Cour d'appel de Nancy, 9 janvier 2012, n° 10/02521

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nancy, 9 janv. 2012, n° 10/02521
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 10/02521
Décision précédente : Tribunal de grande instance, 4 août 2010, N° 07/01453

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D’APPEL DE NANCY

première chambre civile

ARRÊT N° /2012 DU 09 JANVIER 2012

Numéro d’inscription au répertoire général : 10/02521

Décision déférée à la Cour : Déclaration d’appel en date du 13 Septembre 2010 d’un jugement du Tribunal de Grande Instance de B, R.G.n° 07/01453, en date du 05 août 2010,

APPELANT :

Monsieur F A

né le XXX à XXX

Comparant et procédant par le ministère de la ssisté de la SCP LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON, avoués à la Cour, plaidant par Maître TISSOT, avocat au barreau de B,

INTIMÉ :

Monsieur H D

XXX – 54620 X,

Comparant et procédant par le ministére de la SCP VASSEUR Barbara, avoués à la Cour, plaidant par Maître Caroline PELAS-RENOIR substituant Maître CODAZZI, avocat au barreau de B,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 21 Novembre 2011, en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, entendu en son rapport,

Madame Marie Héléne DELTORT, Conseiller,

Madame Joëlle ROUBERTOU, Conseiller,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame DEANA ;

A l’issue des débats, le Président a annoncé que l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 09 Janvier 2012 , en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 09 Janvier 2012 , par Madame DEANA, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Madame DEANA , greffier ;


Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à


FAITS ET PROCÉDURE :

Madame E, veuve A, épouse D, est décédée le XXX, laissant pour lui succéder son fils F A et son second mari, Monsieur D ;

Par exploit d’huissier en date du 10 décembre 2007, Monsieur A a assigner Monsieur D devant le Tribunal de Grande Instance de B aux fins d’obtenir l’ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de la succession de sa mère, avec désignation de Maître C qui aura pour mission de dresser un inventaire ;

Monsieur D a indiqué qu’il acceptait l’ouverture de la succession et qu’il convenait d’exclure de la mission d’u notaire le prix de vente de l’immeuble cédée par la défunte le 25 mars 1986, le prix de vente du terrain cédé en 2004, le contrat d’assurance vie souscrit par la défunte, les capitaux reçus de la succession de son propre père et les meubles meublants réclamés ; il a aussi demandé que le notaire prenne en compte la donation effectuée à son profit portant sur l’usufruit de l’universalité des biens meubles et immeubles composant la succession de son épouse conformément à l’acte dressé le 26 juin 1985 ;

Par ordonnance sur incident du 2 novembre 2009, le Juge de la mise en état a débouté chacune des parties de leurs demandes tendant à la communication par les banques et assurances de l’existence de contrats d’assurance vie au nom de Monsieur D et Madame E ;

Monsieur D a exposé que son épouse avait disposé librement des liquidités provenant de la vente de ses biens propres ; il a ajouté que la totalité des avoirs financiers de Madame E avait été inventoriée par Maître Y dans le cadre de la déclaration de succession et qu’alors la mission que son beau fils souhaitait voir attribuer au notaire était invraisemblable ; il a soutenu qu’il se retrouvait dans la succession des sommes significativement supérieures au produit de la vente des biens propres de son épouse alors même que celle-ci disposait d’une retraite modeste ;

Il a sollicité la condamnation de Monsieur A à lui verser la somme de 3.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de ces accusations judiciaires mensongères ;

Monsieur A a conclu que les opérations financière réalisées sur les conseils de son beau père avaient eu pour conséquence de le priver de la succession de sa mère ; il a soutenu que sa mère lui avait dit qu’il existait un troisième contrat d’assurance vie et a demandé à Monsieur D de fournir les contrats d’assurance vie aux débats ; il a ajouté que Monsieur D avait dissimulé les fonds appartenant en propre à sa mère et que celle ci s’était retrouvée impuissante devant la volonté de son mari ;

Il a demandé qu’il soit enjoint aux banques et assurances de dire si elles disposaient de vontrats d’assurance vie aux noms de Monsieur D et Madame E et de communiquer leur historique ;

Par jugement en date du 5 août 2010, le Tribunal de Grande Instance de B a :

— dit n’y avoir lieu de consulter avant dire droit les organismes bancaires et d’assurance,

— ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de feue Madame E'

— commet pour y procéder Maître Y, notaire associé à LONGWY, et Madame Z, juge commissaire auquel il sera fait rapport en cas de difficultés, – dit qu’en cas d’empêchement du notaire ou du magistrat commis, il sera procédé à son remplacement par simple ordonnance, rendue d’office ou sur requête,

— dit que le notaire aura, notamment pour mission de réaliser l’inventaire de patrimoine de la défunte et de tenir compte de la donation entre époux établie par ses soins le 26 juin 1985,

— dit qu’il pourra également dans le cadre de sa mission, exercer toutes les investigations nécessaires auprès des organismes bancaires et des compagnies d’assurance,

— débouté Monsieur D de sa demande de dommages et intérêts,

— débouté chacun des parties de sa demande au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— dit que les dépens de la présente instance seront utilisés comme frais privilégiés de partage ;

