Cour d'appel de Nancy, 18 décembre 2006, n° 03/02802

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nancy, 18 déc. 2006, n° 03/02802
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 03/02802
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nancy, 2 mai 2000, N° 9804370

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D’APPEL DE NANCY

première chambre civile

ARRÊT N°3024/06 DU 18 DÉCEMBRE 2006

Numéro d’inscription au répertoire général : 03/02802

Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY, R.G.n° 9804370, en date du 03 mai 2000,

APPELANTE :

S.A.R.L. Y, dont le siège est XXX

représentée par la SCP BONET-LEINSTER-WISNIEWSKI, avoués à la Cour

INTIMÉ :

Maître Z X, pris ès-qualités d’administrateur judiciaire de la SA HEYMANN LINGELOR, demeurant XXX XXX

représenté par la SCP MILLOT-LOGIER – FONTAINE, avoués à la Cour

assisté de Me DE HEAULME, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 20 Novembre 2006, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, et Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, chargé du rapport,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Guy DORY, Président de Chambre,

Monsieur Gérard SCHAMBER , Conseiller,

Madame Pascale TOMASINI, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mademoiselle A B ;

ARRÊT : contradictoire, prononcé à l’audience publique du 18 DÉCEMBRE 2006 date indiquée à l’issue des débats, par Monsieur DORY, Président, conformément à l’article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Mademoiselle A B, greffier présent lors du prononcé ;


Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à


FAITS ET PROCÉDURE :

La S.A.R.L. Y était en relation d’affaires avec la SA HEYMANN LINGELOR ; suite au redressement judiciaire de cette société prononcé le 15 décembre 1992, elle fait valoir auprès du juge-commissaire qu’elle disposait à l’encontre de la SA HEYMANN LINGELOR d’une créance résultant de la vente de marchandises conclue avec clause de réserve de propriété ; le 18 décembre 1992, la S.A.R.L. Y a exercé une action en revendication des marchandises pour la somme de 677.466,56F ; cette requête a été rejetée par le juge-commissaire le 2 juillet 1993 pour défaut de validité de la clause de réserve de propriété ; la S.A.R.L. Y a formé opposition et le tribunal de commerce a confirmé l’ordonnance de rejet par un jugement du 7 février 1994 ; un appel a été interjeté contre le jugement et la Cour d’appel a, par un arrêt du 8 juillet 1996, considéré la clause comme valable et a autorisé la S.A.R.L. Y a reprendre les marchandises en quelque lieu où elles se trouvaient ; dans l’impossibilité d’exécuter l’arrêt et après une sommation interpellative infructueuse du 26 novembre 1997, la S.A.R.L. Y a mis en cause la responsabilité de l’administrateur, Maître X ;

Par jugement en date du 03 mai 2000, le Tribunal de Grande Instance de Nancy a :

— débouté la SARL Y de l’ensemble de ses demandes,

— condamné la SARL Y à payer à Maître Z X la somme de 6.000 F par application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

— condamné la SARL Y aux dépens dont distraction au profit de Maître BUISSON, conformément aux dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Pour statuer ainsi, le Tribunal a considéré que la responsabilité professionnelle de l’administrateur judiciaire ne pouvait être engagée que sur la base d’une faute qu’il aurait commise lors de l’exercice de son mandat judiciaire ; que les ordonnances du juge-commissaire étaient exécutoires de plein droit, conformément à l’article D 155 du décret du 27 décembre 1985 et que la clause de réserve de propriété ne rendait pas inaliénables les biens ainsi garantis en ce que, dans le cadre de la poursuite de l’activité du débiteur, il était normal que ces marchandises aient pu être vendues ; que l’administrateur était en droit de considérer la clause de réserve de propriété comme non valable et qu’il n’avait pas commis de faute dans le cas où les marchandises auraient été vendues sans constitution de garantie ; qu’il appartenait au vendeur de se préconstituer une preuve ;

