Cour d'appel de Nancy, Première chambre civile, 19 mars 2007, n° 04/01030

  • Poste·
  • Publicité comparative·
  • Département·
  • Crédit agricole·
  • Illicite·
  • Site·
  • Consommateur·
  • Banque·
  • Édition·
  • Dénigrement

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Nancy, première ch. civ., 19 mars 2007, n° 04/01030
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 04/01030
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nancy, 4 janvier 2004, N° 03/04740

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D’APPEL DE NANCY

première chambre civile

ARRÊT N°674/07 DU 19 MARS 2007

Numéro d’inscription au répertoire général : 04/01030

Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY, R.G.n° 03/04740, en date du 05 janvier 2004,

APPELANTE :

LA BANQUE POSTALE venant aux droits de LA POSTE, dont le siège est 34 rue de la Fédération XXX

représentée par la SCP VASSEUR, avoués à la Cour

assistée de Me Rachel LANZ, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMÉE :

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE X, dont le siège est 56/XXX

représentée par la SCP BONET, LEINSTER & WISNIEWSKI, avoués à la Cour

assistée de Me Patrick LAFFON, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 Février 2007, en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Guy DORY, Président de Chambre,

Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller,

Madame Pascale TOMASINI- KRIER , Conseiller, en son rapport,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Y Z ;

ARRÊT : contradictoire, prononcé à l’audience publique du 19 MARS 2007 date indiquée à l’issue des débats, par Monsieur DORY, Président, conformément à l’article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Madame Odile ANTOINE , greffier présent lors du prononcé ;


Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à


EXPOSÉ DU LITIGE :

Au mois de mai 2003, LA POSTE a mis à la disposition de ses clients un dépliant dans lequel elle reproduisait un graphique comparatif entre les prix des prestations pratiqués par différents établissements bancaires, dont la POSTE et la CAISSE REGIONALE de CREDIT AGRICOLE (CRCA).

Les informations ayant permis la réalisation de ce document provenaient d’un site internet « testepourvous.com », réalisé par une société indépendante, la SA EDITIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES CONSOMMATEURS FRANCE.

Le 2 et le 20 juin 2003, la CRCA, qui figurait en dernière position sur le graphique, a sommé la POSTE d’avoir à « justifier et prouver les conditions de calcul de l’exactitude matérielle des chiffres annoncés dans la publicité précitée ».

Par lettre recommandée du 17 juillet 2003, LA POSTE a répondu à ces sommations et indiqué ses sources, joignant au courrier une impression papier du site internet.

Par jugement du 5 janvier 2004, le Tribunal de Grande Instance de NANCY , le juge des référés initialement saisi par la CRCA ayant fait application des dispositions de l’article 811 du nouveau code de procédure civile, a :

  • déclaré illicite la publicité comparative résultant de la diffusion par LA POSTE, dans les départements de Meurthe-et-Moselle, de la Meuse et des Vosges, d’une brochure publicitaire intitulée « gagnez jusqu’à 100 € par an »,
  • ordonné à LA POSTE de retirer, dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement, l’ensemble des exemplaires de la brochure publicitaire des bureaux de poste situés dans les départements de Meurthe-et-Moselle, de la Meuse et des Vosges,
  • prononcé, à défaut de régularisation dans le délai d’un mois, une astreinte provisoire de 750 € par jour de retard,
  • ordonné à LA POSTE d’indiquer, justificatifs à l’appui, à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X, dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement, le nombre d’exemplaires diffusés de ladite brochure, dans les départements de Meurthe-et-Moselle, de la Meuse et des Vosges,
  • condamné LA POSTE à verser à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X une indemnité provisionnelle à valoir sur les dommages-intérêts d’un montant de 10.000 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
  • ordonné l’exécution provisoire,
  • condamné LA POSTE à verser à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X la somme de 700 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les premiers juges ont estimé que la publicité comparative faite par LA POSTE était illicite, et retenu que la comparaison du coût des comptes bancaires n’était pas objective aux motifs que :

  • le profil mentionné par LA POSTE sur le dépliant incluait 200 opérations débitrices par an,
  • les exploitants du site ont repris les conditions tarifaires 2002 issues d’un dépliant édité par la CRCA,
  • ce dépliant mentionne que la participation aux frais de gestion est de 0.75 € par écriture, dans certains cas, selon le fonctionnement du compte,
  • faute d’informations plus précises, l’exploitant du site internet a interprété cette mention en divisant de son propre chef par deux le nombre d’opérations débitrices pour calculer les frais de tenue de compte de la CRCA.