Pour statuer ainsi, le Tribunal a essentiellement retenu qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur la demande avant dire droit tendant à la recherche d’informations auprès des banques et assurances formée par Monsieur A, puisque, dans son ordonnance du 2 novembre 2009, le Juge avait expressément rappelé qu’il n’avait pas à se substituer à la carence d’une des parties dans l’administration de la preuve qui lui incombe ;

Il a observé qu’aucune formulation expresse reprochant à Monsieur D d’avoir diverti ou recélé l’actif successoral, n’avait été faite et qu’il n’y avait pas lieu d’examiner ces prétentions hypothétiques ;

Monsieur A a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 13 septembre 2010 ;

A l’appui de son appel et dans ses dernières conclusions en date du 15 juin 2011, Monsieur A rappelle que les époux étaient mariés sous le régime de la communauté et que le notaire doit liquider la communauté avant d’établir le partage de la succession de Madame E ;

Il fait valoir que le notaire devait rechercher si le produit de la vente du bien propre de Madame E avait été déposé sur un compte joint ou non ; qu’il y a présomption d’emploi des fonds propres dans l’intérêt de la communauté de sorte que la communauté doit récompense à la défunte puisque le prix de vente aurait été versé sur un compte commun ;

Il ajoute qu’il appartient au notaire de rechercher ce qu’il est advenu de la somme de 12.021,75 € qui ne se retrouve sur aucune des comptes de la de cujus, de préciser si cette somme a profité à la communauté et, le cas échéant, de déterminer la récompense ;

Il considère que Monsieur D s’est rendu coupable de recel successoral ;

Au sujet des contrats d’assurances vie, il rappelle que, si les contrats souscrits par sa mère au profit de son mari, Monsieur D, ont été constitués par des primes dont le montant est manifestement exagéré eu égard aux facultés du contractant, ces primes doivent être rapportées à la succession ; il souligne que sa mère ne disposait que d’une très faible retraite ; il soutient que, pour apprécier le caractère excessif des cotisations d’assurances vie ou déterminer s’il y a lieu à récompense, il faut d’abord que les héritiers aient connaissance de l’existence des divers contrats souscrits par sa mère ; or, il explique que les héritiers doivent faire face au secret professionnel que leur opposent les assureurs ; il est donc nécessaire, selon lui, de donner pouvoir au notaire d’interroger les différentes sociétés d’assurances sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ;

Il ajoute que, du fait du décès de sa mère, un des contrats a nécessairement un autre bénéficiaire, un tiers, et que cela implique l’application de l’article 1437 du Code Civil ; il soutient alors que Monsieur D doit récompense à la succession ;

Par conséquent, Monsieur A demande à la Cour de :

— déclarer le concluant recevable et bien fondé en son appel, y faire droit,

— confirmer le jugement entrepris en ses dispositions ayant ordonné l’ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de feu Madame J E et dit que le notaire aura pour mission de réaliser l’inventaire du patrimoine de la défunte et exercer toutes les investigations nécessaires auprès des organismes bancaires et des compagnies d’assurances,

— le réformer cependant pour le surplus et statuant à nouveau :

— faire application à l’encontre du sieur D de la peine du recel successorel,

— donner pour mission au notaire chargé des opérations de partage de rechercher le sort du prix de la vente de l’immeuble propre de Madame E réalisée en 1986 en tenant compte de la présomption d’emploi des fonds propres dans l’intérêt de la communauté et le cas échéant, de déterminer la récompense due par la communauté à la de cujus,

— donner également pour mission au notaire de procéder à la même recherche en ce qui concerne la somme de 14.140 € provenant de la vente d’un immeuble propre à Madame E régularisée en 2004,

— donner pour mission également au notaire d’interroger la banque LCL, la BANQUE POSTALE’ La compagnie d’assurances AGF sans qu’il puisse se voir opposer le secret professionnel afin de rechercher quels ont été les contrats d’assurance vie qui ont été souscrits par Madame E au profit de Monsieur D en donnant leur historique complet et de rechercher les contrats qui ont pu être souscrits au nom de Monsieur D mais au moyen de fonds communs au profit de tiers bénéficiaires,

— condamner d’ores et déjà le sieur D à remettre au notaire avec copie à Monsieur A sous astreinte de 100 € par jour de retard, l’historique du contrat d’assurance-vie qu’il reconnaît avoir souscrit au profit de Madame E et l’identité de son bénéficiaire actuel,

— condamner le sieur D au paiement envers le concluant d’une indemnité de 3.000 e fondée sur les dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens tant de première instance que d’appel, ces derniers étant recouvrés directement par la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués associés à la Cour, et employés en frais privilégiés de partage ;

Dans ses dernières conclusions en date du 16 mars 2011, Monsieur D répond que son beau fils est uniquement nu propriétaire des biens dépendants de la succession de sa mère ;

Il rappelle qu’il est propriétaire pour moitié et bénéficie de l’usufruit sur l’autre moitié du domicile conjugal sis à X et que ce bien dépend alors de la succession pour la seule nue propriété ;

