Cour d'appel de Paris, 12 novembre 2013, n° 10/23942

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 12 nov. 2013, n° 10/23942
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 10/23942
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Auxerre, 14 novembre 2010, N° 09/00250

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 5

ARRET DU 12 NOVEMBRE 2013

(n° 303, 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 10/23942

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2010 -Tribunal de Grande Instance d’AUXERRE – RG n° 09/00250.

APPELANTE

Y PARIS VAL DE LOIRE agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal dont le siège social est situé

XXX

XXX

Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP FISSELIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me André DE METZ de la SCP DE METZ-RIZZO DE METZ-DAUDE, avocat au barreau de SENS.

INTIMES

Maître I J es qualité de Liquidateur à la liquidation judiciaire de la sté PMG TECHNIC

XXX

XXX

Madame M N X

XXX

XXX

Représentés par Me Edouard GOIRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0003.

Assistés par Me Michel LEQUIN de la SCP REVEST.LEQUIN.JEANDAUX.DURIF, avocat au barreau D’AUXERRE.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 Octobre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre

Monsieur Christian BYK, Conseiller

Monsieur Michel CHALACHIN, Conseiller, entendu en son rapport

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Joëlle BOREL

ARRET :

— contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Joëlle BOREL, greffière présente lors du prononcé.

En 2004, la société PGM TECHNIC, assurée auprès de la société Y PARIS VAL DE LOIRE, a réalisé des travaux d’électricité au premier étage de la maison appartenant à Mme M-N X.

Le 24 novembre 2005, un incendie a ravagé le premier étage et le grenier de la maison.

Aucun accord n’ayant été conclu entre la société Y et Mme X, celle-ci a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance d’Auxerre d’une demande d’expertise.

Mr F, expert désigné par ordonnance du 26 décembre 2006, a déposé son rapport le 17 juillet 2008.

Par acte du 18 février 2009, Mme X a assigné la société Y et la société K L, administrateur de la société PGM TECHNIC, devant le tribunal de grande instance d’Auxerre afin d’être indemnisée de ses préjudices.

Par jugement du 15 novembre 2010, le tribunal a homologué le rapport d’expertise, a retenu la responsabilité décennale de la société PGM TECHNIC, a dit que Y devait garantir le sinistre et a condamné l’assureur au paiement des sommes de 123.749 euros au titre des dommages immobiliers, 14.823 euros au titre des dommages mobiliers, 15.000 euros au titre du préjudice de jouissance, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 18 février 2009, outre celle de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Y a interjeté appel de cette décision par déclaration du 13 décembre 2010.

Par dernières conclusions du 9 septembre 2013, l’appelante demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter Mme X de son appel incident limité au montant des préjudices, et de condamner celle-ci au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 3 septembre 2013, Mme X sollicite la confirmation du jugement, sauf en ce qui concerne les sommes allouées au titre des dommages mobiliers et immobiliers, et demande le paiement des sommes de 199.170,21 euros au titre des réparations, 40.107,64 euros au titre du préjudice mobilier, 48.000 euros au titre de la perte des revenus fonciers, 2.000 euros au titre des frais de nettoyage de l’immeuble, 1.435,20 euros au titre des honoraires de l’économiste Mr Z, 15.000 euros au titre du trouble de jouissance, 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre intérêts au taux légal sur les sommes de 199.170,21 euros et de 40.107,64 euros à compter de novembre 2005, date de l’incendie, jusqu’au 25 janvier 2011, date du paiement au titre de l’exécution provisoire.

Me I J, ès qualités de liquidateur de la société PGM TECHNIC, bien que régulièrement assigné à son domicile par acte d’huissier du 19 juillet 2011, n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 septembre 2013.

MOTIFS

Sur les opérations d’expertise

Considérant que la société Y reproche à l’expert d’avoir tiré ses conclusions des seules déclarations de Mme X, laquelle avait fait réaliser les travaux de remise en état des lieux sinistrés avant la première réunion d’expertise ;

Considérant que Mme X répond qu’elle a fait exécuter les travaux de remise en état après l’achèvement des opérations menées par les deux experts désignés par Y, que l’expert judiciaire a réalisé sa mission au vu du rapport de gendarmerie et des conclusions des deux experts d’assurance, et que l’appelante n’a sollicité ni l’annulation du rapport d’expertise, ni une contre-expertise ;

