Cour d'appel de Papeete, Chambre civile, 9 mai 2019, n° 18/00508

  • Consorts·
  • Séquestre·
  • Loyer·
  • Bail·
  • Locataire·
  • Sociétés·
  • Adoption·
  • Décès·
  • Action·
  • Propriété

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Papeete, ch. civ., 9 mai 2019, n° 18/00508
Juridiction : Cour d'appel de Papeete
Numéro(s) : 18/00508
Décision précédente : Cour d'appel de Papeete, 5 décembre 2018, N° 467;18/00473
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Sur les parties

Texte intégral

199

CL

--------------

Copies exécutoires

délivrées à :

— Me Usang,

— Me Quinquis,

le 09.05.2019.

Copie authentique

délivrée à :

— Me L. Barle,

le 09.05.2019.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 9 mai 2019

RG 18/00508 ;

Décision déférée à la Cour : arrêt n° 467, rg n° 18/00473 de la Cour d’Appel de Papeete du 6 décembre 2018 ;

Sur requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 10 décembre 2018 ;

Demanderesse :

La Sas Centre Vaima, société par actions simplifiées, immatriculée au Rcs n° 935 B, n° Tahiti 894030, dont le siège social est sis à […], […], représentée par son Président ;

Représentée par Me Arcus USANG, avocat au barreau de Papeete et Me Mathieu HANAUT, avocat au barreau de Paris ;

Défendeurs :

Monsieur M E F, né le […] à […] demeurant à […]

Monsieur Q S E F, né le […] à […]

[…]

Représentés par Me U-Claude LOLLICHON-BARLE, avocat au barreau de Papeete ;

La Société I Building Corporation, dont le siège social est sis à […], prise en la personne de son gérant, M. Y Z ;

Représentée par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 31 janvier 2019, devant Mme LEVY, conseiller faisant fonction de présidente, M. GELPI, conseiller, Mme TISSOT, vice-présidente placée auprès du premier président, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme N-O ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par Mme LEVY, présidente et par Mme N-O, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

Rappel des faits et de la procédure :

Par ordonnance du 7 novembre 2018, la Présidente du tribunal de première instance de Papeete a rejeté la requête de Monsieur M T E F et de Monsieur Q S E F aux fins de placement sous séquestre du centre VAIMA, sols, bâtiments et loyers.

Par arrêt du 6 décembre 2018, non contradictoire, signifié à la SAS Centre VAIMA le 7 décembre 2018, la cour d’appel de Papeete a :

— infirmé l’ordonnance rendue le 7 novembre 2018 par la Présidente du tribunal de première instance de Papeete,

— désigné Me U-V A, mandataire de justice avec mission de :

* établir la liste des occupants du centre commercial VAIMA sise à Papeete et celle des baux dont ils sont titulaires,

* leur notifier le présent arrêt, ainsi qu’aux bailleurs et sous bailleurs,

* percevoir les loyers auprès de chaque locataire et sous-locataire, et de tous locataires et sous-locataires futurs, au lieu et place du bailleur,

* déposer les dits loyers sur un compte spécial ouvert la caisse des dépôts et consignations à Papeete,

* payer les charges et impôts dont le bailleur est débiteur.

et dit que la cour a la faculté de modifier ou de rétracter son arrêt.

Par arrêt du 20 décembre 2018, la cour d’appel de Papeete a précisé la mission donnée à Me U-V A, dans l’arrêt du 6 décembre 2018 en précisant qu’il n’avait pas pour mission de payer les échéances des emprunts en capital et intérêts contractés auprès des établissements bancaires pour l’acquisition du centre VAIMA par la SAS CENTRE VAIMA et le financement des investissements successifs.

