Cour d'appel de Paris, 6 novembre 2013

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 6 nov. 2013
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Créteil, 7 avril 2013

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 7

ORDONNANCE DU 06 NOVEMBRE 2013

(n° 67, 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 2013/10721

Décision déférée :

— Ordonnance rendue le 08 avril 2013

par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL

Nature de la décision : contradictoire

Nous, Dominique COUJARD, Conseiller à la Cour d’appel de PARIS, délégué par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l’article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l’article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

assisté de BB BC-BD, greffier lors des débats ;

Après avoir appelé à l’audience publique du 23 octobre 2013 :

— La société C & CO, S.A.Monégasque

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social : XXX

assistée de Maître Sophie FRECHE

avocat au barreau de NICE

SCP POMMIER COHEN & ASSOCIES

XXX

APPELANTE

et

— LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DES FINANCES PUBLIQUES DIRECTION NATIONALE D’ENQUÊTES FISCALES

XXX

XXX

assisté de Maître Dominique HEBRARD MINC,

avocate au barreau de MONTPELLIER

XXX

INTIMÉ

* * * * * *

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 23 octobre 2013, les avocats des parties ;

Les débats ayant été clôturés avec l’indication que l’affaire était mise en délibéré au 06 novembre 2013 pour mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Signé par M. Dominique COUJARD, Délégué du premier président et par M. Benoit BC-BD, Greffier.

* * * * * *

Avons rendu l’ordonnance ci-après :

Vu l’ordonnance rendue le 8 avril 2013 par F G, juge de la liberté et de la détention du tribunal de grande instance de Créteil qui :

' a autorisé, conformément aux dispositions de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales :

— AQ AR, inspectrice principale des finances publiques, XXX épouse AG AH, AX AY, AE AF, T U, AO AP, J K, inspecteurs des finances publiques, tous en poste à la Direction nationale des enquêtes fiscales XXX, en résidence à la brigade d’intervention interrégionale de Marseille 1, XXX

— AU-AM BG, inspecteur principal des finances publiques, AM AN, AS AT, H I épouse AZ-BA, R AJ, R S, AK AL, inspecteurs des finances publiques, en poste à la Direction nationale des enquêtes fiscales XXX, et en résidence à la brigade d’intervention interrégionale Marseille 2, XXX – XXX

— D E, inspecteur des finances publiques, en poste et en résidence à la Direction nationale des enquêtes fiscales, brigade d’intervention interrégionale de Paris-Est, XXX,

Tous agents de la Direction générale des finances publiques spécialement habilités par le Directeur général des finances publiques en application des dispositions des articles L 16 B et R 16 B-1 du livre des procédures fiscales, et dont les copies des habilitations nominatives lui avaient été présentées,

Assistés de

— AA AB, Pascale Labrot, contrôleurs principaux des finances publiques, X

Y, contrôleuse des finances publiques, en poste a la Direction nationale des enquêtes fiscales XXX, en résidence a la brigade d’intervention interrégionale de Marseille 1, XXX -XXX, AU AV AW, L M, contrôleurs principaux des finances publiques, N O, contrôleur des finances publiques, en poste à la Direction nationale des enquêtes fiscales XXX, en résidence à la brigade d’intervention interrégionale de Marseille 2, XXX – XXX,

— Julien Gaufroy, contrôleur des finances publiques, en poste et en résidence à la Direction nationale des enquêtes fiscales, brigade d’intervention interrégionale de Paris-Est, XXX,

Tous agents de la Direction générale des finances publiques spécialement habilités par le Directeur général des finances publiques, en application des dispositions des articles L 16 B et F16 B-1 du livre des procédures fiscales, dont les copies des habilitations nominatives lui avaient été présentées,

' à procéder, conformément aux dispositions de l’article L 16 B, aux visites et saisies nécessitées par la recherche de la preuve des agissements présumés dans les lieux désignés où des documents et des supports d’informations illustrant la fraude présumée étaient susceptibles de se trouver, à savoir :

