Cour d'appel de Nancy, 25 novembre 2015, n° 14/02564

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nancy, 25 nov. 2015, n° 14/02564
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 14/02564
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Épinal, 30 juillet 2014, N° 13/00053

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N° PH

DU 25 NOVEMBRE 2015

R.G : 14/02564

C.R.W.

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’EPINAL

13/00053

31 juillet 2014

COUR D’APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :

FEDERATION DEPARTEMENTALE DES ASSOCATIONS ADMR DES VOSGES

prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

XXX

XXX

Représentée par Me Laurent BENTZ, avocat au barreau D’EPINAL

INTIMÉE :

X A

XXX

XXX

Représentée par Me Gaëlle MARCHAL, avocat au barreau D’EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : Christine ROBERT-WARNET, ,

Conseillers : Yannick BRISQUET ,

B C ,

Greffier lors des débats : Catherine REMOND

DÉBATS :

En audience publique du 06 Octobre 2015 ;

L’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu le 25 Novembre 2015 ;

Le 25 Novembre 2015, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

X A a été embauchée par la Fédération départementale des associations locales ADMR des Vosges dans le cadre d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi, à durée déterminée, à temps partiel, à raison de 26 heures hebdomadaires pour la période courant du 20 mars 2006 au 19 mars 2008, en qualité d’employée de bureau, catégorie B3 de la convention collective ADMR.

À compter du 20 mars 2008, les parties ont conclu un contrat de travail à durée indéterminée, à temps partiel, à raison de 26 heures de travail hebdomadaire pour la salariée exercer les fonctions administratives qui lui étaient confiées (recherche ' classement ' recherche ' documentation ' bureautique ' standard ' accueil ' gestion du planning du personnel d’intervention ' télégestion ' préparation de contrats de travail) « en lien et sous le contrôle et la responsabilité du Président de l’association locale. »

Le contrat prévoyait que les fonctions d’employée de bureau seront exercées dans les Maisons des Services ADMR de Saint Dié des Vosges, sous l’autorité du Directeur de la Fédération.

Suite à des problèmes rencontrés avec le nouveau Président de l’association locale, en la personne de Monsieur Y, arrivé à ce poste en octobre 2011, la Fédération, informée de cette situation en novembre 2011, a organisé le 15 novembre 2011 une réunion avec sa salariée aux termes de laquelle, dans l’attente de trouver une solution, X A a été placée en période de récupération, puis en absence autorisée, son salaire étant maintenu du 28 novembre au14 décembre 2011.

Compte tenu des indications de son employeur, X A s’est présentée le 15 décembre 2011 sur le site de l’association locale à Vittel où, par avenant au contrat de travail à effet du 1er janvier 2012, elle se trouvait affectée.

Il n’est pas contesté que l’association locale n’était pas informée de son arrivée, impliquant le déplacement sur un autre site de la secrétaire que devait remplacer X A. Celle-ci soutient que sa visite, le 15 décembre, légitime en ce qu’elle visait à découvrir ses futurs collègues et son nouveau lieu de travail, sans information préalable des membres de l’association, a contribué à ses difficultés d’intégration d’autant que l’importance des missions qui lui étaient confiées, s’agissant de la mise en place des nouveaux plannings de travail, au regard de la nouvelle convention collective la conduisait, alors qu’elle était seule à l’exécution de ces tâches, à mettre en place de nombreux changements générant mécontentement des clients et des salariés.

Compte tenu des pressions qu’elle subissait, caractérisant de nouveau un harcèlement moral (qu’elle avait précédemment subi à Saint Die des Vosges), X A a été placée en arrêt maladie à compter du 25 juin 2012.

Le 1° juillet 2012, la Fédération lui a adressé un avertissement, faisant suite à un courrier de rappel à l’ordre du 18 juin 2012, qu’a contesté la salariée.

Par courrier du 14 décembre 2012, X A a sollicité de son employeur la signature d’une rupture conventionnelle.

Ce document de rupture a été signé le 26 septembre 2012 à effet du 3 novembre 2012.

Soutenant avoir été victime de faits de harcèlement moral, privant de consentement éclairé la convention de rupture qu’elle a signée, X A a saisi, par requête enregistrée au greffe le 13 février 2013, le conseil de prud’hommes d’Épinal.

Aux termes de ses dernières écritures, elle prétendait à :

' l’annulation de l’avertissement,

' l’annulation de la convention de rupture, produisant les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

' la condamnation de l’ADMR des Vosges à lui payer, sous exécution provisoire, les sommes suivantes :

—  15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

—  15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour nullité de la rupture conventionnelle, produisant les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

outre intérêts au taux légal à compter du jugement

—  1200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

' la remise, par l’ADMR des Vosges, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours suivant la notification du jugement, d’une attestation Pôle Emploi, mentionnant la nullité de la rupture conventionnelle, produisant les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, le conseil de prud’hommes se réservant compétence pour liquider l’astreinte.