Par requête enregistrée au greffe le 10 décembre 2018, et par conclusions récapitulatives du 25 octobre 2019, auxquelles il convient expressément de se référer pour plus ample exposé des prétentions et moyens soutenus, la SAS CENTRE VAIMA demande à la cour de :

'1/ Sur l’élection de domicile :

— Constater que les consorts E F demeurent en Californie et n’ont procédé à aucune élection de domicile en violation de l’article 296 alinéa 4 du code de procédure civile ;

— Prononcer la forclusion de l’appel en date du 15 novembre 2018 ;

2/ Sur l’irrecevabilité des demandes au regard du fondement procédural :

— Constater que la cour d’appel a statué ultra petita en visant l’article 438 du code de procédure civile et les mesures conservatoires tirés de l’article 720 du code de procédure civile ;

— Constater que la requête d’appel a limité sa demande sur le fondement de l’article 196l-2 du Code Civil et de l’article 295 du code de procédure civile de la Polynésie française,

— Constater que l’arrêt du 6 décembre 2018 a motivé en droit sa décision sur le fondement de l’article 438 du code de procédure civile ;

— Constater l’absence de circonstance qui 'exige’ la dérogation au principe du contradictoire ;

— Constater que la SAS CENTRE VAIMA a été prive du principe du double degré de juridiction ;

— Constater qu"il n’existe pas de circonstance qui rend impossible l’identification de la partie adverse ;

— Constater que les consorts E F ont signifié l’arrêt du 6 décembre 2018 à la SAS CENTRE VAIMA dès le 7 décembre 2018 à 11 H 04 le lendemain de la délivrance de l’arrêt du 6 décembre 2018 à leur conseil ;

— Constater que les consorts E F représentés par leur conseil étaient partie à l’instance ayant abouti à l’arrêt du 20 septembre 2018 et ont bien assisté à la première réunion contradictoire d’expertise du 8 novembre 2018 à 10 heures dans la salle du conseil de Perdre des avocats ;

— Constater que tous les commercants locataires ne sont pas des parties adverses au sens de l’article 438 du code de procédure civile ;

3/ Sur le litige entre les consorts E F et la SCI BBC :

— Constater que Monsieur R P I D a fait un apport de sa parcelle de terre à la societé BBC le 20 novembre 1958 en échange de parts sociales ;

— Constater que la SAS CENTRE VAIMA est constructeur de bonne foi en vertu d’un bail de

location du 22 novembre 1974 de la parcelle de terre qui accueille les constructions pour une valeur de 34 940 000 FCP ;

— Constater que la propriété ou la possession litigieuse se situe au niveau des parts sociales de la SCI I BUILDING CORPORATION ;

— Constater que le litige est impossible entre les consorts E F et la SAS CENTRE VAIMA ;

4/ Sur l’absence de propriété ou de possession litigieuse des loyers entre la SAS CENTRE VAIMA et les consorts E F :

— Constater que la demande de séquestre des consorts E F est fondée sur l’article 1961 du code civil ;

— Constater qu’il n’existe aucun litige entre les consorts E F et la SAS CENTRE VAIMA ni sur la propriété, ni la possession des loyers commerciaux qui sont versés par chacun des commerçants à la SAS CENTRE VAIMA en vertu d’un contrat de bail commercial ;

— Constater qu’en vertu des articles 1134 et 1165 du code civil, les consorts E F ne peuvent être partie au contrat de bail ;

5/ Sur l’absence de créance paraissant fondée en son principe et l’absence d’urgence entre les consorts E F et la SAS CENTRE VAIMA :

— Constater qu’il n’existe aucune créance paraissant fondée en son principe compte tenu de la 'mesure conservatoire’ qualifiée par la cour d’appel dans son arrêt du 6 décembre 2018 ;

— Constater l’absence d’urgence ou de péril ;

EN CONSEQUENCE :

. Ordonner la rétractation de l’arrêt du 6 décembre 2018 de la cour d’appel de Papeete en toutes ses dispositions ;

. Dire n’y avoir lieu à séquestre des loyers auprès de l’administrateur séquestre dont la désignation sera annulée ;

. Ordonner le séquestre des loyers que la SAS CENTRE VAIMA verse à la SCI I BUILDING CORPORATION pour la location de la parcelle de terre sur laquelle est construit le 'Centre Bloc Vaima’ ;

. Condamner les consorts E F à payer à la SAS CENTRE VAIMA la somme de 600 000 FCP au titre des frais irrépétibles ;

. Condamner les consorts E F aux dépens.'

