Cour d'appel de Paris, 15 décembre 2015, n° 09/03458

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 15 déc. 2015, n° 09/03458
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 09/03458
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 30 janvier 2013, N° 09/03458

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5-7

ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2015

(n° 166, 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 2013/05968

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 janvier 2013

rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris – RG n° 09/03458

APPELANTS :

— Mme F G Y

Née le XXX à XXX

Nationalité : Française

Sans profession

Demeurant : 33 AG AH 75116 PARIS

— M. B Y

Né le XXX à XXX

Nationalité : Française

Retraité

Demeurant : 33 AG AH 75116 PARIS

Représenté par : Maître Bénédicte D’ANDRIA,

avocate au barreau de PARIS,

toque : C2036

4 AG Brunel 75017 PARIS

et

INTIMÉ :

— M. AA AB DES FINANCES PUBLIQUES D’ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS,

XXX,

Ayant ses bureaux : XXX

agissant sous l’autorité de M. AA Général des Finances Publiques,

XXX

Représentée par :

— La SCP NABOUDET – HATET,

avocats associés au barreau de PARIS,

toque : L0046

66 AG La Fayette 75009 PARIS

à l’audience par M. D E, inspecteur des finances publiques, muni d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 octobre 2015, en audience publique, l’avocat des appelants et le représentant de l’intimé ne s’y étant pas opposés, devant Mme J K- AMSELLEM, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

— Mme J K-AMSELLEM, présidente

— Mme N O, conseillère

— Mme Laurence FAIVRE, conseillère

GREFFIER, lors des débats : M. AC AD-AE

ARRÊT :

— Contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme J K- AMSELLEM, présidente et par M. AC AD-AE, greffier.

* * * * * * * *

Rappel des faits et de la procédure

M. B Y était marié avec H I sous le régime de la loi coranique correspondant en droit français au régime de la séparation de biens pure et simple. Le couple a donné naissance à deux enfants Z et F-G.

Le 17 juillet 1996, Z Y est décédé, sans postérité, laissant ses parents légataires universels. Puis, le 23 septembre 1996, H I est à son tour décédée en laissant pour unique héritière Mme F G Y et pour usufruitier légal son époux survivant M. B Y. En 1999, Mme F G Y s’est installée en Algérie où elle s’était mariée. Elle s’est à nouveau installée en France en novembre 2007.

Aucune déclaration de succession n’a été effectuée par le notaire commis qui a été remplacé. À la suite d’une mise en demeure de l’administration fiscale adressée à M. B Y et reçue par lui le 10 février 2003, une déclaration a été déposée avec, compte tenu du passif grevant la succession de Z Y, la mention «Néant » pour la seule succession de H I, épouse Y, en mai 2003.

Par une notification de redressement du 19 décembre 2005, adressée à M. B Y, les services fiscaux ont utilisé la procédure de taxation d’office pour déterminer la valeur des biens immobiliers faisant partie de la succession de H I épouse Y. Le 19 janvier 2006, M. B Y a contesté les valeurs retenues dans la proposition de rectification. Le 26 avril 2006, l’administration fiscale a maintenu sa position. Le 10 mai 2006, M. B Y a demandé la saisie du conciliateur fiscal, lequel a rendu le 13 juillet 2006 un avis partiellement favorable sur le montant notifié. Un avis de mise en recouvrement pour un total de 184 674 euros a été émis le 8 août 2006 contre M. Y en qualité d’héritier solidaire et le 18 décembre 2007 un avis de mise en recouvrement a été émis à l’encontre de Mme F G Y, pour un montant de 166 207 euros.

M. B Y et Mme F G Y ont formé une réclamation contentieuse le 21 mai 2008. Le 12 décembre 2008, par une lettre adressée à M. B Y l’administration fiscale a admis partiellement la contestation. Elle a ainsi réduit à 0 les droits dus par celui-ci, à 66 986 euros les droits dus par Mme F G Y et fixé le total des pénalités à 79 546 euros.

Par acte d’huissier du 13 février 2009, M. B Y et Mme F G Y ont fait assigner M. AA divisionnaire des services fiscaux devant le tribunal de grande instance de Paris afin que la procédure d’imposition soit déclarée irrégulière et, à titre subsidiaire, qu’elle soit déclarée non fondée.

