Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 13 juin 2017, n° 16/24079

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 8, 13 juin 2017, n° 16/24079
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/24079
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 21 novembre 2016, N° 16/32683
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 13 JUIN 2017

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/24079

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Novembre 2016 – Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 16/32683

APPELANT

LE PROCUREUR GENERAL – SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

en ses bureaux : XXX

XXX

INTIMÉES

SNC GROUPE G H

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 316 655 125

Ayant son siège social 52 Rue des Saints-Pères

XXX

Prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité

Représentée et ayant pour avocat plaidant Me François KOPF de l’AARPI DARROIS VILLEY MAILLOT BROCHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0099

SCI Z ET I G H

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 316 238 906

Ayant son siège social 52 Rue des Saints-Pères

XXX

Prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité

Représentée et ayant pour avocat plaidant Me François KOPF de l’AARPI DARROIS VILLEY MAILLOT BROCHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0099

XXX sous le XXX

Ayant son siège XXX

XXX

Prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Jean-Pierre MARTEL du PARTNERSHIPS ORRICK HERRINGTON & SUTCLIFFE (Europe) LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : P0134

SELARL SEL Y prise en la personne de Maître A Y, ès qualités d’administrateur judiciaire de la SNC GROUPE G H et de la SCI Z ET I G H.

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 808 326 979

Ayant son siège XXX

XXX

Représentée par Me Laurence TAZE G, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

SCP BTSG

Immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 434 122 511

prise en la personne de Maître C X, ès qualités de mandataire judiciaire de la SNC GROUPE G H et de la SCI Z ET I G H

Ayant son siège XXX

XXX

Représentée par Me Laurence TAZE G, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 18 Avril 2017, en audience publique, Madame Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère en son rapport, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Madame Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère

Monsieur Laurent BEDOUET, Conseiller

qui en ont délibéré

MINISTÈRE PUBLIC : l’affaire a été communiquée au Ministère public représenté lors des débats par Monsieur BRISSET-FOUCAULT, substitut général, qui a été entendu en ses observations. Greffier, lors des débats : Monsieur E F

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente et par Mme Rada POT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

Par jugement du 30 novembre 2015, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Groupe G H, désigné la société BTSG prise en la personne de Maître X en qualité de mandataire judiciaire et Maître Y en qualité d’administrateur judiciaire, puis par jugement du 2 décembre 2015, ce même tribunal a prononcé l’extension de la procédure de sauvegarde à la société Z I G H.

Par requête du 4 février 2016, se prévalant de sa qualité de créancière, la société CDR créances a sollicité sa désignation en qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde.

Par ordonnance du 18 mai 2016 le juge-commissaire a rejeté sa demande, estimant notamment que conférer à la société CDR créances le statut de contrôleur « porterait directement atteinte au principe d’égalité des armes dans le cadre des litiges en cours, exigence essentielle du procès équitable ».

Le ministère public a alors interjeté appel de cette ordonnance, sans avoir auparavant formé opposition devant le tribunal de la procédure et, par arrêt du 8 novembre 2016, la présente cour a déclaré irrecevable l’appel du ministère public, relevant qu’elle ne pouvait connaître que de l’appel formé contre le jugement du tribunal de commerce et non directement de celui formé contre l’ordonnance du juge-commissaire.

De son côté, le 26 mai 2016, la société CDR créances a formé opposition à l’encontre de cette ordonnance et, par jugement du 22 novembre 2016, le tribunal de commerce de Paris a débouté la société CDR créances de ses demandes.

Le ministère public a interjeté appel de ce jugement le 30 novembre 2016.

Vu les dernières conclusions du ministère public du 27 février 2017, par lesquelles il demande à la cour de déclarer son appel recevable, d’infirmer le jugement, de désigner la société CDR créances contrôleur à la procédure de sauvegarde des sociétés Groupe G H et Z I G H.

Vu les dernières conclusions du 27 février 2017 de la société CDR créances par lesquelles elle demande à la cour de déclarer recevable l’appel du ministère public, de faire droit aux demandes du ministère public, d’infirmer le jugement, de la désigner en qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde des sociétés Groupe G H et Z I G H, et de condamner tout contestant aux dépens.