La SAS CENTRE VAIMA fait valoir à titre préliminaire que les consorts E F sont forclos en leur appel du 15 novembre 2018, n’ayant procédé à aucune élection de domicile conformément aux dispositions de l’article 296 alinéa 4 du code de procédure civile.

Elle soutient que la cour d’appel a statué ultra petita en motivant sa décision sur le fondement de l’article 438 du code de procédure civile et en ordonnant des mesures conservatoires sur le fondement de l’article 720 du code de procédure civile alors que, dans le dispositif de leur demande,

les consorts E F se fondaient sur la procédure issue de l’article 295 du code de procédure civile ; que les requérants n’ont pas démontré en quoi ils seraient fondés à ne pas appeler la partie adverse ; qu’aucune circonstance ne justifie la dérogation au principe du contradictoire qui induit la violation du principe du double degré de juridiction ; que le défaut de signification de la requête d’appel et de la requête de première instance avec ses pièces, outre de l’ordonnance de rejet du 7 novembre 2018, lui porte atteinte en sa qualité de propriétaire des loyers versés, n’ayant pu utilement se défendre en présence d’une décision qui affecte à titre principal son patrimoine et la prive totalement de ses ressources et de son chiffre d’affaires, l’exposant à une liquidation judiciaire certaine.

Elle ajoute qu’il n’existe pas de circonstances rendant impossible l’identification de la partie adverse d’autant que, d’une part, tous les commerçants locataires ne sont pas des parties adverses au sens de l’article 438 du code de procédure civile, et que d’autre part les consorts E F lui ont signifié dès le 7 décembre 2018, l’arrêt du 6 décembre 2018, ce qui démontre leur connaissance parfaite de la partie adverse.

Elle expose successivement que, par acte sous-seing privé du 8 mars 1974 à Papeete et du 17 mars 1974 à Paris, la société I BUILDING CORPORATION (BBC) a donné à bail à la SA SPDT devenue SAS CENTRE VAIMA, sans changement de personne morale, pour une durée de 11 années entières et consécutives, renouvelable huit fois pour des périodes identiques, à la faculté du preneur seul, une parcelle de terre d’une superficie de 8000 m² connus sous le nom de «Bloc VAIMA» ; qu’elle est devenue propriétaire de bonne foi des constructions et n’a aucun litige avec les consorts E F ; qu’il n’existe aucun litige sérieux sur les loyers commerciaux entre les consorts E F in personae et la SAS CENTRE VAIMA, dès lors que Monsieur R P I D, décédé aux droits desquels viendraient les consorts E F, était propriétaire de la parcelle sur laquelle a été construite le centre VAIMA ; que la seule revendication possible par les consorts E F concerne les parts sociales de Monsieur R P I D puisqu’il résulte des statuts de la SCI BBC, créée le 20 décembre 1958, que ce dernier, associé de H Z, avait fait le même jour un apport de la parcelle de terre précitée à la société BBC.

La SAS CENTRE VAIMA prétend qu’il n’existe aucun litige sur la propriété, ni sur la possession des loyers commerciaux qui lui sont versés par chacun des commerçants, en vertu d’un contrat de bail commercial, ce qui empêche à l’évidence les consorts E F de toute revendication sur les loyers versés par les locataires des boutiques à la SAS CENTRE VAIMA ; que de plus, il n’existe aucune créance fondée en son principe justifiant la décision prise par la cour d’appel qui est en réalité une saisie conservatoire, exposant la requérante à une issue économique catastrophique.

Par conclusions rectificatives et récapitulatives d’intervention volontaire du 17 janvier 2019, la société I BUILDING CORPORATION (BBC) demande à la cour de :

'Faire droit à l’intervention volontaire de la Société I BUILDING CORPORATION et la dire recevable,

Vu les arrêts de la Cour d’Appel de Papeete des 7 décembre 1989, 7 mai 1997 et 23 novembre 2004,

Vu les articles 1351 et 1961 de Code Civil,

Vu les articles 295 et 438 du Code de Procédure Civile,

Dire n’v avoir lieu à la procédure non contradictoire dite d’ordonnance à pied de requête,

Constater l’apport par M. I D à la société I BUILDING CORPORATION du terrain dit du Centre Vaima à Papeete, l’action en annulation de celui-ci ayant été définitivement

jugée.

