CA Paris du 16 janvier 2008 n° 04/19840 , ch. 16 A

  • Asie·
  • Supermarché·
  • Indemnité d'éviction·
  • Valeur·
  • Fonds de commerce·
  • Chiffre d'affaires·
  • Indemnité d 'occupation·
  • Recette·
  • Expert·
  • Banque populaire

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, ch. 16 a, 16 janv. 2008, n° 04/19840
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 04/19840
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 28 juin 2004, N° 00/03610

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

16e Chambre – Section A

ARRET DU 16 JANVIER 2008

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 04/19840

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juin 2004 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n°00/03610

APPELANTE

S.A.R.L. SUPERMARCHE D’ASIE, agissant en la personne de son gérant en exercice, Monsieur Z E F, domicilié en cette qualité au siège social situé

XXX

XXX

représentée par Me C D, avoué à la Cour

assistée de Me Anne D’ANDIGNE-MORAND plaidant pour la SCP ZURFLUH – LEBATTEUX, avocat au barreau de PARIS, toque P 154

INTIMEE

S.A. COOPERATIVE BANQUE POPULAIRE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DE LA REGION SUD DE PARIS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP B – LESENECHAL, avoués à la Cour

assistée de Me Mireille MARCHI substituant Me Jean-Paul PETRESCHI, avocat au barreau de PARIS, toque B 283

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 octobre 2007, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. X, Conseiller, chargé du rapport

M. X a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme GABORIAU, Présidente

Mme IMBAUD-CONTENT, Conseiller

M. X, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Y

ARRET :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau code de procédure civile

Signé par Mme GABORIAU, Présidente, et par Mme Y, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

I- Exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties

Par acte du 2 mai 1991, les époux Z, aux droits desquels vient la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris (BPIC), représentée par la société TANG Frères en vertu d’un contrat de crédit-bail immobilier du 6 mai 1999, a consenti à bail d’exploitation d’un fonds de commerce de vente de produits alimentaires exotiques, sans alcool, à la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE, divers locaux commerciaux situés XXX à Paris 75013, moyennant un loyer annuel de 240 000 francs.

Le 28 octobre 1999, la BPIC a donné congé avec offre d’indemnité d’éviction à la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE pour le 1er mai 2000.

Par un jugement rendu le 21 novembre 2000, le Tribunal de grande instance de Paris a validé le congé à effet du 1er mai 2000 et, avant dire droit sur le montant des indemnités d’éviction et d’occupation, ordonné une expertise.

*

L’expert M. A a déposé son rapport le 25 juillet 2003.

Il estime l’emplacement favorable au commerce exercé, situé non loin du carrefour formé par l’avenue d’Ivry, l’XXX, en plein coeur d’un quartier spécialisé dans les commerces asiatiques, notamment restaurants et magasins d’alimentation.

Après avoir déterminé une surface pondérée de 286 m² (pour une surface réelle de 391 m²), une valeur locative de 228,67 €/m² et un abattement pour précarité de 10%, il propose une indemnité d’occupation annuelle de 58 860 € arrondie à 58 000 € à compter du 1er mai 2000.

En ce qui concerne l’indemnité d’éviction, l’expert, après avoir observé que l’éviction entraînera la perte du fonds de commerce compte tenu de la quasi-impossibilité de trouver, à proximité immédiate, un local équivalent, note que l’indemnité sera dès lors déterminée par la valeur la plus élevée du fonds de commerce ou du droit au bail.

Ayant relevé que l’activité de la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE se répartit entre la vente de fruits et légumes pour environ 90% et l’épicerie sèche pour 10%, et que son chiffre d’affaires moyen sur les exercices 2000 à 2002 est de 1 563 895 €, il observe que suivant les usages de la profession, la valeur du fonds de commerce peut être évaluée soit à 35% du chiffre d’affaires, soit à 120 fois la recette journalière de fruits et légumes plus 100 fois la recette journalière d’épicerie, ce qui le conduit :

  • dans le premier cas à une indemnité de 547 360 €,
  • dans le second à une indemnité de 576 680 €,
  • en tenant compte des deux méthodes à une valeur vénale totale de 560 000 €.

Ayant évalué le droit au bail à 252 580 €, il retient comme indemnité principale la valeur la plus élevée, soit 560 000 €.