Il soutient que son épouse a librement disposé du produit de la cession de ses biens propres en faisant notamment un don à son fils ; que l’appelant ne peut ignorer avoir reçu ce don ; il fait valoir que son épouse a prêté 50.000 francs a sn fils pour qu’il acquiert une maison et que ce dernier l’a remboursée chaque mois en espèce ; il en déduit que Monsieur A ne peut alors pas ignorer l’utilisation faite par sa mère des fruits de la vente de ses biens propres ;

Il ajoute qu’il a financé le contrat d’assurance vie souscrit par la défunte et celui qu’il avait lui même souscrit par ses revenus personnels provenant de ses revenus professionnels constituant des biens propres ;

Il estime que les fonds qu’il a perçus au titre de l’assurance vie demeurent hors succession puisqu’ils ne constituent aucunement des placements excédent manifestement les facultés contributives de son épouse ; il soutient que la défunte ne possédait aucun compte auprès des services de la Poste, ni aux AGF ;

Par conséquent, Monsieur D demande à la Cour de :

— déclarer l’appel interjeté par Monsieur A mal fondé,

— l’en débouter,

— confirmer la décision dont appel,

— condamner Monsieur A à régler à Monsieur D la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— condamner Monsieur A en tous les dépens de première instance et d’appel dont distraction, pour ceux d’appel, au profit de la SCP VASSEUR, avoué associé à la Cour, en application des dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile ;

SUR CE :

Attendu qu’il est constant au vu des pièces produites que la de cujus a procédé à la vente de biens propres :

— le 25 mars 1986 une maison d’habitation sise à X pour un prix de 140.000 F (21.342,86 €),

— le 27 octobre 2004 un terrain à bâtir également situé à X au prix de 30.490 € ;

Que dans ces conditions Monsieur A est effectivement fondé à demander de rechercher le sort des sommes alors perçues par Madame E ; Attendu en ce qui concerne les contrats d’assurance-vie, que Monsieur A ne saurait en l’état d’inachèvement des opérations successorales demander l’application des dispositions relatives au recel successoral à l’encontre de l’intimé ; que cependant, il apparaît au vu des productions que Madame E avait souscrit un contrat 'lionvie’ auprès de la compagnie LCL assurances de personnes ; Qu’interrogé par l’appelant, le service 'clientèle’ de LCL assurances a, suivant courrier du 4 mars 2010, refusé 'dans un souci de confidentialité’ de donner tout renseignement sur ce contrat, étant précisé que celui-ci ne se confond pas avec un contrat d’assurance-vie LIONVIE PEP 3 n°SA 0032722 F réglé le 12 septembre 2005 (cf courrier de LCL assurances en date du 29 janvier 2010) ;

Que dans ces conditions, Monsieur A est également fondé, eu égard aux dispositions de l’article L 132-13 du Code des Assurances, a obtenir des renseignements sur le contrat précité et notamment les primes versées par la de cujus ;

Que d’autre part, Monsieur D a expressément reconnu (cf page 5 dernier paragraphe de ses conclusions du 16 mars 2011) qu’il avait souscrit un contrat d’assurance-vie alimenté par ses revenus personnels provenant de ses revenus professionnels 'constituant des biens propres’ (nonobstant l’application des dispositions de l’article 1401 du Code Civil) ;

Que par conséquent, il importe de savoir dans quelles conditions ledit contrat a été souscrit ; que Monsieur D devra remettre cet acte au notaire désigné, celui- ci ayant la faculté d’interroger l’ 'assureur’ sur le financement et le bénéficiaire actuel

;

Que le jugement sera complété en ce sens, observation étant faite que si le premier juge a dit n’y avoir lieu de consulter avant dire droit les organismes bancaires et d’assurance, il a cependant dit que le notaire pourrait dans le cadre de sa mission exercer toutes les investigations nécessaires auprès des organismes bancaires et des assurances ;

Qu’il n’y a pas lieu d’ordonner d’autres investigations sur des contrats dont l’existence n’est pas avérée ; qu’eu égard à la solution apportée au litige, chaque partie supportera ses propres dépens d’appel ;

Qu’il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du Code de Procédure Civile au profit de l’une ou l’autre des parties ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant ;

Dit que le notaire chargé des opérations successorales devra rechercher quel a été le sort des fonds provenant des deux ventes réalisées par Madame E en 1986 et 2004 ;

Dit que le notaire chargé des opérations successorales devra interroger LCL assurances sur le contrat 'LIONVIE’ souscrit par Madame E auprès de la LCL assurances de personnes ;

Ordonne à Monsieur D de communiquer au notaire le contrat d’assurance- vie souscrit par lui et ce à peine d’une astreinte de CENT EUROS (100 €) passé un délai de 8 jours suivant la signification du présent arrêt ;

Dit que le notaire pourra obtenir tout renseignement de la part de l’assureur ou organisme gérant ledit contrat ;

Rejette les autres demandes de Monsieur A ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

Dit que chaque partie supportera ses propres dépens d’appel ;

Le présent arrêt a été signé par Monsieur DORY, Président de la première Chambre Civile de la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame DEANA, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. DEANA.- Signé : G. DORY.-

Minute en huit pages.

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