Considérant que, même si l’expertise judiciaire a été réalisée après l’exécution des travaux de remise en état, Mr F a disposé de plusieurs éléments de fait pour réaliser sa mission : le rapport de gendarmerie avec les photographies prise immédiatement après le sinistre, et les rapports de Mr G et du cabinet A, experts mandatés par l’assureur, qui sont intervenus quelques semaines après l’incendie, avant la réalisation des travaux de remise en état ;

Qu’en outre, un représentant de la société PGM TECHNIC était présent lors des réunions d’expertise, et a pu fournir à Mr F toutes les explications nécessaires sur les travaux d’électricité qui avaient été réalisés en 2004 ;

Que Mr G et Mr D, du cabinet A, étaient également présents lors de certaines réunions et ont pu décrire les lieux tels qu’ils se présentaient avant les travaux de réfection ;

Considérant, dès lors, qu’aucun reproche ne peut être formulé quant à la façon dont se sont déroulées les opérations d’expertise ;

Sur les causes de l’incendie

Considérant que la société Y affirme que l’expert n’a pu émettre que des hypothèses, puisqu’il n’a effectué aucune constatation matérielle ; elle conteste ses conclusions sur la chute de tension, la protection mécanique du câble d’alimentation, son mode de pose et de raccordement, et sur le circuit de prise de courant protégé par le disjoncteur n° 8 ; elle indique que l’incendie a pu être provoqué par les travaux de rénovation réalisés par Mme X et son compagnon, par la guirlande destinée à éclairer le grenier et branchée sur la prise de courant de la salle de bains, par le câble d’alimentation qui avait été installé avant les travaux réalisés par son assurée, ou par un feu de cheminée ; elle ajoute que, en retenant plusieurs causes possibles, l’expert n’a pas été en mesure de déterminer la cause certaine de l’incendie, qui seule permettrait de mettre en jeu la garantie décennale de la société PGM TECHNIC ;

Considérant que Mme X répond que le rapport d’expertise est parfaitement étayé et écarte les hypothèses émises par l’assureur ; elle ajoute que, si le câble préexistant était défaillant, il appartenait à la société PGM TECHNIC de le remplacer, et que les deux explications retenues par l’expert reposent sur la même idée d’un échauffement de l’installation électrique ;

Considérant que le rapport d’expertise judiciaire est parfaitement clair et circonstancié : Mr F, s’appuyant sur le rapport de gendarmerie, a indiqué que le feu avait pris dans le grenier, en haut de l’escalier , et ne pouvait avoir qu’une origine électrique, toute autre cause devant être écartée compte tenu du lieu de naissance de l’incendie ;

Qu’il a nettement écarté l’hypothèse d’un feu de cheminée, dont le conduit était situé hors de la zone d’éclosion de l’incendie, et dont l’insert servait de desserte de bar ;

Qu’il a écarté l’hypothèse d’un échauffement de la guirlande servant à éclairer le grenier, personne ne s’étant rendu dans les combles avant l’incendie, et la trappe d’accès au grenier étant restée fermée ;

Qu’il n’a retenu que deux causes pouvant expliquer l’incendie : un défaut affectant le câble en aluminium sur lequel la société PGM TECHNIC a branché son installation ou un défaut affectant le circuit de prises de courant protégé par le disjoncteur n° 8, installé par cette même société ;

Que, dans ces deux cas, la responsabilité décennale de la société PGM TECHNIC est engagée, puisque les défauts évoqués par l’expert affectaient les travaux qu’elle avait réalisés et rendaient l’ouvrage impropre à sa destination, dans la mesure où il n’était pas suffisamment protégé contre les risques d’incendie ;

Considérant que la société Y soutient que, si l’incendie a été provoqué par le câble en aluminium préexistant, son assurée ne pouvait en être responsable ;

Mais considérant que, en tant que professionnel du bâtiment, spécialiste en électricité, il appartenait à la société PGM TECHNIC d’étudier la conformité du câble préexistant sur lequel elle avait l’intention de brancher son installation, et d’y apporter le cas échéant toutes les modifications jugées utiles afin d’assurer la sécurité de ses travaux, au besoin en remplaçant ce câble si sa section était insuffisante ou en l’entourant d’une gaine s’il n’était pas suffisamment protégé contre les rongeurs ;

Considérant, dès lors, que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité décennale de la société PGM TECHNIC, et donc la garantie de son assu-

reur ;

