Cour d'appel de Paris, 3 avril 2014

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 3 avr. 2014
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Décision précédente : Autorité des marchés financiers, 21 octobre 2012

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 7

ARRÊT DU 03 AVRIL 2014

(n° 58, 18 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 2012/23179

Décision déférée à la Cour : rendue le 22 octobre 2012

par la Commission des sanctions de

L’AUTORITÉ DES MARCHES FINANCIERS

DEMANDERESSES AU RECOURS :

— La société ORCO PROPERTY GROUP

prise en la personne de son représentant légal

dont le siège social est : XXX

Elisant domicile au cabinet de Maître R TEYTAUD

XXX

— M. X Y

Né le XXX à XXX

Nationalité : Tchécoslovaque

Directeur salarié de société

Demeurant : XXXXXX

Elisant domicile au cabinet de Maître R TEYTAUD

XXX

— M. Q-R A,

Président Directeur Général de la société ORCO PROPERTY GROUP,

Né le XXX à XXX

Nationalité : Française

Elisant domicile au cabinet de Maître R TEYTAUD

XXX

assistés de :

— Maître R TEYTAUD,

avocat au barreau de PARIS

toque : J125

XXX

— Maître Nicolas VIGUIE

avocat au barreau de PARIS,

AARPI VIGUIE SCHMIDT PELTIER JUVIGNY,

XXX

EN PRÉSENCE DE :

— L’AUTORITÉ DES MARCHES FINANCIERS

représentée par son Président

XXX

représentée à l’audience par Mme Dominique LEPAGNOT, munie d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 janvier 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

— M. Christian REMENIERAS, Président

— Mme H I, Conseillère

— Mme D E, Conseillère

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : M. N O-P

MINISTÈRE PUBLIC :

L’affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par M. Marc BRISSET-FOUCAULT, Avocat Général, qui a fait connaître son avis.

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Christian REMENIERAS, président et par M. N O-P, greffier.

* * * * * * * *

La société Orco (Orco) est une société anonyme de droit luxembourgeois spécialisée dans l’immobilier. Essentiellement présente sur les marchés d’Europe centrale, son activité comprend la promotion immobilière, la location, l’hôtellerie et la gestion d’actifs.

La société Orco est dirigée par M. Q-R A, Président directeur général. M. X Y, membre du comité exécutif, en est vice-président. M. X, qui était administrateur délégué, directeur administratif et financier de cette société, a quitté le groupe Orco depuis le mois de janvier 2009.

Les actions Orco ont été introduites au Second marché d’Euronext Paris le 15 décembre 2000. Lors de la cotation de la société, son actionnaire principal et majoritaire était la société luxembourgeoise Orco Holding, devenue par la suite A & Co, également dirigée par M. Q-R A.

Après une année 2007 marquée par d’importants investissements à l’origine de la hausse significative de son niveau d’endettement, Orco a connu en 2008, dans un contexte de crise des marchés, des difficultés financières qui ont entraîné, le 17 juin 2008, la dégradation des notes qui lui avaient été attribuées par l’agence de notation Moody’s.

Au second semestre 2008, en vue de faire face à ces difficultés, Orco a pris plusieurs mesures visant à réduire ses coûts et son endettement, négociant avec les banques et de potentiels investisseurs.

En l’absence de nouveau financement extérieur, et en dépit des mesures prises, la société Orco a demandé l’ouverture d’une procédure de sauvegarde qui a été décidée par jugement du 25 mars 2009 du tribunal de commerce de Paris. La période d’observation s’est achevée le 19 mai 2010 par l’approbation par le même tribunal d’un plan de sauvegarde.

Durant l’année 2008, alors que le cours de l’action Orco avait baissé de 80 B à 25 B au 1er semestre pour atteindre 6 B à la fin de l’année 2008, soit une baisse de 96% par rapport à son plus haut cours de 130 B en 2007, des opérations sur le titre ont été effectuées :

— par la société Orco elle-même, entre le 3 janvier et le 2 octobre 2008, dans le cadre de l’exécution d’un programme de rachat de titres approuvé le 5 octobre 2007 et modifié le 22 février 2008 ;

— par l’un de ses actionnaires, la société A & Co, dirigée par M. Q-R A, entre le 31 juillet 2008 et le 20 octobre 2008 ;

— par M. X Y, entre le 15 décembre 2008 et le 10 février 2009.

Au titre de l’information financière, la société Orco a publié un certain nombre de communiqués dont, notamment, des communiqués des 28 août et 27 novembre 2008 portant respectivement sur ses résultats aux 30 juin 2008 et 30 septembre 2008, ainsi que des communiqués plus brefs et ponctuels, comme celui du 18 septembre 2008 intitulé 'pas de problème de solvabilité pour Orco'.

Le Secrétaire général de l’AMF a ouvert, le 12 décembre 2008, une enquête portant sur 'l’information financière et le marché de l’action Orco et de tout titre qui lui serait lié, à compter du 31 décembre 2007", enquête étendue, par décision du 4 février 2009, au deuxième semestre 2007.

Le rapport d’enquête et les observations demandées durant l’enquête ont été examinés le 28 juin 2011 par la Commission spécialisée n° 1 du Collège de l’AMF qui a décidé de notifier des griefs à la société Orco, ainsi qu’à M. Q-R A, président-directeur général, à M. X, en sa qualité d’administrateur délégué à l’époque des faits, et à M. X Y.

Le président de l’AMF a, par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 24 août 2011, notifié à ces personnes les griefs reprochés et la présidente de la Commission des sanctions a, le 22 septembre 2011, désigné un rapporteur.

Les griefs notifiés étaient en substance les suivants :

—  1 – Une première série de griefs, reprochés à Orco, M. A et M. X sur le fondement de l’article L. 621-15 II c) du code monétaire et financier (CMF), consistait à avoir, en violation des articles 223-1 et 632-1 du règlement général de l’AMF, communiqué au public des informations inexactes, imprécises ou trompeuses. Etaient à ce titre développés quatre griefs :

—  1.1, le premier relatif à l’inexactitude de l’annonce faite dans le communiqué du 27 novembre 2008, imputant l’évolution favorable de l’EBITDA ajusté à l’évolution favorable de l’activité de promotion immobilière, qui jusqu’alors était en retrait par rapport aux prévisions annoncées début 2008 ;

-1.2, le deuxième incriminait le fait que les informations sur la 'trésorerie disponible et assimilés’ figurant dans les comptes publiés et repris dans les communiqués des 28 août 2008 et 27 novembre 2008 n’avaient pas inclus de retraitements spécifiques concernant les éléments de trésorerie nantis ou bloqués alors même que la norme IAS 7 § 6 impose un tel retraitement ;

—  1.3, le troisième soutenait qu’aucun retraitement n’a été réalisé dans les comptes au 30 juin 2008 présentés dans le communiqué de presse du 28 août pour reclasser, en dettes à court terme, l’emprunt obligataire tchèque de 58 M€ alors même, que, compte tenu de la dégradation de la notation de Moody’s intervenue le 17 juin 2008, le groupe Orco ne disposait plus d''un droit inconditionnel de différer le règlement [dudit emprunt] pour au moins 12 mois’ ;

—  1.4, le quatrième incriminait le fait que le 18 septembre 2008, Orco avait annoncé au marché que 'les actionnaires historiques n’avaient vendu aucune de leurs actions’ alors même que la société A & Co avait cédé des actions Orco entre le 31 juillet 2008 et le 20 octobre 2008 de manière significative ;

—  2 – Une deuxième série de grief reprochait à la société Orco, sur le fondement des articles L. 621-14 I et L. 621-15 II c) du CMF, de ne pas avoir procédé aux déclarations prévues par l’article 241-4 du règlement général de l’AMF au titre du programme de rachat de ses propres titres qu’elle avait mis en oeuvre, et de n’avoir pas, en contravention de l’article 241-2 du même règlement, informé le marché par communiqué de presse de la modification de son programme de rachat, adoptée le 22 février 2008 ;

—  3 – Une troisième série de grief concernait M. X Y auquel était reproché, sur le fondement de l’article L. 621-15 II c) du CMF, de ne pas avoir respecté l’obligation d’abstention imposée par l’article 622-1 du règlement général de l’AMF en cédant 17 784 actions Orco entre le 15 décembre 2008 et le 10 février 2009 alors qu’il pourrait 'avoir été détenteur, en tant que vice-président du groupe Orco et membre du comité exécutif, d’informations privilégiées relatives à la dégradation significative de la situation financière du groupe Orco au cours de l’année 2008, qui a conduit la société (') à se placer sous la procédure de sauvegarde le 27 mars 2009 auprès du Tribunal de Commerce de Paris.'