— locaux et XXX M 3194156 A, susceptibles d’être occupés par la SARL VIA TRANSPORTS et/ou la société de droit monégasque C&C0

' a désigné V W Yassine, brigadier de police, en poste au bureau de police, XXX, officier de police judiciaire pour les locaux situés dans le ressort de leur compétence territoriale, pour assister à ces opérations, la tenir informée de leur déroulement, veiller au respect du secret professionnel et des droits de la défense, conformément aux dispositions du troisième alinéa de l’article 56 du code de procédure pénale, et procéder, si nécessaire, à la réquisition prévue au paragraphe Ill de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales ;

' a mentionné que le contribuable avait la faculté de faire appel à un conseil de son choix sans que cette faculté entraîne la suspension des opérations de visite et de saisie ;

' a autorisé, dans les conditions prévues au lll bis de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales, les agents des finances publiques habilités à recueillir sur place, au cours de la visite, des renseignements et justifications concernant les agissements du contribuable visé au I de l’article précité, auprès de l’occupant des lieux ou de son représentant et, s’il est présent, de ce contribuable, après les avoir informés que leur consentement était nécessaire ;

' a précisé que les agents des finances publiques habilités étaient autorisés à demander, pour la mise en 'uvre du dispositif prévu au Ill bis de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales, à l’occupant des lieux ou à son représentant et au contribuable mentionné au I du méme article, de justifier de leur identité et de leur adresse aprés les avoir informés que leur consentement était nécessaire ;

' a donné pour autres instructions particulières, que toute autre visite nécessaire de nouveaux lieux découverts au cours de l’opération serait subordonnée à son autorisation,

que si, à l’occasion de la visite, les agents habilités découvraient l’existence d’un coffre dans un établissement de crédit, situé dans le ressort du tribunal de grande instance, dont la

personne occupant les lieux visités était titulaire et où des pièces et documents se rapportant aux agissements visés au l de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales étaient susceptibles de se trouver, ils pourraient, sur autorisation délivrée par tout moyen par elle-même, procéder immédiatement à la visite de ce coffre, mention de son autorisation étant portée au procès-verbal de visite et de saisie prévu au IV de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales ; que toute difficulté d’exécution serait portée à sa connaissance,

' a dit que l’ordonnance, exécutoire au seul vu de la minute, serait notifiée verbalement sur place au moment de la visite à l’occupant des lieux ou à son représentant qui en recevrait copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal de visite et de saisie.

Qu’en l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, l’ordonnance serait notifiée après la visite par lettre recommandée avec accusé de réception ; la notification étant réputée faite à la date de réception figurant sur l’avis ; qu’à défaut de réception, il serait procédé à la signification de l’ordonnance par acte d’huissier de justice.

' a dit que l’ordonnance pouvait faire I’objet d’un appel, non suspensif, devant le premier président de la

cour d`appel de Paris sans que les parties soient tenues de constituer avocat, suivant les régles

prévues par le code de procédure civile, cet appel devant être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée par pli recommandé ou, depuis le 1er janvier 2009, par voie électronique au greffe de la cour dans un délai de 15 jours, délai courant à compter, soit de la remise, soit de la réception, soit de la signification de l’ordonnance.

' a dit que l’ordonnance du premier président de la cour d’appel de Paris serait susceptible d’un pourvoi en cassation, selon les régles prévues par le code de procédure civile, dans un délai de 15 jours,

' a dit que l’ordonnance qui n’autorisait qu’une visite unique des lieux désignés serait

réputée caduque si elle n’était pas exécutée avant le 30 avril 2013,

' a dit que les originaux du procés-verbal relatant les modalités et le déroulement des opérations de visite et de saisie, consignant les constatations effectuées à cette occasion, et de l’inventaire établi, devrait lui être adressés dans les meilleurs délais et, en tout état de cause, avant le 15 mai 2013.

