Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 9 novembre 2010, n° 10/08413

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 1, 9 nov. 2010, n° 10/08413
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 10/08413
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 21 mars 2010
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 1

ARRET DU 09 NOVEMBRE 2010

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 10/08413

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 mars 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 09/76

APPELANTES

WEST VIRGINIA INVESTMENT A B fond de droit américain prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

Suite 200

XXX

(ETATS UNIS)

représentée par la SCP MENARD-SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assistée de Me Ron SOFFER, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2110

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

(ETATS UNIS)

représentée par la SCP MENARD-SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assistée de Me Ron SOFFER, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2110

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

XXX

(ETATS UNIS)

représentée par la SCP MENARD-SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assistée de Me Ron SOFFER, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2110

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

(ETATS UNIS)

représentée par la SCP MENARD-SCELLE-MILLET, avoués à la Cour

assistée de Me Ron SOFFER, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2110

INTIMES

S.A. ELECTRO BANQUE

prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

représentée par la SCP PETIT LESENECHAL, avoués à la Cour

assistée de Me Pierre-Yves ROSSIGNOL, plaidant pour la SCP GRANRUT AVOCATS, toque : P14

Le MINISTÈRE PUBLIC agissant en la personne de Monsieur le PROCUREUR GÉNÉRAL près la Cour d’Appel de PARIS

élisant domicile en son parquet au XXX

représenté par Madame ROUCHEREAU, avocat général

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 octobre 2010, en audience publique, le rapport entendu, devant la Cour composée de :

Monsieur MATET, Président

Madame X, Conseillère

Madame Y, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame PATE

MINISTÈRE PUBLIC : représenté lors des débats par Madame ROUCHEREAU, avocat général, qui a développé oralement ses conclusions écrites

ARRET :- CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur MATET, président et par Madame PATE, greffier présent lors du prononcé.

Une action de groupe a été engagée devant le Tribunal fédéral de Première instance du district sud de New York, contre diverses personnes notamment contre des sociétés du groupe Alstom, certains actionnaires faisant notamment grief à celles-ci d’avoir manipulé des résultats financiers pour masquer une situation précaire.

Relevant que la société ELECTROBANQUE était l’une des quatre banques ayant aidé Alstom à offrir du crédit au client d’Alstom, Renaissance, et que les documents en sa possession sous sa garde ou son contrôle sont au coeur du litige faisant l’objet de l’action, qu’ils sont cruciaux et pertinents, le juge Victor Marrero du Tribunal du district sud de l’Etat de New York a délivré, le 6 mai 2009, à l’Autorité centrale en France une commission rogatoire aux fins d’entraide judiciaire portant sur :

'1°) tous les documents concernant le financement de navires de croisière Renaissance R1,R2,R5 et Z, y compris, mais sans limitation, les documents en rapport ou en liaison avec les risques de crédit, concernant les risques de crédit , faisant partie d’efforts de verification préalable ou constituant une analyse des dits risques de crédit ;

2°) Tous les documents concernant la vente par Alstom de navires de croisière à Renaissance entre le 3 août 1999 et le 12 août 2003 ;

3°) Tous les documents concernant une garantie quelconque (totale ou partielle) consentie par Alstom en liaison avec un financement accordé par la banque à Renaissance du 3 août 1999 au 12 août 2003".

Le juge du tribunal de grande instance de Paris commis pour exécuter la commission rogatoire a rendu le 22 mars 2010 une ordonnance dans ces termes ' Constatons l’impossibilité de statuer valablement sur le bien fondé ou non du refus de la société ELECTROBANQUE de produire diverses pièces énumérées en annexe A de la commission rogatoire. En conséquence, clôturons le présent dossier et ordonnons le renvoi de la procédure à l’autorité mandante'.

Les sociétés WEST VIRGINIA INVESTMENT A B, XXX, XXX ont interjeté appel de l’ordonnance entreprise. Par conclusions du 8 octobre 2010, elles prient la Cour :

A titre principal :

— d’ordonner à la société ELECTROBANQUE de produire les courriers adressés par elle aux bénéficiaires du secret bancaire tendant à ce que ceux-ci se prononcent sur la renonciation au secret bancaire sous astreinte de 100¿ par jour de retard suivant le prononcé de la décision à intervenir, ainsi que les réponses apportées par ces bénéficiaires sous la même astreinte,

— en tout état de cause s’il n’est pas fait droit à la demande de production, dire que la société ELECTROBANQUE ne justifie pas d’un empêchement légitime à l’exécution de la commission rogatoire décernée par le juge de New York, et ordonner à la société ELECTROBANQUE de l’exécuter

A titre subsidiaire :

— de rejeter des débats les conclusions de la société ELECTROBANQUE du 5 octobre ;

— d’ordonner à la société ELECTROBANQUE de produire les courriers adressés par elle aux bénéficiaires du secret bancaire tendant à ce que ceux-ci se prononcent sur la renonciation au secret bancaire sous astreinte de 100¿ par jour de retard suivant le prononcé de la décision à intervenir, ainsi que les réponses apportées par ces bénéficiaires sous la même astreinte,

— en tout état de cause s’il n’est pas fait droit à la demande de production, dire que la société ELECTROBANQUE ne justifie pas d’un empêchement légitime à l’exécution de la commission rogatoire décernée par le juge de New York, et ordonner à la société ELECTROBANQUE de l’exécuter

Les sociétés WEST VIRGINIA INVESTMENT A B, XXX, XXX essentiellement que le secret bancaire ne constitue pas un empêchement péremptoire à la mise en oeuvre d’une commission rogatoire, le bénéficiaire pouvant toujours y renoncer, et que la demande de production de pièces à la société ELECTROBANQUE permettra d’apprécier si cette dernière peut ou non refuser de communiquer les pièces objet de la commission rogatoire.