Sur les préjudices

Considérant que la société Y qualifie les demandes de l’intimée d’extravagantes ;

Considérant que Mme X fonde ses demandes sur le rapport d’un économiste de la construction, Mr Z, et sur les factures des entreprises ayant réalisé les travaux de remise en état ; elle demande un montant supérieur au titre de son préjudice mobilier ; elle ajoute une perte de loyers provenant de biens qu’elle a dû vendre pour financer les travaux ;

Considérant que Mr F s’est fait assister d’un sapiteur, économiste en construction, Mr C, afin de déterminer le montant des travaux de remise en état de l’immeuble ;

Que Mr C a détaillé chacun des postes de travaux, en tenant compte des factures d’entreprises produites par l’intimée et des travaux réalisés par Mr H, compagnon de Mme X ;

Que le sapiteur a retenu une somme de 10 euros de l’heure pour la main d’oeuvre assumée par Mr H, aboutissant ainsi à un total de 14.400 euros pour ce poste de travaux ;

Considérant que, pour s’opposer aux chiffres retenus par le sapiteur, Mme X a elle-même fait appel aux services d’un économiste de la construction, Mr Z, qui a établi un rapport sur les travaux réalisés par Mr H le 5 janvier 2009 ;

Mais considérant que ce document ne suffit pas à contredire les conclusions du sapiteur, pour deux raisons :

— d’une part, il a été établi plusieurs mois après le dépôt du rapport d’expertise et n’a donc pas été soumis à l’appréciation ni de l’expert, ni du sapiteur, ni de la société Y,

— d’autre part, il n’opère aucune distinction entre le coût des matériaux et celui de la main d’oeuvre, si bien qu’il est impossible de savoir précisément quel aurait été, selon ce spécialiste, le coût de la main d’oeuvre si les travaux n’avaient pas été réalisés par Mr H ;

Considérant que Mme X ne produit aucun autre document permettant de connaître le coût de la main d’oeuvre de professionnels pour les travaux réalisés par son compagnon ;

Que, dans ces conditions, la cour ne peut qu’entériner les chiffres retenus par le sapiteur ;

Considérant que, pour les travaux réalisés par les entreprises RODRIGUES, B et E, le sapiteur a pris en compte leurs factures dans le calcul du préjudice immobilier ;

Que le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a condamné la société Y au paiement de la somme de 123.749 euros à ce titre ;

Considérant que Mme X a dressé elle-même un inventaire du mobilier détruit par l’incendie, et en a fait sa propre évaluation, sans produire la moindre facture ;

Qu’elle ne propose donc à la cour aucun élément objectif pour s’opposer à l’évaluation du préjudice mobilier faite par Mr F ;

Que le chiffre de 14.823 euros retenu par celui-ci et entériné par le tribunal mérite donc d’être confirmé ;

Considérant que le jugement doit également être confirmé en ce qu’il a dit que les sommes de 123.749 euros et de 14.823 euros porteraient intérêts à compter du 18 février 2009, date de l’assignation ;

Considérant que la somme de 15.000 euros qui a été retenue par le tribunal au titre du trouble de jouissance mérite d’être confirmée, dans la mesure où ni Mme X, ni la société Y ne contestent ce chiffre ;

Considérant que Mme X, qui prétend avoir dû vendre des biens immobiliers et ainsi avoir perdu des loyers pour financer les travaux de réfection, ne produit aucun justificatif à l’appui de cette allégation ;

Que le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande ;

Considérant que les frais de nettoyage des locaux ont été inclus par l’expert dans les dommages mobiliers ;

Que Mme X ne justifie pas de ce que ces frais auraient été plus élevés que le montant retenu par l’expert ;

Considérant que l’intimée ne peut obtenir le remboursement des honoraires de Mr Z, dont le rapport, non contradictoire, n’a pas permis de contredire les chiffres retenus par le sapiteur ;

Considérant, par conséquent, que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispo

sitions ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Considérant qu’il apparaît équitable d’allouer à Mme X la somme complémentaire de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et de débouter l’appelante de sa demande fondée sur ce texte ;

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Et y ajoutant, condamne la société Y à payer à Mme X la somme complémentaire de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure

civile ;

Déboute la société Y de sa demande fondée sur ce texte ;

Condamne la société Y aux dépens de la procédure d’appel et dit qu’ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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