Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 7 octobre 2010, n° 10/02495

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 1re ch. civ. a, 7 oct. 2010, n° 10/02495
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 10/02495
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lyon, 22 mars 2010, N° 2010/00009
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

R.G : 10/02495

décision du tribunal de grande instance de Lyon

Référé du 23 mars 2010

RG : 2010/00009

COUR D’APPEL DE LYON

1re chambre civile A

ARRET DU 07 Octobre 2010

APPELANTE :

SNC VINCI IMMOBILIER RESIDENTIEL

XXX

XXX

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour

assistée de la SELARL ISEE, avocats au barreau de LYON

INTIMES :

M. Z X

né le XXX à SAINT-ETIENNE (LOIRE)

XXX

XXX

représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour

assisté de Me Didier LEMASSON, avocat au barreau de LYON

Melle D E Y

née le XXX à SAINT-PRIEST-EN-JARREZ (LOIRE)

XXX

XXX

représentée par Maître Christian MOREL, avoué à la Cour

assistée de Maître Didier LEMASSON, avocat au barreau de LYON

**************

Date de clôture de l’instruction : 08 septembre 2010

Date des plaidoiries tenues en audience publique: 08 septembre 2010

Date de mise en délibéré : 07 octobre 2010

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Bernadette MARTIN, président

— Christine DEVALETTE, conseiller

— B C, conseiller

assistée pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier

A l’audience, B C a fait son rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Bernadette MARTIN, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire .

**************

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Vinci Immobilier Résidentiel a vendu une maison d’habitation en état futur d’achèvement à M. X et Melle Y.

Lors de la livraison, les acquéreurs ont formulé des réserves, refusé de solder le prix et en ont consigné 10 %, soit la somme de 21 500 euros.

Le constructeur a agi en référé en paiement d’une provision équivalente à la moitié de cette somme, outre intérêts et indemnité.

Il a relevé appel, par acte du 7 avril 2010, de l’ordonnance qui a rejeté cette demande en raison de contestations sérieuses.

*

Par ses dernières conclusions, la société Vinci expose que les réserves à la livraison, formulées le 29 septembre 2009, portent pour l’essentiel, hors peut-être le cas de l’évier de cuisine, sur des questions mineures insusceptibles de caractériser l’inachèvement des lieux et que, devant le refus injustifié de règlement des acquéreurs, elle a refusé de remettre les clefs, mais que M. X et Mlle Y avaient par la suite changé les serrures et occupé la maison.

Elle précise que divers travaux ont ensuite été effectués et estime que l’ordonnance entreprise est erronée en ce qu’elle retient qu’on ne pourrait apprécier la réalité de l’achèvement de l’immeuble, qu’elle a fait abstraction du propre comportement des acquéreurs et qu’en toute hypothèse, en prenant livraison de la villa, ces derniers se sont placés dans l’obligation de régler au moins la somme correspondante à 95 % du prix, d’autant qu’à l’heure actuelle l’achèvement de l’immeuble est incontestable et les réserves en voie d’être levées.

La société Vinci conteste tout accord de sa part sur la consignation du prix et se défend de tout grief relatif à la forme de la notification de l’achèvement, pour demander de réformer la décision entreprise et, compte tenu de la durée de la procédure de se prononcer également sur l’exigibilité de la dernière fraction du prix, en conséquence:

— de condamner solidairement M. X et Melle Y à lui payer, à titre provisionnel, une somme de 10 750 euros outre intérêts conventionnels de 1 % par mois, tout mois commencé étant compté en entier, à compter du 12 novembre 2009 (date de la pose de l’évier),

— de les condamner solidairement à lui payer à titre provisionnel une somme de 10 750 euros outre intérêts conventionnels de 1 % par mois, tout mois commencé étant compté en entier, à compter du 7 juin 2010 (date de notification de ses premières conclusions d’appel),

— à titre très subsidiaire, de les condamner au paiement du principal et d’ordonner une expertise sur la teneur et la levée des réserves,

— de les condamner au paiement d’une somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

*

M. X et Melle Y considèrent au contraire qu’un accord a été passé entre les parties le 29 septembre 2009 et que, les réserves n’étant toujours pas levées, comme la société Vinci le reconnaît elle-même, les conditions de paiement du solde du prix ne sont toujours pas réunies.