Par jugement du 31 juillet 2014, le conseil de prud’hommes d’Épinal a :

— condamné l’ADMR des Vosges à payer à X A :

. 11 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 4000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du harcèlement moral subi,

. 350 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

— ordonné le remboursement par l’ADMR des Vosges à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à X A, dans la limite de 14 jours d’indemnité,

— ordonné la remise par l’ADMR des Vosges à X A d’une attestation Pôle Emploi rectifiée, conforme aux termes du jugement,

— débouté les parties en leurs autres demandes.

La Fédération Départementale des Associations ADMR des Vosges a interjeté appel de cette décision le 11 septembre 2014.

Vu les conclusions parvenues au greffe le 22 juillet 2015, développées oralement à l’audience du 6 octobre 2015 à laquelle l’affaire a été retenue, par lesquelles la Fédération, sur le prêt de main-d''uvre évoqué par le conseil de prud’hommes à la barre, rappelle que celui-ci, intervenu dans un but non lucratif, est parfaitement légal dès lors que le salarié l’accepte, ce que concrétise le contrat de travail.

Contestant que X A ait fait l’objet de harcèlement moral, tant à Saint Dié des Vosges qu’à Vittel, elle sollicite de la cour l’infirmation du jugement déféré de ce chef mais aussi en ce que la rupture conventionnelle, à l’initiative de la salariée durant son arrêt maladie, est exempte de tout vice du consentement.

La Fédération Départementale des Associations Locales ADMR des Vosges prétend en conséquence au débouté de X A en toutes ses demandes, sollicitant sa condamnation au paiement d’une indemnité de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions parvenues au greffe le 30 juillet 2015, reprises à la barre par lesquelles X A sollicite la confirmation du jugement déféré, en ce qu’il a fait droit à sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral et pour rupture conventionnelle nulle, produisant les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, son infirmation quant aux sommes allouées, renouvelant ses demandes de la manière suivante :

—  15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

—  15 000 euros à titre d’indemnité pour rupture conventionnelle nulle produisant les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

—  1200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, en première instance,

outre intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir

— la remise, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours suivant notification de l’arrêt à intervenir d’une attestation Pôle Emploi mentionnant une rupture conventionnelle nulle produisant les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, la cour se réservant compétence pour liquider l’astreinte,

— l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

—  1800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile .

SUR CE

' Sur la nature du contrat de travail de X A

Ce débat, né d’une interrogation de la juridiction de première instance à la barre, ne suscite pas fondamentalement de litige entre les parties.

En effet, il n’est pas contesté que l’employeur de X A est la Fédération Départementale qui, disposant du pouvoir de direction et de sanction, a embauché X A, a mené les entretiens préalables à la signature de l’avenant au contrat de travail, signé la convention de rupture de ce contrat de travail mais aussi a pu rappeler à l’ordre sa salariée, selon courrier du 18 juin 2012, puis lui adresser un avertissement le 1er juillet 2012.

En l’absence de litige entre les parties, aucune ne formant une quelconque demande sur ce fondement, la cour ne peut constater qu’il n’y a pas lieu à trancher quoique ce soit de ce chef.

' Sur le harcèlement moral

Il résulte de la combinaison des dispositions de l’article L 1152 '1 et L 1154 ' 1 du code du travail qu’aucun salarié ne peut subir de faits répétés ayant pour objet ou pour effet d’engendrer une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte notamment à sa santé physique ou psychologique.

Il appartient au salarié, qui invoque être victime de faits de harcèlement moral, d’établir des faits qui, pris en leur ensemble, font présumer l’existence d’un harcèlement moral.

Au vu de ces faits établis, il incombe à l’employeur de justifier que les décisions qu’il a prises sont objectives, étrangères à toute notion de harcèlement moral.

En l’espèce, aux termes d’un courrier adressé à son employeur le 22 avril 2012, X A énonce des faits imputables à Monsieur Y, Président de l’association à Saint Dié des Vosges, constituant selon elle des faits de harcèlement.

Elle énonce ainsi :

' le réaménagement du bureau pour qu’elle ne reçoive plus de clientèle,

' la déstabilisation permanente,

' l’agression verbale,

' le refus de communication,

' les insultes devant des tiers et le dénigrement,

' la menace de mise au placard.

Toutefois, hors ses allégations, X A n’établit aucun fait susceptible de faire présumer l’existence d’un harcèlement moral.

Au contraire, le mail adressé le 9 novembre 2011 par Monsieur Y, Président de l’association locale, à l’employeur de cette dernière relate qu’aucune communication n’a été possible pour la semaine écoulée, celui-ci signalant que « de lundi à jeudi, X ne m’a pas adressé une seule fois la parole et vendredi, elle m’a agressé verbalement par 2 fois, une fois le matin en présence de Jeanine Tron et de Lydie Rémy et l’après-midi, me trouvant seul avec elle'.

Aucun harcèlement moral ne se trouve donc présumé sur la période où X A travaillait à l’antenne de Saint Dié des Vosges.

Il n’est pas contesté qu’au regard des difficultés relationnelles, évidentes entre le Président et la secrétaire du site de Saint Dié des Vosges, la Fédération a tenté de trouver une solution.