Constater à cet égard l’autorité de la chose jugée de l’arrêt du 7 décembre 1989, rappelée par arrêt du 7 mai 1997.

Dire et juger que cet apport étant antérieur au décès de M. I D, le terrain dit du Centre Vaima et les actions de la société BBC n’étaient plus dans le patrimoine successoral à la date dudit décès, à l’exception de 1.000 actions léguées aux consorts X.

Dire et juger que celles-ci ont été régulièrement acquises par M. Y

Z, père.

Dire que la survenance d’une adoption à titre posthume 29 ans après ce décès et bien plus de 30 ans après l’apport en société (délai de prescription) est dépourvue de toute incidence sur cette sortie de patrimoine avant décès.

Constater que le terrain et les constructions y édifiées sont la propriété de la société BBC et l’absence de tout litige sérieux sur ce droit de propriété.

Constater qu’il a été jugé définitivement que les actions aux fins de fictivité de la société BBC et de nullité des actes de transfert de la propriété des actions étaient soient prescrites, soient non fondées.

En conséquence, ordonner la levée du séquestre prononcée par l’arrêt de la Cour d’Appel de Papeete du 8 décembre 2018 et rétracter celui-ci en toutes ses dispositions.

Débouter les consorts E F de toutes prétentions contraires.

Vu le caractère abusif de la demande de placement sous séquestre, en ce qu’elle a sciemment occulté l’existence de décisions de justice antérieures.

Statuer ce que de droit sur une éventuelle amende civile.

Condamner les consorts E F au versement d’une somme de 5.000.000 FCP de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi notamment de crédibilité auprès des organismes bancaires.

Condamner les consorts E F au versement d’une somme de 1.000.000 FCP au titre des frais irrépétibles.

Condamner les consorts E F aux dépens dont distraction au profit de la SELARL JURISPOL.

Sous toutes réserves – Et ce sera justice.'

Elle rappelle que, selon acte sous-seing privé en date du 28 février 1959, P I D, propriétaire du sol sur lequel est édifié un centre commercial dans le centre de la ville de Papeete, a fait don de ses actions au sein de la société I BUILDING CORPORATION (BBC), et ce au profit de certains membres de la famille Z ; qu’en dépit des termes de l’acte suscité, deux assemblées générales de la société BBC, tenues les 7 février et 5 juillet 1961, ont constaté le transfert progressif des actions de P I D au profit des consorts Z ; que, sur autorisation délivrée par le tribunal de première instance de Papeete le 28 février 1969, les 1000 actions des consorts X, qu’ils possédaient à titre de légataires particuliers, ont été vendues aux enchères et acquises par Y Z, de sorte qu’à la

date du décès de ce dernier, soit le 12 mars 1962, les actions détenues par P I D dans le capital de la société BBC étaient sorties de son patrimoine, à l’exception des 1000 actions appartenant aux consorts X, régulièrement acquises par Y Z.

Elle ajoute qu 'avant son décès, P I D avait entamé une action judiciaire tendant à l’adoption de sa nièce W B, adoption validée après sa mort, par jugement du 11 décembre 1991 auquel le légataire universel de I D n’était pas appelé, par le tribunal de première instance de Papeete ; que, par arrêt du 28 juin 2018, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre un arrêt du 18 juin 2016 de la cour d’appel de Papeete déclarant irrecevable l’arrêt formé par Monsieur Y Z.

Elle indique aussi que, par arrêt du 18 novembre 2004, la cour d’appel de Papeete a confirmé un jugement du tribunal de première instance du 16 février 2004 en ce qu’il a déclaré prescrite l’action tendant au constat de la fictivité de la société BBC et à l’annulation des actes en date des 28 février 1959, 7 février et 5 juillet 1961, et ordonné la mainlevée du séquestre des actions de la société BBC ; que de plus, par arrêt du 20 septembre 2018, la cour d’appel de Papeete, statuant sur la fixation du nouveau loyer du bail renouvelé, a rejeté l’intervention au débat des consorts E F en rappelant qu’ils n’étaient pas parties au contrat de bail.

