Cour d'appel de Metz, 26 novembre 2013, n° 13/00868

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, 26 nov. 2013, n° 13/00868
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 13/00868
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Moselle, 9 décembre 2008, N° 07/079

Sur les parties

Texte intégral

Arrêt n° 13/00868

26 Novembre 2013


RG N° 09/00246


Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Moselle

10 Décembre 2008

07/07 9


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

CHAMBRE SOCIALE

Chambre Sociale-Section 2 Sécurité Sociale

ARRÊT DU

vingt six Novembre deux mille treize

APPELANTE :

FONDS D’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE

XXX

XXX

XXX

représenté par M. CROS, muni d’un pouvoir spécial

INTIMÉES :

Madame O U C

XXX

XXX

non comparante, non représentée

SA ASCOMETAL

Avenue de U

XXX

Représentée par Me Joumana FRANGIE-MOUKANAS, avocat au barreau de PARIS

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE MOSELLE

XXX

XXX

représentée par Mme THILL, munie d’un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre

ASSESSEURS : Monsieur Thierry SILHOL, Conseiller

Madame Gisèle METTEN, Conseiller

GREFFIER (lors des débats) : Mme Sylvie MATHIS,

DÉBATS :

A l’audience publique du 01 Octobre 2013, tenue par Monsieur Thierry SILHOL, Conseiller et magistrat chargé d’instruire l’affaire, lequel a entendu les plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées, et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l’arrêt être rendu par mise à disposition publique au greffe le 26 Novembre 2013.

EXPOSE DU LITIGE:

Y B, né le XXX, a été employé par la Société des aciers fins de l’est (SAFE), devenue la société Ascometal, du 19 novembre 1956 au 23 juin 1996. Il est décédé le XXX.

Sa AB, O-U C a complété le 18 avril 2005 une déclaration de maladie professionnelle à laquelle elle a joint des certificats médicaux établis le 27 octobre et 1er décembre 2004 mentionnant un adénocarcinome bronchique.

Après avoir reconnu le 23 août 2005 le caractère professionnel de la maladie au titre du tableau n° 30 bis et l’imputabilité du décès de Y B à cette même affection, la caisse primaire d’assurance maladie de Metz devenue depuis celle de Moselle (la caisse) a attribué à Mme C une rente de conjoint survivant aux taux de 60% à compter du 30 novembre 2004.

Au mois de septembre 2005, Mme C a saisi le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Z) d’une demande d’indemnisation. Aux mois de juillet et décembre 2006, elle a accepté les offres suivantes :

I Action successorale :

préjudice patrimonial : 1.750, 80 euros représentant les arriérés de rente

préjudice extra-patrimonial :

— préjudice moral : 64.000 euros

— souffrances physiques : 20.700 euros

— préjudice d’agrément : 20.300 euros

II préjudice personnel subi par Mme C :

préjudice moral et d’accompagnement de fin de vie : 30.000 euros.

Le 6 septembre 2006, Mme C a saisi la caisse d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société Ascometal.

Aucune conciliation n’a pu aboutir.

Suivant requête expédiée le 4 janvier 2007, Mme C a fait convoquer la SA Ascometal et la caisse devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Moselle aux fins d’obtenir la reconnaissance de la faute inexcusable de l’ancien employeur de son époux.

Le Z intervenant volontairement à l’instance en sa qualité de créancier subrogé a demandé la reconnaissance de la faute inexcusable de la société Ascometal, la majoration au maximum de la rente de conjoint survivant servie à Mme C et le paiement par la caisse des sommes indemnisant le préjudice.

La caisse s’en est rapportée sur l’existence de la faute inexcusable et a sollicité la condamnation de la société Ascometal à lui rembourser la majoration de la rente et le montant des indemnités réparant le préjudice.

La société Ascometal s’est opposée à ses prétentions et a demandé aux premiers juges de lui déclarer inopposable la décision reconnaissant le caractère professionnel de la maladie de Y B.

Le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Moselle a prononcé le 10 décembre 2008 un jugement dont le dispositif est le suivant :

' Déclare recevable la demande présentée par le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Z),

Au fond, rejette la demande de Mme. B et du Z '

Contre cette décision dont il a reçu notification le 12 décembre 2008, le Z a interjeté appel selon lettre recommandée avec accusé de réception adressée au greffe de la cour d’appel le 6 janvier 2009.