Le Tribunal a encore considéré que cette preuve pouvait être faite par le moyen d’un inventaire et qu’il appartenait au vendeur de demander au juge-commissaire qu’il prescrive à l’administrateur d’effectuer cet inventaire ; qu’au moment de l’ouverture de la procédure collective, aucun inventaire n’avait été demandé par la S.A.R.L. Y et qu’avant la réforme de 1994, cet inventaire était facultatif ; que les factures produites ne suffisent pas à établir l’existence des marchandises entre les mains de la SA HEYMANN LINGELOR au 15 décembre 1992 ; qu’en l’état de la législation sur les procédures collectives avant la réforme de 1994, il n’était pas démontré que Maître Z X avait commis une faute lors de l’exercice de son mandat judiciaire ;

La S.A.R.L. Y a interjeté appel de la décision par déclaration en date du 10 juillet 2000 ;

A l’appui de son appel et dans ses dernières écritures, la S.A.R.L. Y fait valoir que Maître Z X a été informé dès le début de la revendication opérée sur les marchandises ; qu’il pouvait dès lors prendre toutes les mesures s’imposant pour garantir la préservation de ses intérêts, en cas de décision favorable à la revendication ; l’appelante souligne qu’en permettant la cession des marchandises au cours de la procédure, alors même qu’aucune décision n’était passée en force de chose jugée, Maître Z X l’a privée du bénéfice de sa légitime revendication ; que dans l’hypothèse de la revente avant l’expiration du délai de revendication d’une marchandise grevée d’une clause de réserve de propriété, la jurisprudence retient la responsabilité professionnelle de l’administrateur ;

La S.A.R.L. Y soutient encore que la faute d’imprudence de Maître X est caractérisée ; qu’il appartenait à l’intimé d’inviter la société LINGELOR à isoler la marchandise et lui interdire de la vendre, dès lors qu’il existait une revendication ;

Sur l’existence des marchandises au moment de l’ouverture de la procédure collective, la S.A.R.L. Y fait valoir qu’à aucun moment jusqu’à la mise en cause de sa responsabilité, l’administrateur n’a opposé ou prétendu la non-existence des marchandises ; que si cette marchandise n’avait pas existé le 15 décembre 1992, l’administrateur l’aurait immédiatement opposé dans le cadre de l’action en revendication ; l’appelante ajoute qu’elle n’a cessé de demander que lui soient communiqués les éléments relatifs aux inventaires qui ont été dressés selon toute vraisemblance lors de l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de sa débitrice ; qu’aucune des demandes légitimes de renseignement n’a abouti ; l’appelante fait état d’une part des bons de livraison attestant de la réception des marchandises et d’autre part des neuf factures correspondantes ; l’appelante ajoute encore que Maître Z X ne saurait lui reprocher de ne pas rapporter la preuve de l’identification des marchandises alors qu’elle demeure dans l’attente des documents d’inventaire concernant l’état du patrimoine de la société débitrice au moment du redressement, à tout le moins au moment de sa cession ;

La S.A.R.L. Y demande à la Cour de :

— déclarer recevable et bien fondé l’appel interjeté, y faire droit,

— infirmer le jugement entrepris,

— statuant à nouveau :

— condamner Maître Z X au paiement de la somme de 103.279,11 € (677.466,56 F) correspondant à la valeur des marchandises revendiquées,

— condamner Maître Z X au paiement des intérêts légaux sur cette somme à compter de la date de la revendication,

— condamner Maître X au paiement d’une indemnité de 2.290 € en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

— condamner Maître X aux entiers dépens d’instance et d’appel, ces derniers étant recouvrés directement par la SCP BONET-LEINSTER-WISNIEWSKI, avoués associés à la Cour, conformément aux dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Maître Z X dans ses dernières écritures répond que l’appelante ne démontre ni sa faute ni un préjudice en relation causale avec son fait ;