La société I BUILDING CORPORATION (BBC) conteste la décision du 6 décembre 2018 en ce que la cour a fondé sa décision sur les dispositions de l’article 438 du code de procédure civile sans caractériser l’urgence d’une mesure de séquestre s’inscrivant dans un contentieux de près de 60 ans.

Elle soutient que les consorts E F qui fondent leur action sur l’article 295 du code de procédure civile, peuvent, contrairement à leurs dires, tout à fait connaître l’identité des locataires du centre VAIMA, en demandant la liste au bailleur actuel ; qu’en l’absence de litige, les locataires ne peuvent être qualifiés de partie adverse au sens de l’article 438 du du code de procédure civile.

Elle ajoute qu’elle est propriétaire du bien immobilier querellé, comme le confirment les nombreuses décisions rendues en ce sens, et versées aux débats (arrêts du 7 mai 1997 et du 18 novembre 2014) qui ont autorité de la chose jugée ; que le jugement d’adoption posthume du 11 décembre 1991 est indifférent quant au droit de propriété du centre VAIMA, et des actions de la société propriétaire qui étaient sorties du patrimoine de M. I D à son décès, ou régulièrement acquises sur autorisation judiciaire.

Par conclusions récapitulatives du 23 janvier 2019 auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens soutenus, les consorts E F demandent à la cour de :

'Par déboutement de toutes demandes et conclusions contraires,

Constater que 'la BBC’ est dissoute de plein droit depuis le 12 mars 1962 et que sa demande de rétractation est de ce seul chef irrecevable.

Constater que les frères E J se présentent en qualité d’héritiers de feue leur mère, W B I D, adoptée par feu P I D, et produisent un jugement d’adoption posthume du 11 décembre 1991 ainsi que la justification des décisions de rejet des recours ayant, depuis 1991, été introduits contre ladite adoption, la dernière en date étant l’arrêt de la Cour de Cassation du 28 juin 2018 rejetant le pourvoi formé contre l’arrêt de la Cour d’appel de Papeete en date du 18 août 2016 qui a déclaré irrecevable l’appel dudit jugement d’adoption ;

Constater qu’ils se prétendent propriétaires du sol du terrain du Centre VAIMA et des constructions y établies, ceci en vertu du jugement d’adoption, de la saisine de plein droit de l’héritière au jour du

décès de son auteur (12 mars 1962), et de l’accession ; en vertu de la dissolution de plein droit de ladite société au jour du décès et du principe de reprise des apports en nature ; en vertu du caractère fictif, déjà jugé, de la société I BUILDING CORPORATION que le défunt avait constituée ; en vertu du caractère douteux et dénié (articles 1323 et 1324 du Code Civil) de la signature de I D sur des actes sous seing privé (28 février 1959) dont la qualification reste à effectuer (testament ' donation ') ; en vertu de la nullité de cet acte pour violation des formes (article 970 Code Civil) à le considérer comme un testament ; en vertu de l’article 931 du Code Civil et de l’article 960 ancien du Code Civil à le considérer comme une donation ; et à défaut de tradition des titres avant le

décès ;

Constater quant au bail contracté en 1974, qu’ils prétendent que celui-ci est nul, ayant été consenti, non par le Gérant mais de surcroît par des associés qui ne l’étaient pas (associés) ; que cette nullité procède par ailleurs, selon eux toujours, de l’absence des autorisations administratives préalables requises ce qui entraînerait selon eux deux causes de nullité absolue et d’ordre public ; que la Sas Centre VAIMA n’a pu prendre à bail un immeuble appartenant à une société dissoute de plein droit depuis 1962, de surcroît sur la base d’un bail nul de nullité absolue et d’ordre public ; que l’accession

est encourue.

Constater que dès lors les conditions de fond de l’application d’un séquestre sont démontrées, le litige étant à considérer sérieux.

Constater que les requérants ont, à juste titre, présumé que les loyers d’une centaine de locaux à usage commercial et d’habitation sont payables mensuellement par des locataires dont ils ignorent la liste, encore à ce jour, les locaux occupés, les baux et les sommes payées ; qu’ils n’ont en l’état aucun droit ni possibilité ou capacité hors par le canal d’un administrateur séquestre, de procéder contre des inconnus de manière contradictoire ; que d’importantes déperditions de loyers sont à craindre.