Vu l’appel relevé contre cette ordonnance le 29 avril 2013 par la société C & Co,

Vu les conclusions développées oralement à l’audience, par lesquelles la société appelante demande, au visa de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales, voir :

— constater que l’administration n’a pas respecté les dispositions de ce texte qui imposent que la requête comporte tous les éléments d’information en possession de l’administration, de nature à justifier la visite,

— annuler l’ordonnance déférée,

— annuler, par voie de conséquence, la visite et la saisie exercées à ce titre.

Vu les conclusions développées oralement à l’audience, par lesquelles le Directeur général des finances publiques demande voir :

— confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 8 avril 2013 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Créteil.

— rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions

— la condamner au paiement de la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.

MOTIFS :

Aux termes de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales, l’autorité judiciaire peut autoriser l’administration à effectuer une visite domiciliaire lorsqu’il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement de l’impôt sur le revenu ou les bénéfices ou de la TVA, pour rechercher la preuve de ces agissements .

La société requérante fait grief à l’administration de n’avoir pas produit certains éléments d’information au juge de la liberté et de la détention ; elle conteste l’existence de présomptions de fraude.

Elle soutient que l’ordonnance a été rendue sur la base d’é1ements incomplets et inexacts,

que n’ont pas respectées les dispositions de 1'article L.16 B II qui imposent que la requête

comporte tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à

justifier la visite.

La société C & CO énonce

— qu’elle est une société anonyme monégasque dont la constitution exige, conformément aux informations consultables sur le site du Gouvernement Princier de la Principauté de Monaco (service-pub1ic-entreprises.gouv.mc), la rédaction des statuts par un notaire monégasque (Pièce nt* 4), l’autorisation du Ministre d’Etat (Pièce 11° 5), ainsi que le dépôt d’un dossier auprès du service de l’Expansion Economique dans lequel les associés fondateurs doivent justifier d’un siège social effectif à Monaco et annexer le titre juridique d’occupation (Pièce n° 6) ;

— qu’elle a établi son siège social à XXX et avoir conclu à cet effet un contrat de prestations de services et d’hébergement avec la SARL CATS BUSINESS CENTER, le 6 octobre 2008, fourni lors du dépôt du dossier auprès du service de l’Expansion Economique (Pièce 11° 7) ;

— que la législation sur les Sociétés Anonymes Monégasques (SAM) exigeant une surface minimum du siège social, un autre contrat portant sur une plus grande surface a été conclu à l’occasion de la transformation de la société en SAM, le 15 janvier 2013 (Pièce n°8).

— que les factures mensuelles font d"ailleurs état de l’utilisation des services et matériels (abonnement téléphone et ADSL, envois de télécopies…) à cette adresse (Pièce n° 9 et 10). – qu’elle y dispose ainsi de moyens matériels (locaux et matériels) nécessaires à l’exercice de son activité ;

— qu’elle a souscrit une assurance multirisques bureaux à l’adresse de son siège social par l’intermédiaire de la société de courtage d’assurance de droit monégasque CARE (Pièce n° 11);

— que les modifications statutaires effectuées par la société C & CO, consultables sur le site d’accès public www.legi1nonaco.mc (Pièce n° 12), ainsi que diverses factures de téléphone ou de maintenance informatique à cette adresse démontrent la matérialité et l’effectivité du siège social monégasque (Pièce n° 13);

— qu’elle emploie divers salariés au lieu de son siège social à Monaco, dont la procédure d’embauche est encadrée par le Service de l’Emploi monégasque (Pièce 11°' 14).

— que l’ensemble de ces salariés seraient affiliés aux Caisses Sociales de Monaco (Pièce n° 15, 16, 17).