En ce qui concerne les indemnités accessoires, il retient :

  • des frais de remploi représentant 8% de la valeur du fonds de commerce, soit 44 800 €,
  • un trouble commercial estimé, selon les usages, à trois mois de bénéfices au 31 décembre 2002, soit 22 250 €,
  • des frais administratifs pour 1 700 €,
  • une perte sur stock estimée au quart de la valeur du stock au 31 décembre 2002, soit 8 250 €,
  • soit au total 77 000 €.

Il propose dès lors une indemnité d’éviction de 560 000 € + 77 000 € soit 637 000 €.

*

La Cour statue sur l’appel interjeté le 19 août 2004 par la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE du jugement rendu le 29 juin 2004 par le Tribunal de grande instance de Paris qui a :

  • Fixé à la somme de 792 428,75 € l’indemnité d’éviction due par la BPIC à la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE,
  • Condamné en tant que de besoin la BPIC au paiement de cette somme au taux légal à compter de sa décision, sous la réserve que la bailleresse n’use pas de son droit de repentir,
  • Condamné sous la même réserve la BPIC à rembourser à la société SUPERMARCHÉ D’ASIE les frais de licenciement sur justificatifs,
  • Fixé à 58 860 € par an l’indemnité d’occupation due en principal à compter du 1er mai 2000 par la société SUPERMARCHÉ D’ASIE à la BPIC,
  • Condamné en tant que de besoin la société SUPERMARCHÉ D’ASIE au paiement de cette somme jusqu’à libération complète des lieux, ce sous la même réserve,
  • Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
  • Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,
  • Fait masse des dépens comprenant les frais d’expertise et dit qu’ils seront supportés par moitié par chacune des parties.

Adoptant pour l’essentiel les conclusions de l’expert, le tribunal a :

  • fixé l’indemnité d’occupation à 58 860 €,
  • actualisé le chiffre d’affaires moyen aux exercices 2001 à 2003, soit 1 983 479,60 €,
  • évalué la valeur du fonds de commerce
    • selon la méthode du chiffre d’affaires, en retenant 35% de celui-ci, soit 694 217,86 €,
    • selon la méthode de la recette journalière, en retenant 110 (et non 120) fois celle de fruits et légumes et 90 (et non 100) fois celle d’épicerie, soit 669 423,90 €,
    • conduisant à une valeur moyenne de 681 820,85 €,
  • évalué les indemnités accessoires en retenant
    • des frais de remploi représentant 8% de la valeur du fonds de commerce, soit 54 545,66 €,
    • un trouble commercial estimé à trois mois de bénéfices au 31 décembre 2003, soit 46 800,79 €,
    • des frais administratifs pour 1 500 €,
    • une perte sur stock estimée au quart de la valeur du stock au 31 décembre 2003, soit 7 761,75 €,
  • soit au total une indemnité d’éviction de 792 428,75 €.

*

Par ordonnance du 16 février 2005, le Conseiller de la mise en état a ordonné un complément d’expertise pour évaluer l’indemnité d’éviction à la date la plus proche de l’éviction selon la méthode de l’excédent brut d’exploitation et plus généralement pour réactualiser les données et conclusions du rapport d’expertise.

Nommé en remplacement de M. A, l’expert M. B a déposé son rapport le 3 avril 2007.

Confirmant l’adéquation du commerce à la très forte commercialité du quartier, après avoir déterminé une surface pondérée de 294 m² (pour une surface réelle de 408 m² et non de 391 m² comme indiquée par son prédécesseur) et une valeur locative de 230 €/m², ne retenant pas d’abattement pour précarité compte tenu de l’accroissement de 119% du chiffre d’affaires entre 2000 et 2005, il propose une indemnité d’occupation arrondie à 67 620 € par an à compter du 1er mai 2000.

En ce qui concerne la valeur du fonds de commerce, il la détermine par deux méthodes :

Par la méthode du chiffre d’affaires (ou de la recette journalière), en retenant un chiffre d’affaires moyen sur les exercices 2003 à 2005 de 2 418 830 €, puis en additionnant 125 fois (et non 120 et 110 retenus respectivement par le premier expert et le tribunal) la recette journalière de fruits et légumes et 115 fois (et non 100 et 90 retenus respectivement par le premier expert et le tribunal) la recette journalière de l’épicerie, pour aboutir à une valeur totale de 1 063 000 €.