Maître Z X soutient que le juge-commissaire était le seul compétent pour statuer sur la mise en oeuvre d’une clause de réserve de propriété et que sa décision était exécutoire ; il ajoute que l’existence d’un litige de ce chef n’interrompt pas la poursuite de l’activité permise par l’effet du jugement de redressement judiciaire ; il souligne que ce n’est pas lui qui a vendu la marchandise dans le cadre de la poursuite de l’activité mais bien la SA HEYMANN LINGELOR restée à la tête de ses affaires ; qu’il ignorait tout de l’existence des marchandises en nature au moment de l’ouverture de la procédure de redressement, sachant qu’avant 1994 il n’avait aucune obligation de dresser un inventaire ; l’intimé souligne que l’appelante avait eu la faculté de faire établir elle-même cet inventaire, démarche qui aurait été de nature à protéger ses droits éventuels dans le cadre de son action aux fins de revendication de propriété ;

Maître Z X ajoute encore que la jurisprudence visée par l’appelante, postérieure à 1994, n’est pas applicable en l’espèce ; que l’existence d’une clause de réserve de propriété ne pouvait rendre les biens inaliénables ; au surplus, l’intimé souligne que son fait, même établi, ne pourrait être la cause du préjudice invoqué sachant que l’ensemble des créances relevant de l’article 40 a été honoré et que si Y avait fait valoir sa créance dans ce cadre, elle aurait sans nul doute été payée ;

Maître Z X répond encore que l’appelante est dans l’incapacité de démontrer d’une part les conditions dans lesquelles les marchandises auraient existé en nature lorsqu’elles ont été revendiquées et d’autre part à quelle époque ces marchandises auraient été vendues ; l’intimé ajoute que le stock après la poursuite de l’activité a été repris à forfait sans qu’aucun inventaire ne soit établi ; qu’ainsi il est bien en peine d’en produire un ;

Maître Z X demande à la Cour de :

— déclarer l’appel interjeté par la SARL Y irrecevable et mal fondé, l’en débouter ainsi que de toutes demandes, fins et conclusions,

— confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

— y ajoutant,

— condamner Y à 800 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— la condamner en outre à 2.500 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

— la condamner enfin aux entiers dépens d’appel dont distraction au profit de la SCP MILLOT-LOGIER & FONTAINE, avoués aux offres de droit ;

SUR CE :

Attendu que pour engager la responsabilité de l’administration judiciaire, la société Y doit d’abord démonter que les marchandises vainement revendiquées existaient en nature au jour de l’ouverture de la procédure collective ; que force est de constater qu’en l’espèce cette preuve qui ne saurait résulter de factures ou de bons de livraison antérieurs au jugement de redressement, n’est pas rapportée ; qu’elle ne saurait être déduite du système de défense adopté par l’administrateur envers le revendiquant ; qu’il peut seulement être relevé qu’aucune des pièces produites ne contient une quelconque reconnaissance, même implicite, de la part de Maître X de l’existence desdites marchandises au jour de l’ouverture du redressement de l’entreprise LINGELOR ou au jour où il a eu connaissance de la requête en revendication ;

Que d’autre part il est constant qu’à l’époque des faits, antérieurs au 1er octobre 1994, la formalité de l’inventaire constituait une simple faculté laissée à l’appréciation du juge commissaire et non de l’administrateur qui n’était pas tenu d’y procéder d’office ;

Que l’absence de telles opérations ne saurait donc être imputée à faute à Maître X ; qu’aucune pièce émanant de la collaboratrice de celui-ci n’est produite ;

Qu’en définitive, il y a lieu de confirmer le jugement querellé ; que succombant en son recours la société Y sera condamnée aux dépens d’appel outre le paiement à Maître X de la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Qu’il n’y a pas lieu à dommages et intérêts pour procédure abusive ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement,

Confirme le jugement querellé ;

Condamne la SARL Y à payer à Maître X la somme de HUIT CENTS EUROS (800 €) sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne l’appelante aux dépens d’appel qui pourront être directement recouvrés par la SCP MILLOT-LOGIER & FONTAINE, avoués associés à la Cour, conformément aux dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

L’arrêt a été prononcé à l’audience publique du dix huit Décembre deux mille six par Monsieur DORY, Président de la première chambre civile de la Cour d’Appel de NANCY, conformément à l’article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Mademoiselle B, Greffier.

Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.

Signé : L. B.- Signé : G. DORY.-

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Cour d'appel de Nancy, 18 décembre 2006, n° 03/02802