Par un jugement du 31 janvier 2013 (RG 09/03458), ce tribunal a, à la suite d’une expertise sur la valeur des biens, notamment,

— dit que la procédure de taxation d’office est régulière ;

— Infirmé partiellement la décision du 12 décembre 2008 ;

— Fixé la valeur des biens au 17 juillet 1996, jour du décès de H I, épouse Y ;

— Fixé les abattements ;

— Prononcé le dégrèvement partiel des droits et pénalités mis en recouvrement.

Vu l’appel interjeté le 25 mars 2013 par Mme F G Y et M. B Y contre cette décision ;

Vu les dernières conclusions, signifiées par le X le 25 juin 2013 par Mme F G Y et M. B Y par lesquelles ils demandent à la cour :

À titre principal de :

— Infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré la procédure d’imposition régulière,

— Ordonner la restitution de l’intégralité des sommes versée par M. et Mme Y au titre de la succession de Mme H Y ;

A titre subsidiaire, de :

— retenir pour l’ensemble des biens un abattement de 30% pour indivision familiale, et un abattement de 30% pour occupation familiale du bien situé au 1er étage de la AG AH,

— Dire et juger que les biens s’évaluent à 156.893 euros pour le bien de 106 m2 situé AG AH, à 64.750 euros pour le 37 m2 situé également AG AH en rez-de-chaussée, à 86.400 euros pour le bien situé AG des Belles Feuilles, à 100.000 euros pour le bien situé avenue de la Bourdonnais, soit à 36.858 euros pour la totalité des parts de la SCI après application de l’abattement pour indivision, et de l’abattement pour défaut de liquidité.

— Condamner l’État aux entiers dépens d’appel en application de l’article R*207-1 du Livre de Procédure Fiscale ;

— mettre à la charge de l’État en application de l’article 700 du Code de procédure civile une somme de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles « qui sera éventuellement révisée en cours d’instance totalité des frais d’expertise judiciaire ».

Les appelants rappellent que la doctrine administrative du 13 L-1513 n° 61 à 63 du 1er juillet 2002 précise qu’en matière d’enregistrement, les notifications sont adressées aux personnes désignées par l’article 1712 du code général des impôts comme devant supporter la charge des droits. Ils soutiennent que la jurisprudence de la Cour de cassation énonce que le respect des droits de la défense impose de notifier l’intégralité des actes de la procédure postérieurs à la proposition de rectification à l’ensemble des cohéritiers. Ils font valoir qu’en l’espèce, les héritiers solidaires de H I, épouse Y, étaient M. B Y et leur fille Mme F G Y. Or l’ensemble des actes de la procédure de redressement ont été adressés exclusivement à M. B Y, ce qui a empêché Mme F G Y d’avoir connaissance des mesures de poursuite entreprises.

Ils demandent en conséquence à la Cour de prononcer la nullité de la procédure et la décharge de la totalité des droits de succession mis en recouvrement.

Sur le fond, M. et Mme Y font valoir que l’administration fiscale a exercé abusivement le pouvoir discrétionnaire dans la détermination des bases d’évaluation des biens immobiliers recueillis dans la succession. Ils demandent à la Cour, sur les bases retenues par le tribunal qui correspondent à celles de l’expertise auxquelles l’administration s’est rangée, de substituer les abattements qu’ils soutiennent à ceux du tribunal.

Vu les dernières conclusions signifiées par le X, le 23 août 2015, par M. AA AB des Finances publiques d’Ile de France et du département de Paris, par lesquelles il demande à la cour de :

— Déclarer Madame F G Y et Monsieur B Y mal fondés en leur appel ;

— Les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

— Confirmer le jugement rendu le 31 janvier 2013 par le tribunal de grande instance de Paris;

— Condamner Madame F G Y et Monsieur B Y à verser à l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’administration fiscale soutient que le principe de solidarité (obligation au paiement) énoncé par l’article 1203 du code civil, selon lequel « le créancier d’une obligation contractée solidairement peut s’adresser à celui des débiteurs qu’il veut choisir, sans que celui-ci puisse lui opposer le bénéfice de la division » est repris en matière fiscale par les articles 1705 et 1709 du code général des impôts qui prévoient une solidarité entre les parties à un acte présenté à l’enregistrement (article 1705), ainsi qu’entre les cohéritiers d’une succession (article 1709).