— qu’elle y dispose ainsi de moyens humains nécessaires à l’exercice de son activité ;

— qu’elle entretient d"importantes relations commerciales avec ses clients établis eux-aussi à Monaco (Pièce n°18);

— qu’elle dispose d’un compte bancaire ouvert dans les livres de la Société Générale Monaco et de la Succursale de Monaco de la Banque Populaire Côte d’Azur (Pièce n° 19) ;

— que les véhicules utilisés par elle sont immatriculés à Monaco (Pièce 11° 20) ;

— que la présence en France d’un convoi portant les noms de C & Co et de VIA TRANSPORTS à la date du 24 janvier 2013 a une explication toute autre que celle avancée par l’administration ;

— qu’en effet, à cette date, la société VIA TRANSPORTS a loué un véhicule à C & Co pour effectuer un convoi exceptionnel ainsi qu’en atteste la facture ci-jointe (Pièce 11 à 21)

— qu’enfin et surtout, elle déclare et paie l’impôt sur les bénéfices à Monaco depuis sa constitution (Pièce n° 22) ;

— que l’ensemble de ces éléments, de nature à démontrer l’effectivité du site d’exploitation

monégasque et à combattre les présomptions alléguées, n’a pas été communiqué au juge de la liberté et de la détention, alors même que certains étaient directement consultables par Internet.

— que par ailleurs, les autres éléments sus évoqués pouvaient parfaitement être connus de l’administration fiscale française, laquelle dispose, aux termes de la clause d’échange de renseignements contenue dans l’article 20 de la Convention franco-monégasque du 18 mai 1963, du pouvoir d’obtenir, sur simple demande, tous les renseignements qui lui paraissent nécessaires auprès de l’administration fiscale monégasque (Pièce n° 23) ;

— qu’ainsi, l’administration fiscale n’a pas mis le juge des libertés et de la détention en

mesure d’apprécier correctement sa situation et que les présomptions de fraude alléguées.

La société AD & CO soutient, d’autre part,

— que la présomption de fraude n’est pas caractérisée ni suffisante pour que l’atteinte aux droits fondamentaux que constitue une visite domiciliaire soit proportionnée aux craintes de l’administration et à l’ampleur du processus frauduleux .

Mais c’est à juste titre que l’administration lui répond

— que la société AD & CO est gérée et administrée par P C et B C.

— qu’en 2012, son capital social a été porté à 150 000 € et qu’elle a été transformée en société anonyme monégasque.- que cette société dispose du site Internet http://www.C.mc, sur lequel figurent la ligne téléphonique 00377 93 10 54 23, la ligne de fax 00377 93 10 54 45 et les adresses email monaco@C.mc et C-and-co@ymail.com. (Pièces 1 et 2 jointes à la requête).

— qu’un droit de communication exercé auprès du bureau des douanes de Nice Port a montré que la société C & CO était assujettie à la taxe spéciale sur certains véhicules routiers dite « taxe à l’essieu » à raison des véhicules lui appartenant qui circulent sur le territoire français.

— qu’en 2012, elle avait utilisé sept ensembles articulés (tracteur+remorque) et un véhicule porteur.

— qu’il apparaissait ainsi que la société C & CO disposait d’au moins huit camions ayant un poids supérieur à 7,5 tonnes.

— que selon le guide des dispositions relatives à l’utilisation et à l’occupation de la voie publique de Monaco, le stationnement en principauté n’est possible que pour les véhicules n’excédant pas 7,5 tonnes et qu’il est limité à 15 minutes.

— qu’il apparaissait de ces faits que la société monégasque C & CO ne disposait pas de site d’exploitation à l’adresse de son siège social sur le territoire de la Principauté de Monaco permettant d’entreposer les véhicules nécessaires à l’exercice de son activité .

— que les deux dirigeants de la société C & CO, P C et B C sont résidents en France, respectivement à Cagnes-sur-Mer et à Saint-Laurent-du-Var ;

— que P C est également gérante de la SARL VIA TRANSPORTS à A, qui exerce l’activité de transports routiers de fret interurbains et dispose de deux établissements secondaires, l’un à Carros (06510) et l’autre à Nainville-les-Roches (91750).

— que le 24 janvier 2013, à 13 heures 20, il a été constaté que cinq véhicules (Poids lourds et véhicules légers) portant le nom de C & CO, immatriculés à Monaco, étaient stationnés dans l’enceinte de l’entreprise VIA TRANSPORTS à Carros.