Ils en ont conclu que la comparaison ne saurait être qualifiée d’objective, puisque les modalités de calcul pour la CRCA ne concernent pas 200 opérations débitrices.

La CRCA a ensuite saisi le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de NANCY pour voir étendre le jugement litigieux au département de la MOSELLE. Ce magistrat s’est déclaré incompétent en raison de l’existence de contestations sérieuses et a renvoyé l’affaire à la juridiction du fond.

Par jugement du 22 novembre 2004, le Tribunal de Grande Instance de NANCY a :

  • déclaré illicite la publicité comparative résultant de la diffusion par LA POSTE dans le département de la Moselle d’une brochure publicitaire intitulée « gagnez jusqu’à 100 € / an »,
  • constaté que LA POSTE a procédé au retrait des brochures publicitaires dans le département de la Moselle au mois de mars 2004,
  • en conséquence, constaté que la demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X est devenue sans objet,
  • condamné LA POSTE à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X la somme de 1.200 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Le tribunal a retenu que par une lettre du 1er mars 2004 adressée à l’ensemble des chefs d’établissements de la Moselle, LA POSTE leur a enjoint de retirer des bureaux de poste les dépliants publicitaires litigieux, que les chefs d’établissement des bureaux de poste de la Moselle ont, dans les premiers jours du mois de mars 2004, certifié ne plus laisser en libre-service les plaquettes litigieuses, que la CRCA ne produit aucune pièce telle que des constats d’huissiers postérieurs au jugement du 5 janvier 2004 venant à l’appui de ses allégations.

LA POSTE a interjeté appel de ces deux décisions. Les procédures ont été jointes selon ordonnance du conseiller de la mise en état du 6 avril 2006.

Dans ses dernières écritures signifiées et déposées le 12 septembre 2006, la BANQUE POSTALE, venant aux droits de LA POSTE a conclu à l’infirmation des décisions querellées, au débouté de la CRCAM de l’ensemble de ses prétentions. Elle demande à la Cour de lui donner acte de ce que les documents litigieux ont été retirés dès le 20 juin 2003, de condamner la CRCAM à lui payer la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’instance et d’appel. A titre infiniment subsidiaire, elle sollicite la réduction à un euro symbolique du montant des dommages-intérêts alloués à la CRCAM.

L’appelante estime que le raisonnement adopté par les premiers juges est erroné, observant que la CRCA n’a jamais précisé les caractéristiques de sa clientèle et son profil standard ni les modalités de facturation de la participation aux frais de gestion.

Elle soutient que les données figurant sur le site « testepourvous » sont exactes, que l’intimée ne rapporte pas la preuve de ce que la méthode de calcul utilisée lui serait défavorable, que les éléments chiffrés fournis par la CRCA ne permettent pas au consommateur de déterminer quel sera le coût réel des frais de gestion.

L’appelante rappelle par ailleurs qu’elle a donné l’ordre de retirer les brochures dès le 20 juin 2003, que cet ordre a été exécuté au début du mois de juillet 2003, que la CRCA ne produit aucun constat postérieur au 1er juillet 2003, que la demande d’astreinte était dépourvue de tout objet dès lors que le retrait sollicité était intervenu avant la signification de l’assignation, que s’agissant du département de la Moselle, le retrait a été fait suite au jugement du 5 janvier 2004.

Elle souligne justifier de ce retrait par une attestation complétée par chacun des chefs d’établissement des bureaux de poste de Meurthe et Moselle et l’ensemble des talons retournés par les chefs d’établissement des bureaux de poste de la Moselle.

L’appelante maintient n’avoir commis aucune faute ni méconnu les dispositions des articles L 121-1 et suivants du code de la consommation. Elle estime que :

  • la méthode publicitaire utilisée n’est pas déloyale puisque la publicité compare des services de même nature répondant à des mêmes besoins et ayant les mêmes objectifs,
  • la publicité est limitée à une comparaison objective puisque réalisée par un organisme extérieur et indépendant, se basant sur le coût de mêmes prestations facturées par différents établissements bancaires,
  • elle identifie clairement les concurrents qui fournissent les prestations,
  • la CRCA était elle-même en possession de tous les renseignements utiles dès le 4 juin 2003, fournis par la société EDITIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES CONSOMMATEURS FRANCE.

