employeur de l’avis d’inaptitude du même jour ; que par courrier du 8 janvier 2010 il a à nouveau adressé une convocation au salarié via l’employeur ;

qu’il a déclaré le salarié inapte à tous les postes de l’entreprise au terme de la deuxième visite de reprise du 21 janvier 2010 ;

Attendu que si l’initiative de la visite de reprise appartient normalement à l’employeur, celle-ci peut être sollicitée par le salarié auprès du médecin du travail, à la condition d’informer l’employeur de cette demande ; que tel a bien été le cas puisque les convocations ont été transmises au salarié par l’employeur ;

qu’ainsi et quand bien même de nouvelles visites ont été effectuées à la demande de l’employeur, c’est à juste titre que les premiers juges ont constaté que la deuxième visite de reprise a été réalisée le 21 janvier 2010 ;

Attendu qu il résulte des dispositions de l’article L. 1226-4 du code du travail qu’à la suite de la seconde visite médicale déclarant de façon irrémédiable le salarié inapte, l’employeur dispose uniquement de deux possibilités :

'soit il reclasse son salarié au terme d’une recherche sérieuse de reclassement ;

'soit il licencie le salarié au motif de l’impossibilité de reclassement ;

que l’employeur n’ayant ni reclassé ni licencié le salarié dans le délai d’un mois à compter du 21 janvier 2010, il avait, l’obligation de reprendre le paiement des salaires à compter du 21 février 2010 et ce même si le salarié qui était à nouveau en arrêt de travail à partir du 1er février 2010, percevait des indemnités journalières ;

que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point ;

Sur le complément de salaire de la période du 1er février 2010 au 19 mars 2010

Attendu qu’il résulte des pièces du dossier et notamment du mail du 22 juin 2010 que la société DBX a conservé les sommes perçues à titre de compléments de salaires et versés par la prévoyance pour la période du 01.02.2010 au 19.03.2010 ; que le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point, sauf à rectifier les sommes allouées, compte tenu du décompte de la complémentaire ;

Sur la portabilité des droits à prévoyance et mutuelle

Attendu que bien que s’étant engagé devant la formation des référés à mettre en place la portabilité de la mutuelle et du régime de prévoyance complémentaire, l’employeur n’a pas exécuté l’ordonnance de référé qui le condamnait à le faire ; que M. Y qui n’a pu être couvert pendant neuf mois en a subi un préjudice qui sera évalué à la somme de 2000 € ;

que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef ;

Sur la demande de requalification

Attendu que C Y a été embauché par la SAS DBX. le 4 mars 1991 en qualité d’analyste programmeur ;

que par avenant du 3 mars 2000, il a été positionné à l’indice 2.1 de la convention collective applicable des bureaux d’études techniques ;

que son bulletin de paye du mois de janvier 2006 porte la mention d’un emploi de directeur de projet et un coefficient 110 ;

que par mail du 19 février 2007, E A lui a indiqué que son statut correspondait à celui de cadre position 2.1 coefficient 110 correspondant aux ingénieurs et cadre ayant au moins deux ans de pratique de la profession, qualités intellectuelles et humaine permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études mais que sa fonction était celle d’un analyste et non d’un directeur de projet ;

mais attendu que le coefficient 110 n’existe pas dans la convention collective applicable ;

qu’il convient d’ajouter qu’il résulte de la convention collective que les cadres position 2.1 coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise travaillant aux mêmes tâches qu’eux ;

que selon les dispositions de la convention collective le salarié, qui avait plus de 26 ans aurait dû être placé au coefficient 115 dès le 1er avril 2000 ;

que sa pratique en qualité de cadre pendant 6 ans aurait du lui permettre d’accéder au coefficient 150 qui s’applique aux 'ingénieurs et cadres ayant au moins 6 ans de pratique en cette qualité et étant en pleine possession de leur métier ; partant des directives données par leur supérieur, ils doivent avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche ' ;

que ce coefficient avait vocation à s’appliquer, quand bien même il n’aurait pas exercé de fonction de commandement ; qu’il résulte cependant des pièces au dossier qu’il supervisait le travail des collaborateurs au Maroc ;

qu’il résulte en outre de la pièce 53 qu’il était présenté aux clients de la société comme 'expert fonctionnel’ ; que les pièces 54 à 60 permettent de constater qu’il assurait des missions variées dépassant largement celles d’analyste programmeur ;

