Cour d'appel de Nancy, 30 novembre 2016, n° 15/03057

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nancy, 30 nov. 2016, n° 15/03057
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 15/03057
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nancy, 18 octobre 2015, N° 2014/004697

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D’APPEL DE NANCY

CINQUIÈME CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT N° /16 DU 30 NOVEMBRE 2016

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/03057

Décision déférée à la Cour :
jugement du tribunal de Commerce de NANCY, R.G.n° 2014/ 004697, en date du 19 octobre 2015,

APPELANTE :

SCP PIERRE BRUART, mandataire judiciaire demeurant
XXX
MAXEVILLE

agissant qualité de « Mandataire liquidateur à la procédure de liquidation de la « SAS
ENTREPRISE MILANDRI FRERES », dont le siège était 2 bis avenue du Général de Gaulle 54 380 DIEULOUIARD, nommé à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Nancy le 05/11/13

représentée par Me Frederique MENEVEAU, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

SARL HATRIZE LOCATIONS prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié Route Départementale 613 – De la ChenoIs – 54800 HATRIZE, inscrite au Registre du
Commerce et des Sociétés de Briey sous le numéro 322 366 337

représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL
LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON
LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du
Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 19 Octobre 2016, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Claude SOIN, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Dominique LEHN, Président de
Chambre,

Monsieur Claude SOIN, Conseiller,

Madame Corinne BOUC, Conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Ali
ADJAL;

A l’issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 30 Novembre 2016, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

signé par Mme Dominique LEHN, Président et par M. Ali Adjal, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à


Vu l’appel du jugement rendu le 19 octobre 2015 par le tribunal de commerce de Nancy, régularisé le 16 novembre 2015 par la SCP Pierre Bruart, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SAS
Entreprise Milandri Frères, à l’encontre de la SARL
Hatrize Locations ;

Vu le jugement entrepris ;

Vu les dernières conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats (R.P.V.A.) le 24 juin 2016 par la SCP Pierre Bruart, ès-qualités, appelante ;

Vu les dernières conclusions notifiées par le
R.P.V.A. le 02 mai 2016 par la société Hatrize
Locations, intimée ;

Vu l’ordonnance du 29 juin 2016 ayant déclaré close l’instruction ;

Vu l’ensemble des éléments et pièces du dossier ;

EXPOSE DU LITIGE

Selon contrat du 15 juillet 2009, la société
Hatrize Locations et la société Entreprise Milandri
Frères ont conclu un contrat de location longue durée sans conducteur avec option prioritaire d’achat en fin de location, portant sur le véhicule Fruehauf immatriculé 260 AHS 54.

Par jugement du 05 novembre 2013, le tribunal de commerce de
Nancy a prononcé à l’encontre de la société Milandri Frères la conversion de la procédure de redressement judiciaire ouverte le 13 novembre 2012, en liquidation judiciaire et désigné la
SCP Pierre Bruart en qualité de liquidateur judiciaire.

Par lettre recommandée du 11 décembre 2013 avec demande d’accusé réception, la société
Hatrize
Locations a revendiqué en vain auprès de la SCP Pierre
Bruart, ès-qualités, le matériel donné à bail.

Saisi par la société Hatrize Locations d’une requête en revendication du véhicule, datée du 27 janvier 2014, le juge-commissaire a rejeté la demande du loueur.

La société Hatrize Locations ayant formé opposition le 11 mars 2014 à l’encontre de l’ordonnance, le tribunal de commerce de Nancy a par jugement du 19 octobre 2015 :

— déclaré la société Hatrize Locations recevable et bien fondée en son opposition à l’ordonnance du juge-commissaire du 27 janvier 2014,

— annulé en conséquence ladite ordonnance,

— statuant à nouveau, ordonné la restitution du véhicule Fruehauf immatriculé 26 AHS 54, sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard à compter de 10 jours postérieurement à la signification du jugement,

— dit qu’à défaut de restitution dans un délai de trois mois, il pourra être de nouveau statué sur l’astreinte,

— s’est réservé la liquidation de l’astreinte,

— condamné la SCP Pierre Bruart, ès-qualités, à payer la somme de 3 805,27 euros pour la période du 05 novembre 2013 au 31 décembre 2014, et la somme de 275,08 euros à compter du 1er janvier 2015 jusqu’à la date de restitution du véhicule,

— condamné la SCP Pierre Bruart, ès-qualités, à payer à la société Hatrize Locations la somme de 1 500,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire,

— ordonné l’emploi des dépens en frais privilégié de procédure collective.