Elle ajoute que selon constat d’huissier établi le 6 avril 2004, la CRCA reste classée avant-dernière des banques les moins chères de sa région.

L’appelante expose ensuite que le préjudice allégué par la CRCA est inexistant, qu’elle reste classée par le site « testepourvous » en dernière position dans le classement des banques les moins chères. Elle ajoute qu’elle n’établit pas le dénigrement illicite dont elle prétend avoir été victime et soutient que dès lors que lorsqu’elle valide les modalités de calcul de la société EDITIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES CONSOMMATEURS France, elle reste en dernière position, il est établi que la publicité comparative litigieuse n’est pas illicite puisqu’elle ne fait que retracer la réalité.

Elle fait également valoir que l’intimée ne démontre pas avoir perdu des clients au profit de la POSTE du fait des renseignements figurant dans le document en cause. Elle précise que les bases de calcul du préjudice de la CRCA sont théoriques, qu’elle ne rapporte pas la preuve de l’existence de clients domiciliés dans le département des Vosges, alors que ce département relève de la CRCA ALSACE VOSGES qui n’est pas partie à la procédure. Elle demande par conséquent à la Cour, subsidiairement, de réduire les dommages-intérêts alloués par les premiers juges à un euro symbolique.

Dans ses dernières écritures signifiées et déposées le 5 avril 2006, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X a conclu à la confirmation des jugements entrepris en leurs dispositions ayant déclarée illicite la publicité comparative effectuée par la Poste dans les départements de Meurthe et Moselle, Meuse, Moselle et Vosges sur le fondement des dispositions des articles L 121-8 et suivants du code de la consommation. Sur son appel incident du jugement du 22 novembre 2004, elle demande la condamnation de la Poste à retirer et à cesser définitivement de diffuser les documents publicitaires litigieux mis à la disposition de ses clients dans les guichets du département de la Moselle et ce sous astreinte de 750 € par jour de retard.

Elle sollicite également la condamnation de la POSTE à lui payer la somme de 994.500 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par elle sur les départements de Meurthe et Moselle, Meuse, Moselle et Vosges en raison du dénigrement illicite ainsi qu’une indemnité de procédure de 5.000 € pour les frais d’appel, outre les dépens.

L’intimée rappelle qu’elle fonde ses prétentions sur les articles L 121-8 et L 121-12 du code de la consommation, rappelle que le tribunal a considéré, de façon très pertinente, que l’étude comparative à laquelle s’était livrée la société ESTC reprise par la Poste ne pouvait être qualifiée d’objective puisque les modalités de calcul pour la CRCA ne concernaient pas 200 opérations débitrices, contrairement aux autres établissements analysés, que ni l’éditeur du site ni LA POSTE n’avaient vérifié les conditions applicables à son tarif, disponible dans ses agences, alors que c’était la seule solution pour LA POSTE de pouvoir arguer de l’exactitude matérielle de la comparaison. Elle en conclut que l’étude réalisée était parfaitement approximative et dépourvue de rigueur, fondée sur un chiffre arbitraire d’opérations débitrices facturées sur une base forfaitaire inadéquate.

Elle précise que c’est à LA POSTE d’apporter la preuve, conformément aux dispositions de l’article L 121-12 du code de la consommation, de l’exactitude matérielle des informations qu’elle diffuse et ce dans un « bref délai », que LA POSTE a attendu plus de 6 semaines après les mises demeure pour apporter sa réponse, qu’elle a cependant succombé dans l’administration de la preuve dont la charge lui incombait.

Elle rappelle que 3 constats d’huissiers en date des 30 juin et 1er juillet 2003 démontrent que la publicité litigieuse n’a pas été retirée dès le 20 juin 2003, qu’en ce qui concerne le département de la Moselle, le retrait des plaquettes litigieuses n’a été fait qu’à la suite du jugement du 5 janvier 2004 relatif aux autres départements.

L’intimée maintient avoir subi un préjudice considérable, précise renoncer à demander la condamnation de l’appelante à communiquer le nombre de brochures diffusées et solliciter l’indemnisation de son préjudice définitif.