— que le même jour, il avait également été constaté qu’un ensemble articulé constitué d’un tracteur portant le nom de C & CO, immatriculé Q168, et d’une remorque portant le nom de TRANSPORTS, immatriculée CC087 QM, XXX à Nice, en direction de Nice.

— qu’en réponse au droit de communication exercé auprès de la DREAL (PACA), il a été précisé que la société C & CO avait fait l’objet d’un unique contrôle routier, le 15 juillet 2010 au péage de La Barque sur l’autoroute A8.(Pièces 1, 13 et 14, 5, 6 et 7 jointes à la requête).

— que l’ensemble de ces éléments permettait de présumer que la société C & CO, dont des camions stationnaient sur le territoire national dans les locaux de la SARL VIA TRANSPORTS avec laquelle elle entretenait des relations commerciales, et dont les dirigeants résidaient en France, disposait sur le territoire national de moyens matériels et d’un centre décisionnel lui permettant d’y réaliser de façon indépendante une activité de transports de marchandises.

— que cette société n’était pas connue du service des impôts des entreprises territorialement compétent.

L’argumentation développée par l’appelante ne remet donc pas en cause le bien fondé des présomptions retenues par le premier juge.

En effet, les statuts de la société DERRANDES & CO, de même que l’acte portant augmentation de son capital, publiés au Journal officiel de la principauté de Monaco, ont été remis au Juge (pièce 1 jointe à la requête).

Le premier juge a également été exactement informé de l’adresse du siège à Monaco, et des numéros de téléphone, télécopie et adresses email mentionnés sur le site internet de la société.

Le premier juge a donc relevé à juste titre que qu’eu égard au tonnage des huit camions dont elle disposait, de la réglementation monégasque relative à l’utilisation et à l’occupation de la voie publique et de l’absence de stationnement pour livraisons à l’adresse du siège social, cette société n’y disposait pas d’un site d’exploitation permettant d’entreposer les véhicules nécessaires à l’exercice d’une activité conforme à son objet social.

Les pièces produites par l’appelante, et les explications qu’elle fournit, ne remettent pas en cause cette analyse.

En effet, si elle verse aux débats un Contrat de prestations de services et d’hébergement (pièce n°7), cette pièce vient confirmer l’exactitude de l’adresse du siège social et permet de constater qu’il s’agit d’un contrat de domiciliation chez un prestataire de services aux entreprises.

Ce contrat a été modifié en janvier 2013 pour passer d’un bureau de 15 m² à un bureau de 25 m², et l’appelante souligne que c’est en raison de sa transformation en SAM, afin de respecter le minimum de superficie requis par la loi monégasque pour une telle société.

Cet aveu vient confirmer que la société C & CO avait fixé son siège dans des bureaux privatifs d’une entreprise de domiciliation ainsi que le permet la loi monégasque selon la pièce 4 communiquée par l’appelante, limité à la taille minimum requise, et par là même, la présomption selon laquelle cette société ne disposait pas à cette adresse d’un site d’exploitation permettant l’exercice de son activité de transport de marchandises.

Sur l’assurance multirisque bureaux pour ce local, preuve n’est pas rap^portée que l’administration connaissait l’existence de cette police

L’appelante produit également des factures de prestations de services de secrétariat téléphonique, ce qui corrobore la présomption d’une absence de site d’exploitation à l’adresse du siège.

L’appelante produit le contrat de travail signé le 1er avril 2009 et le bulletin de salaire du mois de février 2011 de M. Z employé en qualité de chauffeur routier, ainsi que les convocations aux visites médicales obligatoires à l’office de médecine du travail de la principauté de Monaco de quatre autres chauffeurs routiers et un responsable logistique.

Ces documents permettent de constater que ces employés relèvent de la législation sociale de la principauté de Monaco, ce qui n’est pas contesté, mais ils ne permettent pas de conclure, comme l’indique l’appelante, que ces personnes sont employées au lieu de son siège social.

Si le contrat de travail de M. Z mentionne que son lieu d’affectation est situé XXX à Monaco, son activité de chauffeur routier s’exerce dans le seul cadre des transports qui lui sont confiés.

