Cour d'appel de Grenoble, 1re chambre, 7 février 2023, n° 21/00456

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 1re ch., 7 févr. 2023, n° 21/00456
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 21/00456
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Grenoble, 16 décembre 2020, N° 11-19-0501
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 13 février 2023
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Sur les parties

Texte intégral

N° RG 21/00456 – N° Portalis DBVM-V-B7F-KW6Z

C2

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY

la SELARL GUMUSCHIAN ROGUET BONZY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 07 FEVRIER 2023

Appel d’un Jugement (N° R.G. 11-19-0501)

rendu par le Tribunal judiciaire de GRENOBLE

en date du 17 décembre 2020

suivant déclaration d’appel du 21 janvier 2021

APPELANTES :

MMA IARD prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentées par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉE :

S.C.I. BONZY prise en la personne de son représentant légal, domicilié en

cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me David ROGUET de la SELARL GUMUSCHIAN ROGUET BONZY, avocat au barreau de GRENOBLE et par Me Françoise MOLLARD, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Catherine Clerc, président de chambre,

Mme Joëlle Blatry, conseiller,

Mme Véronique Lamoine, conseiller

Assistées lors des débats de Mme Anne BUREL, Greffier

DÉBATS :

A l’audience publique du 9 janvier 2023, Mme Blatry a été entendue en son rapport.

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Suivant acte authentique passé devant Me Frédéric Braud avec le concours de Me Emmanuelle Fonsat, notaires à Le Pont de Claix, la SCI Bonzy a vendu à la SCI LPME un immeuble sur la commune de [Adresse 5].

Me Fonsat a commis une erreur de calcul dans la déclaration de plus- value mentionnant un montant de 9.961€ à la place de la somme de 18.757€.

Suite à cette erreur, les sociétés MMA IARD Assurances Mutuelles et MMA IARD (les sociétés MMA), assureurs en responsabilité de Me Fonsat, lui ont versé le montant manquant de 8.796€ pour qu’elle puisse déposer la déclaration de plus-value qui avait été refusée par la direction générale des finances publiques pour défaut de provision.

Le 18 octobre 2017, Me Franck Malvy venant aux droits de Me Fonsat et Me Braud ont signé une quittance subrogative aux sociétés MMA.

Suivant exploit d’huissier du 15 février 2019, les sociétés MMA ont fait citer la SCI Bonzy en condamnation à leur payer diverses sommes relatives à la charge de l’impôt et à une indemnité de procédure.

Par jugement du 17 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Grenoble a :

dit que Me Braud et Me Fonsat ont manqué à leur obligation de conseil,

fixé à 3.000€ le préjudice subi au titre de la perte de chance par la SCI Bonzy,

ordonné la compensation des sommes dues,

condamné en conséquence la SCI Bonzy à payer aux sociétés MMA la somme de 5.796€ avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2018,

autorisé la partie défenderesse à payer ladite somme en 18 mensualités d’un montant qui ne saurait être inférieur à la somme de 322€, avant le 10 de chaque mois, le premier versement devant intervenir le 10 du mois suivant la signification de la décision, le solde devenant exigible à la 18eme mensualité,

dit qu’à défaut d’une seule mensualité ou de règlement d’un seul loyer courant la totalité de la somme restant due sera exigible,

condamné la SCI Bonzy à payer aux sociétés MMA une indemnité de procédure de 800€ et à supporter les dépens.

Suivant déclaration du 21 janvier 20251, les sociétés MMA ont relevé appel de cette décision.

Au dernier état de leurs écritures en date du 17 novembre 2022, les sociétés MMA IARD Assurances Mutuelles et MMA IARD demandent à la cour de réformer le jugement déféré et de :

les déclarer recevables et bien fondées,

condamner la SCI Bonzy à leur payer la somme de 8.796€ avec intérêts à compter de la lettre de mise en demeure du 9 août 2018,

condamner la SCI Bonzy à leur payer une indemnité de procédure de 3.000€.

Elles font valoir que :

aux termes de ses dernières écritures de premières instance, la SCI Bonzy sollicitait uniquement des délais de paiement et en aucun cas des dommages-intérêts,

le tribunal, tout en relevant que la SCI Bonzy ne formait aucune demande en paiement de dommages-intérêts, en a déduit qu’elle demandait le versement d’une somme équivalente à celle versée par les sociétés MMA et la compensation des sommes dues,

il est interdit aux juges du fond de modifier l’objet du litige tel qu’il a été défini par les parties,

le montant de l’impôt était en tout état de cause dû par la SCI Bonzy, quelle que soit la faute du notaire,

le débat sur le manquement du notaire est vain puisqu’il ne fait aucun doute que la SCI Bonzy doit supporter la charge de l’imposition litigieuse,

la SCI Bonzy ne démontre pas qu’elle n’aurait pas vendu si elle avait connu le vrai montant de l’impôt, ce que le tribunal reconnaît d’ailleurs expressément,

le fait pour un contribuable d’avoir à subir une imposition normalement due ne constitue pas un préjudice indemnisable,

ainsi, elles se trouvent normalement subrogées dans les droits de leurs assurés jusqu’à concurrence des sommes réglées à l’encontre de la SCI Bonzy,

c’est Me Braud qui a reçu la somme litigieuse et est donc le subrogeant,

dès lors que la faute a été commise par Me Fonsat, Me Braud n’a pas à répondre des fautes de son prédécesseur et la SCI Bonzy ne peut lui opposer ses manquements en application de l’article 1346-5 du code civil.