Le rapporteur a déposé son rapport le 6 août 2012 , les mis en cause ont développé leurs observations en réponse et la séance de la Commission des sanctions s’est tenue le 28 septembre 2012.

Par décision du 22 octobre 2012 (la Décision) la Commission des sanctions de l’AMF a décidé de prononcer à l’encontre de la société Orco une sanction pécuniaire de 100 000 B, de M. Q-R A une sanction de 80 000 B, de M. X de 30 000 B, de M. X Y une sanction de 450 000 B et de publier sa décision sur le site Internet de l’AMF sous une forme préservant l’anonymat de M. X.

Sur l’information financière communiquée au public par la société Orco (1re série de griefs), la Décision estime caractérisés et imputables à la société Orco, à M. A et à M. X le second aspect du grief 1.1 et les griefs 1.2 et 1.4.

Sur le grief (2) relatif à l’information délivrée au public concernant le programme de rachat d’actions, la Décision retient que les manquements aux articles 241-2 et 241-4 du règlement général de l’AMF, imputables à la société Orco sont caractérisés.

La Décision retient enfin qu’est caractérisé le manquement d’initié reproché à M. X Y (grief 3).

LA COUR

Vu la décision du 22 octobre 2012 de la Commission des sanctions de l’Autorité des Marchés Financiers ;

Vu le recours contenant l’exposé de leurs moyens déposé le 20 décembre 2012 par la société Orco Property Group et M. Q-R A et leurs 'observations complémentaires et récapitulatives’ déposées le 29 octobre 2013, demandant à la cour :

. 'd’annuler la procédure AMF n° 11/17 ainsi que la décision de la Commission des sanctions du 22 octobre 2012 en ce qui concerne les manquements, objets du présent recours,' qui leur sont reprochés ;

. en tout état de cause :

. Infirmer la décision de la Commission des sanctions du 22 octobre 2012 en ce qu’elle les a condamnés au titre des manquements à leurs obligations d’information du public ;

. Les mettre hors de cause au titre des manquements reprochés.

Vu le recours contenant l’exposé de ses moyens, déposé le 20 décembre 2012 par M. X Y et ses 'observations complémentaires et récapitulatives’ déposées le 29 octobre 2013, demandant à la cour :

. d’annuler la procédure AMF n° 11/17 ainsi que la décision de la Commission des sanctions du 22 octobre 2012 en ce qui concerne le manquement qui lui est reproché ;

. en tout état de cause :

. Infirmer la décision de la Commission des sanctions du 22 octobre 2012 en ce qu’elle l’a condamné au titre du manquement d’initié qui lui est reproché par la notification de griefs;

. Le mettre hors de cause au titre de ce manquement d’initié.

Vu les observations de l’Autorité des Marchés Financiers du 26 juin 2013 ;

Vu les observations du Ministère public mises à la disposition des parties ;

Après avoir entendu les parties, qui ont pu répliquer et ont eu la parole en dernier, le représentant de l’AMF et M. l’Avocat général à l’audience du 16 janvier 2014 ;

Sur ce,

Sur les moyens d’annulation présentés par tous les requérants

Considérant qu’en premier lieu, les requérants prient la cour d’annuler la Décision en raison de l’illégalité de l’enquête de l’AMF résultant du fait que 'l’AMF ne disposait pas de pouvoirs de contrôle réguliers pour enquêter sur le titre ORCO'; qu’après avoir rappelé que la société Orco a son siège social à Luxembourg et que l’autorité de marché luxembourgeoise, la CSSF, était le 'superviseur unique’ d’Orco dans le cadre de l’information périodique et permanente et de son contrôle, ils font valoir que 'l’AMF n’a jamais apporté la preuve que l’ouverture de l’enquête le 12 décembre 2008« , qui a donné lieu à la notification de griefs du 24 août 2011 et à la Décision, 'est intervenue dans le respect de l’article 26 » de la directive transparence du 15 décembre 2004, 'et à tout le moins en accord avec la CSSF, interdisant ainsi une double poursuite pour des faits identiques, dès lors en outre que les sanctions encourues sont plus importantes en France qu’au Luxembourg’ ;

Mais considérant qu’il est constant que les titres de la société Orco ont été admis au Second marché d’Euronext Paris le 15 décembre 2000, puis en 2005 à Prague et en 2007 à Budapest et Varsovie et sont aujourd’hui cotés sur l’Eurolist C d’Euronext Paris ;

Considérant que l’article L. 621-1 du code monétaire et financier (CMF) dans sa rédaction issue de la loi du 1er août 2003 prévoit que l’AMF 'veille à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers et tous autres placements donnant lieu à appel public à l’épargne, à l’information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers’ et qu''afin d’assurer l’exécution de sa mission, l’Autorité des marchés financiers effectue des contrôles et des enquêtes'(article L. 621-9 du même code) ;

Qu’aux termes de l’article L. 621-15 II du CMF dans sa rédaction applicable à l’époque des faits : 'La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes: (. ..)

c) toute personne qui, sur le territoire français ou à l’étranger, s’est livrée ou a tenté de se livrer à une opération d’initié ou s’est livrée à une manipulation de cours, à la diffusion d’une fausse information ou à tout autre manquement mentionné au premier alinéa du 1 de l’article L. 621-14, dès lors que ces actes concernent un instrument financier émis par une personne ou une entité faisant appel public à l’épargne ou admis aux négociations sur un marché d’instruments financiers ou pour lequel une demande d’admission aux négociations sur un tel marché a été présentée, dans les conditions déterminées par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers', étant rappelé que l’article L. 621-14 I vise les 'manquements aux obligations résultant des dispositions législatives et réglementaires ou des règles professionnelles visant à protéger les investisseurs contre les opérations d’initié, les manipulations de cours et la diffusion de fausse information, ou à tout autre manquement denature à porter atteinte à la protection des investisseurs ou au bon fonctionnement des marchés';

Qu’il en résulte que les requérants ne sont pas fondés à contester la possibilité pour l’AMF de procéder à une enquête sur 'l’information financière et le marché de l’action Orco Property Group, et de tout titre qui lui serait lié, à compter du 31 décembre 2007" (enquête ouverte le 12 décembre 2008) et que la Commission des sanctions s’est à juste titre reconnue compétente pour connaître des manquements reprochés à la société Orco, M. A, M. X et M. Y relatifs à la diffusion de fausses informations et à des opérations d’initié ;

Considérant, en outre, que la Directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil 'sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE’ a pour objet d’harmoniser les exigences concernant la divulgation de l’information périodique et permanente ; qu’ainsi que l’observe l’AMF, les dispositions de l’article 26, intitulé 'mesures conservatoires', de ladite directive (transposées à l’article L. 451-1-5° du CMF), qui sont invoquées par les requérants, ont pour objet de prévoir une compétence subsidiaire de l’AMF pour prendre des mesures conservatoires en ce qui concerne les obligations de divulgation de l’information et ne concernent pas le contrôle de la qualité de l’information délivrée au public ;