En l’état de ses dernières conclusions oralement développées lors de l’audience de plaidoirie par son représentant muni d’un pouvoir spécial, le Z demande à la cour de :

' Juger recevable la demande du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, subrogé dans les droits des ayants droit de Monsieur B Y,

Réformer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Moselle du 10 décembre 2008,

Juger que la rente de Madame O-U B doit être majorée à son maximum, conformément aux dispostions de l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;

Juger que cette majoration de rente sera versée directement par la CPAM à Madame

O-U B ;

Fixer l’indemnisation des préjudices personnels subis par Monsieur Y B de la façon suivante :

— préjudice moral : 64.000 euros

— souffrances physiques : 20.700 euros

— préjudice d’agrément : 20.300 euros

Fixer l’indemnisation du préjudice moral des ayants droit de Monsieur Y B de la façon suivante :

— préjudice moral et d’accompagnement de fin de vie de Mme B AB de Monsieur B : 30.000 euros

Juger que la CPAM de Metz devra verser au Z la somme de 135.000 euros en réparation des préjudices personnels de Monsieur Y B et des préjudices personnels de ses ayants droit;

Condamner la société Ascometal à payer au Z une somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile '.

Par conclusions de son avocat présentées en cause d’appel et reprises oralement lors de l’audience de plaidoirie, la SA Ascometal demande pour sa part à la cour de :

«  Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu’il a débouté le Z de son recours.

Subsidiairement, si la cour devait retenir la faute inexcusable de la société Ascometal il est demandé de :

Ramener à des plus justes proportions les montants sollicités par le Z au titre de l’indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux de Monsieur B et au titre de l’indemnisation du préjudice moral des ayants droit de Monsieur B.

Dire et juger inopposables à la société Ascometal les décisions de prise en charge de la maladie et du décès de Monsieur B adoptées par la caisse.

En raison tant de cette inopposabilité que de l’application de l’article 2 de l’arrêté du 16 octobre 1995, débouter la caisse de son action récursoire à l’encontre de la société Ascometal. "

Par conclusions écrites présentées en cause d’appel et développées oralement lors de l’audience de plaidoirie par son représentant, la caisse demande pour sa part à la cour:

«  – De donner acte à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Moselle qu’elle s’en remet à la sagesse de la Cour en ce qui concerne la faute inexcusable reprochée à la société Ascometal ;

Le cas échéant :

— De donner acte à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Moselle qu’elle s’en remet à la Cour en ce qui concerne la fixation du montant de la majoration de rente de conjoint survivant réclamée par le Z pour le compte de Madame AB O-U B;

— De dire et juger que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Moselle versera la majoration de rente de conjoint survivant directement entre les mains de Madame AB O-U B

— De fixer à son juste montant la réparation du préjudice causé à feu Monsieur Y B au titre de l’action successorale ;

— De dire et juger que le préjudice causé par les souffrances physiques et morales constitue un seul et unique poste de préjudice ;

— De fixer à son juste montant le préjudice moral de Madame AB O-U B;

— De dire et juger que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Moselle versera entre les mains du Z les sommes susceptibles d’être allouées au titre du préjudice extrapatrimonial et du préjudice moral de Madame AB O-U B ;

— De constater que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Moselle a respecté le principe du contradictoire au cours de la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et du décès de Monsieur Y B ;

— En conséquence, de dire et juger que la décision du 23 août 2005, reconnaissant le caractère professionnel de la maladie et du décès de Monsieur Y B, est opposable à la Société Ascometal ;

— De condamner la Société Ascometal à rembourser à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Moselle la majoration de rente de conjoint survivant qu’elle sera tenue de verser à Madame AB O-U B, et les indemnités (en principal et intérêts) qu’elle sera tenue de verser au Z au titre des préjudices moraux et extrapatrimoniaux. "

Mme C, régulièrement convoquée à l’audience du 1er octobre 2013 par lettre recommandée dont elle a accusé réception le 13 mai 2013, n’a pas comparu et ne s’est pas davantage faite représenter.