Par la méthode de l’excédent brut d’exploitation (EBE), en retenant un EBE moyen sur les années 2003 à 2005 de 238 183 €, en en retirant le différentiel entre le loyer plafonné et l’indemnité d’occupation proposée, soit 26 669 € (pour déterminer la réelle capacité bénéficiaire du fonds), en y appliquant un coefficient de capitalisation de 5, pour aboutir à une valeur arrondie de 1 060 000 €.

Effectuant la moyenne arithmétique des résultats obtenus, il obtient, en arrondissant, une valeur du fonds de commerce de 1 062 000 €.

L’expert évalue enfin les indemnités accessoires en retenant :

  • des frais de remploi représentant 10,17% (et non 8%) de la valeur du fonds de commerce, soit 108 050 €,
  • un trouble commercial estimé à trois mois de bénéfices au 31 décembre 2005, soit 31 200 €,
  • des frais administratifs pour 1 500 €,
  • une perte sur stock estimée à 5% (et non au quart) de la valeur du stock au 31 décembre 20035, soit 2 000 €.

Il aboutit ainsi à une indemnité d’éviction arrondie à 1 205 000 €.

*

Dans ses dernières conclusions du 4 septembre 2007, la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE demande à la Cour de :

  • Infirmer le jugement intervenu et statuant à nouveau :
  • DIRE que la société SUPERMARCHE D’ASIE a droit à une indemnité d’éviction dans les termes de l’article L 145-14 du Code de Commerce ;
  • DIRE que l’éviction a pour conséquence inéluctable la perte totale du fonds de commerce ;
  • DIRE que la société SUPERMARCHE D’ASIE doit être intégralement indemnisée du préjudice subi du fait de cette éviction ;
  • A titre principal,
    • En conséquence, et conformément aux termes de l’ordonnance du 16 février 2005, FIXER le montant de l’indemnité d’éviction qui lui est due en fonction de la méthode EBE, à la somme de 1.346.650 € ;
  • A titre subsidiaire,
    • FIXER le montant de l’indemnité d’éviction à la moyenne de l’indemnité fondée sur la perte du fonds de commerce et celle fondée sur la méthode de l’EBE à la somme de 1.276.0250 euros;
  • CONDAMNER la bailleresse à rembourser au SUPERMARCHE D’ASIE, sur justificatifs, le montant des indemnités de licenciement qui devront être versées aux salariés du fait de la perte du fonds de commerce ;
  • DIRE que l’indemnité d’occupation due par le preneur ne saurait être supérieure à la somme de 47 628 € par an en principal, à compter du 1er mai 2000 ;
  • CONDAMNER la société intimée au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses dernières conclusions du 12 septembre 2007, la BPIC demande à la Cour de :

  • Confirmer la décision du Tribunal rendue le 29 juin 2004 en son principe,
  • Vu le rapport de Monsieur G-H B dire qu’il ne peut-être tenu compte pour le ca1cul de l’indemnité d’éviction due à la société SUPERMARCHE D’ASIE que des résultats produits par la branche d’activité exercée en conformité avec la clause de destination contractuelle, qui ne comprend pas l’activité de grossiste,
  • En conséquence dire que l’indemnité d’éviction due à la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE ne prendra en compte que l’activité générée par la vente aux particuliers,
  • Pour les motifs sus exposés, dire que l’indemnité principale due à la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE ne saurait excéder la somme de 634 834 €,
  • Subsidiairement,
    • Si la Cour devait retenir l’intégralité de l’activité de la société SUPERMARCHE D’ASIE dire que 1'indemnité principale ne saurait être fixée à une somme supérieure à 725 684 €,
  • Dire que l’indemnité de remploi ne saurait excéder 8 % de l’indemnité principale qui sera retenue par la Cour,
  • Débouter purement et simplement la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE de toutes ses demandes à toutes fins qu’elles comportent,
  • Condamner la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE à régler une indemnité d’occupation de 67 000 € par an en principal, hors charges hors taxes à compter du 1er mai 2000,
  • Condamner la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE au paiement d’une somme de 8 000 € au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens.