La SCP Pierre Bruart, ès-qualités, a interjeté appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 24 juin 2016, elle demande à la cour, au visa des articles
L 624-9 et R 624-13 du code de commerce, L 622-13 et R 622-21 du même code, d’infirmer le jugement et statuant à nouveau, de constater à titre principal que le loueur n’a pas revendiqué dans le délai légal auprès de l’administrateur judiciaire, de dire en conséquence qu’il ne pouvait saisir le juge-commissaire de sa demande de revendication et de le déclarer irrecevable en son opposition et en sa demande de revendication.

A titre subsidiaire, l’appelante demande à la cour de constater que la société Hatrize Locations ne justifie pas d’une déclaration de sa créance au passif de la société Entreprise Milandri Frères, dire et juger que ni le juge-commissaire ni le tribunal de commerce statuant sur le recours d’une ordonnance du juge-commissaire n’ont compétence pour condamner le liquidateur à l’indemnité réclamée, et débouter en conséquence la société Hatrize
Locations de sa demande de condamnation.

A titre plus subsidiaire, la SCP Pierre Bruart demande à la cour de :

— constater que l’article 44 du contrat en litige limite la période d’indemnisation du loueur,

— infirmer en conséquence le jugement en ce qu’il l’a condamnée, ès-qualités, à payer les sommes de 3 805,27 euros et 275,08 euros à compter du 1er janvier 2015 jusqu’à la date de restitution du véhicule,

— dire et juger qu’aucune indemnisation ne saurait être due avant le 1er décembre 2013, ni après le 15 juillet 2014 et que c’est donc tout au plus une somme de 3 988,66 euros qui devrait être fixée au passif.

A titre encore plus subsidiaire, elle demande à la cour d’analyser l’article 44 du contrat en une clause pénale et de réduire la demande de la société
Hatrize Locations à de plus justes proportions.

En tout état de cause, elle conclut au débouté de la société Hatrize Locations de l’ensemble de ses prétentions et notamment de sa demande de condamnation à une astreinte, à l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a condamnée, ès-qualités, à payer à la société Hatrize Locations la somme de 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et à la condamnation de la partie adverse à lui payer, ès-qualités, la somme de 2 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre la condamnation de l’intimée aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 02 mai 2016, la société Hatrize Locations demande à la cour de débouter l’appelante de l’ensemble de ses prétentions, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement et de condamner la SCP Pierre Bruart, ès-qualités, à lui payer la somme de 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre la condamnation de cette dernière aux dépens, qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur la recevabilité de l’opposition

Il convient de constater en premier lieu qu’en cause d’appel, la SCP Pierre Bruart, ès-qualités, a acquiescé à la qualification retenue par les premiers juges pour le contrat ayant lié la société
Hatrize
Locations et la société Entreprise Milandri Frères, admettant ainsi que ce contrat est un contrat de location simple et non pas un contrat de crédit-bail.

Néanmoins, la SCP Pierre Bruart maintient en appel le moyen pris de l’irrecevabilité de l’opposition au motif du non respect par la société Hatrize Locations, des dispositions de l’article L 624-9 du code de commerce.

Il résulte de l’article précité que la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure, l’article R 624-13 précisant en outre que :

— la demande en revendication doit être adressée dans ce délai, par lettre recommandée avec demande d’accusé réception, à l’administrateur s’il en a été désigné, ou à défaut, au débiteur, avec copie au mandataire judiciaire,

— à défaut d’acquiescement dans le délai d’un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans le délai d’un mois à compter de l’expiration du délai de réponse.

En l’espèce, il est constant que la société
Hatrize Locations n’a pas revendiqué, dans le délai de trois mois de l’article L 624-9, le matériel en litige auprès de la SCP Bayle Chanel, administrateur judiciaire de la société Entreprise Milandri Frères désigné par le jugement d’ouverture du 13 novembre 2012, publié le 27 novembre 2012.

Toutefois, il ressort des débats, conclusions et pièces versées au dossier et notamment des lettres adressées par la SCP Bayle Chanel au débiteur, datées des 10 septembre, 16 et 21 octobre 2016, que le contrat de location de matériel s’est poursuivi entre les parties, postérieurement à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

En exécutant les prestations du contrat, l’administrateur a donc opté, en application des dispositions de l’article L 622-13 du code de commerce, pour la poursuite du contrat, et cette continuation impliquait reconnaissance du droit de propriété du bailleur sur le matériel loué. En considération de la poursuite du contrat, la société Hatrize Locations n’avait donc pas lieu d’exercer l’action en revendication préalable, prévue à l’article L 624-9.

Le jugement doit en conséquence être confirmé, en ce qu’il a déclaré recevable l’opposition formée par la société Hatrize Locations, à l’encontre de l’ordonnance du juge-commissaire du 27 février 2014.

Par ailleurs, il est établi que le preneur ne s’est pas acquitté du paiement des loyers, postérieurement à la poursuite du contrat, en dépit des lettres de relance adressées les 02 septembre et 08 octobre 2013, tant au débiteur qu’à l’administrateur judiciaire.

