Cour d'appel de Paris, 13 octobre 2016, n° 16/01102

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 13 oct. 2016, n° 16/01102
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/01102
Décision précédente : Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris, 2 novembre 2015

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2016

AUDIENCE SOLENNELLE

(n° 440 , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/01102

Décision déférée à la Cour :
Décision du 03 Novembre 2015 -Conseil de l’ordre des avocats de
PARIS

DEMANDEUR AU RECOURS

Madame X Y

XXX

XXX

XXX

Comparante en personne

Assistée de Me Hélène Z, avocat au barreau du VAL D’OISE, toque :
6

DÉFENDEUR AU RECOURS

LE CONSEIL DE L’ORDRE DES AVOCATS DE
PARIS

XXX

XXX

Représentée par Me Laurence BOYER de la SELEURL BY
LAW, avocat au barreau de PARIS, toque : D1712

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 Juin 2016, en audience tenue en en audience publique, devant la Cour composée de :

— Madame A B, Présidente de chambre

— Madame A-C D,
Conseillère

— Madame A-E F,
Conseillère

— Madame G H

— Madame I J, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie
SUEUR

MINISTERE PUBLIC :

L’affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Michel
LERNOUT, Avocat Général, qui a fait connaître son avis et qui n’a pas déposé de conclusions écrites antérieures à l’audience.

DÉBATS : à l’audience tenue le 23 Juin 2016, ont été entendus :

— Madame F, en son rapport

— Maître Z, en ses observations

— Maître BOYER, avocat représentant le Conseil de l’Ordre des avocats au Barreau de PARIS, en ses observations

— Monsieur LERNOUT, Avocat Général, en ses observations

— Madame Y a eu la parole en dernier,

ARRÊT :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la
Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme A
B, présidente et par Mme Lydie
SUEUR, greffier.

* * *

Par lettre recommandée reçue le 6 janvier 2016,
Maître Y a formé un recours contre une délibération du conseil de l’ordre des avocats de Paris du 3 novembre 2015, publiée au bulletin le 19 novembre suivant, relative au cahier des charges du centre d’affaires des avocats de Paris, après la décision implicite de rejet du bâtonnier de sa réclamation formée le 25 novembre 2015.

A l’audience du 23 juin 2016, maître Y a soutenu verbalement le mémoire qu’elle a déposé et a demandé le débouté du conseil de l’ordre de l’ensemble de ses demandes et le prononcé de l’annulation de la délibération du 3 novembre 2015.

Le conseil de l’ordre du barreau de Paris soutenant verbalement ses conclusions préalablement déposées, sollicite que le recours de Maître
Y soit déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt à agir et à titre subsidiaire mal fondé et que celle-ci soit déboutée de l’ensemble de ses demandes. Il sollicite sa condamnation à payer la somme de 1 500 sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le ministère public qui n’a pas pris d’écritures, s’en est rapporté.

MOTIFS DE LA DECISION :

La décision contestée est l’approbation d’un avenant au cahier des charges du centre des affaires des avocats de Paris (CDAAP) qui prévoit : 'la mise en place de 8 caméras de sécurité dans les locaux qui ne fonctionnent qu’en dehors des horaires des hôtesses d’accueil et dont les enregistrements ne sont conservés que 72 h et accessibles par le bâtonnier ou son délégué au moyen d’un mot de passe.'

Maître Y qui déclare agir sur le fondement de l’article 19 de la loi du 31 décembre 1971 et de l’article 15 du décret du 27 novembre 1991, expose qu’elle est domiciliée XXXXXXXXXXXXXXX.

Pour répondre à la fin de non-recevoir soulevée par le conseil de l’ordre, elle soutient que l’intérêt à agir s’apprécie à la date du recours et elle ajoute qu’elle a saisi le bâtonnier d’une demande d’arbitrage à la suite de la décision de résiliation de son contrat la liant à la société TBC chargée de la gestion du
CDAAP et que la procédure est toujours en cours de sorte qu’elle a intérêt à voir statuer sur l’avenant en cause.

Sur le fond, Maître Y conteste la légalité de la délibération du 3 novembre 2015 en faisant valoir que la question soumise à l’approbation du conseil de l’ordre ne relevait pas de sa compétence et que l’avenant adopté est incompatible avec la mission du conseil de l’ordre relative à la protection des droits et l’observation des devoirs attachés au secret professionnel de l’avocat. Elle ajoute que les dispositions contenues dans l’avenant ont été immédiatement mises en oeuvre malgré le caractère suspensif de son appel et alors que la société TBC n’a pas obtenu les autorisations de la CNIL et de la préfecture.

