Cour d'appel de Paris, 5 juillet 2016, n° 15/14711

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 5 juill. 2016, n° 15/14711
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/14711
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 24 juin 2015, N° 15/53868

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 05 JUILLET 2016

(n°428 , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/14711

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 Juin 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 15/53868

APPELANTE

SA ARCHE INDUSTRIES Agissant poursuites et diligences de son Directeur Général

XXX

XXX

Représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

assistée de Me Marine FERRERI substituant Me David GUILLOUET et plaidant pour le cabinet VOLTAIRE AVOCATS, toque A 270

INTIMEE

SA MERIC & ASSOCIES inscrite au RCS de Lyon sous le n° B 064 501 653

XXX

XXX

Représentée par Me Ivan MASANOVIC, avocat au barreau de PARIS, toque : B0316

assistée de Me Ivan MASANOVIC, avocat au barreau de PARIS, toque : B0316 substituant Me François DUMOULIN, de la SCP ANTIGONE AVOCATS, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Mai 2016, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente de chambre

Madame Odette-Luce BOUVIER, Conseillère

Mme X Y Z, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Martine ROY-ZENATI, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.

La SA Arche Industries fait partie du groupe Arche spécialisé dans la conception et la fabrication de composants de haute technicité à destination de l’industrie automobile.

Par décision du 10 juillet 2014, le comité de groupe, regroupant les sociétés Arche Industries, XXX, XXX, XXX, a désigné la SA Meric & Associés afin de procéder à l’examen des comptes consolidés du groupe Arche pour l’année 2013.

Le 11 juillet 2014, le cabinet d’expertise a adressé une copie de la lettre de mission au président de la société Arche Industries aux termes de laquelle il évoquait un budget de l’ordre de 25.000 euros HT, outre les frais accessoires. A cette correspondance, était annexée une facture d’acompte d’un montant de 15.000 euros TTC.

Le rapport d’expertise définitif a été remis le 18 novembre 2014.

Le 21 novembre 2014, la société Meric & Associés a adressé sa note d’honoraires n° 00014193 d’un montant de 25.000 euros HT, outre les frais de déplacement, de secrétariat et de reprographie pour un montant total de 26.415,60 euros HT, soit un solde de 31 698,72 euros TTC.

La société Arche Industries a contesté le montant des honoraires réclamés.

Le 8 avril 2015, la société Meric & Associés a fait assigner la société Arche Industries devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés, au visa des articles L 2332-1 et L 2334-1 du code du travail, aux fins de notamment de voir condamner la société Arche Industries à lui verser la somme de 31 698,72 euros TTC au titre de la mission d’analyse des comptes annuels du groupe pour l’exercice 2013, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 3 décembre 2014.

Par ordonnance contradictoire rendue en la forme des référés du 25 juin 2015, rectifiée le 9 juillet 2015, le président du tribunal de grande instance de Paris a :

— rejeté la fin de non recevoir ;

— condamné la société Arche Industries à payer à la société Meric & Associés la somme de 30 786,20 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2014, outre la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société Arche Industries a interjeté appel de cette décision le 3 juillet 2015.

Par ses conclusions transmises le 29 septembre 2015, elle demande à la cour de :

— a titre principal, déclarer la société Meric & Associés irrecevable en ses demandes ;

— à titre subsidiaire, infirmer l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau, fixer le montant des honoraires dus à la société Meric & Associés à la somme de 13.860 euros TTC et les frais de mission à la somme de 274,60 euros.

— à titre infiniment subsidiaire, ramener les prétentions de la société Meric & Associés à de plus justes proportions et confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a fixé les frais de secrétariat à hauteur de 415 euros HT ;

— en tout état de cause, condamner la société Meric & Associés au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

A titre principal, elle fait valoir que l’action de la société Meric & Associés est irrecevable, faute pour cette dernière d’avoir eu recours à la procédure de conciliation préalable obligatoire ou à l’arbitrage du Conseil régional de l’ordre conformément aux dispositions de l’article 159 du décret n°2012-432 du 30 mars 2012 relatif à l`exercice de l’activité d’expertise comptable ; que le défaut de mise en 'uvre de cette procédure constitue une fin de non-recevoir qui n’est pas susceptible d’être régularisée.

A titre subsidiaire, elle conteste le montant des honoraires réclamés au motif que la lettre de mission ne fait pas état du nombre d’intervenants et de leur qualification qui doit être prise en considération dans la détermination des honoraires ; que la lettre de mission est silencieuse sur le taux journalier, le nombre de jours d’intervention et la ventilation des temps prévisionnels pour chaque étape de travail ; qu’un constat analogue doit être effectué s’agissant de la note d’honoraires du 21 novembre 2014.