Dès lors, c’est à bon droit que par lettre recommandée du 13 mars 2013, avec demande d’accusé réception, la société Hatrize Locations, sur le fondement de l’article L 622-13 III 1°du code de commerce, a constaté que l’administrateur n’a pas fourni la prestation promise au cocontractant du débiteur (le paiement des loyers), précisé ne plus être d’accord pour poursuivre la relation contractuelle, notifié en conséquence à l’administrateur judiciaire la résiliation de plein droit du contrat de location et formé concomitamment, au visa des articles 42 et 43 du contrat de location, une demande de restitution du matériel.

En l’absence de restitution à ce jour par la SCP Pierre
Bruart, en sa qualité de liquidateur judiciaire, du véhicule, il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a annulé l’ordonnance frappée d’opposition et en ce qu’il a condamné la SCP Pierre Bruart, ès-qualités, à restituer au loueur le véhicule Fruehauf objet du litige.

Aucune considération particulière ne commandant d’assortir la condamnation d’une astreinte, le jugement doit être infirmé sur ce point.

Sur l’indemnité de résiliation

Au soutien de sa demande de confirmation du jugement, la société Hatrize Locations expose que la résiliation du contrat de location emporte obligation pour le preneur puis, compte tenu du dessaisissement de la société débitrice résultant de la liquidation judiciaire, obligation pour le liquidateur judiciaire de procéder à la remise du véhicule au loueur.

Elle ajoute qu’en l’absence de restitution, liée au défaut de respect des stipulations contractuelles, l’immobilisation du matériel a engendré pour elle un préjudice incontestable, sujet à réparation.

Certes l’article 44 alinéa 1 du contrat de location stipule qu’en cas de résiliation anticipée du contrat pour l’un des motifs visés à l’article 42 (résiliation de plein droit du fait et aux torts du locataire en cas de défaut de règlement), le locataire s’engage à verser au loueur une indemnité égale à la moitié du montant des forfaits de location restant à courir entre la date de résiliation anticipée et la date d’échéance normale du contrat, le second alinéa précisant que si le locataire interrompt son activité, notamment en cas de liquidation, l’indemnité due est calculée de la même manière à partir du premier jour suivant la dernière facturation du matériel par le loueur.

Il ressort cependant des dispositions de l’article R 622-21 alinéa 2 du code de commerce que les cocontractants mentionnés à l’article L 622-13 (contrats en cours à la date d’ouverture de la procédure collective) bénéficient d’un délai d’un mois, à compter de la date de résiliation de plein droit, pour déclarer au passif la créance résultant de cette résiliation.

En l’espèce, il est constant que la société
Hatrize Locations n’a pas procédé à cette formalité.

En conséquence, le jugement doit être infirmé en ce qu’il a condamné la SCP Pierre Bruart, ès-qualités, à payer la somme de 3 805,27 euros pour la période du 05 novembre 2013 au 31 décembre 2014, et la somme de 275,08 euros à compter du 1er janvier 2015 jusqu’à la date de restitution du véhicule.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être confirmé dans ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.

L’appelante, partie perdante pour l’essentiel, doit supporter les dépens qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile.

L’intimée ayant exposé des frais irrépétibles afin de faire valoir ses droits, il convient de lui allouer la somme de 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sans que la partie adverse puisse prétendre à une telle indemnité.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement prononcé le 19 octobre 2015 par le tribunal de commerce de Nancy, sauf en ce qu’il a déclaré la société Hatrize Locations recevable et bien fondée en son opposition à l’ordonnance du juge-commissaire du 27 janvier 2014, sauf en ce qu’il a annulé ladite ordonnance,

Statuant à nouveau,

ORDONNE la restitution par la SCP Pierre Bruart, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Entreprise Milandri Frères, à la société Hatrize Locations, du véhicule Fruehauf immatriculé 26 AHS 54,

DIT n’y avoir lieu à astreinte,

DECLARE irrecevable la demande de condamnation de la
SCP Pierre Bruart, ès-qualités, à payer à la société Hatrize Locations une indemnité, en réparation du défaut de restitution du matériel,

CONFIRME le jugement pour le surplus et dans ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance,

Y ajoutant,

FIXE à 1 500,00 euros (mille cinq cents euros) la somme due par la SCP Pierre Bruard, ès-qualités, à la société Hatrize
Locations, au titre des frais irrépétibles d’appel,

DEBOUTE la SCP Pierre Bruard, ès-qualités, de ce chef de demandes.

CONDAMNE la SCP Pierre Bruard, ès-qualités, à payer les dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame Dominique LEHN, Président de chambre à la Cour d’Appel de NANCY, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Minute en six pages.

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