Confirmer le placement sous séquestre du Centre VAIMA, sol et bâtiments et des loyers produits par ceux-ci, selon toutes les modalités déjà fixées dans l’arrêt du 6 décembre 2018 quant a la mission confiée a Monsieur A.

Dire n’y avoir lieu à rétractation.

Condamner la Sas Centre VAIMA à payer 551 M et Q E F la somme de 200 000 FCFP au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens, et dire n’y avoir lieu à condamner de ce chef la prétendue BBC, dont l’existence et la dissolution demeurent en débat.

[…].'

En préliminaire, ils font observer qu’ils ont, le 11 décembre 2018 élu régulièrement domicile en Polynésie française, au cabinet de leur conseil.

Au fond, les consorts E F prétendent essentiellement qu’ils sont, de part le jugement définitif d’adoption posthume du 11 décembre 1991, les héritiers de feue leur mére, W B I D, adoptée par feu P I D, et propriétaires du sol du terrain du centre VAIMA et des constructions y établies, en vertu de ce jugement, de la saisine de plein droit de l’héritière au jour du décès de son auteur (12 mars 1962), et de l’accession.

Ils soulèvent sur le fond la nullité de l’ensemble des actes découlant du caractère fictif de la société I BUILDING CORPORATION ainsi que la nullité du bail contracté en 1974 qui auraient été consentis non par le gérant mais par des associés qui ne l’étaient pas et en l’absence des autorisations

administratives préalables requises, en indiquant que les arrêts des 7 décembre 1989 et 18 novembre 2004 ne leur sont pas opposables du fait que leur mère, enfant adoptée, a les mêmes droits que ceux d’un enfant légitime depuis l’arrêt de la Cour de cassation du 28 juin 2018, ce qui modifie son intérêt à agir, étant considérée jusqu’à présent uniquement comme légataire particulière de P I D.

Ils ajoutent qu’ils ignorent qui sont les locataires des locaux d’habitation et des locaux commerciaux du centre VAIMA et qu’il existe un litige sérieux sur la propriété justifiant le séquestre ordonné par la cour d’appel, dans sa décision du 6 décembre 2018 ; que la SAS VAIMA, venant aux droits de la SPDT, ne peut invoquer la théorie de l’apparence et sa bonne foi pour se voir reconnaître la qualité de preneuse ne pouvant ignorer qu’à l’époque de la souscription du bail, le «bloc VAIMA» provenait d’une succession «d’une notoriété publique», «douteuse et alimentant même la spéculation», et qu’il existait un conflit notoirement connu du microcosme polynésien sur la succession de P I D au vu de sa fortune immobilière considérable, W B étant considérée comme la fille adoptive de ce dernier ; que les nouveaux associés de la SAS Centre VAIMA ont investi en connaissance de cause, spécialement son président, Monsieur C, déjà associé dans la SPDT, et ses associés locaux qui n’ont pu ignorer la notoriété du conflit pas plus que son existence et son contenu, relayés régulièrement par la presse depuis le 28 septembre 1987.

Motifs :

En préliminaire, contrairement aux dires de l’appelante, les consorts E F ont procédé à l’élection de domicile au cabinet de leur conseil dans leur requête du 15 novembre 2018, conformément aux dispositions de l’article 296 du code de procédure civile local.

En conséquence, la SAS Centre VAIMA sera déboutée de sa demande tendant à voir prononcer la forclusion de l’appel en date du 15 novembre 2018.

Le litige soumis à la cour porte sur le séquestre du centre VAIMA et subséquemment des loyers versés par des locataires de baux commerciaux à la SAS Centre VAIMA, ordonné par la cour d’appel de Papeete, dans son arrêt du 6 décembre 2018, à la demande des consorts E F et sur la procédure choisie par ces derniers à cette fin.