II- Motifs de l’arrêt

A Sur l’indemnité d’occupation

Considérant qu’après congé avec offre de renouvellement, le locataire doit au bailleur, à compter de la fin du bail, une indemnité d’occupation fixée à la valeur locative des locaux ;

Considérant que les parties ne discutent pas la surface pondérée de 294 m² retenue par M. B, qui sera donc entérinée ;

Considérant que la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE critique la valeur locative de 230 €/m² retenue par cet expert, basée sur certains loyers fixés postérieurement au 1er mai 2000 ;

Mais considérant que, pour proposer cette somme, l’expert a analysé 18 loyers de supermarchés, trois fixés judiciairement, trois en renouvellement amiable, douze en première location ; que si dix d’entre eux sont postérieurs à l’année 2000, cinq autres lui sont antérieurs ; que le grief adressé à l’expert est donc infondé, alors en outre que M. A avait proposé une somme proche de 228,67 € et que l’adéquation du commerce à la très forte commercialité du quartier est acquise ;

Que la valeur de 230 €/m² sera donc retenue ;

Considérant, enfin, que s’il est d’usage que soit tenu compte de la précarité de l’occupation liée à l’incertitude sur la date de l’éviction, c’est à juste titre que l’expert en a écarté l’application en l’espèce alors que, nonobstant cette incertitude, le chiffre d’affaires de la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE a été en constante progression de 2000 à 2005, au total de 119% sur cette période ;

Que l’indemnité d’occupation sera donc fixée à la somme de 67 620 € HTHC / an retenue par l’expert, ramenée selon la demande de la BPIC à la somme de 67 000 € HTHC/an et le jugement sera réformé en ce sens ;

B Sur l’indemnité d’éviction

1 Sur l’indemnité principale

Considérant qu’en raison de la quasi impossibilité de trouver, à proximité immédiate, un local équivalent, il n’est pas contesté que l’éviction entraînera la perte du fonds de commerce de la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE ;

Considérant qu’il conviendra dès lors de retenir la valeur la plus élevée du fonds de commerce ou du droit au bail ;

Qu’il n’est pas contesté qu’en l’espèce la valeur du droit au bail (évaluée à 252 580 € par le premier expert et à 236 000 € par le second) est très inférieure à celle du fonds de commerce, ci-après déterminée, et c’est donc cette dernière qui sera retenue ;

Considérant qu’eu égard à la nature du commerce considéré, il est traditionnellement d’usage que le fonds d’un commerce de fruits et légumes soit valorisé de 55 à 115 fois la recette journalière ou 30% du chiffre d’affaires annuel, cependant que celui de l’épicerie fine l’est de 70 à 130 fois la recette journalière ;

Que cependant, l’évolution des techniques de valorisation financière conduit à prendre en considération non le seul volume d’activité du commerce sous la forme d’un multiple du chiffre d’affaires (ou de la recette journalière qui en est, au cas d’espèce, la 310ème partie), mais aussi les capacités bénéficiaires de l’entreprise sous la forme d’un multiple (de 3 à 10) de son Excédent Brut d’Exploitation (EBE) ;

Considérant, en ce qui concerne le chiffre d’affaires, que le dernier retenu est celui de la moyenne des années 2003 à 2005, soit une somme de 2 418 830 € ;

Qu’alors que l’expertise a établi que celui-ci est composé pour 81% de vente au détail et 19% de vente en demi-gros, la BPIC demande à la Cour de dire qu’il ne peut-être tenu compte pour le calcul de l’indemnité d’éviction que des résultats produits par la vente au détail, exercée en conformité avec la clause de destination contractuelle, qui ne comprendrait pas l’activité de grossiste ;

Mais considérant que l’article 2 du contrat de bail stipule que :

Ces locaux pourront servir au preneur pour l’exploitation d’un fonds de commerce de vente de produits alimentaires exotiques, sans alcool.

Qu’il n’est pas discuté que la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE ne vend que des produits alimentaires exotiques, ce qui rentre dans la destination contractuelle ;

Qu’important dès lors peu que cette vente soit faite pour partie au détail et pour autre en demi-gros, il sera retenu une base de chiffre d’affaires de 2 418 830 € ;

Considérant, en ce qui concerne le multiplicateur à appliquer, que pour l’essentiel ce commerce vend des fruits et légumes au détail, les ventes au demi-gros et d’épicerie n’étant qu’accessoires ;

Qu’il convient dès lors de retenir un taux unique et, compte tenu de la bonne adéquation du commerce exercé à la commercialité du quartier, de porter, comme l’a fait le premier juge, le taux habituellement retenu de 30% à 35% ;

Que la valeur retenue au titre de la méthode du chiffre d’affaires sera donc de :