Ils font en outre valoir que la longue liste de ces réserves exclut l’achèvement de l’ouvrage, que d’ailleurs le constructeur ne justifie pas de tous les travaux dont il se prévaut et que la prise de possession ne saurait impliquer une reconnaissance tacite de cet achèvement.

Ils s’estiment fondés à opposer au demandeur l’exception d’inexécution de ses propres obligations ainsi que l’absence de respect des formalités présidant à la notification d’achèvement, de sorte qu’ils ne peuvent être tenus du paiement des deux dernières échéances du prix, non plus que d’intérêts de retard.

M. X et Melle Y concluent à la confirmation de l’ordonnance entreprise et au paiement d’une indemnité de 2 500 euros pour frais irrépétibles.

* *

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le document signé entre les parties le 29 septembre 2009 mentionne diverses réserves et s’achève en ces termes : 'selon L. 232-3 CCH les clefs ne sont pas remises ce jour par Vinci, nous consignerons les 10 % sur un compte séquestre'.

Cette formulation ne reflète que l’enregistrement des positions respectives des parties, et peu important que ce document ait été rédigé par le représentant du constructeur, il n’en ressort nul accord selon lequel 10 % du prix resterait consigné jusqu’à levée des réserves.

Dans un courrier daté du lendemain, les acquéreurs indiquaient d’ailleurs à la société Vinci qu’il était regrettable que cette dernière ait maintenu sa décision de subordonner la remise des clefs au paiement intégral du prix.

L’existence d’un accord passé dans les termes qu’ils revendiquent à présent n’est pas établi.

Quant au respect des stipulations de la vente, l’attestation d’achèvement a bien été émise par le maître d’oeuvre, le 2 octobre 2009, et s’il est possible d’en contester la teneur, le document visé à l’acte de vente existe formellement.

L’autre exigence contractuelle, portant sur la notification par lettre recommandée avec accusé de réception de la réalisation des conditions du paiement, ne porte, dès lors notamment que le contrat n’attache aucune conséquence à cette formalité, que sur la preuve de cette notification.

N’étant pas contesté que la convocation à la livraison a bien été reçue, il n’importe pas qu’elle ait été adressée par courrier simple.

Ces contestations prises de l’absence de respect du formalisme contractuel doivent être écartées.

A défaut d’accord particulier entre les parties ou d’obstacle de forme pouvant faire échec à la demande, il convient d’examiner si les conditions d’exigibilité des deux dernières fractions du prix sont réunies.

— Sur la fraction exigible à l’achèvement de l’immeuble :

M. X et Melle Y soutiennent que la longueur de la liste de réserves, constatées contradictoirement sur plus de huit pages, serait symptomatique du caractère substantiel des malfaçons, qui ne sauraient être qualifiées de mineures.

Mais le nombre de réserves n’emporte en lui-même aucune conséquence sur l’achèvement de l’immeuble si sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d’équipement qui sont indispensables à l’utilisation, conformément à sa destination, de l’immeuble faisant l’objet du contrat.

En effet, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu’ils n’ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments impropres à leur utilisation.

Or, les défauts mentionnés lors de la livraison sont mineurs, par exemple, 'revoir planéité', 'changer vitrage sur porte double', 'manque porte coulissante placard', voire même 'calfeutrer autour EV cuvette WC, revoir finition joints -petits trous', dès lors qu’il ne résulte pas de cette dernière mention que cet équipement ne serait pas fonctionnel.

Même à reconnaître une majoration d’incidence résultant de leur cumul, ces défauts n’ont pas un caractère substantiel au sens de l’article R. 261-1 du code de la construction et de l’habitation.

Sauf l’un d’entre eux, ainsi formulé : 'cuisine: manque évier + meuble sous évier'.

L’absence de cet équipement de base porte à ce point atteinte à l’utilisation de l’habitation qu’elle exclut l’exigibilité, dès le 29 septembre 2009, de la somme en litige.

Mais depuis, les acquéreurs ont signé un quitus intitulé 'réserves levées', constatant la 'pose évier'.

A la date de ce document, l’immeuble était achevé.

Il ne peut exister de contestation sérieuse, notamment au regard d’une exception d’inexécution qui se trouve ainsi dépourvue de fondement, quant à l’exigibilité d’une provision correspondant à cette situation.