Sur quoi :

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Vu le jugement entrepris,

Vu les conclusions écrites déposées le 7 mars 2012 par le Z, celles déposées le 10 juillet 2012 par la SA Ascometal ainsi que celles déposées le 17 février 2012 par la caisse, toutes présentées en cause d’appel et reprises oralement lors de l’audience de plaidoirie auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises,

I Sur la recevabilité de l’action du Z :

Attendu qu’en vertu de l’article 53-VI de la loi n 200-1257 du 23 décembre 2000, le Z qui a indemnisé le préjudice subi par Monsieur B et Mme C est recevable, comme créancier subrogé, en son action tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, à la fixation de la majoration de la rente de conjoint survivant et à la fixation de la réparation des préjudices personnels de la victime et ses ayants droit dans la limite des sommes versées par lui-même ;

II Sur la faute inexcusable :

Attendu qu’au soutien de son appel, le Z soutient que les conditions de la faute inexcusable sont réunies en l’état des lois et règlements en vigueur ainsi que des pièces médicales et des nouveaux témoignages qu’il produit à hauteur de cour;

Que pour sa part, la société Ascometal soutient que :

— l’origine professionnelle de la maladie n’est pas démontrée alors que dans 90% des cas cette affection est due au tabagisme ;

— elle exerçait une activité industrielle soumise à des réglementations de prévention dont les autorités sanitaires n’ont jamais prétendu qu’elles n’auraient pas été respectées aux dates concernées ;

— la conscience du danger n’est pas établie dès lors que le décret du 17 août 1977 était ambigu, que le respect des normes réglementaires était impropre à prévenir le risque et que les travaux scientifiques relatifs à l’amiante qui ne concernaient que les mines n’ont pas été diffusés auprès des industriels ;

— les pièces lacunaires produites par le Z ne permettent d’établir ni la période d’exposition au risque ni les conditions de travail de la victime ;

* * *

Attendu qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés dans l’entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’avait pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ;

Qu’il incombe au salarié qui invoque la faute inexcusable de son employeur de rapporter la preuve de ce que celui-ci avait ou aurait dû prendre conscience du danger auquel il était exposé, et de ce qu’il n’avait pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver;

Attendu en l’espèce, qu’il ressort des certificats médicaux produits aux débats par le Z et la caisse, dont notamment ceux rédigés les 26, 27 octobre, 9 novembre et 1er décembre 2004 que Y B était atteint d’un adénocarcinome primitivement bronchique dont il est décédé le XXX ;

Qu’ensuite, selon la lettre rédigée le 3 juin 2005 par l’employeur à l’occasion de la déclaration de maladie professionnelle, Y B a travaillé pour la société Ascometal du 19 novembre 1956 au 23 septembre 1996 ; que durant cette période, l’intéressé a toujours travaillé au service métallurgique de l’établissement d’Hagondange (Moselle) en qualité de scieur puis d’agent de contrôle ; que dans ce même courrier, l’employeur réfute l’origine professionnelle de la maladie ;

Que cependant, aux termes du procès-verbal de l’enquête administrative diligentée par la caisse, « Y B a eté exposé à l’inhalation de poussières d’amiante de 1956 à 1976 au service de Ascometal-Hagondange notamment par l’utilisation de plaques et tresses en amiante et le port de gants amiantés » ;

Que le Z produit aux débats des attestations rédigées par Messieurs I D, K A, G X et R B qui ont tous cotoyé la victime au service métallurgique de l’établissement d’Hagondange ;

Que d’après Messieurs A et X, affectés respectivement au département métallurgique depuis 1973 et 1980, Y B, qui travaillait aux essais mécaniques, utilisait quotidiennement des fours, notamment, de traitement thermique et des plaques chauffantes où l’amiante était présente en quantité abondante ;

Que M. R B, embauché, précise que jusqu’à sa retraite, son frère Y s’occupait des échantillons thermiques qu’il plongeait quotidiennement dans des fours de trempe garnis de joints et de calorifugeage en amiante ;

Que les déclarations de Messieurs A, X, B, versées pour la première fois à hauteur de cour, corroborent celles de M. D qui a travaillé avec la victime à partir de 1966 ;

Qu’il ressort de l’ensemble de ces attestations que Y B ne disposait d’aucun moyen de protection individuelle et que la poussière d’amiante se propageait dans le laboratoire qui n’était muni d’aucun système de ventilation ;

Que le Z communique contradictoirement une note technique décrivant les fours de traitement thermique utilisés au service métallurgique de la SAFE; qu’il résulte de ce document que le calorifugeage des portes de ces fours était réalisé jusqu’en 1993 avec de la cordelette d’amiante et que pour manipuler les échantillons qu’il devait y introduire, Y B portait des gants en amiante ; qu’il est également indiqué que lors des essais de trempe, la victime était équipée d’un tablier en amiante, cette substance n’ayant été éliminée dans l’entreprise qu’à partir de 1996 ;

Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que Y N a été exposé à l’inhalation de poussières d’amiante durant toute sa carrière professionnelle, soit de 1956 à 1996 et que l’ensemble des conditions du tableau n°30 bis tenant à la désignation de la maladie, aux délais de prise en charge et d’exposition au risque ainsi qu’à la liste limitative des travaux sont réunies ; que par suite et en l’absence de toute preuve que la maladie aurait une cause totalement étrangère au travail, la société Ascometal ne peut valablement soutenir que l’origine professionnelle du cancer broncho-pulmonaire primitif n’est pas établie ;

Attendu que la conscience du danger doit être appréciée au moment de l’exposition au risque ;

Que sur ce point, il y a lieu de relever que le décret du 31 août 1950 a constitué le tableau nº30 des maladies professionnelles et a désigné comme étant à l’origine des affections professionnelles d’asbestose, les travaux exposant à l’inhalation de poussières d’amiante, ne précisant qu’à titre indicatif par l’emploi de l’adverbe notamment, les travaux de cardage, filature et tissage de l’amiante;

Que le décret du 21 octobre 1951 a ajouté à cette liste indicative de travaux, ceux de calorifugeage au moyen d’amiante et la manipulation d’amiante à sec dans les industries de fabrication d’amiante ciment, de fabrication de joints en amiante, de fabrication de garnitures de friction ;

Que si les travaux réalisés par Y B ne correspondaient pas aux travaux énoncés par le tableau n°30 en vigueur durant la période d’exposition au risque, cette liste ne revétait qu’un caractère purement indicatif ;

Que l’association de ce caractère indicatif des travaux concernés et de leur énumération était de nature à attirer l’attention de l’employeur relativement aux activités s’en rapprochant, lesquelles permettaient d’illustrer les cas d’inhalation aux poussières d’amiante qui pouvaient être rencontrés;

Attendu qu’en outre, le décret du 10 juillet 1913 relatif à l’hygiène et à la sécurité des travailleurs, prévoyait en son article 6 que « les poussières ainsi que les gaz incommodes, insalubres ou toxiques seront évacués directement en dehors des locaux de travail au fur et à mesure de leur production » et que « l’air des ateliers sera renouvelé de façon à rester dans l’état de pureté nécessaire à la santé des ouvriers » ;

Que le décret du 13 décembre 1948, modifiant le décret du 10 juillet 1913 imposait, dans les cas exceptionnels où serait reconnue impossible l’exécution des mesures de protection collective contre les poussières, la mise à disposition des travailleurs de masques et dispositifs de protection appropriés ;

Que le décret 77-949 du 17 août 1977 a prescrit des mesures particulières d’hygiène régissant les établissements où le personnel est exposé à l’amiante ;

Qu’il se déduit de l’ensemble de cette réglementation applicable à la période durant laquelle Y B a été exposé au risque que l’employeur avait ou du moins aurait dû avoir conscience de la nécessité d’assurer le bon renouvellement de l’air dans les locaux et de prévenir l’inhalation de poussières dangereuses ainsi que des dangers particuliers résultant de l’amiante ;

Attendu par ailleurs qu’il ressort des explications développées par le Z et des attestations précitées qu’aucun système de protection individuelle ou collective n’empêchaient l’inhalation de la fibre d’amiante ;

Qu’il s’évince de ces énonciations que la maladie dont Y B est décédé trouve l’une de ses causes dans la faute inexcusable de la société Ascometal ;

Qu’en l’état de l’ensemble de ces énonciations, le jugement déféré doit être infirmé en ce qu’il a écarté l’existence d’une faute inexcusable et débouté le Z de ses demandes;

III Sur les conséquences de la faute inexcusable :

A Sur la majoration de la rente :

Attendu qu’en l’absence de toute faute établie ou même alléguée à l’encontre de Y B, il y a lieu, en vertu de l’article L. 452-2 alinéa 4 du code de la sécurité sociale, de fixer au maximum la majoration de la rente de conjoint survivant servie à compter du 30 novembre 2004 à Mme C ;

Que cette majoration doit être payée directement par la caisse à Mme C ;

B Sur l’indemnisation des prejudices :

Attendu qu’en considération des pièces produites par les parties, des conséquences fatales de l’affection dont Y B a été victime, de son âge au moment du décès et des souffrances endurées par le défunt et son épouse, il y a lieu de fixer les préjudices à hauteur des sommes versées par le Z ;

Qu’en l’état de l’action du Z et de l’acceptation des offres d’indemnisation par C, ces sommes seront versées par la caisse au fonds, créancier subrogé par l’effet de l’ article 53-VI de la loi n°20003-1257 du 23 décembre 2000 ;