Il résulte des pièces versées aux débats que, par bail authentique du 22 novembre 1974, Y Z, K Z et L Z, en qualité d’associés de la société BBC ont donné à bail à la Société Polynésienne de Développement Touristique (SPDT), aux droits de laquelle vient la SAS VAIMA, un terrain sis à Papeete d’une superficie de 8000 m² environ dénommé Bloc Vaima, ainsi que les constructions édifiées sur ce terrain, toutes affectées à usage commercial et destinées à être démolies en vue de la reconstruction générale de l’îlot.

Il est aussi indiqué dans ce bail que la société SPDT a reçu la faculté de procéder sur le terrain loué à toute construction ou démolition qui, à l’expiration du bail, appartiendront de plein droit à la société BBC ou à ses ayants droit à titre d’accession, sans aucune indemnité à la charge de celle-ci.

A l’issue d’une dizaine d’années de procédure, il est constant que le c’ur du litige porte essentiellement sur la propriété du centre VAIMA, au travers des aléas de la succession de M R P I- D, ce qui conduit la cour à en déduire que, dans la meilleure hypothèse, seuls les loyers versés par la SAS VAIMA à la BBC auraient pu faire l’objet d’un séquestre par les consorts E F.

En effet, il ne peut être contesté que la contrepartie des loyers versés à la SAS VAIMA par ses locataires, objets du séquestre, provient uniquement des constructions qu’elle a réalisées au titre du bail précité, les locataires des locaux commerciaux du centre VAIMA étant des tiers au contrat liant la SCI BBC et la SAS CENTRE VAIMA, et en aucun cas des parties adverses au sens des

dispositions de l’article 438 du code de procédure civile local.

De plus, par arrêt du 20 septembre 2018, la chambre commerciale de cour d’appel de Papeete, statuant sur la fixation du nouveau loyer du bail renouvelé entre la SCI BBC et la SAS CENTRE VAIMA a rejeté l’intervention au débat des consorts E F en rappelant qu’ils n’étaient pas parties au contrat de bail liant la SCI BBC à la SAS VAIMA.

En conséquence, et au vu de ces développements, des éléments sérieux de contestation repris dans les moyens développés par les parties dans la présente instance et des décisions de justice définitives versées aux débats, qui ont tranché une partie des points soulevés par les consorts E F, il convient de rétracter l’arrêt du 6 décembre 2018, le débat contradictoire étant indispensable, la forme procédurale choisie par les consorts E F par le biais d’une ordonnance de requête n’étant pas adaptée, et d’ordonner la mainlevée du séquestre des loyers du centre VAIMA, ordonné par l’arrêt précité.

La SAS CENTRE VAIMA sera déboutée de sa demande non justifiée tendant à voir ordonner le séquestre des loyers qu’elle verse à la SCI BBC pour la location de la parcelle de terre sur laquelle est construit le «Centre Bloc VAIMA».

La société BBC, qui n’évoque pas un préjudice qu’elle aurait subi du fait du non paiement des loyers par la SAS CENTRE VAIMA , suite au séquestre ordonné des loyers de cette dernière, sera déboutée de sa demande faite à titre de dommages-intérêts, ainsi que de sa demande faite au titre de l’amende civile, l’appel ayant été formé par la SAS CENTRE VAIMA , et non par les consorts E F.

Il sera fait application des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile au bénéfice de la société BBC, de la SAS CENTRE VAIMA.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Déboute la SAS Centre VAIMA de sa demande tendant à voir prononcer la forclusion de l’appel interjeté le 15 novembre 2018 par les consorts E F à l’encontre de l’ordonnance en date du 7 novembre 2018 ;

Ordonne la rétractation de l’arrêt du 6 décembre 2018 rendu par la cour d’appel de Papeete en toutes ses dispositions ;

Ordonne la mainlevée du séquestre des loyers prononcé par l’arrêt du 6 décembre 2018 auprès de l’administrateur séquestre dont la désignation est annulée ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne les consorts E F à payer à la SAS CENTRE VAIMA et à la SCI I BUILDING CORPORATION la somme de 500 000 FCP à chacune, au titre des frais irrépétibles ;

Condamne les consorts E F aux entiers dépens.

Prononcé à Papeete, le 9 mai 2019.

Le Greffier, La Présidente,

signé : M. N-O signé : C. LEVY

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Papeete, Chambre civile, 9 mai 2019, n° 18/00508