Considérant que les dispositions ainsi invoquées, qui ne concernent ni les enquêtes ni les contrôles, ne font pas obstacle à ce qu’un régulateur national, en l’espèce l’AMF, surveille la qualité de l’information délivrée au public sur un titre négocié sur le marché réglementé qu’elle régule, tel le titre Orco ; que l’argumentation des requérants relative à l’illégalité de l’enquête n’est par conséquent pas fondée et leur demande d’annulation de la Décision de ce chef doit être rejetée ;

Considérant qu’en second lieu, les requérants font valoir que la procédure doit être annulée 'en raison de l’atteinte particulièrement grave, disproportionnée et irrémédiable commise par l’AMF aux droits de la défense’ d’Orco, de M. A et de M. Y et 'au principe de l’égalité des armes’ ; qu’ils exposent que dans le cadre d’une nouvelle enquête ouverte le 20 février 2013 sur le titre Orco, les enquêteurs de l’AMF ont été autorisés par ordonnance du juge des libertés et de la détention (JLD) de Paris du 7 mai 2013 à procéder à des opérations de visite et de saisie qui se sont déroulées le 13 mai 2013 dans les locaux parisiens des sociétés Orco, opérations au cours desquelles, les services de l’AMF ont procédé à des saisies globales de messageries comprenant des correspondances échangées entre avocat et clients relativement à la présente procédure tant antérieurement à la Décision du 22 octobre 2012 que durant le recours dont est saisi cette cour ; qu’ils précisent à l’audience que si les recours d’Orco en annulation de l’ordonnance du JLD et des conditions du déroulement des opérations de visite ont été rejetés, des recours contre ces décisions sont pendants ; qu’ils font valoir qu’en tout état de cause, l’AMF a pu prendre connaissance depuis le 13 mai 2013 de documents confidentiels qui intéressent la présente procédure, documents dont l’Autorité disposait lorsqu’elle a déposé ses observations devant cette cour le 26 juin 2013 ce dont il résulte une atteinte aux principes invoqués garantis par l’article 6 de la CEDH devant entraîner la nullité de la Décision ;

Mais considérant que la Décision qui fait l’objet du présent recours a été prononcée le 22 octobre 2012 par la Commission des sanctions, soit antérieurement à la nouvelle enquête ouverte par l’AMF le 20 février 2013 et aux saisies évoquées qui se sont déroulées le 13 mai 2013 ; que, s’il est exact que les observations de l’AMF, en réponse aux exposés des moyens des requérants du 20 décembre 2012, ont été déposées le 26 juin 2013, soit postérieurement aux saisies du 13 mai 2013, aucun élément dans les observations de l’AMF, qui se bornent à expliciter la Décision et à répondre aux argumentations des requérants, ne laisse supposer que l’AMF aurait pris connaissance, ni a fortiori aurait exploité dans le cadre de la présente procédure, les correspondances confidentielles évoquées qui auraient été saisies le 13 mai 2013 ; qu’il n’est d’ailleurs invoqué par les requérants aucun élément concret de nature à laisser penser que l’AMF aurait eu connaissance de telles correspondances, ni même à susciter le moindre doute sur ce point ; que les atteintes invoquées ne sont pas établies ; que le moyen d’annulation proposé par les requérants sera rejeté ;

Sur les moyens d’annulation présentés par M. Y

Considérant qu’en premier lieu, M. Y soutient que l’enquête de l’AMF est entachée d’illégalité en ce qu’elle a débouché sur des griefs pour un manquement d’initié qui aurait été commis postérieurement à la décision d’ouverture d’enquête ; que, selon le requérant, il résulterait implicitement de la Charte de l’enquête publiée par l’AMF le 10 septembre 2012 que les enquêteurs qui tirent leur pouvoir d’enquête de leur ordre de mission, ne peuvent recueillir des informations sur une période postérieure à la période objet de l’enquête sans obtenir une décision d’extension de l’enquête ; qu’en l’espèce, l’enquête ayant été ouverte le 12 décembre 2008 sur l’information financière et le marché de l’action Orco et de tout titre qui lui serait lié à compter du 31 décembre 2007, et ayant fait l’objet d’une extension le 4 février 2009 qui avait pour seul objet d’y inclure la période allant de fin juin à fin décembre 2007, les enquêteurs de l’AMF n’avaient pas le pouvoir de s’intéresser à des cessions d’actions effectuées par M. Y à compter du 15 décembre 2008 ;

Mais considérant qu’il ne peut être déduit de la Charte invoquée que la date de la décision d’ouverture d’enquête constituerait 'la borne ultime du pouvoir d’investigation de la DESM’ (conclusions du requérant page 11) ; qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne s’oppose à ce que les enquêteurs relèvent des faits postérieurs à la décision d’ouverture d’enquête ; que cette décision se borne à fixer le point de départ de la période sous enquête et ne fait pas obstacle à ce que, pendant le déroulement de l’enquête, soient relevés des faits postérieurs à la date d’ouverture de l’enquête et susceptibles de donner lieu à notification de griefs ; qu’il en résulte que, contrairement à ce qui est soutenu, l’enquête en l’espèce ouverte le 12 décembre 2008 – qui a, en particulier porté sur des cessions d’actions effectuées du 15 décembre 2008 au 10 février 2009 par M. Y auquel a été notifié le 24 août 2011 un grief de manquement d’initié – n’est pas entachée d’illégalité ; qu’il est, au surplus, observé que même si l’analyse du requérant devait être suivie – ce qui n’est pas le cas – la critique ne serait pas fondée en raison de l’extension de l’enquête le 4 février 2009 ;

Considérant qu’en deuxième lieu, M. Y invoque la nullité de la procédure de l’AMF relativement au manquement d’initié qui lui est reproché en faisant valoir que les règles impératives de loyauté applicables aux auditions n’ont pas été respectées lors de son audition à Prague le 15 avril 2010 dans les locaux de la Czech National Bank (CNB), homologue Tchèque de l’AMF, audition au cours de laquelle la moitié des questions lui ont été posées par l’enquêteur de l’AMF, présent aux côtés des agents de la CNB ; qu’en effet, il n’a pas été convoqué par une lettre lui indiquant ses droits, dont celui de se faire assister d’un conseil, ni mis en mesure de renoncer à une telle assistance (articles L. 621-11 et R.621-35 du CMF) ;

Considérant que, par courrier du 3 mars 2010, la DESM a requis l’assistance de la CNB pour obtenir des informations relatives aux cessions d’actions Orco réalisées par M. Y et entendre ce dernier ; que cette audition, qui a été enregistrée, a eu lieu dans les locaux de la CNB le 15 avril 2010 en présence de deux agents de la CNB, deux agents de l’AMF dont l’un a également posé des questions, et un interprète et ce, après que M. Y ait été informé de ses 'droits et obligations dans le cadre de (sa) déposition', droits et obligations de droit tchèque, qui, ainsi qu’il résulte de la transcription de l’enregistrement, ont été rappelés à l’intéressé ;

Considérant que, comme l’AMF, la CNB est signataire du 'Multilateral Memorandum of Understanding’ de l’Organisation Internationale des Commissions de Valeurs mobilières qui prévoit en son article 9 relatif à l’exécution des demandes d’assistance qu''à moins que les Autorités n’en aient décidé autrement, les informations et documents demandés dans le cadre du présent Accord seront rassemblés conformément aux procédures en vigueur dans la juridiction de l’Autorité requise, par les personnes qu’elle aura désignées…';

