Cour d'appel de Paris, 30 janvier 2008, n° 06/15554

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 30 janv. 2008, n° 06/15554
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 06/15554
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 5 avril 2006, N° 05/00737

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

16e Chambre – Section A

ARRET DU 30 JANVIER 2008

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 06/15554

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Avril 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 05/00737

APPELANTE

SCI B C agissant poursuites et diligences de son gérant Mme D E épouse X

XXX

XXX

représentée par la SCP FISSELIER – CHILOUX – BOULAY, avoués à la Cour

assistée de Me Sébastien MAHUT plaidant et intervenant en tant que collaborateur de la SCP A.K.P.R. avocat au barreau de Créteil, PC 112

INTIMEE

SARL FUN KIWI 2

XXX

XXX

représentée par la SCP BAUFUME – GALLAND – VIGNES, avoués à la Cour

assistée de Me Alain DELESTRE, avocat au barreau de PARIS, toque : P 489

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 octobre 2007, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame GABORIAU, Présidente, chargé du rapport.

Madame GABORIAU a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame GABORIAU, Présidente

Madame IMBAUD-CONTENT, Conseiller

Monsieur PEYRON, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Y.

ARRÊT :

— contradictoire,

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.

— signé par Madame GABORIAU, Présidente, et par Madame Y, greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*************

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Cour statue sur l’appel interjeté par la Sci B C du jugement rendu le 6 avril 2006 par le Tribunal de grande instance de Paris qui a :

' Dit que le local dont s’agit consiste en un local accessoire non soumis à l’obligation d’immatriculation complémentaire au registre du commerce,

' Dit que le congé sans offre de renouvellement délivré le 6 août 2004 par la SCI B C à la Sarl FUN KIWI 2 a mis fin à compter du 31 mars 2005 au bail du 20 mai 1998 portant sur les locaux situés XXX,

' Dit que ledit congé ayant été délivré sans motif légitime de refus de paiement d’une indemnité d’éviction, celle-ci est due par la SCI B C à la SARL FUN KIWI 2 sur la totalité du fonds exploité à cette adresse et impasse Truillot,

' Avant dire droit au fond sur le montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à cet égard, désigné en qualité d’expert monsieur F G, avec mission :

— de se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission,

— visiter les lieux, les décrire, dresser le cas échéant la liste du personnel employé par le locataire,

— rechercher, en tenant compte de la nature des activités professionnelles autorisées par le bail, de la situation et de l’état des locaux, tous éléments permettant :

— de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction dans le cas :

.d’une perte de fonds : valeur marchande déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, des frais et droits de mutation afférents à la cession de fonds d’importance identique, de la réparation du trouble commercial,

.de la possibilité d’un transfert de fonds, sans perte conséquente de clientèle, et, en tout état de cause, le coût d’un tel transfert, comprenant : acquisition d’un titre locatif ayant les mêmes avantages que l’ancien, frais et doits de mutation, frais de déménagement et de réinstallation, réparation du trouble commercial,

      • d’apprécier si l’éviction entraînera la perte du fonds ou son transfert,
      • de déterminer le montant de l’indemnité due par le locataire pour l’occupation des lieux, objet du bail depuis le 31 mars 2005 jusqu’à leur libération effective,

à titre de renseignement, dire si, à son avis, le loyer aurait été ou non plafonné en cas de renouvellement du bail et préciser, en ce cas, le montant du lover calculé en fonction des indices qui aurait été applicable à la date d’effet du congé,

' Ordonné l’exécution provisoire.

Référence faite aux énonciations de cette décision pour l’exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties et aux dernières conclusions signifiées le 3 octobre 2007 par l’appelante la SCI B C et le 26 septembre 2007 par l’intimée la SARL FUN KIWI 2 en ce qui concerne leurs prétentions actuelles et les moyens invoqués,

Rappel des faits et de la procédure antérieure


¿ suivant acte enregistré le 20 mai 1998, les époux Z, aux droits desquels vient la SCI JUI C, ont donné à bail à la Société FUN KIWI 2 pour une durée de neuf ans à compter du 1er Avril 1996 et jusqu’au 31 mars 2005, un local sur cour à usage commercial situé XXX