Par uniques conclusions du 2 juillet 2021, la SCI Bonzy demande à la cour de :

1) à titre principal, confirmer partiellement le jugement déféré et débouter les sociétés MMA de leurs demandes,

2) subsidiairement, constater l’attitude fautive des notaires, fixer son préjudice à la somme demandée par les assureurs et ordonner la compensation des sommes dues,

3) plus subsidiairement, si elle devait être condamnée à paiement, lui accorder un délai de paiement de 18 mois à compter de la signification de la présente,

4) en tout état de cause, condamner in solidum les sociétés MMA à lui payer une indemnité de procédure de 2.000€.

Elle expose que :

en première instance, elle a clairement relevé la faute des notaires lui ayant occasionné un préjudice,

elle n’entend pas contester la réalité de la subrogation des sociétés MMA,

toutefois aucun remboursement n’est dû de sa part

elle entend se prévaloir des dispositions de l’article 1346-5 du code civil lui permettant d’opposer au créancier subrogé les mêmes exceptions et moyens de défense dont elle aurait pu disposer initialement contre son créancier originaire,

Me Braud et Me Fonsat ont manqué à leur obligation de conseil, ce qui lui a causé un préjudice,

lors de la signature de l’acte authentique, elle pensait ne devoir que la somme de 9.961€ au titre de la plus-value et c’est en considération de cet impôt qu’elle a accepté de réitérer la vente.

La clôture de la procédure est intervenue le 6 décembre 2022.

MOTIFS

1/ sur la demande en paiement des sociétés MMA

La recevabilité des demandes des sociétés MMA n’est pas discutée.

Pour contester la demande en condamnation des sociétés MMA, la SCI Bonzy se prévaut des dispositions de l’article 1346-5 du code civil lui permettant d’opposer au créancier subrogé les mêmes exceptions et moyens de défense dont elle aurait pu disposer initialement contre son créancier originaire.

La SCI Bonzy allègue le manquement de Me Braud et Me Fonsat à leur obligation de conseil.

Le notaire doit, avant de dresser les actes, procéder aux vérification des faits et conditions de nature à assurer l’efficacité de ses actes.

A défaut, le notaire engage sa responsabilité délictuelle, ce qui suppose la démonstration d’une faute en lien de causalité direct et certain avec un préjudice.

En l’espèce, si la faute des notaires est incontestable, à savoir une erreur de Me Fonsat sur le montant de l’imposition au titre de la plus value non relevée par Me Braud, le fait pour un contribuable d’avoir à subir une imposition normalement due ne constitue pas un préjudice indemnisable.

Par ailleurs, la SCI Bonzy, qui ne produit aucune pièce, ne démontre aucunement que si elle avait été informée du montant exact de son imposition, elle n’aurait pas réitéré la vente alors qu’en renonçant à celle-ci, elle s’exposait au paiement de la clause pénale de 11.000€ prévue en page 17 du compromis de vente du 30 novembre 2016.

Par voie de conséquence, en l’absence de démonstration de l’existence d’un préjudice en lien de causalité direct et certain avec la faute commise par les notaires, c’est à tort que le tribunal a minoré la demande en paiement des assureurs, sans que de surcroît, en première instance, la SCI Bonzy n’ait formé une demande de dommages-intérêts dans le dispositif de ses écritures.

Le jugement déféré sera donc infirmé et la SCI Bonzy sera condamnée à payer aux sociétés MMA la somme de 8.796€ avec intérêts à compter de la lettre de mise en demeure du 9 août 2018.

En l’absence du moindre commencement d’apurement de la dette et de l’ancienneté de celle-ci datant de 2017, il n’y a pas lieu d’accorder à la SCI Bonzy le bénéfice de délais de paiement.

Le jugement déféré sera également infirmé sur ce point.

2/ sur les demandes accessoires

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice des assureurs.

Enfin, la SCI Bonzy supportera les dépens de la procédure d’appel qui seront distraits conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré uniquement sur les mesures accessoires,

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la SCY Bonzy à payer aux sociétés MMA IARD Assurances Mutuelles et MMA IARD la somme de 8.796€ avec intérêts à compter du 9 août 2018,

Rejette la demande en délais de paiement de la SCI Bonzy,

Y ajoutant,

Condamne la SCI Bonzy à payer aux sociétés MMA IARD Assurances Mutuelles et MMA IARD la somme de 1.500€ par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SCI Bonzy de sa demande de frais irrépétibles en appel,

Condamne la SCI Bonzy aux dépens de la procédure d’appel qui seront distraits conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame CLERC, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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