Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 5 octobre 2017, n° 15/01763

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. soc. -sect. b, 5 oct. 2017, n° 15/01763
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 15/01763
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Grenoble, 12 avril 2015, N° F13/00358
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

MDM

RG N° 15/01763

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Olivier ANGOTTI

la SCP JANOT & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B

ARRÊT DU JEUDI 05 OCTOBRE 2017

Appel d’une décision (N° RG F13/00358)

rendue par le Conseil de prud’hommes – Formation de départage de GRENOBLE

en date du 13 avril 2015

suivant déclaration d’appel du 21 avril 2015

APPELANTE :

COMMISSARIAT A L’ENERGIE ATOMIQUE ET AUX ENERGIES ALTERNATIVES (CEA), prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

[…]

représentée par Me Olivier ANGOTTI, avocat au barreau de PARIS

INTIME :

Monsieur Z X

2397, Pelisson

[…]

comparant en personne, assisté de Me Pierre JANOT de la SCP JANOT & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Dominique DUBOIS, Présidente

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseiller,

Monsieur Philippe SILVAN, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 22 Juin 2017,

Madame Magali DURAND-MULIN chargée du rapport, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistée de Madame Karine GAUTHÉ, Greffière placée déléguée à la Cour d’Appel de Grenoble, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 05 octobre 2017, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 05 Octobre 2017.

Monsieur X a été embauché par le Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives (CEA) selon contrat à durée indéterminée du 08 décembre 1980 en qualité d’agent de sécurité.

Au dernier état de la relation contractuelle, Monsieur X exerçait les fonctions de chef de groupe d’agent de sécurité moyennant une rémunération de 2.796,61 €.

Par courrier du 05 février 2013, Monsieur X a été licencié pour faute grave. Il lui est reproché de s’être introduit la nuit dans les locaux de l’établissement, sans autorisation, et d’avoir subtilisé des matériaux appartenant au CEA.

Monsieur X a saisi le conseil de prud’hommes Grenoble le 11 mars 2013 afin de contester son licenciement et obtenir le paiement d’heures de repos.

Par jugement de départage du 13 avril 2015, le conseil de prud’hommes de Grenoble a :

— dit que le licenciement de M. X ne repose ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

— condamné le CEA à payer à Monsieur X la somme de 100.000 € à titre de dommages-intérêts ;

— ordonné au CEA de rembourser à Pôle Emploi les indemnité de chômage versées à M. X dans la limite de 6 mois de salaire ;

— dit qu’une copie du présent jugement sera transmis à Pôle Emploi par les soins du greffe ;

avant dire droit sur le rappel de salaire ;

— ordonné une expertise qui sera exécutée sous le contrôle de Mme Y, juge départiteur ;

— dit qu’après dépôt du rapport de l’expert, l’affaire sera rappelée à un prochain bureau de jugement devant lequel les parties comparaitront en personne ;

— condamné le CEA à verser à Monsieur X la somme de 20.000 € à titre de provision à valoir sur le rappel de salaire ;

— ordonné l’exécution provisoire de l’expertise et de la provision allouée ;

— condamné le CEA à payer à Monsieur X la somme de 1.200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné le CEA aux dépens exposés ce jour.

Le CEA a interjeté appel de la décision par déclaration enregistrée au greffe de la cour d’appel de Grenoble le 24 avril 2015.

Aux termes de ses conclusions régulièrement transmises, visées et développées oralement à l’audience, le CEA demande à la cour de :

— infirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il l’a condamné à verser à Monsieur X les sommes suivantes :

—  100.000 € nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

—  1.200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— dire que le licenciement repose sur une faute grave ;

subsidiairement,

— dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;

— statuer ce que de droit sur les dépens.

Le CEA soutient que le licenciement pour faute grave de Monsieur X est justifié. Il invoque les manquements graves du salarié à ses obligations professionnelles :

— intrusion dans les bâtiments, non justifiée par un motif de sécurité, et sans avoir prévenu sa hiérarchie.

— appropriation, sans autorisation, de matériel appartenant au CEA (caisse en bois, morceau de vinyle et plaque de contreplaqué) en contravention avec le règlement intérieur qui prévoit qu’aucun bien appartenant au CEA ne peut sortir de l’établissement sans autorisation préalable, peu important le type de matériel et son coût. Le CEA estime qu’aucune atténuation de responsabilité ne peut être retenue du fait que les biens sont de faible valeur ou que M. X n’ait aucun antécédent.

— le fait que Monsieur X a reconnu, tout au long de la procédure, avoir commis les faits reprochés.

Aux termes de ses conclusions régulièrement transmises, visées et développées oralement à l’audience, Monsieur X demande à la cour de :

— confirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes de Grenoble du 13 avril 2015 ;

En conséquence :

— dire qu’il n’a commis aucune faute,

— dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

— condamner le CEA à lui verser les sommes de :

— indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 200.000 €

— article 700 du code de procédure civile : 2.000 €

— condamner le CEA aux entiers dépens.

Monsieur X soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, en effet il n’y a aucun antécédents disciplinaire en 30 ans d’ancienneté.