Vu les dernières conclusions du 23 février 2017 des sociétés Groupe G H et Z I G H, par lesquelles elles demandent à la cour de déclarer irrecevable l’appel du ministère public faute de tout droit d’appel et faute de tout intérêt à agir, au fond de débouter le ministère public de ses demandes et de confirmer le jugement. Vu les dernières conclusions du 26 février 2017 de la Sel Y, prise en la personne de Maître A Y, en sa qualité d’administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde des sociétés Groupe G H et Z I G H, et de la SCP BTSG, prise en la personne de Maître X, en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde des sociétés Groupe G H et Z I G H, par lesquelles elles demandent à la cour de constater qu’elles s’en rapportent à la sagesse de la juridiction.

Sur ce,

Sur la recevabilité de l’appel.

Sur l’absence d’opposition préalable par le ministère public.

Les sociétés Groupe G H et Z I G H soutiennent que l’appel du ministère public est irrecevable au motif que seule la société CDR créances a formé opposition à l’encontre de l’ordonnance du juge-commissaire et qu’il n’a pas lui-même exercé au préalable une opposition devant le tribunal à l’encontre de l’ordonnance refusant de désigner la société CDR créances en qualité de contrôleur.

Selon l’article L. 661'6 du code de commerce, « ne sont susceptibles que d’un appel de la part du ministère public: Les jugements ou ordonnances relatifs à la nomination ou au remplacement de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l’exécution du plan, du liquidateur, des contrôleurs, du ou des experts (…) ».

Si l’exercice du recours de droit commun à l’encontre des décisions du juge-commissaire, prévu par l’article R. 621'21 du code de commerce, est ouvert à toutes les parties, en ce compris le ministère public, le fait que l’opposition n’ait pas été formée par lui, mais par le candidat aux fonctions de contrôleur ne constitue pas un obstacle à la recevabilité de l’appel qu’il forme sur le fondement de l’article L. 661'6 susmentionné.

En conséquence, la demande d’irrecevabilité de ce chef sera rejetée.

Sur le champ d’application de l’appel.

Les sociétés Groupe G H et Z I G H soutiennent que le droit d’appel du ministère public prévu à l’article L. 661'6 du code de commerce ne s’applique qu’aux décisions relatives à la nomination des contrôleurs et non à celles refusant la désignation d’un contrôleur.

Cependant, l’article L. 661'6 susmentionné ne vise pas uniquement les décisions de nomination, mais plus largement les ordonnances et jugements relatifs à la nomination des organes de la procédure, des experts et des contrôleurs.

Il s’ensuit que le droit d’appel conféré au ministère public s’applique également à l’appel des décisions refusant la désignation du ou des contrôleurs.

Sur la qualité du ministère public à interjeter appel.

Les sociétés Groupe G H et Z I G H font valoir que le ministère public intervient pour la sauvegarde de l’ordre public économique, c’est-à-dire la défense de l’intérêt général, et qu’il ne peut soutenir une position qui n’intéresse que la défense d’intérêts privés, même si la matière du litige, elle-même, est d’ordre public. Selon elles, le droit pour un créancier de solliciter sa désignation en qualité de contrôleur est un droit purement personnel attaché à sa créance, et le refus de désignation ne porte atteinte qu’à son droit particulier et non à l’intérêt public économique.

Selon l’article L. 621'11 du code de commerce : « les contrôleurs assistent le mandataire judiciaire dans ses fonctions et le juge-commissaire dans sa mission de surveillance de l’administration de l’entreprise. »

Ainsi la mission de contrôleur ne s’exerce pas dans l’intérêt personnel de celui-ci, mais au contraire dans l’intérêt de la collectivité des créanciers, puisqu’il a notamment pour rôle d’assister le juge-commissaire et le mandataire judiciaire. C’est donc de façon logique que le législateur a donné au ministère public, qui veille à la préservation de l’intérêt général et à la défense de l’ordre public économique, le monopole de l’appel des décisions statuant sur les désignations des contrôleurs qui exercent cette fonction d’assistance dans les procédures collectives.