IV sur l’opposabilité à la société Ascometal de la décision reconnaissant le caractère professionnel de la maladie et du décès de Y B :

Attendu que sur ce point, la société Ascometal soutient notamment que la caisse ne justifie ni de l’envoi de la réception de l’avis l’informant de la clôture de l’instruction de la déclaration de maladie professionnelle ni du caractère effectivement suffisant du délai dont l’employeur a disposé pour prendre connaissance du dossier ;

Qu’en réplique, la caisse fait valoir que le 1er août 2005, elle a informé l’employeur de la clôture de l’instruction et de la possibilité de venir consulter le dossier ; que devant les premiers juges, la société Ascometal n’a pas contesté la réception de cette lettre et que compte tenu des délais habituels d’acheminement du courrier, l’avis de clôture est parvenu à l’employeur le 2 août 2005;

Qu’elle en déduit que la société Ascométal a disposé d’un délai parfaitement suffisant de six jours ouvrés pour consulter le dossier ;

* * *

Attendu que selon l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable au présent litige, avant de se prononcer sur le caractère professionnel de la maladie, la caisse primaire d’assurance maladie doit informer l’employeur de la fin de la procédure d’instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ;

Que cette disposition n’impose pas à la caisse d’aviser l’employeur de la clôture de la procédure d’instruction par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ; que cependant, il y a lieu, en cas de contestation sur la date effective de réception de ce courrier, de verifier si l’employeur a effectivement reçu cet avis et, le cas échéant, disposé d’un délai suffisant pour prendre connaissance du dossier ;

Attendu au cas présent que par lettre en date du 1er août 2005, la caisse a informé l’employeur de la fin de l’instruction et de la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier, préalablement à la décision sur le caractère professionnel de la maladie devant intervenir le 11 août 2005 ;

Que si devant les premiers juges, l’employeur n’a pas contesté avoir reçu ce courrier, il n’en reste pas moins que sa date effective de réception n’est établie par aucun élément du dossier ;

Qu’eu égard aux délais habituels d’acheminement du courrier, cette correspondance n’a pu être reçu avant le 2 ou le 3 août 2005 ; qu’ainsi, déduction faite du samedi 6 et du dimanche 7 août, l’employeur n’a disposé que d’un délai de six ou sept jours utiles pour exercer ses droits ;

Que ce délai qui a couru pendant la période estivale de la première quinzaine du mois d’août était insuffisant pour permettre à la société Ascometal de venir prendre connaissance des pièces du dossier et formuler le cas échéant des observations préalablement à la décision sur le caractère professionnel de la maladie ;

Qu’en conséquence, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens developpés par l’employeur, il y a lieu d’accueillir la demande d’inopposabilité de la décision reconnaissant le caractère professionnel de la maladie déclarée par Y B ;

V Sur les frais irrépétibles :

Attendu que la société Ascometal qui succombe essentiellement à hauteur de cour doit être condamnée à payer au Z la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Par ces motifs:

La cour statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire :

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a déclaré recevable la demande présentée par le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante ;

L’INFIRME pour le surplus ;

Et statuant à nouveau :

DIT que la maladie professionnelle dont est décédé Y B le XXX est due à la faute inexcusable de son employeur la SA Ascometal ;

FIXE au maximum la majoration de la rente de conjoint survivant servie à Mme O-U C depuis le 30 novembre 2004 ;

DIT que cette majoration sera versée directement par la caisse primaire d’assurance maladie de Moselle à Mme O-U C ;

FIXE l’indemnisation des préjudices personnels subis par Y B aux sommes suivantes :

— souffrances physiques et morales : 84.700 euros,

— préjudice d’agrément : 20.300 euros ;

FIXE l’indemnisation du préjudice personnel subi par Mme O-U C à la somme de 30 000 euros ;

DIT que la caisse primaire d’assurance maladie de Moselle doit payer au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante la somme totale de 135.000 euros en réparation des préjudices personnels subis par Y B et Mme O-U C ;

DECLARE inopposable à la SA Ascometal la décision prise le 23 août 2005 par la caisse primaire d’assurance maladie de Metz reconnaissant le caractère professionnel de la maladie et du décès de Y B ;

CONDAMNE la SA Ascometal à payer au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

Vu l’article R. 144-10 du code de la sécurité sociale, DIT n’y avoir lieu à dépens.

Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe le 26 Novembre 2013 par Monsieur Etienne BECH, Président de Chambre, assisté de Mme MATHIS, greffier, et signé par eux.

Le Greffier, Le Président,

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