Elles ajoutent que la société ELECTROBANQUE doit exécuter la commission rogatoire car les droits de la société Renaissance dont le siège se situait aux Etats-Unis, bénéficiaire du secret bancaire, ont été liquidés et celle-ci n’est plus créancière du droit au secret. Elles disent enfin que les documents sollicités par le juge américain sont limitativement énumérés et ont un lien direct et précis avec l’objet du litige et que la période pertinente est définie dans l’acte.

Suivant conclusions du 8 octobre 2010, la société ELECTROBANQUE sollicite de prononcer la radiation de l’instance enrôlée sous le n° RG 10/7952, demande de déclarer irrégulière et mal fondée la demande d’injonction de communication de pièces, de déclarer irrecevable et mal fondé l’appel et de rejeter l’exécution de la commission rogatoire et de condamner les sociétés WEST VIRGINIA INVESTMENT A B, XXX, XXX au paiement de la somme de 5 000¿ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir principalement qu’il existe un empêchement légitime à l’exécution de la commission rogatoire pour cause de secret bancaire, que le juge requis n’a pas à apprécier si les circonstances justifient d’opposer le secret bancaire et que la commission rogatoire se déroulant dans la période de pre-trial discovery ne peut être admise dès lors que les demandes sont générales, non limitées et imprécises, relevant du 'proof-fishing'.

La clôture a été prononcée à la demande des représentants des parties, le jour des plaidoiries.

Le ministère public a été entendu en ses observations.

Sur quoi,

Considérant que la demande de la société ELECTROBANQUE visant à prononcer la radiation d’une autre instance enrôlée sous le n° RG 10/7952 est dépourvue de pertinence ;

Considérant que la convention de la Haye du 18 mars 1970 signée par la France et les Etats Unis sur l’obtention de preuves à l’étranger en matière civile ou commerciale a pour objet de 'faciliter la transmission et l’exécution des commissions rogatoires’ avec le souci 'd’accroître l’efficacité de la coopération judiciaire mutuelle en matière civile ou commerciale’ ;

Qu’aux termes de son article 23 'tout Etat contractant peut, au moment de la signature, de la ratification ou de l’adhésion, déclarer qu’il n’exécute pas les commissions rogatoires qui ont pour objet une procédure connue dans les Etats du common law sous le nom de 'pre-trial discovery of documents’ ;

Que par déclaration du 30 juillet 1974 le gouvernement français a précisé que par application de l’article 23 de la convention les commissions rogatoires ayant pour objet l’exécution de cette procédure ne seraient pas exécutées ; que cette réserve a été modifiée par la déclaration du 24 décembre 1989 selon laquelle ' la déclaration faite par le Gouvernement de la République française conformément à l’article 23 relatif aux commissions rogatoires qui ont pour objet une procédure connue dans les Etats de common law sous le nom de 'pre-trial discovery’ ne s’applique pas lorsque les documents demandés sont limitativement énumérés dans la commission rogatoire et ont un lien direct et précis avec le litige’ ;

Considérant que le juge américain énonce -selon la traduction française- que sa requête est présentée en vertu du chapitre 1 de la convention de la Haye du 18 mars 1970 sur l’obtention de preuves à l’étranger en matière civile et commerciale et précise que la commission rogatoire 'tient compte des réserves de la France en vertu de la convention de la Haye. Ce Tribunal a jugé que les documents demandés sont énumérés limitativement à l’Annexe A de la présente requête et qu’ils sont directement et précisément liés à l’objet de la procédure, conformément à la modification de l’article 23 de la convention de la Haye par la déclaration de la République Française datée du 19 janvier 1987" et que le juge américain fait encore mention dans la demande d’assistance judiciaire, page 8 de la version en langue anglaise, de ce que 'The parties are now conducting pre-trial fact discovery’ ;

Qu’il est donc établi et non discuté que l’exécution de la requête s’inscrit dans la procédure de 'pre-trial discovery of documents’ et est soumise aux conditions de la réserve de l’article 23 de la convention de la Haye ;

Qu’en l’espèce, la commission rogatoire vise 'tous documents concernant le financement de navires de croisière y compris les documents en rapport ou en liaison avec les risques de crédit, concernant les risques de crédit'…'Tous les documents concernant la vente par Alstom de navires de croisière à Renaissance entre le 3 août 1999 et le 12 août 2003« …'Tous les documents concernant une garantie quelconque (totale ou partielle) consentie par Alstom en liaison avec un financement accordé par la banque à Renaissance du 3 août 1999 au 12 août 2003 » ; que la teneur des documents réclamés n’étant pas définie avec précision et les demandes étant excessivement larges, la commission rogatoire ne répond pas aux conditions de la Convention ; que, sans qu’il y ait lieu de faire droit à la demande de production de pièces formée par les appelantes, il convient, infirmant l’ordonnance entreprise, de refuser la demande d’exécution de la commission rogatoire ;

Considérant qu’il convient de condamner les sociétés WEST VIRGINIA INVESTMENT A B, XXX, XXX à payer à la société ELECTROBANQUE la somme de 5 000¿ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Par ces motifs

Infirme l’ordonnance entreprise,

Refuse la demande d’exécution de la commission rogatoire délivrée

le 6 mai 2009 par le juge Victor Marrero du Tribunal du district sud de l’Etat de New York ;

Condamne les sociétés WEST VIRGINIA INVESTMENT A B, XXX, XXX à payer à la société ELECTROBANQUE la somme de 5 000¿ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne les sociétés WEST VIRGINIA INVESTMENT A B, XXX, XXX aux dépens et admet la SCP PETIT LESENECHAL, avoué, au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

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