Elle soutient que le dénigrement dont elle a été victime a généré un trouble commercial important, son image ayant été durablement altérée par la comparaison illicite, que l’étendue de son préjudice doit être appréciée en tenant compte de l’importante diffusion de la brochure et de l’impact que la dévalorisation de son image aura dans le temps.

Elle précise qu’il résulte d’une jurisprudence constante que le préjudice subi par la victime du dénigrement doit être considéré comme présumé dès lors que ce dénigrement procède d’une publicité comparative illicite constitutive de concurrence déloyale, le juge du fond appréciant souverainement l’étendue de ce préjudice, constitué par le trouble commercial, et le montant de la réparation destinée à réparer ce préjudice.

Elle met en compte 10 € par exemplaire illicitement diffusé à raison de 30 brochures par mois et par guichet de LA POSTE, limité sur une durée de 6 mois soit 982.800 € pour les départements de la Meurthe et Moselle, Meuse et Moselle.

Son implantation commerciale étant 20 fois inférieure dans les Vosges que dans les autres départements, elle réclame à ce titre 11.700 € soit une indemnisation totale de 994.500 €.

La procédure a été clôturée suivant ordonnance du 1er décembre 2006.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il convient à titre liminaire de donner acte à la BANQUE POSTALE de ce qu’elle vient aux droits de LA POSTE en application des dispositions du paragraphe II.1 de l’article 16 de la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005.

Il sera ensuite rappelé qu’en application des dispositions de l’article L 121-12 du code de la consommation, la charge de la preuve du caractère licite de la publicité comparative réalisée appartient à l’appelante.

Il est constant que les informations contenues dans le dépliant diffusé par LA POSTE trouvent leur source dans le site internet « tetstepourvous.com », qui diffuse une étude réalisée par la société EDITIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES CONSOMMATEURS FRANCE (ESTC), qu’aux termes d’un courrier adressé par cette société à la CRCA le 4 juin 2003, il apparaît qu’aucune autorisation d’exploitation commerciale de cette étude n’a été ni sollicitée ni donnée à LA POSTE.

L’article L 121-8 du code de la consommation dispose que « toute publicité qui met en comparaison des biens ou des services en identifiant, implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou services offerts par un concurrent n’est licite que si :

1° elle n’est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur,

2° elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif,

3° elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie ».

Par ailleurs l’article L 121-12 du même code, déjà cité, précise que « l’annonceur pour le compte duquel la publicité comparative est diffusée doit être en mesure de prouver dans un bref délai l’exactitude matérielle des énonciations, indications et présentations contenues dans la publicité ». A cet égard, il sera observé que sommée par la CRCA de fournir ses sources les 2 et 20 juin 2003, LA POSTE n’a répondu que par courrier du 17 juillet 2003, en précisant que les informations provenaient du site internet « testepourvous.com », que sur ce site, le profil du consommateur y est clairement détaillé, les exploitants du site ayant tenu compte des frais mis en compte par chacun des établissements bancaires visés pour un certain nombre d’opérations identiques, que le site mentionne les opérations prises en compte au titre du consommateur type.

Le délai de réponse de LA POSTE , d’environ un mois, ne peut être considéré comme ayant été « bref » au sens de l’article précité.

Par ailleurs, il résulte des explications fournies par la société EDITIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES CONSOMMATEURS FRANCE, dans un courrier du 21 juillet 2003, qu’elle avait pris en compte les conditions tarifaires 2002 trouvées dans un dépliant édité par la CRCA DE X, que ce dépliant mentionne que la participation aux frais de gestion est par écriture, de 0,75 €, dans certains cas, selon le fonctionnement du compte (modalités d’application disponibles en agence), que faute de validation et d’informations plus précises de la part de la banque, elle avait interprété cette mention en divisant de son propre chef par deux le nombre d’opérations débitrices, pour calculer les frais de tenue de compte ayant servi de référence au classement des établissements bancaires de la région X.

Or, il est établi et non contesté que LA POSTE, au dos du dépliant publicitaire, a indiqué que le profil inclut « 200 opérations débitrices par an ».

Il apparaît ainsi que la comparaison ne peut être qualifiée d’objective au sens de l’article L 121-8 du code de la consommation puisque les modalités de calcul pour la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X ne concernent pas 200 opérations débitrices.