Qu’il en résulte que la régularité des actes accomplis par la CNB en application du droit tchèque doit être appréciée au regard de ce droit dont il n’a pas été soutenu qu’il aurait été méconnu; que le requérant ne saurait tirer argument du fait que l’enquêteur de l’AMF a posé des questions, pour en déduire que le droit français serait applicable ; que les dispositions invoquées n’étant pas applicables, le moyen ne peut qu’être rejeté ;

Considérant que M. C reproche, en troisième lieu, à la Commission des sanctions saisie par le Collège dans les limites de la notification des griefs d’avoir modifié la définition de l’information privilégiée au titre de laquelle il avait été mis en cause et d’avoir ainsi outrepassé les limites matérielles de sa saisine ce qui justifierait l''infirmation’ de la Décision ; qu’il fait valoir que la notification de griefs faisait état d''informations privilégiées relatives à la dégradation significative de la situation financière du groupe Orco', à savoir trois informations distinctes : les difficultés de trésorerie du groupe, les difficultés de financement d’un projet à Varsovie et la recherche de partenaires financiers pour entrer au capital d’Orco, et reproche à la Décision, qui a admis que 'pris isolément, aucun de ces éléments n’était assez 'précis’ au sens de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF', d’avoir développé, sans notification de grief complémentaire, au mépris des droits de la défense, une nouvelle définition de l’information privilégiée résultant de la réunion des trois informations réunies comme constituant un ensemble de circonstances permettant de caractériser une seule information privilégiée : celle relative aux difficultés de trésorerie auxquelles la société ne parvenait pas à faire face ;

Mais considérant qu’aux termes de la notification de griefs adressée à M. Y le 24 août 2011 : '3 – Or, l’information relative aux difficultés financières du groupe paraît avoir présenté l’ensemble des caractéristiques d’une information privilégiée dès le 14 décembre 2008.

En effet, cette information était :

— précise : le 14 décembre 2008, vous avez eu communication de difficultés majeures rencontrées quant au financement du principal projet en Pologne du groupe Orco (projet Zlota), qui venaient s’ajouter aux difficultés de trésorerie du groupe, dont vous étiez régulièrement informé au titre des prévisionnels de « cash flow» communiqués pas M. (X). Ces informations constituaient des éléments suffisamment définis et intelligibles pour permettre d’en tirer une conclusion négative sur le cours du titre Orco ;

— non connue du public : les conséquences de la dégradation très significative de la situation financière du groupe au cours de 2008, qui s’est plus particulièrement fait ressentir à compter du second semestre 2008 n’étaient pas connue du public. Les difficultés tenant au projet Zlota n’avaient fait l’objet d’aucune communication spécifique de la part du groupe, de même que les négociations dans le cadre de la recherche de partenaires financiers comme les sociétés Cogef ou Cofis. ;

— susceptible d’avoir une influence sur le cours du titre Orco : la connaissance des difficultés de trésorerie rencontrées par le groupe Orco, nécessitant la recherche active de partenaires externes pour renforcer ses fonds propres et assurer la continuité de projets importants tels que le projet Zlota, n’aurait pas manqué d’avoir une incidence négative sur le cours du titre Orco.

Un investisseur raisonnable aurait donc pu utiliser cette information avant qu’elle ne soit rendue publique comme l’un de ses fondements pour vendre des titres Orco.

Ainsi l’annonce de la mise sous 'procédure de sauvegarde’ de la société Orco Property Group SA, le 27 mars 2009, après la suspension de sa cotation sur le marché d’Euronext Paris a entraîné, à la reprise de la cotation, une baisse de 17,7% du cours d’Orco'.;

Qu’il en résulte que, contrairement à ce qui est soutenu, la notification de griefs visait explicitement une seule information privilégiée constituée d’éléments venant 's’ajouter’ les uns aux autres ; que, de même, la Décision s’appuie sur la réunion de ces éléments, qu’elle rappelle (page 14), 'qui convergeaient, en ce qu’ils faisaient tous apparaître, chez Orco, des difficultés financières’ et constituaient 'un ensemble de circonstances dont la réunion, la simultanéité et la convergence confèrent à l’information sur les difficultés de trésorerie auxquelles la société ne parvenait pas à faire face – et qui ont conduit à son placement sous sauvegarde judiciaire le 25 mars 2009 – un caractère suffisamment univoque et alarmant pour qu’il soit possible d’en tirer une conclusion sur l’évolution du titre’ ; que c’est sans excéder les limites de sa saisine que la Commission des sanctions a étudié les caractéristiques de l’information visée par la notification de griefs afin d’apprécier s’il s’agissait d’une information privilégiée ;

Sur les autres demandes de la société Orco et de M. A

Considérant que la société Orco et M. A contestent la Décision en ce qu’elle a retenu qu’ils avaient, en violation des articles 223-1 et 632-1 du règlement général de l’AMF, communiqué au public des informations inexactes, imprécises ou trompeuse ;

Sur le grief 1.1

Considérant que, s’agissant de l’annonce incriminée figurant dans le communiqué du 27 novembre 2008 relative à l’évolution de l’EBITDA, la société Orco et M. A font valoir que la Décision a dénaturé les termes du grief notifié par le Collège – qui, selon les requérants, ne concernait que l’imputation dans le communiqué de l’évolution favorable de l’EBITDA ajusté du groupe à l’évolution favorable de l’activité de l’activité de promotion résidentielle (grief que la Décision estime non caractérisé) – en ajoutant à la notification de griefs, sans notification de griefs complémentaire, un reproche distinct tiré de l’imprécision qui affecterait les indications sur l’amélioration de la rentabilité d’exploitation de la promotion résidentielle et la marge moyenne de 20 à 25% pour les contributeurs les plus importants ; qu’ils ajoutent qu’en tout état de cause, l’information communiquée par Orco, qui n’était pas lacunaire, n’a pas pu avoir pour effet de tromper le public ; qu’en effet, le résultat opérationnel global était mentionné dans le communiqué du 27 novembre 2008 et il n’était ni obligatoire, ni nécessaire de détailler activité par activité ce résultat, d’autant qu’il s’agissait d’un communiqué financier trimestriel qui n’a pas vocation à entrer dans les détails et que sa comparaison avec celui de septembre 2007 permettait au public d’apprécier l’évolution défavorable de l’ensemble des activités du groupe Orco ; que, selon les requérants, la Décision a fait une lecture erronée du communiqué s’agissant de l’absence de mention du 'double retraitement’ effectué sur l’EBITDA ajusté car Orco n’a communiqué que sur la rentabilité d’exploitation de l’activité de promotion résidentielle qui s’était effectivement améliorée ; qu’en outre, l’information publiée dans ce communiqué de huit pages permettait au public de situer dans son contexte et d’apprécier en toute connaissance de cause l’évolution de l’activité de promotion immobilière du groupe, étant observé que ce communiqué exposait les graves difficultés auxquelles Orco devait faire face et qu’il était exact de souligner une moins mauvaise nouvelle à savoir l’amélioration de la rentabilité d’exploitation de l’activité de promotion résidentielle ; qu’enfin, la Commission a fondé son argumentation sur une lecture erronée du tableau interne joint au courriel du 18 novembre 2008 du directeur du contrôle de gestion et de la consolidation du groupe alors que ce n’est que l’allocation des frais centraux, non spécifiquement liés à l’activité promotionnelle, qui a rendu déficitaire l’activité de promotion résidentielle dont la rentabilité 'intrinsèque’ s’est améliorée au cours de la période considérée passant de – 6 millions B à – 4 millions B ;

Mais considérant que les notifications de griefs adressées par courriers des 24 août 2011 l’une à la société Orco, l’autre à M. A G, s’agissant de l’annonce faite dans le communiqué du 27 novembre 2008 :

