Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 26 novembre 2010, n° 10/01701

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ch. soc. c, 26 nov. 2010, n° 10/01701
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 10/01701
Importance : Inédit
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 1 janvier 2023
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Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 10/01701

[F] [V]

C/

SAS AREVA NP

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 16 Février 2010

RG : F 08/02018

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2010

APPELANT :

[L] [F] [V]

né le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Maitre Sonia MECHERI

Avocat au Barreau de LYON

Toque 643

substitué par Maître COUPAS

Avocat au Barreau de LYON

INTIMÉE :

SAS AREVA NP

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me Joseph AGUERA,

avocat au barreau de LYON

Toque 8

PARTIES CONVOQUÉES LE : 06 Avril 2010

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Octobre 2010

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel GAGET, Président de Chambre

Hélène HOMS, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 Novembre 2010, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel GAGET, Président de Chambre, et par Evelyne FERRIER-DOUSSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Vu le jugement du 16 février 2010 du Conseil de Prud’hommes de LYON qui déclare que le licenciement de [L] [F] [V] repose sur une cause réelle et sérieuse et le déboute de l’ensemble de ses demandes ;

Vu l’appel formé par [L] [F] [V] par lettre recommandée avec accusé de réception du 05 mars 2010 reçue au greffe de la Cour le 09 mars 2010, et vu les conclusions déposées le 03 août 2010 soutenues à l’audience, dans lesquelles il sollicite la réformation de la décision attaquée en ce qu’elle a déclaré que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et réclame la condamnation de la société AREVA NP au paiement des sommes suivantes :

75.480 € de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions en réponse de la société AREVA NP déposées le 11 octobre 2010 et soutenues à l’audience, qui conclut à la confirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions et demande la condamnation de [L] [F] [V] au versement de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Les parties ont donné à l’audience du 15 octobre 2010, leurs explications orales explicitant leur argumentation et ont convenu qu’elles avaient, entre elles, communiqué, en temps utile et contradictoirement, leurs pièces et conclusions ;

DÉCISION

[L] [F] [V] a été embauché par la société FRAMATOME, devenue AREVA NP, par contrat de travail en date du 18 juin 1981, en qualité de technicien supérieur.

En date du 17 mai 2006, [L] [F] [V] a été condamné par la Cour d’Assise du RHONE à 8 ans d’emprisonnement pour viol sur mineure de 15 ans.

[L] [F] [V] a été convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 09 juin 2006.

Compte tenu de son incarcération, [L] [F] [V] a été représenté lors de cet entretien du 22 juin 2006, par Monsieur [B], délégué du personnel.

Parallèlement, [L] [F] [V] a directement adressé par courrier ses explications à la direction de la société AREVA NP.

Par courrier du 12 juillet 2006, la société ARVEA NP a notifié à [L] [F] [V] son licenciement.

[L] [F] [V] prétend que ce licenciement, fondé sur un fait de sa vie privée, est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La société AREVA NP répond que le fait privé a causé un trouble dans l’entreprise, préjudiciable au bon fonctionnement de ses services, ce qui justifie la rupture du contrat de travail.

Sur le licenciement de [L] [F] [V]

Vu l’article L.1232-1 du Code du travail.

En droit, un fait tiré de la vie privé d’un salarié ne peut justifier son licenciement, à moins que ce fait génère un trouble caractérisé dans l’entreprise.

La lettre de licenciement adressée par la société AREVA NP à [L] [F] [V] le 16 juillet 2006 rappelle que cette sanction est liée à « un trouble caractérisé au sein de « son service, à « l’émoi très important au sein du personnel », « préjudiciable au bon fonctionnement de l’activité du service ».

Il encore fait état de « choc », de « réactions émotionnelles aigues du personnel entrainant une inertie au travail » qui « s’est mué progressivement en un trouble latent dans un climat émotionnel lourd ».

Ce trouble a pour origine, selon l’employeur, la connaissance qu’ont eu les collègues de [L] [F] [V] de sa condamnation pénale pour viol sur mineure de 15 ans.

[L] [F] [V] prétend que le trouble allégué par l’employeur n’est pas avéré.

Il fait d’abord valoir que l’employeur a lui-même informé ses collègues du service financier sur sa condamnation pénale, et sur la nature des faits qui ont justifié cette condamnation.

Or, la Cour relève sur ce point que [L] [F] [V] n’apporte aucun élément au soutien de sa prétention, et que la condamnation prononcée le 17 mai 2006 par la Cour d’Assises du RHONE a été rendue publique sur une antenne de radio locale le même jour.

Et il n’est pas établi que la société ARVEA NP aurait délibérément organisé la circulation d’informations sur la condamnation de [L] [F] [V] dans le service auquel il était affecté aux fins de provoquer le trouble caractérisé, motif de licenciement.

[L] [F] [V] soutient encore que le trouble émotionnel dont se prévaut l’employeur n’est pas établi.

La Cour constate cependant, au regard des pièces produites, que l’employeur a été contraint d’intervenir à de multiples reprises auprès des salariés et cadres de son service dès la date de condamnation de [L] [F] [V], afin de prévenir la propagation de rumeurs sur ce sujet.

Il est par ailleurs établi que certains salariés de ce service, qui sont amenés à côtoyer la mère de la victime, également salariée de la société ARVEA NP dans le même bâtiment, ont exprimé leur forte perturbation émotionnelle.

La société AREVA NP produit également les justificatifs d’intervention d’une cellule psychologique dédiée au soutien et au suivi des salariés du service de [L] [F] [V].

[L] [F] [V] fait enfin valoir que son licenciement est tardif puisqu’il est intervenu plus de deux mois après sa condamnation pénale.

Mais la sanction n’est pas tardive car elle fait directement suite aux troubles constatés dans l’entreprise, dans la mesure où la convocation à l’entretien préalable a été notifiée trois semaine seulement après la date de la condamnation pénale, et car le licenciement est intervenu quelques jours seulement après la dernière réunion organisée par la cellule de soutien psychologique.

Il est bien démontré, en l’espèce, que la condamnation pénale frappant [L] [F] [V] a créé dans l’entreprise un trouble caractérisé et certain, de sorte que la mesure de licenciement pour cause réelle et sérieuse est bien justifiée, proportionnée qu’elle était à la mesure de la gravité de la situation d’émoi résultant des faits relevant de sa vie privée, et ayant donné lieu à sanction pénale grave.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du Code de procédure civile.

[L] [F] [V] qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Dit n’y avoir lieu à appliquer l’article 700 du Code de procédure civile en l’espèce ;

Condamne [L] [F] [V] aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier Le Président,

Evelyne FERRIER Michel GAGET

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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