¿ le local loué avait pour destination 'tout commerce de confection de détail, gros et demi-gros, de prêt à porter, de bijoux, de maroquinerie, mercerie, parfumerie, gadgets, chaussures, articles d’ameublement, de sport, de bureaux, d’ateliers’ ;

¿ la Société FUN KIWI 2 a utilisé ce local d’abord comme atelier de coupe puis comme réserve d’une boutique sur rue, exploitée dans le même immeuble, dont elle est locataire auprès d’un autre propriétaire ;

¿ par acte d’huissier en date du 6 août 2004, la Sci B C a délivré un congé avec refus de renouvellement sans indemnité d’éviction avec effet au 31 mars 2005, au motif que la Société FUN KIWI 2 n’a pas procédé à l’immatriculation au registre du commerce de ce local ;

¿ par acte du 26 novembre 2004, la Sarl FUN KIWI 2 a fait citer la Sci B C en nullité de ce congé ;

¿ le jugement critiqué, tout en reconnaissant le droit pour le bailleur de délivrer congé, a dit que celui-ci avait été délivré sans motif légitimant le refus de paiement d’une indemnité d’éviction, dès lors que ce local, qui n’a aucune exploitation commerciale distincte de la boutique sur rue, n’était pas soumis à une obligation d’immatriculation complémentaire au registre du commerce ;

¿ il a, en outre, dit que l’indemnité d’éviction était due sur la totalité du fonds exploité au 91 rue Voltaire ainsi que sur un local à usage d’atelier et de réserve situé XXX.

Prétentions des parties


L’appelante la SCI B C demande à la Cour :

  • d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau,
  • à titre principal de dire que le congé sans offre de renouvellement et sans indemnité d’éviction est valide,
  • à titre subsidiaire de dire que l’indemnité d’éviction et son assiette ne peuvent porter que sur le local en cause, et de modifier en conséquence la mission de l’expert,
  • en tout état de cause de condamner la Société FUN KIWI 2 :

— à payer une somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

— aux dépens.

Elle fait valoir que si le local est actuellement à usage de dépôt, il ne peut être contesté que sa destination, à l’origine, était l’exploitation d’un commerce, et que la société FUN KIWI 2, qui a violé ses obligations contractuelles en ne respectant pas la destination du fonds de commerce, et qui n’a pas procédé aux formalités d’inscription du local, ne peut bénéficier du statut des baux commerciaux.

Elle observe, ensuite, que le local en cause n’appartient pas au même bailleur que la boutique sur rue, que la société FUN KIWI 2 ne démontre pas, alors qu’elle dispose d’un autre lieu de stockage au 8, impasse TRUILLOT, que sa suppression entraînerait un risque de nature à compromettre l’exploitation de l’activité, et que celle-ci reste dès lors hors du champ d’application du statut des baux commerciaux.

L’intimée la SARL FUN KIWI 2 demande à la Cour de confirmer le jugement et de condamner la SCI B C à payer une somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens.

Elle fait valoir que le local en cause est accessoire au fonds de commerce exploité sur rue, que la destination indiquée dans le bail importe peu dès lors que la situation géographique dans l’immeuble empêche l’exploitation d’un vrai fonds de commerce autonome de vente de prêt à porter et textiles, le local n’étant pas accessible à la clientèle.

Elle ajoute que la restitution du local entraînerait l’obligation de trouver un autre lieu de stockage, ce qui entraînerait, nécessairement, des frais nouveaux et compromettrait l’exploitation du commerce sur rue.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le cadre juridique

Article L145-9 du code de commerce

'Par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux soumis aux dispositions du présent chapitre ne cessent que par l’effet d’un congé donné suivant les usages locaux et au moins six mois à l’avance.(…)

Le congé doit être donné par acte extrajudiciaire. Il doit, à peine de nullité, préciser les motifs pour lesquels il est donné et indiquer que le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d’une indemnité d’éviction, doit, à peine de forclusion, saisir le tribunal avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné.'

Article L145-14 du code de commerce

'Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d’éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.

Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.'