— ' en imputant l’annonce, dans le communiqué du 27 novembre 2008, l’évolution favorable de

l’EBITDA ajusté à l’évolution favorable de l’activité de promotion résidentielle, activité qui jusqu’alors était en retrait par rapport aux prévisions annoncées en début 2008, le groupe Orco pourrait avoir manqué aux dispositions des articles 223-1 et 632-1 du règlement général de l’AMF',

— et, après analyse des termes du communiqué et des éléments issus d’un tableau joint à un courrier du 18 novembre 2008 du directeur du contrôle de gestion et de la consolidation du groupe permettant de 'constater que l’activité promotionnelle apparaissait en augmentation uniquement dans le cas où il était procédé à un double retraitement : celui consistant à ne pas tenir compte du profit de cession des actifs et celui consistant à ne pas tenir compte des coûts centraux du groupe supportés par chaque activité',

— la notification de griefs concluait que 'compte tenu de ces éléments, il semblait donc imprécis, inexact et trompeur d’indiquer dans le communiqué du 27 novembre 2008, d’une part, que la 'rentabilité d’exploitation de la promotion résidentielle s’est améliorée', et d’autre part que l’évolution positive de l’EBITDA ajusté du groupe confirmait les annonces faites dans le communiqué du 28 août 2008…" ;

Considérant qu’il en résulte que les requérants ne peuvent soutenir que la Décision a ajouté aux notifications de griefs en retenant que le grief notifié consistait, s’agissant du communiqué du 27 novembre 2008, d’une part, à avoir attribué l’évolution favorable de l’EBITDA ajusté à l’évolution favorable de l’activité de promotion résidentielle (premier aspect du grief non retenu par la Décision car manquant en fait) et d’autre part, à avoir affirmé que la rentabilité d’exploitation de l’activité de promotion résidentielle s’améliorait alors que, selon les données disponibles en interne, il était nécessaire de procéder à un double retraitement pour qu’elle affiche une progression (second aspect du grief estimé caractérisé par la Décision) ;

Considérant que le communiqué du 27 novembre 2008 relatif aux comptes non audités du 3e trimestre 2008 comprend l’annonce suivante :

'L’EBITDA ajusté s’élève à 63,5 millions contre 29,6 millions d’B pour la même période en 2007.

'L’augmentation à 18 millions d’B (contre 10 millions d’B en juin 2008) de l’EBITDA sans vente d’actifs au cours des trois derniers mois confirme la tendance positive prévue en juin. La rentabilité d’exploitation de la promotion résidentielle s’est améliorée comme les projets majeurs de 2008 sont en train d’être comptabilisés et reconnus aux 3e et 4e trimestres, avec une marge moyenne de 20 à 25% pour les contributeurs les plus importants.

'Le programme de ventes a contribué à l’EBITDA à la hauteur de 45 millions d’B, 13 millions d’B correspondant au gain net sur les prix de cession, comparés à la dernière évaluation enregistrée, et 32 millions d’B correspondant aux bénéficies accumulés de la réévaluation comptabilisés depuis l’acquisition.';

Considérant que, dès lors qu’il n’est pas reproché à l’émetteur de ne pas avoir porté à la connaissance du public des informations sur toutes les activités d’Orco ou sur le détail des retraitements comptables opérés, l’argumentation des requérants contestant le caractère lacunaire de l’information délivrée est inopérante ;

Considérant que le caractère lacunaire de l’information retenu par la Décision, qui, contrairement à ce qui est soutenu, n’a pas une lecture erronée du tableau interne joint au courriel du 18 novembre 2008 dont il est fait état, résulte du fait que le communiqué du 27 novembre 2008 se bornait à faire état du fait que 'la rentabilité d’exploitation de la promotion résidentielle s’est améliorée', sans nuancer cette affirmation alors que l’activité de promotion résidentielle était fortement déficitaire et que seul l’EBITDA ajusté avant cession d’actifs et avant allocation des frais centraux (qui passait de – 6,3 M B en juin 2008 à – 4,8 M B en septembre 2008) était susceptible de fonder 'l’amélioration’affirmée, affirmation qui ne permettait pas au public de situer dans son contexte et d’apprécier en toute connaissance de cause l’évolution de l’activité de promotion résidentielle alors que le résultat opérationnel de cette activité négatif en juin 2008 (- 34,6 M. B) s’était aggravé en septembre 2008 (- 41,5 M B), qu’en outre, l’EBITDA ajusté de ladite activité était devenu négatif en septembre 2008 et l’EBITDA ajusté avant cession d’actifs était également négatif et en baisse depuis juin 2008 ;

Qu’il en résulte que les requérants ne sont pas fondés à contester la Décision en ce qu’elle retient que l’information ainsi dispensée dans le communiqué du 27 novembre 2008 n’était pas exacte, précise et sincère au sens de l’article 223-1 du règlement général de l’AMF ;

Sur le grief 1.2

Considérant que, s’agissant du grief consistant à ne pas avoir, en violation de la norme IAS 7 § 6, retraité 'certaines sommes significatives soumises à restriction’ dans la communication du montant du poste 'trésorerie disponible ou assimilés’ figurant dans les comptes aux 30 juin 2008 puis au 30 septembre 2008, respectivement repris et publiés dans les communiqués des 28 août 2008 et 27 novembre 2008, ou de ne pas avoir porté à la connaissance du public les restrictions affectant ces sommes, les requérants font valoir que les chiffres de trésorerie communiqués au marché correspondaient aux montants figurant dans les comptes consolidés d’Orco et qu’Orco n’avait pas précisément connaissance au jour de la publication de ses communiqués de la partie non disponible de sa trésorerie ; qu’ils ajoutent qu’en tout état de cause, Orco n’avait pas à modifier ses méthodes comptables concernant la présentation d’états financiers intermédiaires ;

Considérant qu’il est constant que le communiqué du 28 août 2008, sur les comptes au 30 juin 2008 indiquait que 'Le groupe a clôturé la période avec 103 millions d’B de liquidités ou d’équivalents', reprenant ainsi sans plus de précision l’information disponible dans le bilan, et que le communiqué du 27 novembre 2008, qui reproduisait le bilan au 30 septembre 2008 faisant état de 'liquidité ou équivalent de liquidité’ de 103,5 millions B, ne faisait aucun commentaire particulier sur la trésorerie disponible ;

Considérant que la Décision, qui rappelle, d’une part, la norme IAS 7 § 6 qui prévoit que la trésorerie comprend les fonds en caisse et les dépôts à vue et définit les équivalents de trésorerie comme les 'placements à court terme très liquides, qui sont facilement convertibles en un montant connu de trésorerie et qui sont soumis à un risque négligeable de changement de valeur', et la même norme § 48 qui impose à l’entreprise d’indiquer, en le commentant, le montant des soldes importants de trésorerie et équivalents détenus mais non disponibles pour le groupe, et d’autre part, les § 28 , 10 et 16 de la norme IAS 34, retient à juste titre que l’obligation d’information portant sur les soldes importants de trésorerie non disponible s’applique, dans les mêmes conditions, aux états financiers intermédiaires et annuels et que, l’indisponibilité, lorsqu’elle résulte d’un événement significatif intervenu au titre de la période intermédiaire, doit figurer dans les états financiers de cette période et non pas seulement dans les états financiers annuels ;

Considérant, en l’espèce, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il résulte du courriel du 1er août 2008 du directeur du contrôle de gestion et de consolidation du groupe que la société Orco disposait en interne, avant la publication des communiqués en cause, de l’information selon laquelle 'la majeure partie des 60 millions de trésorerie’ était en réalité soumise à des restrictions d’utilisation ;