Attendu que dès le 30 juin 2006 Brigitte X s’adressait à lui 'en tant que chef de projet CESACT ' ; que ses fonctions de chef de projet résultent également du compte rendu du 26 janvier 2006 (pièce 69) du 4 décembre 2007 (pièce 70) et du rapport d’analyse fonctionnelle de TEAM NET du 29 août 2008 ;

que par mail du 4 janvier 2009, G H I lui a également rappelé qu’il faisait 'fonction de chef de projet’ sur le dossier de Bourges ;

qu’il résulte donc de ces éléments que contrairement à ce que soutient l’employeur, le salarié exerçait effectivement des fonctions de chef de projet ; que ces fonctions avaient d’ailleurs été reconnues par la société qui les avaient fait figurer sur ses bulletins de paye avant que de décider unilatéralement à la suite du rachat par TEAMNET de le rétrograder, tout en exigeant qu’il 'fasse fonction’ ;

Attendu que c’est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé qu’il exerçait en fait des fonctions relevant de l’indice 3.1 de la convention collective depuis 42 mois ;

Attendu que les calculs de rappel de salaire effectués par C Y qui sollicite un rappel de salaire à partir de janvier 2007 sur une base de 169 heures par mois en se basant sur un minimum conventionnel de 3143,30 € sur une base de 151,57 h de janvier 2007 à janvier 2009 puis de 3286,80 € par mois pour 151,57 h à partir de janvier 2009 sont conformes aux dispositions de la convention collective Syntec et n’ont pas été valablement contredits par l’employeur ;

que le jugement entrepris sera donc infirmé sur la somme allouée à ce titre ; que la SAS DBX sera condamné à verser à C Y la somme de 56.553,90 € outre congés payés afférents ;

Sur les congés payés

Attendu qu’il résulte du courriel du 21 janvier 2010 de C Y, qui sollicitait 22 jours de congés payés au terme de son arrêt de travail et alors et que le médecin du travail avait délivré un avis d’inaptitude, qu’il n’a pu prendre la totalité de ses congés payés 2008 et qu’il avait ses jours à prendre en 2010 ;

Attendu que par courriel en réponse à celui du 21 janvier 2010, l’employeur, n’a ni contesté le droit du salarié à prendre ses congés payés, ni contesté qu’il lui restait un reliquat de jours à prendre au titre de 2008 ; qu’il s’est contenté de faire valoir qu’il ne lui était 'hélas, pas possible d’y accéder ' ;

que par courrier du 7 juin 2010, le salarié a précisé qu’il lui restait 13 jours à prendre au titre de 2008 et a mentionné que la durée totale de ses congés se chiffrait à 40 jours ;

que les prétentions du salarié ne sont pas sérieusement contestées par l’appelant qui se contente d’alléguer qu’il était absent depuis le 16 février 2009 jusqu’au licenciement alors qu’il résulte des pièces au dossier que la fin de l’arrêt de travail du salarié étant fixée au 21 janvier 2010, l’employeur lui a refusé la prise des congés payés, bien qu’étant informé de l’avis d’inaptitude ;

que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef et qu’il sera fait droit à la demande de M. Y à hauteur des 40 jours de congés payés et de la somme de 3.618,90 € qu’il revendique à ce titre ;

Sur le non respect des dispositions conventionnelles

Attendu que le salarié avait droit aux termes de la convention collective d’un jour supplémentaire de congés payés par tranche de 5 ans en sus des 25 jours de congés payés annuels ; qu’il résulte du dossier et notamment des bulletins de paye que l’employeur n’a pas respecté ces dispositions ;

Attendu que la convention collective prévoit également que 'L’ensemble des salariés bénéficie d’une prime de vacances d’un montant au moins égal à 10% de la masse globale des indemnités de congés payés prévus par la convention collective de l’ensemble des salariés’ ;

que l’employeur n’a pas davantage respecté ces dispositions ; que le préjudice en résultant pour le salarié doit être évalué à la somme de 3.500 € ; que le jugement entrepris doit être réformé de ce chef ;

Sur le licenciement

Attendu qu’après s’être opposé à la prise de ses congés payés par le salarié et avoir sollicité deux nouvelles visites de reprise qui ont eu lieu les 5 et 19 février 2010 et qui ont confirmé les avis précédents, l’employeur a proposé le 25 février 2010, le reclassement du salarié sur un poste de développeur informatique n’impliquant pas de déplacements puis a contesté le 26 février 2010 le dernier avis d’inaptitude devant l’inspecteur du travail ;

Attendu que par décision du 18 mars 2010, l’inspecteur du travail a constaté que contrairement à ce que soutient l’employeur, le médecin du travail a abouti au constat d’inaptitude au terme d’une étude de poste et des conditions de travail de M. Y et a pu constater la dégradation de ses conditions de travail ainsi que celles des plusieurs autres salariés de l’entreprise, pointant les causes d’ordre managérial et relationnel ;

que l’inspecteur du travail a constaté que sur les 12 salariés de l’agence de Grenoble il ne restait que 3 salariés dont deux étaient en arrêt de travail et que la proposition de reclassement ne pouvait être sérieusement envisagée au vu des éléments médicaux et de la dégradation des conditions de travail ;