Ainsi, les parties convenaient de l’affectation de X A, à effet du 1er janvier 2012, sur le site de Vittel.

Il n’est pas contesté que ce changement de site est intervenu d’un commun accord et n’a jamais été considéré, par les parties, comme caractérisant une mutation disciplinaire.

L’embauche sur le site de Saint Dié des Vosges d’une salariée, en remplacement de X A, à effet de début décembre 2011 puis le départ au cours de ce même mois de Monsieur Y, sont insuffisants pour permettre à la salariée d’évoquer, dans ses écritures, que nonobstant le départ du Président, l’employeur ne l’avait pas réaffectée sur le poste de Saint Dié des Vosges, qu’elle occupait précédemment.

S’agissant de l’affectation de X A sur le site de Vittel, il n’est pas sérieusement contestable que son arrivée a pu être difficile puisqu’elle s’est présentée sur son nouveau site le lendemain de l’annonce faite par l’employeur de son affectation, avant même qu’une quelconque information soit diffusée sur le site, ce qu’a d’ailleurs contesté le Président de l’association locale auprès de la Fédération.

Si X A énonce avoir fait l’objet de faits de harcèlement moral sur ce site, il convient de souligner que son courrier du 22 avril 2012, aux termes duquel elle sollicite la prise en charge par son employeur des frais générés par son changement d’affectation de site, dans lequel elle dénonce les faits de harcèlement moral dont elle soutient avoir été victime à Saint Dié des Vosges, ne relate en revanche aucun fait susceptible de recevoir la qualification de harcèlement moral, sur le site de Vittel, alors que la salariée y est présente depuis le 1er janvier 2012.

S’il n’est pas contesté que ce nouveau poste nécessitait l’apprentissage, par la salariée, d’un nouveau ressort géographique, la découverte de nouveaux salariés, de nouveaux bénévoles, un investissement certain lié à la nécessaire mise en place de la nouvelle convention collective applicable, aucun élément afférent à la mésentente avec les bénévoles, avec les salariés, la surcharge et la difficulté des missions qui lui étaient confiées, ne permet de faire présumer l’existence d’un harcèlement moral, contrairement à ce que soutient X A.

Au contraire, les revendications du Président de l’association locale , les contestations émises par X A sur les demandes qui lui étaient formulées ont conduit l’employeur à lui adresser successivement, le 18 juin 2012, une lettre la rappelant à ses obligations contractuelles en termes d’insubordination puis, le 1er juillet 2012, un avertissement maintenu en dépit de la contestation opposée par la salariée.

Il se déduit des précédents développements qu’en l’absence de faits établis par la salariée, faisant présumer l’existence d’un harcèlement moral, la décision déférée sera infirmée qui, sur ce fondement, a condamné la Fédération Départementale des associations ADMR des Vosges à payer à X A la somme de 4000 euros à titre de dommages-intérêts.

Au contraire, X A sera déboutée en ce chef de demande.

' Sur la validité de la rupture conventionnelle

Il n’est pas contesté qu’en dépit de la suspension du contrat de travail du fait de l’arrêt maladie subi par X A, celle-ci a pu solliciter puis conclure valablement, avec son employeur, une rupture conventionnelle du contrat de travail.

Pour être valable, cette rupture conventionnelle suppose, particulièrement de la part du salarié, un consentement éclairé. Cette même rupture conventionnelle peut être annulée en cas de fraude.

Il incombe à la partie qui invoque un vice du consentement d’en rapporter la preuve.

Il résulte des précédents développements que X A n’établit pas la réalité du harcèlement moral qu’elle invoque à l’encontre de son employeur, qui aurait altéré son consentement à la demande, puis à la signature de la convention de rupture.

Bien que la demande formée par la salariée, visant à bénéficier d’une rupture conventionnelle, a été précédée d’un courrier, émanant d’un délégué syndical puis du médecin du travail énonçant cette possibilité puis probabilité, stigmatisant la réalité d’une réflexion, X A ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle aurait subi de quelconques pressions, caractéristiques des violences qu’elle énonce.

À défaut pour X A d’établir l’existence d’un vice du consentement qu’elle invoque, sans prétendre à l’existence d’une fraude, la décision déférée sera infirmée qui a prononcé la nullité de la rupture conventionnelle conclue entre les parties, produisant les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

' Sur les autres demandes

Compte tenu des termes de la présente décision, il y a lieu de condamner X A à payer à la Fédération Départementale des Associations ADMR des Vosges une indemnité de 300 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche, sur le même fondement, X A sera déboutée en sa demande.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant contradictoirement,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement prononcé par le conseil de prud’hommes d’Épinal le 31 juillet 2014.

STATUANT À NOUVEAU,

DÉBOUTE X A en l’ensemble de ses demandes.

CONDAMNE X A à payer à la Fédération Départementale des Associations ADMR des Vosges une indemnité de TROIS CENTS EUROS (300 euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE X A aux entiers dépens.

Ainsi prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Christine ROBERT-WARNET, Président, et Catherine REMOND, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

Minute en neuf pages

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