Que, cependant, aucune information relative à l’existence même de restrictions n’a été donnée au marché dans les communiqués des 28 août et 27 novembre 2008, alors même que l’entreprise savait à ces dates que l’indisponibilité concernait une proportion significative de la trésorerie ; qu’il est inopérant à cet égard pour les requérants de soutenir qu’ils n’avaient pas une connaissance précise du montant de trésorerie soumis à restrictions ; qu’il ne peuvent davantage se prévaloir du fait que des analystes auraient compris à la lecture du communiqué du 27 novembre 2008 que la situation de trésorerie du groupe était mauvaise ; qu’en effet, outre le fait que la note d’analyse produite du 1er décembre 2008 se borne à faire état 'd’une situation de liquidité qui sera particulièrement tendue au S1 2009", soit durant une période postérieure aux communiqués, l’information dont aurait pu disposer un analyste ne serait pas de nature à permettre à un émetteur de se dispenser de communiquer une information au marché ;

Considérant, enfin, que les requérants ne sont pas fondés à déduire du fait qu’auraient été utilisées dans les communiqués de 2008 en cause les mêmes normes comptables que dans les comptes annuels de 2007 (Cf norme IAS 34 § 28) qu’ils auraient respecté en 2008 la norme IAS 7, étant en outre rappelé l’importance de porter à la connaissance du public l’information 'dont l’omission aurait pour effet de rendre trompeurs le états financiers intermédiaires’ et tout événement significatif pour la compréhension de la période intermédiaire (Cf la norme IAS 34 § 10 et 16) ;

Qu’il en résulte que la Décision, qui retient établi ce manquement, doit être approuvée ;

Sur le grief 1.4

Considérant que les requérants ne remettent pas en cause le caractère inexact de l’information, mais soutiennent qu’ils n’ont pas manqué aux dispositions des articles 223-1 et 632-1 du règlement général de l’AMF ; qu’ils font valoir que les circonstances extraordinaires qui ont entouré la publication de ce communiqué ont influé sur son contenu à l’élaboration duquel M. A n’a pas participé et ont conduit Orco à différer la publication d’un rectificatif ; que renvoyant sur ces points à leurs explications durant la procédure de l’Autorité, ils insistent sur le contexte exceptionnel de crise financière de 2008, conduisant Orco, non à cacher une information, mais à différer un rectificatif dans l’espoir que le marché se stabilise et pour pouvoir justifier du fait que M. A restait bien dirigeant du groupe malgré la vente d’actions qui avait été imposée par la Société Générale dans le cadre de l’exercice d’une sûreté ; qu’ils ajoutent qu’Orco n’avait pas connaissance des cessions de titres Orco et n’aurait pu, en tout état de cause, avoir connaissance que d’une partie seulement et relativement minime de ces cessions, à savoir celles réalisées avant la rédaction du communiqué et son envoi pour publication le 17 septembre vers 17 heures ; qu’ainsi le nombre d’actions Orco cédées par A & Co au moment de l’envoi par Orco du communiqué (197 402 actions représentant 1,53% du capital d’Orco sachant que A &Co en détenait encore alors 10,51%) ne peut être considéré comme très significatif ;

Mais considérant que le communiqué de presse du 18 septembre 2008 mentionne que 'les actionnaires historiques n’avaient vendu aucune de leurs actions’ ; qu’il résulte cependant du dossier que la société A & Co, détenue par M. Q-R A, avait cédé, sans que ce dernier ne l’ignore, des titres Orco qui avaient été donnés en nantissement à une banque en garantie d’un prêt, et ce dès le 1er août 2008 ; qu’en effet, ont été cédés le 1er août 2008 : 30 000 titres, le 8 août 2008 : 42 000 titres, le 13 août 2008 : 8 000 titres, le 9 septembre 2008 : 2 000 titres, le 16 septembre 2008 : 50 500 titres, le 17 septembre 2008 : 184 902 titres dont 34 902 le matin et 150 000 l’après-midi et le 18 septembre 2008 : 303 500 titres ; que même à suivre l’argumentation des requérants selon lesquels seuls 167 402 titres Orco avaient été cédés avant l’envoi le 17 septembre du communiqué à publier le 18 septembre, il n’en demeure pas moins que, contrairement à ce qu’affirmait l’information communiquée le 18 septembre 2008, les actionnaires historiques avaient vendu de leurs actions, au surplus dans des proportions importantes ; qu’en outre, le marché n’a été informé des cessions d’A & Co que le 12 novembre 2008 ;

Considérant que les requérants se bornent devant la cour à renvoyer à l’argumentation développée en première instance et écartée par la Décision par d’exacts motifs que la cour approuve (Décision page 11, § 1) ; qu’il sera simplement rappelé que le contexte de crise invoqués par les requérants ne saurait justifier la communication au public d’une information inexacte et trompeuse ; que le manquement imputable tant à la société Orco qu’à M. A est caractérisé ;

Sur les sanctions

Considérant que tant la société Orco que M. A soutiennent que le montant de la sanction qui leur a respectivement été infligée est injustifié ; qu’ils font valoir qu’ils n’ont retiré aucun avantage ou profit des manquements reprochés ; que la Décision ne pouvait prendre en compte le fait que la société Orco avait déjà été sanctionnée par la Commission des sanctions le 8 décembre 2005 car elle a, ce faisant, révélé une décision qui n’était accessible sur le site Internet de l’AMF que sous forme anonymisée et tenu compte d’une circonstance aggravante de récidive non prévue par la loi ; que les 'anomalies’ comptables en cause sont involontaires et n’ont pas trompé le marché et que les circonstances exceptionnelles liées tant à la crise financières qu’aux profondes mutations intervenues au sein d’Orco doivent être pris en considération, d’autant qu’il était pertinent, après le communiqué du 18 septembre 2008, de retarder la publication d’un rectificatif dont les effets auraient pu être 'bien pire au regard de la situation du marché de cette époque de crise';

Considérant qu’aux termes de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier : 'le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements.'

Considérant qu’en matière d’information financière, et en l’absence de tout profit directement lié aux manquements, la Décision fonde à juste titre la sanction sur la gravité des manquements ;

Considérant, s’agissant de la société Orco, que la Commission a pu, retenir comme un élément de gravité, le fait que cette société avait déjà été avertie, dans le cadre d’une procédure pour manquement à l’obligation d’information ayant donné lieu à une sanction prononcée le 8 décembre 2005, de l’importance et de l’intérêt pour le public d’une communication d’informations exactes, précises et non trompeuses ; qu’il importe peu à cet égard que la précédente décision ait fait l’objet d’une publication sous forme anonyme sur le site Internet de l’AMF ; que la gravité des manquements résulte aussi de leur multiplicité, étant rappelé que la Décision sanctionne la société Orco non seulement au titre des trois manquements aux articles 223-1 et 623-1 du règlement général de l’AMF consistant à avoir communiqué au public des informations inexactes, imprécises ou trompeuses, qui font l’objet du présent recours, mais aussi au titre de manquements aux articles 241-2 et 241-4 du même règlement à l’occasion de la modification et de l’exécution par Orco de son programme de rachat d’actions (Décision pages 12 et 13) qui ne font pas l’objet de contestations dans le cadre du présent recours ; que cette gravité résulte enfin du fait que les manquements correspondant aux griefs 1.4 et 2, ont conduit à dissimuler au public des informations sur les agissements mêmes de la société ou de ses actionnaires historiques ;

Considérant que l’argumentation développée et non justifiée par M. A dans le cadre du présent recours ne contredit pas les termes de la Décision qui retient exactement qu’en sa qualité de président directeur général de la société Orco, M. A, dont il est établi qu’il prenait activement part à la communication financière de l’émetteur, est le débiteur, au premier chef, de l’obligation de donner au marché une information exacte, précise et sincère et qu’il ne justifie d’aucune circonstance particulière qui l’aurait privé de l’exercice de ses fonctions ;