Il s’ensuit que le ministère public a intérêt et qualité à interjeter appel de la décision déférée dès lors qu’un texte exprès le prévoit, ce qui est conforme à sa mission de l’intérêt public économique.

Les appelantes seront donc déboutées de leur demande d’irrecevabilité.

Sur le fond.

L’article L. 621-10 du code de commerce dispose que « le juge-commissaire désigne un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui en font la demande ».

Dans un arrêt du 21 octobre 2016, la chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé que « si le juge-commissaire désigne un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui lui en font la demande, il n’est pas tenu de désigner tous ceux qui en font la demande, même s’ils ne sont pas plus de cinq ».

Les sociétés Groupe G H et Z I G H en concluent que la désignation de contrôleurs ne revêt aucun caractère d’automaticité et qu’il convient que les juges du fond s’interrogent sur l’opportunité de la désignation sollicitée.

En l’espèce, elles font valoir que la société CDR créances a contesté avec vigueur l’ouverture de la procédure collective et qu’elle se situe dans une volonté d’opposition permanente à celle-ci, allant même jusqu’à intervenir volontairement pour contester le jugement renouvelant la période d’observation.

Selon elles, si la société CDR créances était désignée contrôleur, de par sa critique même de l’existence de la procédure collective, du caractère virulent de ses conclusions, tant à leur endroit qu’à celle du tribunal, elle porterait atteinte à l’intérêt du bon déroulement de la procédure collective.

Elles font part de l’important contentieux les opposant au CDR et soutiennent que si celle-ci était désignée contrôleur, elle intenterait de nombreux recours de façon systématique, s’inscrivant dans une stratégie de harcèlement procédural de son débiteur.

De leur côté, les organes de la procédure font valoir que s’il ne suffit pas qu’un simple contentieux existe entre le débiteur et le candidat contrôleur, les candidatures doivent être rejetées dès lors qu’un tel contentieux, par sa spécificité et son importance, fait craindre un abus par le créancier de ses fonctions de contrôleur, susceptible de porter atteinte aux chances de redressement du débiteur.

Ils indiquent souhaiter éviter que le conflit opposant le CDR créances aux sociétés du groupe H ne perturbent le bon fonctionnement de la procédure, compte tenu de l’accès à des informations privilégiées dont dispose le contrôleur, de nature à porter une atteinte disproportionnée à l’organisation de la défense des débiteurs dans le cadre des contentieux actuellement en cours. La société CDR créances précise avoir été désignée contrôleur dans la première procédure collective, qui s’est déroulée 16 ans auparavant, et que jamais aucun reproche n’a pu lui être fait relativement aux fonctions qu’elle a alors exercées.

Enfin elle ajoute être le créancier principal des sociétés du groupe H, étant créancière de 98 % du passif total.

Il convient de relever que les contrôleurs désignés dans les procédures collectives ont pour mission générale d’être les gardiens de l’intérêt collectif des créanciers et disposent d’un pouvoir supplétif en cas de carence des organes de la procédure, de sorte qu’ils peuvent porter un regard critique sur le déroulement de la procédure, cette critique devant s’opérer de façon positive, dans l’intérêt collectif des créanciers, et ne devant pas constituer une obstruction au bon déroulement de la procédure.

En l’espèce, le simple fait que la société CDR créances soit opposée aux sociétés du groupe H dans des procédures judiciaires est insuffisant à démontrer que sa nomination ait pour objet ou pour effet de nuire au bon déroulement de la procédure de sauvegarde des sociétés débitrices, de sorte que c’est par une appréciation erronée des faits de la présente espèce que le tribunal n’a pas fait droit à la demande de désignation de la société CDR créances en qualité de contrôleur.

Le jugement sera donc infirmé et la société CDR créances sera désignée en qualité de contrôleur de la procédure de sauvegarde des sociétés Groupe G H et Z I G H

Sur les dépens.

Il convient d’ordonner l’emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable l’appel du ministère public,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Désigne la société CDR créances en qualité de contrôleur à la procédure de sauvegarde des sociétés Groupe G H et Z I G H

Ordonne l’emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 13 juin 2017, n° 16/24079