Elle se prévaut du guide de méthodologie sur les missions légales de l’expert-comptable du comité d’entreprise qui rappelle que 'la lettre de mission devrait a minima comporter les éléments suivants : les objectifs et les axes de la mission, la nature et l’étendue des investigations, les documents, informations et entretiens demandés, les noms des intervenants, le calendrier des travaux, le montant des honoraires’ et de l’article 2 de l’arrêté du 2 décembre 1986 listant les informations que doivent contenir la lettre de mission et la note d’honoraires.

Elle fait valoir que le taux journalier apparaît excessif en comparaison de la moyenne des taux appliqués par les cabinets d’expertise comptable assistant un comité d’entreprise.

Par ses conclusions transmises le 27 avril 2016, la société Meric & Associés, intimée, demande à la cour de confirmer l’ordonnance entreprise et de condamner la société Arche Industries au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

A titre liminaire, elle soutient que l’article 159 du décret n°2012-432 du 30 mars 2012 n’ouvre qu’une faculté de suivre préalablement une procédure de conciliation ou d’arbitrage et qu’il ne peut faire obstacle au droit qu’a toute personne d’agir en justice ; qu’en outre, cet article n’a vocation à s’appliquer qu’à l’égard du 'client’ de l’expert-comptable, soit en l’espèce du Comité de groupe à l’origine de sa désignation, la société Arche Industries ne pouvant valablement se prévaloir de ces dispositions.

Elle soutient qu’aucune disposition légale n’impose à l’expert d’indiquer dans la lettre de mission le nombre d’intervenants et leur qualification ; que l’éventuel défaut d’information imputable à l’expert, qui ne respecterait pas les dispositions de l’article 2 de l’arrêté du 2 décembre 1986, ne saurait en tout état de cause être indemnisé par la diminution du montant des honoraires réclamés puisque ce montant dépend seulement de l’étendue de la mission, de la qualité du travail accompli, des travaux d’analyse, des avis et des vérifications, des temps de réunion et du temps passé pour faire comprendre la situation économique et financière d`une entreprise à des non-techniciens ; qu’au regard du travail réalisé, de la difficulté pour la société Meric & Associés d’obtenir les documents réclamés à de multiples reprises, du périmètre de consolidation couvrant six sociétés, la durée de 10 jours de la mission et le taux journalier, qui se situe dans la moyenne des taux appliqués par les cabinets d’expertise comptable assistant un comité d’entreprise, n’apparaissent pas excessifs.

SUR CE, LA COUR

1 – sur la fin de non recevoir :

Considérant que l’article 159 du décret n° 2012-432 du 30 mars 2012 relatif à l’exercice de l’activité d’expert-comptable, prévoit :

'En cas de contestation par le client ou adhérent des conditions d’exercice de la mission ou de différends sur les honoraires, les personnes mentionnées à l’article 141 [experts-comptables, stagiaires et salariés, sociétés d’expertise comptable] s’efforcent de faire accepter la conciliation ou l’arbitrage du président du conseil régional de l’ordre avant toute action en justice.' ;

Considérant, qu’outre le fait que l’employeur concerné par la mission d’expertise n’est pas le client de la société d’expertise comptable, désignée par le comité de groupe, cette disposition, qui n’ouvre qu’une faculté, ne crée aucune obligation à la charge de l’expert, et ne peut faire obstacle au droit de toute personne d’agir en justice, de sorte que c’est à juste titre que la fin de non recevoir soulevée par la société Arche Industries sur ce fondement a été écartée par le premier juge ;

2 – sur les honoraires :

Considérant que, selon l’article L 2334-4 du code du travail, pour l’exercice des missions prévues par l’article L. 2332-I, le comité de groupe peut se faire assister par un expert-comptable ; que celui-ci est rémunéré par l 'entreprise dominante ;

Considérant que, pour opérer toute vérification ou tout contrôle entrant dans l’exercice de ces missions, l’expert-comptable a accès aux mêmes documents que les commissaires aux comptes des entreprises constitutives du groupe ; que l’article 2332-1 précise que le comité de groupe reçoit des informations sur l’activité, la situation financière, l’évolution et les prévisions d’emploi annuelles ou pluriannuelles et les actions éventuelles de prévention envisagées compte tenu de ces prévisions, dans le groupe et dans chacune des entreprises qui le composent ; qu’il reçoit communication, lorsqu’ils existent, des comptes et du bilan consolidés ainsi que du rapport du commissaire aux comptes correspondant ; qu’il est informé, dans ces domaines, des perspectives économiques du groupe pour l’année à venir ; que les avis rendus dans le cadre de la procédure fixée à l’article L. 2323-7-1 lui sont communiqués ;