Le Conseil de l’Ordre expose préalablement que l’avenant approuvé le 3 novembre 2015 a été signé avec la société TBC le 5 novembre suivant et que la mise en place des caméras a été déclarée à la
CNIL le 26 novembre. Il ajoute que le juge des référés du tribunal de grande instance de Pontoise n’a pas fait droit à la demande de Maître Y tendant à voir retirer les caméras, en l’absence de trouble manifestement illicite.

Le Conseil de l’Ordre soulève l’irrecevabilité du recours formé par Maître Y dans la mesure où il a été mis fin au contrat la liant à la société TBC le 30 décembre 2015 et qu’elle n’a donc plus d’intérêt à agir.

Sur le fond, le Conseil de l’Ordre soutient que le contrat de partenariat conclu avec la société TBC concerne les conditions d’exercice professionnel des avocats et entre dans sa mission. Il fait par ailleurs valoir que l’installation des caméras dans les conditions retenues n’est pas incompatible avec le secret professionnel de l’avocat . Il ajoute que les caméras ne sont pas actives à ce jour, que les autorisations nécessaires ont été obtenues et qu’une affiche signale la présence des caméras à l’entrée du CDAAP.

— Sur la recevabilité du recours :

L’article 19 al 2 de la loi du 31 décembre 1971 dispose que peuvent être déférées à la cour d’appel à la requête de l’intéressé, les délibérations ou décisions du conseil de l’ordre des avocats au barreau de nature à léser ses intérêts professionnels.

Maître Y qui a conclu un contrat avec la société TBC chargée de la gestion du
CDAAP le 21 septembre 2015' avait un intérêt à agir à la date du recours.

Celui-ci doit donc être déclaré recevable.

— Sur le bien fondé du recours :

Le conseil de l’ordre a conclu avec la société TBC un contrat de partenariat aux termes duquel il a confié à celle-ci la gestion du CDAAP, à charge pour elle de mettre à disposition pour le compte du conseil, des espaces de travail avec services aux avocats. La délibération contestée approuve un avenant à ce contrat.

L’avenant relatif à l’installation de caméras au sein de locaux dédiés aux avocats est relatif aux conditions d’exercice de la profession et il entre dans les attributions du conseil de l’ordre d’en approuver les termes, préalablement à sa signature avec le partenaire.

Il y a lieu tout d’abord de relever que la cour est saisie uniquement d’un recours contre une délibération du conseil de l’ordre approuvant un avenant et qu’elle n’a pas à se prononcer sur la validité du contrat principal ni sur l’exécution de l’avenant en ce que les caméras seraient mises en marche avant l’obtention des autorisations nécessaires.

Ainsi la seule question qui est valablement soumise à l’appréciation de la cour est celle de la compatibilité de cet avenant avec le respect des règles du secret professionnel de l’avocat.

Il convient tout d’abord de relever que l’avenant autorise l’installation de 8 caméras au CDAAP et qu’il ne ressort pas de la délibération contestée que ces caméras permettraient un enregistrement sonore de sorte que la question de la compatibilité ne se pose qu’au regard d’images qui selon l’avenant, doivent être conservées pendant 72 heures et seront accessibles uniquement au bâtonnier ou à son délégué.

Maître Y a fait établir le 16 septembre 2015 par un huissier de justice un procès-verbal de constat qui révèle la présence de caméras à l’entrée des locaux, derrière le comptoir d’accueil, dans une salle commune de coworking, dans un couloir commun et à l’entrée d’un bureau.

Dans ces conditions particulières d’installation, les caméras ne sont susceptibles que de révéler l’existence d’une relation entre le client et le conseil mais elles ne permettent pas de connaître les documents et pièces échangés ou consultés au cours d’un entretien et dont le secret est protégé par l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971. Néanmoins leur emplacement peut être modifié dès lors que leur localisation n’est pas spécifiée par l’avenant.

Cette absence de précision de la localisation des caméras ne permet pas d’assurer que celles-ci ne seront pas en mesure de photographier des documents couverts par le secret professionnel.

Dès lors il y a lieu de prononcer l’annulation de la délibération entreprise.

PAR CES MOTIFS :

Annule la délibération du 3 novembre 2015 du
Conseil de l’Ordre du barreau de Paris approuvant l’avenant relatif à l’installation de caméras dans les locaux du CDAAP, en ce que celui-ci ne précise pas leur localisation,

Laisse les dépens à la charge du Conseil de l’Ordre du barreau de Paris.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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