2 418 830 € x 35% = 846 590,50 €, arrondi à 850 000 €

Considérant, en ce qui concerne l’EBE, que sa valeur moyenne sur les exercices 2003 à 2005 est de 238 183 € ;

Que l’expert a estimé pouvoir 'retraiter’ cette somme en en retirant le différentiel entre le loyer plafonné, actuellement payé, et l’indemnité d’occupation proposée, ce qui est critiqué par l’appelante ;

Que la BPIC propose, dans le même sens, de 'retraiter’ le montant des charges sociales, qui seraient trop faibles par rapport à celles habituelles du fait du recours à des contrats de travail 'aidés’ ;

Mais considérant que si la valeur du fonds de commerce doit être appréciée à la date la plus proche possible de l’éviction, sa consistance doit l’être à l’époque du refus de renouvellement ;

Que la rentabilité de la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE doit s’apprécier en fonction du loyer plafonné et de la politique salariale spécifiques à cette entreprise ;

Que rien ne justifie de 'retraiter’ l’EBE qui sera maintenu à la somme de 238 183 € ;

Considérant, en ce qui concerne le coefficient multiplicateur, que, nonobstant les contestations de l’intimée, celui-ci, dans une fourchette de 2 à 10, peut être fixé à 5 compte tenu de l’adéquation du commerce à son environnement, de la forte évolution du chiffre d’affaires, de la stabilité du résultat net, et en sens inverse, de l’interdiction de vente d’alcool, critères tous retenus à juste titre par l’expert ;

Que la valeur retenue au titre de la méthode de l’EBE sera donc de :

238 183 € x 5 = 1 190 915 €, arrondi à 1 190 000 € ;

Considérant que la moyenne arithmétique appliquée à ces deux méthodes conduit à retenir une valeur du fonds de commerce de 1 020 000 €.

2 sur les indemnités accessoires

Considérant, en ce qui concerne les frais de remploi, que c’est à juste titre que le premier juge les a évalués à 8% de la valeur du fonds de commerce, ce qui conduit, en l’espèce, à une indemnité de 1 020 000 € x 8% = 81 600 € ;

Considérant que les autres indemnités retenues par l’expert :

  • un trouble commercial estimé à trois mois de bénéfices au 31 décembre 2005, soit 31 200 €,
  • des frais administratifs pour 1 500 €,
  • une perte sur stock estimée à 5% de la valeur du stock au 31 décembre 20035, soit 2 000 €,

qui ne sont pas contestées par les parties, seront retenues ;

Que le montant total de l’indemnité d’éviction sera dès lors fixé à :

1 020 000 € + 81 600 € + 31 200 € + 1 500 € + 2 000 € = 1 136 300 €,

le jugement étant partiellement réformé en ce sens.

C Sur les frais et dépens

Considérant que les dépens de l’instance résultant de la volonté du bailleur de ne pas renouveler le bail, il convient de les mettre à sa charge, en ce compris les frais d’expertise.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, STATUANT EN DERNIER RESSORT,

Réforme le jugement entrepris des chefs du montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation, et statuant à nouveau des chefs réformés :

  1. Fixe à la somme de 1 136 300 € l’indemnité d’éviction due par la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris à la Sarl SUPERMARCHÉ D’ASIE,
  1. Condamne en tant que de besoin la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris au paiement de cette somme avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, sous la réserve que la bailleresse n’use pas de son droit de repentir,
  1. Condamne sous la même réserve la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris à rembourser à la société SUPERMARCHÉ D’ASIE les frais de licenciement sur justificatifs,
  1. Fixe à 67 000 € par an l’indemnité d’occupation due en principal à compter du 1er mai 2000 par la société SUPERMARCHÉ D’ASIE à la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris,
  1. Condamne en tant que de besoin la société SUPERMARCHÉ D’ASIE au paiement de cette somme avec intérêts au taux légal jusqu’à libération complète des lieux, ce sous la même réserve,
  1. Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
  1. Condamne la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris aux entiers dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertises. Autorise sur sa demande, Me C D à recouvrer directement contre la Banque Populaire Industrielle et Commerciale de la Région Sud de Paris ceux des dépens dont il a fait l’avance sans avoir reçu provision.

Le Greffier La Présidente

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine

Textes cités dans la décision

  1. Code de commerce
  2. Code de procédure civile
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CA Paris du 16 janvier 2008 n° 04/19840 , ch. 16 A