Elle indique que si les arrêts cités par les appelants (Marie du 18 novembre 2008 et Rigault du 7 avril 2010) sont venus limiter la portée du principe de la solidarité dans le cadre du contrôle des successions et donations par le principe de loyauté, ils n’ont toutefois pas limité la portée du principe de la solidarité dans le cadre de la procédure de relance et de taxation d’office quand les redevables n’ont pas rempli leurs obligations déclaratives. Or au cas particulier, l’administration fiscale a constaté un défaut de dépôt de déclaration de succession. Elle rappelle sur ce point qu’elle peut s’adresser à l’un quelconque des cohéritiers lorsque les rehaussements sont effectués selon une procédure d’imposition d’office.

Sur l’exercice abusif par l’administration d’un pouvoir discrétionnaire, l’administration rappelle que la taxation d’office est mise en 'uvre en cas de défaut de production ou de souscription tardive des déclarations de succession en application des dispositions de l’article L. 67 du livre des procédures fiscales. Elle précise avoir recueilli des éléments permettant de déterminer directement la base d’imposition et fait connaître au contribuable la méthode qu’elle a adoptée pour effectuer les calculs et déterminer les bases d’imposition.

S’agissant de la demande de prise en compte de l’évaluation proposée par les requérants, l’administration indique que les valeurs en pleine propriété retenues par le tribunal sur la base du rapport de l’expert sont acceptées par les parties et que les demandes de révision à la hausse d’abattements retenus et d’admission d’abattements supplémentaires sont exagérées et non fondées.

LA COUR

Sur la validité de la procédure de redressement

Les appelants soutiennent que l’absence de notification des actes de procédure à Mme F G Y, entraîne la nullité de la procédure de redressement.

Ils soutiennent sur ce point à juste titre que si l’administration fiscale peut choisir de notifier les redressements à l’un seulement des redevables solidaires de la dette fiscale, la procédure doit néanmoins être contradictoire et la loyauté des débats oblige l’administration à notifier, en cours de procédure, à l’ensemble des personnes qui peuvent être poursuivies, les actes de procédure les concernant.

Il importe peu à ce sujet que le redressement procède du seul redressement des valeurs déclarées ou d’une taxation d’office. Cette dernière procédure n’ayant pas pour effet de priver les contribuables de leurs droits fondamentaux.

En l’espèce, il n’est pas contesté que les actes de la procédure, en particulier, l’avis de mise en recouvrement du 8 août 2006 et le rejet de la réclamation 12 décembre 2008, ont été notifiés seulement à M. B Y et non à Mme F G Y.

Il s’en déduit que la procédure n’a pas été contradictoire, qu’il convient d’en constater la nullité tant à l’égard de M. B Y que de Mme F G Y et d’annuler les avis de mise en recouvrement des 8 août 2006 et 18 décembre 2007 ;

Par suite, le jugement qui a validé la procédure et rejeté les demandes d’annulation de M. B Y et Mme F G Y doit être infirmé en toutes ses dispositions.

Il n’y a en conséquence pas lieu de statuer sur les autres demandes.

Sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. B Y et Mme F G Y l’ensemble des frais non compris dans les dépens qu’ils ont été contraints d’exposer pour faire valoir leurs droits. En conséquence, l’État sera condamné à verser à M. B Y et Mme F G Y la somme globale de 7 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions;

Statuant à nouveau

Constate la nullité de la procédure de redressement ;

Annule les avis de mise en recouvrement des 8 août 2006 contre M. Y en qualité d’héritier solidaire et le 18 décembre 2007 à l’encontre de Mme F G Y ;

— Ordonne la restitution des sommes versées dans le cadre de la procédure de taxation d’office par M. B Y et Mme F G Y au titre de la succession de H I, épouse Y ;

— Rejette toute demande autre, plus ample ou contraire des parties ;

— Condamne l’État à verser à M. B Y et Mme F G Y la somme globale de 7 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamne l’État aux dépens.

LE GREFFIER,

AC AD-AE

LA PRÉSIDENTE,

J K- AMSELLEM

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Cour d'appel de Paris, 15 décembre 2015, n° 09/03458