Le fait que pour l’édition 2003 de l’étude comparative et les éditions postérieures, la CRCA ait validé le calcul effectué par la société ESCT et qu’elle reste classée parmi les dernières des banques les moins chères de la région est sans emport sur le caractère illicite de la publicité comparative réalisée par LA POSTE, dans le dépliant litigieux, avec les tarifs 2002.

C’est par conséquent à bon droit que le premier juge a retenu le caractère illicite de la publicité comparative de LA POSTE. Le jugement du 5 janvier 2004 sera confirmé de ce chef. Il sera uniquement infirmé en ce qu’il a ordonné à LA POSTE, d’indiquer, justificatifs à l’appui, à la CRCA de X, dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement, le nombre d’exemplaires diffusés de la brochure publicitaire intitulée « gagnez jusqu’à 100 €/an » dans les départements de Meurthe et Moselle, de la Meuse et des Vosges, l’intimée renonçant à cette demande à hauteur de Cour.

Le jugement du 22 novembre 2004 sera confirmé sauf en ce qu’il a constaté que la demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X est devenue sans objet. La POSTE sera condamnée à retirer et à cesser définitivement de diffuser les documents publicitaires litigieux mis à la disposition de ses clients dans les guichets du département de la Moselle sous astreinte de 750 € par jour de retard, les allégations de LA POSTE relative à la cessation de diffusion de la brochure litigieuse étant insuffisamment établies, étant rappelé que la charge de la preuve pèse sur elle et non sur l’intimée comme elle le soutient.

Sur l’appel incident du CREDIT AGRICOLE quant à son préjudice, il sera relevé que l’intimée ne justifie pas de la défection et de la perte de clients à la suite de la diffusion par LA POSTE de la publicité litigieuse.

Par contre, le dénigrement résultant nécessairement d’une publicité comparative illicite est générateur d’un trouble commercial qui entraîne un préjudice. L’intimée s’est en effet trouvée victime d’informations inexactes de nature à porter atteinte à son image.

En l’espèce, le préjudice ainsi subi par la CRCA de X sera intégralement réparé par un montant de 30.000 €, dont à déduire la provision d’ores et déjà prononcée.

La CRCA de X se verra en outre allouer une indemnité de procédure de 1.500 €.

La BANQUE POSTALE, succombant en son appel, sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement,

Donne acte à LA BANQUE POSTALE de ce qu’elle vient aux droits de LA POSTE en application des dispositions du paragraphe II.1 de l’article 16 de la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 ;

Infirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY en date du 5 janvier 2004 uniquement en ce qu’il a ordonné à LA POSTE, d’indiquer, justificatifs à l’appui, à la CRCA de X, dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement, le nombre d’exemplaires diffusés de la brochure publicitaire intitulée « gagnez jusqu’à 100 €/an » dans les départements de Meurthe et Moselle, de la Meuse et des Vosges ;

Statuant à nouveau de ce seul chef :

Donne acte à la CAISSE REGIONALE AGRICOLE MUTUEL DE X de ce qu’elle renonce à cette prétention ;

Confirme le jugement querellé pour le surplus de ses dispositions ;

Infirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY en date du 22 novembre 2004 uniquement en ce qu’il a constaté que la demande de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X est devenue sans objet ;

Statuant à nouveau de ce seul chef :

Condamne LA POSTE à retirer et à cesser définitivement de diffuser les documents publicitaires litigieux mis à la disposition de ses clients dans les guichets du département de la Moselle sous astreinte de SEPT CENT CINQUANTE EUROS (750 €) par jour de retard ;

Confirme le jugement querellé pour le surplus de ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Condamne la BANQUE POSTALE à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X la somme de TRENTE MILLE EUROS (30.000 €) à titre de dommages-intérêts, dont à déduire la provision d’ores et déjà prononcée ;

Condamne la BANQUE POSTALE à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE X la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 €) au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne la BANQUE POSTALE aux dépens d’appel et autorise la SCP BONET LEINSTER WISNIEWSKI, avoués associés, à faire application des dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile ;

L’arrêt a été prononcé à l’audience publique du dix neuf Mars deux mille sept par Monsieur DORY, Président de la première chambre civile de la Cour d’Appel de NANCY, conformément à l’article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame ANTOINE, Adjoint Administratif faisant fonction de greffier.

Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.

Signé : O. ANTOINE.- Signé : G. DORY.-

Minute en douze pages.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Nancy, Première chambre civile, 19 mars 2007, n° 04/01030