Article L145-17 du Code de commerce

I. – Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d’aucune indemnité :

1º S’il justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du locataire sortant. Toutefois, s’il s’agit soit de l’inexécution d’une obligation, soit de la cessation sans raison sérieuse et légitime de l’exploitation du fonds, compte tenu des dispositions de l’article L. 145-8, l’infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s’est poursuivie ou renouvelée plus d’un mois après mise en demeure du bailleur d’avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire les termes du présent alinéa ;

Discussion

Seuls les commandements d’avoir à respecter une obligation, comme il est dit à l’article précité, peuvent provoquer la privation d’indemnité, à condition que l’infraction n’ait pas cessé dans le mois qui l’a suivi. Seules les infractions irréversibles ou instantanées, peuvent avoir le même effet sans mise en demeure préalable.

Le congé visait l’absence d’immatriculation qui n’est pas un manquement contractuel devant faire l’objet d’une mise en demeure préalable mais une cause objective de dénégation du droit au statut des baux commerciaux, et partant du droit au renouvellement, pour défaut d’une des conditions essentielles du statut. En l’absence d’une telle immatriculation, exigée par l’article L. 145-1 du Code de commerce, le bail sort du régime des baux commerciaux pour être soumis au régime de droit commun du Code civil, dépourvu du droit au renouvellement.

Le local, peut n’être point immatriculé s’il caractérise un local accessoire, les locaux correspondant aux établissements secondaires étant, seuls, soumis à l’obligation d’immatriculation. Pour être considéré comme tel le local en cause doit appartenir au propriétaire du local principal qui est, alors, censé connaître l’utilisation qui est faite du 'local accessoire'.

Si, comme en l’espèce, il appartient à un propriétaire différent, le locataire doit rapporter la preuve que le bailleur savait que la location du local accessoire était faite en vu de son utilisation jointe au local principal. Cette connaissance doit avoir existé au moment de la formation du bail mais une simple connaissance de fait suffit, à charge pour le locataire de l’ établir.

En outre, la seule connaissance par le bailleur de l’utilisation jointe du local accessoire ne dispense pas le preneur de rapporter la preuve de son caractère indispensable, les deux conditions étant cumulatives.

Or, la destination figurant au bail contredit toute caractéristique de local accessoire, une activité commerciale y étant expressément et précisément prévue. La SARL FUN KIWI 2 ne rapporte pas la preuve, lui incombant, que le bailleur avait la connaissance de cette affectation prétendument accessoire, la simple allégation selon laquelle 'il était clair que le local donné à bail par les époux A serait une annexe du point de vente sur rue et non pas l’inverse’ ne pouvant tenir lieu de preuve.

Dans l’hypothèse contraire avancée par la SARL FUN KIWI 2, où l’activité pratiquée serait conforme à la destination contractuelle en ce que 'tout commerce de confection…' ne signifierait pas vente, 'laquelle serait impossible au regard de l’exiguïté du local', 'le fait de stocker des produits textiles destinés à la vente immédiate et d’y préparer les commandes’entrant, selon la SARL FUN KIWI 2 parfaitement dans la destination contractuelle, le local étant de surcroît, 'également utilisé en tant qu’atelier tel que stipulé dans le bail.', le preneur se trouverait, alors, dans l’obligation de justifier, à la date du congé, de l’immatriculation du local, celui-ci ayant cette activité commerciale. Dès lors, la décision entreprise doit être réformée.

Sur les autres demandes

La SARL FUN KIWI 2 qui succombe en ses prétentions sera condamnée aux entiers dépens de l’appel.

La nécessité d’apaiser les relations entre les parties commandent de ne pas allouer de somme en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant en dernier ressort :

I. Réformant la décision entreprise et statuant à nouveau,

Dit que le congé, relatif au local situé XXX, sans offre de renouvellement et sans indemnité d’éviction est valide,

II. Dit n’y avoir lieu à allocation, en cause d’appel, d’une somme en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,

III. Condamne la SARL FUN KIWI 2 aux dépens d’appel et autorise sur sa demande, la SCP.FISSELIER CHILOUX BOULAY à recouvrer directement contre la SARL FUN KIWI 2 ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

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Cour d'appel de Paris, 30 janvier 2008, n° 06/15554