Les pénalités de retard, calculées au taux permis par l’article R. 261-14 du code de la construction et de l’habitation, sont dus depuis cet achèvement ; au regard de ce texte, la société Vinci n’est cependant pas fondée à réclamer que tout mois commencé soit compté en entier, les intérêts cessant de courir à la date même du paiement, selon le quantième auquel il interviendra.

— Sur la fraction exigible lors de la mise du local à la disposition des acquéreurs :

Ce solde peut être consigné en cas de contestation sur la conformité aux prévisions du contrat.

De nombreuses réserves initiales ont été levées, selon les documents signés par les acquéreurs.

D’autres cependant persistent, le constructeur concédant lui-même que le processus est 'en cours’ ; il en résulte une contestation sérieuse sur l’exigibilité de la dernière fraction du prix.

Une mesure d’expertise s’avère nécessaire.

Les parties s’opposent sur la mission que peut recevoir l’expert, les acquéreurs estimant qu’elle doit porter sur l’ensemble des désordres, y compris ceux qui seraient constatés après le 29 septembre 2009, le constructeur estimant au contraire qu’elle doit se borner aux réserves émises cette date.

Il convient de dire que la mission d’expertise portera sur l’ensemble des réserves non levées à ce jour, en écartant celles qui ont donné lieu à quitus et en incluant celles qui n’ont été formulées qu’après livraison, mais non celles, hypothétiques, qui pourraient être un jour formulées.

La consignation sera à la charge du constructeur.

Il y a lieu de laisser à chaque partie la charge de ses dépens.

Les circonstances conduisent à écarter l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

— Réforme l’ordonnance entreprise ;

— Condamne solidairement M. X et Melle Y à payer à la société Vinci Immobilier résidentiel une provision de 10 750 euros avec intérêts conventionnels au taux de 1 % par mois à compter du 12 novembre 2009, étant précisé que seule sera décomptée, au titre du mois du paiement, une fraction de celui-ci selon le quantième du jour où ce paiement interviendra ;

— Y ajoutant, dit n’y avoir lieu à provision pour le surplus et désigne en qualité d’expert M. G H-I, société B.D.P.M, XXX, avec mission, après avoir convoqué les parties et avisé leurs conseils, de :

— recueillir et consigner les explications des parties, prendre connaissance des documents de la cause, notamment des pièces contractuelles, se faire remettre par les parties ou par des tiers tous autres documents utiles, entendre tout sachant à charge de reproduire leurs dires et leur identité, s’entourer de tous renseignements à charge d’en indiquer la source, si nécessaire faire appel à un technicien d’une autre spécialité ou se faire assister pour l’accomplissement de sa mission par toute personne de son choix, sous son contrôle et sa responsabilité,

— se rendre sur les lieux situés XXX

— vérifier la persistance des huit réserves visées en page 8 des conclusions déposées par les acquéreurs le 7 septembre 2010, hors celles ayant donné lieu à quitus,

— déterminer le cas échéant la manière et le temps nécessaire pour y remédier,

— évaluer le coût des reprises, sauf exécution par le constructeur,

— donner tout élément permettant d’établir les préjudices subis par les parties, et en proposer une évaluation chiffrée,

— s’expliquer techniquement sur les dires des parties ;

— Dit que l’expert fera connaître sans délai son acceptation et qu’en cas de refus ou d’empêchement légitime il sera aussitôt pourvu à son remplacement ;

— Dit que l’expert commencera ses opérations dès qu’il aura été avisé par le greffe de la consignation de la provision ;

— Dit que la société Vinci Immobilier résidentiel devra consigner au greffe de la cour une somme de 1 000 euros à valoir sur les frais d’expertise avant le 1er décembre 2010 ;

— Rappelle qu’à défaut de consignation dans le délai imparti la désignation de l’expert est caduque ;

— Dit qu’à l’issue de la première et au plus tard de la deuxième réunion des parties l’expert communiquera aux parties un état prévisionnel détaillé de ses frais et honoraires et, en cas d’insuffisance de la provision allouée, demandera la consignation d’une provision supplémentaire ;

— Dit que l’expert devra déposer son rapport au greffe avant le 1er mai 2011 ;

— Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d’appel ;

— Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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