Considérant, enfin, que le contexte exceptionnel de crise des marchés mis en avant par les requérants devait, à l’inverse de ce qu’ils allèguent, conduire de leur part à une vigilance accrue sur la qualité de l’information délivrée au public ;

Considérant que les sanctions prononcées par la Décision à l’encontre de la société Orco et à l’encontre de M. A étant justifiées et proportionnées aux manquements commis, leur recours sera rejeté ;

Sur les autres demandes de M. Y

Considérant que M. Y expose ne pas avoir commis de manquement d’initié en cédant, entre le 15 décembre 2008 et le 10 février 2009, une partie des actions Orco qu’il détenait; qu’il fait, en premier lieu, valoir, que l’information 'composite’ amalgamée par la Décision ne présente aucune des caractéristiques d’une information privilégiée et, en second lieu, qu’il n’a pas utilisé d''information privilégiée’ pour décider de vendre des actions Orco ;

Considérant que, selon le requérant, l’information 'composite’ amalgamée par la Décision n’est ni précise, ni inconnue du public, ni susceptible d’avoir une influence significative sur le cours de bourse ;

— qu’en effet, cette information composite n’est, ainsi que l’avait retenu le rapporteur de la Commission, pas précise ; que la réunion de trois informations équivoques ne saurait conférer à l’information sur 'les difficultés de trésorerie auxquelles la société ne parvenait pas à faire face’ un caractère suffisamment univoque et alarmant pour la qualifier de précise ; que les trois informations 'amalgamées’ sont équivoques sur la situation financière d’Orco le 15 décembre 2008 et ne constituent ni une information plus alarmante que ce qui avait déjà été communiqué au marché, ni une information permettant de savoir que la situation d’Orco aurait été irrémédiablement compromise et ce, qu’il s’agisse du tableau financier du 1er décembre 2008 qui était un simple outil de gestion à la disposition du management montrant la nécessité de faire des arbitrages entre les projets en cours ou à lancer, ce dont le marché était déjà été informé, qu’il s’agisse des difficultés du projet Zlota car le courriel du 14 décembre 2008 faisait état d’une information positive, à tout le moins équivoque, concernant la construction de cette tour actuellement achevée à Varsovie ou qu’il s’agisse enfin de l’information concernant la recherche de partenaires extérieurs car aucune conclusion ne pouvait être tirée le 15 décembre 2008 du début des négociations entreprises par Orco avec ses partenaires financiers ;

— qu’en effet, cette information 'composite’ était connue du public avant le 15 décembre 2008, le marché ayant connaissance tant des graves difficultés financières du groupe Orco que des difficultés d’exécution du projet Zlota et de la recherche par Orco de nouveaux investisseurs ;

— qu’en effet, enfin, ces trois informations, même réunies, n’étaient pas de nature à aggraver la tendance fortement baissière observée au cours du dernier trimestre 2008 car, équivoques, elles ne permettaient pas de considérer que la société ne parviendraient pas à faire face à ses difficultés de trésorerie ;

Considérant que l’AMF, après avoir rappelé que les termes de la Décision, fait observer, d’une part qu’il résultait du tableau de trésorerie du 1er décembre 2008 que la société Orco ne pourrait pas financer l’ensemble de son programme, ce dont le public n’avait pas été informé par le communiqué du 27 novembre 2008, d’autre part, s’agissant du projet Zlota, qu’il ne peut être reproché à la Décision d’avoir méconnu le fait que le courriel du 14 décembre 2008 faisait état d’une 'lueur d’espoir’ générée par les négociations en cours, mais d’avoir pris en compte la nécessité, également mentionnée dans ce courriel, de trouver 72 millions B, mettant ainsi en lumière un problème considérable de financement, problème non évoqué par l’article publié, dans une langue peu accessible aux investisseurs, dans un journal polonais ne faisant état que de 'rumeurs', enfin, que le fait que les difficultés de trésorerie du groupe Orco nécessitent la recherche de partenaires externes pour renforcer les fonds propres et assurer la continuité de projets tels la tour Zlota, partenaires non encore trouvés, n’était pas connu du public ; que l’AMF en conclut que 'c’est donc à tort que M. X Y conteste le caractère privilégié de l’information relative aux difficultés de trésorerie auxquelles la société ne parvenait pas à faire face’ ;

Considérant qu’aux termes de l’article 622-1 du règlement général de l’AMF : 'Toute personne mentionnée à l’article 622-2 doit s’abstenir d’utiliser l’information privilégiée qu’elle détient en acquérant ou cédant, (') pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, soit directement soit indirectement, les instruments financiers auxquels se rapporte cette information ou les instruments financiers auxquels ces instruments sont liés'; que, par application de l’article 622-2 du même règlement, cette obligation d’abstention s’applique notamment à toute personne qui détient une information privilégiée en raison de sa qualité de membre des organes d’administration, de direction, de gestion ou de surveillance de l’émetteur ;

Considérant que, selon l’article 621-1 du règlement général de l’AMF :

'Une information privilégiée est une information précise qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d’instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d’instruments financiers qui leur sont liés.

'Une information est réputée précise si elle fait mention d’un ensemble de circonstances ou d’un événement qui s’est produit ou qui est susceptible de se produire et s’il est possible d’en tirer une conclusion sur le cours quant à l’effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui leur sont liés.

'Une information, qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d’instruments financiers dérivés qui leur sont liés est une information qu’un investisseur raisonnable serait susceptible d’utiliser comme l’un des fondements de ses décisions d’investissements’ ;

Considérant qu’il n’est contesté ni que M. X Y avait la qualité de vice président du groupe Orco Property Group et était membre du comité exécutif, ni qu’il a procédé, du 15 décembre 2008 au 10 février 2009, à 21 opérations de cession qui ont porté au total sur 17 784 titres Orco représentant 75 % de sa position ;

Considérant que M. Y conteste le caractère privilégié de l’information retenue par la Décision qui a estimé qu’il était en possession d’éléments dont aucun n’était en lui-même assez 'précis’ au sens de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF, mais dont 'la réunion, la simultanéité et la convergence confèrent à l’information sur les difficultés de trésorerie auxquelles la société ne parvenait pas à faire face – et qui ont conduit à son placement sous sauvegarde judiciaire le 25 mars 2009 – un caractère suffisamment univoque et alarmant pour qu’il soit possible d’en tirer une conclusion sur l’évolution du titre', l’information atteignant donc le degré de précision exigé par ce texte et que 'la conjonction de ces éléments inconnus du public était de nature, si elle était parvenue à la connaissance du marché, à aggraver la tendance fortement baissière observée au cours du dernier trimestre 2008, en ce qu’un investisseur raisonnable aurait pu l’utiliser comme l’un des fondements de sa décision de vendre les actions Orco', étant ajouté que la mise de la société sous sauvegarde dans le mois qui a suivi la fin des cessions incriminées a entraîné une baisse du titre de 17,7% ;

Considérant, s’agissant de l’impossibilité pour Orco de financer l’ensemble de ses projets, que M. Y a été destinataire de courriels émanant d’un autre membre de la direction et relatifs à l’évolution de la trésorerie de la société ; qu’à ces courriels des 25 juillet, 31 octobre et 1er décembre 2008 sont joints des tableaux de trésorerie, celui du 1er décembre 2008 faisant apparaître, au titre de la 'treasury available’ des montants négatifs de 612 000 B pour février 2009, 34,9 millions B pour mars 2009 et 23,4 millions B pour avril 2009, ce tableau étant retenu par la Décision comme 'révélateur de l’impossibilité où se trouvait la société de financer l’ensemble de son programme’ ;