Sur l’appropriation des biens appartenant au CEA :

— la caisse en bois : il s’agissait d’un détritus et il était d’usage, dans le CEA, de pouvoir utiliser ce genre de biens ;

— le rouleau de vinyle et la plaque de contreplaqué : ils avaient vocation à permettre l’aménagement d’un véhicule appartenant au CEA, et il était d’usage de pouvoir utiliser des matériaux appartenant au CEA, à cette fin.

Il estime qu’il y a disproportion de la sanction par rapport au coût des matériaux.

Sur l’intrusion dans le bâtiment : sa mission de chef de la sécurité impliquait de faire des rondes pour connaître parfaitement les lieux. De plus, il était titulaire d’un pass pour entrer dans les lieux ce qui démontre que l’accès aux bâtiment lui était autorisé.

MOTIFS DE LA DECISION

La présente procédure d’appel est limitée au bien fondé du licenciement notifié à Monsieur X le 05 février 2013 ainsi que les parties l’ont confirmé à l’audience.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

La charge de la preuve de la faute grave incombe à l’employeur.

La lettre de licenciement énonce les faits suivants :

«'Entre le 20 octobre et le 12 novembre 2012, soit une période de 3 semaines pendant laquelle vous avez effectué 6 vacations, vous vous êtes, à plusieurs reprises, introduit de nuit dans des bâtiments, sans raison particulière relevant de vos fonctions et sans motif de sécurité, et avez sorti du matériel appartenant au CEA du centre sans aucune autorisation, en totale violation des procédures règlementaires applicables en matière d’accès aux bâtiments et de sortie du matériel du centre.

En effet :

- dans la nuit du 20 au 21 octobre 2012, vous vous êtes approprié une caisse en bois et l’avez sortie du centre sans autorisation en vue d’une utilisation à des fins personnelles ;

- dans la nuit du 1er au 2 novembre 2012, vous vous êtes introduit dans un bâtiment et avez également pris un morceau de rouleau de vinyle appartenant au CEA, le sortant du centre sans autorisation ;

- dans la nuit du 11 au 12 novembre 2012, vous vous êtes à nouveau, introduit dans un bâtiment fermé, en l’occurrence l’atelier du GIP ARC-Nucléart implanté au sein du CEA/Grenoble, en utilisant le passe mis à disposition par le CEA pour l’exercice de vos fonctions, sans aucun motif de sécurité justifiant cette intrusion et ce, afin d’y prendre une plaque de contreplaqué que vous avez également sortie du centre sans autorisation.'»

Monsieur X ne conteste pas avoir pris sans autorisation préalable de sa hiérarchie et en s’introduisant pendant la nuit dans les locaux du CEA, une caisse en bois, un morceau de rouleau de vinyle et une plaque de contreplaqué.

S’agissant de l’intrusion dans les bâtiments, les premiers juges ont relevé à juste titre que le salarié avait la possibilité, en sa qualité de personnel polyvalent, d’effectuer des rondes lesquelles font partie de sa mission ainsi que cela résulte des écritures de l’employeur et donc de s’introduire dans les bâtiments, le salarié disposant d’un pass de sorte que le fait qu’il se soit introduit dans les bâtiments n’est pas fautif en lui-même.

Le règlement intérieur prévoit que «'aucun bien ou document appartenant au CEA, quel qu’il soit (notamment ordinateur portable) ne peut être sorti de l’entreprise sans autorisation préalable du responsable hiérarchique'». Monsieur X qui s’est approprié des biens sans autorisation a contrevenu au règlement intérieur.

Monsieur X a indiqué lors du conseil de discipline et lors de son entretien disciplinaire, et ce sans que l’employeur ne contredise ces affirmations, que la caisse en bois était entreposée sur un pont en bois servant de dépôt aux déchets, qu’il avait trouvé 4 m² de chute de vinyle dont il a taillé un morceau et qu’il a pris une plaque de contreplaqué de 50x50.

Eu égard à l’ancienneté de près de 33 ans de Monsieur X, au fait qu’il n’avait jamais fait l’objet d’aucune procédure disciplinaire ni même d’aucun rappel à l’ordre et compte tenu de la valeur dérisoire des biens lesquels avaient vocation à être jetés, le manquement commis par le salarié consistant à ne pas avoir sollicité l’autorisation préalable, ne présente pas une gravité telle qu’il rendait impossible son maintien dans l’entreprise pendant la durée du préavis et ne constitue pas davantage un motif sérieux de licenciement.

Au vu de ces éléments c’est à juste titre que le conseil de prud’hommes a dit que le licenciement de Monsieur X ne reposait ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse.

Compte tenu de l’âge de Monsieur X à la date du licenciement, soit 56 ans, rendant difficile la recherche d’un emploi, de son ancienneté et du fait qu’il devait quitter l’entreprise 4 mois plus tard au titre de la cessation anticipée d’activité, il convient de dire que la somme de 100.000 € allouée par les premiers juges répare l’intégralité du préjudice subi par M. X.

Le jugement sera confirmé.

Sur les autres demandes :

Le CEA sera condamné aux dépens et au paiement au profit de Monsieur X de la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au Greffe après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré.

Y ajoutant,

CONDAMNE le CEA à payer à Monsieur X la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE le CEA aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au Greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Présidente, et par Madame Karine GAUTHÉ, Greffier placé délégué à la Cour d’Appel de Grenoble, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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