Attendu qu’il résulte des termes de la lettre de licenciement du 3 juin 2010 que C Y a été licencié pour avoir refusé d’accepter la proposition de reclassement formulée par l’employeur ;

Attendu que le refus d’une proposition de reclassement ne peut constituer un motif de licenciement que s’il est abusif ; qu’en l’espèce il résulte de la décision de l’inspecteur du travail que la proposition de reclassement n’était pas sérieusement envisageable ; que le refus du salarié ne peut donc être considéré comme abusif ;

qu’il appartenait par conséquent à l’employeur de rechercher toutes les autres possibilités de reclassement du salarié au sein de l’entreprise et du groupe et non de se prévaloir de ce seul refus pour le licencier ;

que c’est donc à juste titre que le conseil des prud’hommes a constaté que le motif du licenciement est illégitime et que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que le montant des dommages-intérêts alloués à ce titre à été justement évalué compte tenu de l’ancienneté du salarié et des circonstances du licenciement ;

qu’il en est de même du complément d’indemnité de licenciement dont le montant n’a pas été discuté ;

Sur le préavis

Attendu que si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d’une indemnité pour un préavis qu’il est dans l’impossibilité physique d’exécuter en raison d’une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a débouté M. Y de sa demande à ce titre ;

qu’il convient de faire droit à la demande dont le quantum est conforme aux dispositions de la convention collective qui prévoit 3 mois de préavis pour les cadres ;

Sur la remise tardive des documents

Attendu que le salarié qui a été licencié le 3 juin 2010 a été contraint d’écrire à l’employeur pour lui demander où se trouvait le solde de tout compte ;

qu’à la suite de la relance de pôle emploi, il a ensuite dû saisir le juge des référés le 22 juin 2010 afin d’obtenir, finalement, la remise à la barre d’une attestation pôle emploi et d’un solde de tout compte qui se sont révélés erronés ; que l’attitude de la société DBX qui l’a contraint à engager une procédure, lui a occasionné un préjudice qu’il convient d’évaluer à la somme de 1.500 € ; que le jugement entrepris sera infirmé sur ce point ;

Attendu qu’il convient d’ordonner une nouvelle remise des documents sociaux conformes aux dispositions du présent jugement et pour prévenir tout retard de la société DBX, de fixer une astreinte provisoire ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que l’équité commande d’allouer à l’intimé la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles qu’il a été contraint d’exposer en cause d’appel, cette somme s’ajoutant à celle allouée en première instance ;

Attendu que la SAS DBX succombant, elle sera condamnée aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement du 12 juillet 2012 en ce qu’il a :

— condamné la SAS DBX à payer à C Y les sommes suivantes :

—  2831,29 euros de complément d’indemnité de licenciement sur base réelle,

—  8241,70 euros de salaire du 21 février 2010 jusqu’à la fin du contrat de travail outre congés payés afférents de 824,17 euros,

—  46'000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Le réformant pour le surplus et statuant à nouveau

CONDAMNE la SAS DBX à payer à C Y les sommes suivantes :

—  3618,90 euros d’indemnité de congés payés,

-2204 euros de complément de salaire pour la période du 1er février 2010 au 19 mars 2010,

—  6774 euros à titre d’indemnités de préavis outre congés payés afférents de 677,40 euros,

—  2.000 euros de dommages-intérêts pour défaut de mise en place de la portabilité de la mutuelle et résistance abusive,

—  3500 euros pour dommages-intérêts pour non respect des dispositions conventionnelles,

—  1.500 euros de dommages-intérêts pour remise tardive de l’attestation Pôle emploi et préjudice moral,

—  11'577,91 euros de complément d’indemnité de licenciement sur la base du coefficient 170,

—  10'881,06 euros d’indemnités de préavis et congés payés afférents 1088,10 euros,

—  56'553,90 euros de rappel de salaire sur la base du coefficient 170 à compter du 1er janvier 2007 outre 5655,39 euros de congés payés afférents,

—  46'000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE à la SAS DBX de remettre à C Y l’attestation pôle emploi et les bulletins de paye rectifiés conformément au dispositif du présent arrêt sous astreinte provisoire de 50 € par jour et par document de retard passé le délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision ;

Dit que la cour se réserve de liquider l’astreinte provisoire ;

Condamne la SAS DBX aux entiers dépens.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Madame PONY, Président, et par Madame KALAI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Grenoble, 30 janvier 2014, n° 12/04331