Considérant, cependant, qu’ainsi que le relève la Décision, le tableau du 1er décembre 2008 a été établi pour permettre à la direction du groupe 'd’ajuster les dépenses et les recettes et de gérer le degré d’avancement des projets en cours et de ceux à lancer’ ainsi que de procéder aux arbitrages nécessaires ; qu’il s’agissait ainsi d’un outil d’aide à la décision donnant un aperçu d’une situation financière qui n’était appelée à se réaliser qu’en cas d’inaction de la direction ;

Considérant, en outre, qu’ainsi le souligne le requérant, les prévisions du tableau du 1er décembre 2008 étaient non seulement beaucoup moins alarmantes que celles du tableau précédent du 31 octobre 2008, mais encore, en partie erronées, le courriel accompagnant le tableau du 1er décembre 2008 précisant à cet égard que les données, correctes jusqu’en février, nécessitaient d’être ajustées pour la suite car ne prenaient pas pleinement en compte l’annulation de certains projets ;

Considérant que ces documents qui confirmaient que la société Orco n’était pas en mesure de financer l’ensemble de ses projets, n’ont à juste titre pas été retenus par la Décision comme assez 'précis’ au sens de l’article 621-1 du règlement général de l’AMF ;

Considérant, s’agissant des difficultés du projet Zlota, qu’ainsi que le relève la Décision, M. Y a été destinataire des échanges de courriels ayant eu lieu le dimanche 14 décembre 2008 accompagnés d’un projet d’accord en cours de négociations avec la société en charge de la construction de la tour Zlota ; que le préambule de ce projet mentionne qu’un financement de supplémentaire de 297 millions de zlotys (72 millions B) est nécessaire pour financer les travaux de cette tour ; que ce document témoignait ainsi d’un 'problème considérable de financement’ ;

Considérant, toutefois, que le projet d’accord avait justement vocation à résoudre, au moins pour partie, les difficultés évoquées ; qu’en outre, il était précisé, en termes prudents, que les négociations en cours évoluaient dans un sens positif et le membre du comité exécutif auteur du courriel auquel était joint le projet d’accord évoquait 'une lueur d’espoir’ ; qu’au surplus, aucun élément n’établit que l’échec de ce projet d’accord, aurait compromis 'la réalisation du programme de construction de la tour Zlota’ ;

Considérant que, c’est par conséquent, à juste titre non seulement que la Décision n’a pas retenu le caractère 'précis’ de cet élément pris isolément, mais encore que le requérant soutient que ce projet d’accord était une information sinon positive, à tout le moins équivoque concernant le projet Zlota ;

Considérant, s’agissant de l’information relative à la recherche par Orco de nouveaux investisseurs, que la Décision, qui relève que pris isolément, cet élément n’est pas plus 'précis’ que les précédents, retient que M. X Y a été associé à la recherche, par Orco, d’investisseurs extérieurs et informé des discussions conduites avec la société Cogef à la fin de l’année 2008, à l’occasion notamment de la réunion des vice-présidents du 16 décembre 2008 ; qu’il a en outre été chargé de suivre l’accomplissement des 'due diligences’ à propos de l’offre de la société Cofis, qui n’a finalement pas abouti ;

Considérant, cependant, que le requérant souligne exactement que les négociations avec des investisseurs extérieurs n’ont été entreprises que fin 2008 s’agissant de la société Cogef et début 2009 s’agissant de la société Cofis et qu’il n’existait à ces dates aucune certitude sur l’aboutissement ou non de ces négociations ; que s’il n’est pas contesté que la recherche de tels investisseurs était motivée par les difficultés financières d’Orco, il n’en demeure pas moins que l’information relative à la conduite de négociations pouvait être interprétée comme de nature à permettre de résoudre ces difficultés ; que l’information présentait donc un caractère trop équivoque pour être susceptible, si elle était rendue publique, d’avoir une influence sensible sur le cours du titre Orco ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les éléments parcellaires, prospectifs, nuancés et équivoques sus-décrits, même pris ensemble, n’étaient pas suffisants pour affirmer fin 2008 et début 2009 que la société ne parvenait pas ou ne parviendrait pas à faire face à ses difficultés de trésorerie ; que, contrairement à ce que retient la Décision, il n’est pas établi que ces éléments constituaient 'un ensemble de circonstances dont la réunion, la simultanéité et la convergence’ conférait à 'l’information sur les difficultés de trésorerie auxquelles la société ne parvenait pas à faire face’ un caractère suffisamment 'univoque et alarmant pour qu’il soit possible d’en tirer une conclusion sur l’évolution du titre’ ; que c’est à juste titre que le requérant conteste le caractère précis de l’information composite retenue par la Décision ;

Considérant que ce n’est donc qu’au surplus qu’il est observé que, si, ainsi que le relève la Décision, les courriels et le tableau de trésorerie du 1er décembre 2008, de même que les négociations avec des partenaires extérieurs étaient par nature confidentiels et si les difficultés du projet Zlota n’avaient été évoquées que dans un journal polonais, il n’en demeure pas moins que le requérant justifie du fait que les difficultés financières du groupe Orco et notamment celles rencontrées pour financer l’ensemble de son programme étaient connues du public avant le 15 décembre 2008 ; qu’en effet – outre le fait que le communiqué du 27 novembre 2008, bien que comportant des inexactitudes sur la trésorerie disponible, signalait pour 2009 une 'revue complète des projets', les décisions prises ayant notamment eu pour principe que 'tous les nouveaux projets non financés, y compris la réserve foncière, sont ajournés. Les seuls besoins d’investissement accepté à cet égard sont ceux relevant du processus d’obtention des permis'- le public avait pu constater que l’agence Moody’s avait procédé durant l’été 2008 à la dégradation de la notation attribuée à la société Orco ; que, de plus, un article paru dans le journal 'Le Revenu Hebdo Bourse’ le 5 décembre 2008 indiquait pour le titre Orco : 'Conseillé à la vente le 1er août dernier, à 26 B. Le titre n’a pas encore trouvé de support bien solide pour mettre un terme à son effondrement….'et concluait : 'Vendez'; que le cours de l’action Orco s’est en effet effondré ayant chuté de 80 à 25 B au 1er semestre 2008 puis continué à se dégrader au second semestre pour atteindre 6 B à la fin de l’année 2008, reflétant une dégradation continue et connue du public de la situation du groupe ;

Considérant, enfin, que ce n’est qu’également au surplus, qu’il est observé qu’il n’est pas établi que la conjonction des éléments sus-rappelés, dont certains susceptibles d’être interprétés positivement dans le contexte, connu du marché, de difficultés de trésorerie de la société Orco, ne permet pas, contrairement à ce que retient la Décision, d’affirmer que cette conjonction d’éléments, si elle était parvenue à la connaissance du marché, aurait été, en elle-même, de nature à aggraver la tendance baissière observée au cours du dernier trimestre 2008 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le caractère privilégié de l’information retenue par la Décision n’est pas établi et que, par conséquent, la Décision doit réformée en ce qui concerne le manquement d’initié reproché à M. Y ;

PAR CES MOTIFS

Rejette les demandes tendant à l’annulation de la procédure AMF n° 11/17 ;

Rejette le recours formé par la société Orco Property Group et par M. Q-R A contre la décision de la Commission des sanctions de l’AMF du 22 octobre 2012 ;

Réformant la décision de la Commission des sanctions de l’AMF du 22 octobre 2012 en ses dispositions relatives à M. X Y , dit non établi le manquement d’initié reproché à M. Y et n’y avoir pas lieu à sanction à son encontre ;

Dit que, s’agissant de M. Y, les dépens seront à la charge du Trésor public ;

Condamne la société Orco Property Group et M. Q-R A aux dépens.

LE GREFFIER,

N O-P

LE PRÉSIDENT,

Christian REMENIERAS

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Cour d'appel de Paris, 3 avril 2014