Considérant que la société Arche Industries fait grief à la lettre de mission de ne pas avoir fait état du nombre d’intervenants et de leur qualification ;

Considérant que la lettre de mission établie 11 juillet 2014 décrit le déroulement de la mission comme suit : établissement du plan de mission, prise de connaissance de l’entreprise et de son environnement, obtention des éléments nécessaires à la mission, traitement des données, analyse des données, entretiens et investigations nécessaires (direction, comité), rédaction du rapport, supervision de la mission, présentation du rapport en réunion préparatoire et présentation du rapport en réunion plénière, la rémunération de cette mission ayant été fixée à 25 000 € HT ;

Que si le guide de méthodologie dont se prévaut l’appelante préconise que 'la lettre de mission devrait a minima comporter les éléments suivants : les objectifs et les axes de la mission, la nature et l’étendue des investigations, les documents, informations et entretiens demandés, les noms des intervenants, le calendrier des travaux, le montant des honoraires', ces préconisations ne lient pas l’expert vis-à-vis de l’entreprise, qui n’est pas sa co-contractante, et ne présentent donc aucune force contraignante à l’égard de la société Méric ;

Que l’article 2 de l’arrêté du 2 décembre 1986, auquel se réfère le guide de méthodologie, liste les informations que doivent contenir la lettre de mission et la note d’honoraires, mais ne mentionne pas non plus les informations considérées comme manquantes ;

Considérant qu’en tout état de cause, les honoraires de l’expert-comptable dépendent de l’étendue de la mission, de la qualité du travail accompli, des travaux d’analyse, des avis et des vérifications, des temps de réunion et du temps passé pour faire comprendre la situation économique et financière d’une entreprise à des non-techniciens ;

Considérant que le planning d’intervention de la société Meric & Associés est détaillé comme suit :

— prise de connaissance de l’entreprise : 2 jours

— traitement des données/montage technique : 4 jours

— rédaction du rapport : 10 jours

— rencontre avec le Comité de groupe 24/04/2014 : 1 jour

— présentation préparatoire 7/11/2014 : 1 jour

— présentation plénière 13/11/2014 : 1 jour

Total : 19 jours ;

Que le prix/jour est fixé sur ce planning à 1 350 euros HT ;

Considérant que le nombre de jours pour l’étude du dossier, étant relevé que l’expert a éprouvé des difficultés pour rassembler les documents réclamés, n’apparaît pas excessif compte tenu du périmètre de l’analyse couvrant 6 sociétés ; que le temps de rédaction du rapport comprenant 166 pages , dont 60 annexes, apparaît également en rapport avec le travail fourni ; que le taux horaire pratiqué se situe dans la moyenne des taux pratiqués par les cabinets d’expertise-comptable, étant relevé que la comparaison des honoraires précédemment facturés par le cabinet Altis Eco n’est pas pertinente dès lors qu’ils ne concernaient pas une mission confiée par le comité de groupe mais l’examen des comptes d’une seule société du groupe ; qu’enfin aucune disposition légale n’interdit à un expert-comptable de déléguer à des collaborateurs, même non inscrits à l’ordre des experts-comptables, la conduite et/ou la rédaction du rapport de mission, étant précisé que seul l’expert-comptable inscrit peut valablement le signer, ce qui implique une responsabilité dans la surveillance du travail des collaborateurs et justifie que la rémunération ne soit pas différenciée entre eux ;

Considérant qu’il se déduit de ce qui précède que les honoraires facturés ne sont ni abusifs ni disproportionnés ;

Considérant que le premier juge a réduit les frais de mission et de déplacement, ramenés à la somme de 786,20 euros TTC au lieu de 1 415,60 euros TTC facturés ; que la société Méric & Associés ne conteste pas la décision de ce chef ; que si la société appelante tend à la confirmation de la décision sur les frais de tirage, elle conteste devoir des frais de secrétariat en l’absence de toute justification ; que toutefois, il est manifeste que la rédaction du rapport d’expertise nécessite le recours à un secrétariat dont la rémunération a justement été fixée par le premier juge ;

Considérant qu’au vu de ces éléments, l’ordonnance sera confirmée ;

Considérant que le sort des dépens et de l’indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge ;

Qu’à hauteur de cour, il convient d’accorder à la société intimée, contrainte d’exposer de nouveaux frais pour se défendre, une indemnité complémentaire sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile dans les conditions précisées au dispositif ci-après ;

Que la société Arche Industries, qui succombe, ne peut prétendre à l’allocation d’une indemnité de procédure et supportera les dépens d’appel ;

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance entreprise ;

Y ajoutant

Condamne la société Arche Industries à payer à la société Méric & Associés la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Arche Industries aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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