Concernant les autres salariés, les contrats de travail ne sont pas communiqués.

L’appelante expose que les véhicules qu’elle utilise sont immatriculés à Monaco et communique les certificats d’immatriculation d’un fourgon et de trois véhicules de service, mais la même information avait été fournie au juge, notamment par la remise de la liste de ses véhicules soumis à la taxe à l’essieu, tous immatriculés à Monaco.

S’agissant de l’impôt sur les bénéfices payé à Monaco, il n’est pas discuté que la société C & CO existe juridiquement à Monaco, de même il n’est pas contesté qu’elle y dépose des comptes et y acquitte l’impôt sur les sociétés.

En revanche, elle ne fournit aucun renseignement quant à la TVA qu’elle pourrait y déclarer, ou y payer.

Ainsi, contrairement à ce qu’elle soutient, aucun élément inexact ou incomplet n’a été remis au juge.

Sur la présomption de fraude

La réglementation monégasque en matière d’utilisation et d’occupation de la voie publique a été remise au juge qui a ainsi pu vérifier que le stationnement des véhicules de plus de 7,5 tonnes était interdit à Monaco (pièce 4 jointe à la requête).

Ce document traite également du lieu de livraisons et d’enlèvement des marchandises mis à la disposition des entreprises de transport par Monaco Logistique PAL, à Nice Saint-Isidore, pour leur permettre d’exercer leur activité dans le respect de la réglementation.

Or, au cas présent, il a été constaté que les véhicules de la société C & CO stationnaient dans les locaux constituant l’établissement secondaire de la SARL VIA TRANSPORTS, à Carros, également dirigée par P AD.

En outre, les pièces produites par l’appelante viennent confirmer ces conditions d’exercice de l’activité. En effet, sur dix factures produites relatives à des sociétés clientes domiciliées à Monaco, une seule concerne un transport effectué à partir de Monaco.

Les neuf autres concernent des transports depuis la France, livrés en France, et pour l’un en Allemagne, dont huit à partir de Carros ou de Nice, ou livrés à Carros.

Ainsi aucune des pièces produites ne vient contredire la présomption d’une activité exercée, non pas à partir de moyens d’exploitation en principauté de Monaco, mais à partir des moyens de la SARL VIA TRANSPORT exerçant la même activité et ayant la même dirigeante, dès lors qu’il avait été constaté que ces deux sociétés entretenaient des relations commerciales et que les véhicules de l’une stationnaient dans l’enceinte des locaux de l’autre.

Enfin, la résidence en France des deux dirigeants de la société C & CO est un fait, non contesté.

S’ajoutant à la fonction de dirigeante de la société française VIA TRANSPORTS de P C, cette constatation permettait de présumer l’existence d’un centre décisionnel en France et l’ensemble de ces éléments permettait de présumer de leexercice deune activité de transport de marchandises sur le territoire français où résidaient ses dirigeants, où stationnaient ses véhicules, dans les locaux de la SARL VIA TRANPORTS,

qui avait la même dirigeante et avec laquelle elle entretenait de relations commerciales.

Le premier juge a donc exactement motivé sa décision en retenant qu’il pouvait être présumé que cette société avait exercé en France une activité qui aurait dû y être soumise à l’ensemble des impôts commerciaux.

Le premier juge a, en outre précisé ce qui lui permettait de présumer que cette société ne respectait pas ses obligations comptables en France, dès lors qu’il a relevé qu’elle n’avait déposé aucune déclaration en matière d’impôt sur les sociétés et de TVA, alors qu’elle paraissait exercer une activité de transport de marchandises sur le territoire français.

P A R C E S M O T I F S

Déboute la société AD & CO,

Confirme l’ordonnance rendue le 8 avril 2013 par le juge de la liberté et de la détention du tribunal de grande instance de Créteil,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société AD & CO à payer la somme de 2 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société AD & CO aux dépens.

LE GREFFIER,

BB BC-BD

LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT,

Dominique COUJARD

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