Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 5, 17 décembre 2020, n° 20/14074

  • Conséquences manifestement excessives·
  • Exécution provisoire·
  • Tribunal judiciaire·
  • Expulsion·
  • Procédure civile·
  • Immeuble·
  • Sociétés·
  • Bail·
  • Indemnité d 'occupation·
  • Activité

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 5, 17 déc. 2020, n° 20/14074
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/14074
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 5

ORDONNANCE DU 17 DECEMBRE 2020

(n° /2020)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/14074 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCNYZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juillet 2020 TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS – RG n° 17/11774

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Thomas RONDEAU, Conseiller, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

DEMANDEUR

S.E.L.A.R.L. JURIS PHARMA

36 rue du Faubourg Saint-Honoré

[…]

Représentée par Me Freddy BRILLON de la SELEURL CABINET Freddy BRILLON, avocat au barreau de PARIS, toque : G795

à

DEFENDEURS

S.C.I. DU […]

[…]

[…]

S.C.P. d’huissiers ROUET ET MAGET

[…]

[…]

Représentées par le Cabinet SEPTIME, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

Assistées de Me Laurence SEMEVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0313

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 18 Novembre 2020 :

Par jugement du 7 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :

— constaté l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail du 18 décembre 2002 portant sur les locaux situés au 2e étage sur rue de l’immeuble sis […] à Paris 8e, à la date du 28 août 2017 ;

— ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les six mois de la signification du présent jugement, l’expulsion de la société Juris Pharma et de tout occupant de son chef des lieux, avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

— dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désignée par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément aux dispositions légales ;

— fixé l’indemnité d’occupation due par la société Juris Pharma, à compter de la résiliation du bail, soit le 28 août 2017, à une somme mensuelle de 3.863 euros HT outre les taxes, charges et accessoires ;

— condamné la société Juris Pharma à payer à la SCI du […] la somme de 12.655 euros TTC au titre de sa dette locative comprenant, les loyers, indemnité d’occupation, taxes et charges arrêtée au mois de mars 2019 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

— condamné la société Juris Pharma à payer à la SCI du […] une indemnité d’occupation d’un montant mensuel principal de 3.863 euros HT outre les taxes, charges et accessoires, à compter du mois d’avril 2019 jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés ;

— débouté toutes les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

— ordonné l’exécution provisoire de la présente décision ;

— rejeté les autres demandes ;

— condamné la société Juris Pharma aux dépens avec distraction.

Par acte du 8 septembre 2020, la société SELARL Juris Pharma a relevé appel de la décision.

Par acte délivré le 9 octobre 2020, la société SELARL Juris Pharma demande au premier président de la cour d’appel statuant en référé, au visa de l’ancien article 524 du code de procédure civile, des articles 515 et 517-1 et suivants du code de procédure civile, du décret du 11 décembre 2019 en son II de l’article 55, de :

— ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement ;

— condamner le défendeur au paiement d’une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens.

Elle fait notamment valoir que l’exécution provisoire aurait des conséquences manifestement

excessives.

Par conclusions déposées à l’audience du 18 novembre 2020, la SCI du […] et la SCP Rouet et Maget demandent au premier président de :

— débouter la demanderesse de sa demande de suspension de l’exécution provisoire ;

— la condamner aux dépens et au paiement de la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à chacune des deux défenderesses.

Elles font notamment valoir que la demanderesse ne rapporte pas le moindre début de preuve des conséquences manifestement excessives qu’entraînerait l’exécution provisoire.

A l’audience du 18 novembre 2020, les conseils des parties ont été entendus en leurs observations, le conseil de la demanderesse précisant que la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile est formée à l’encontre de la seule SCI du […].

SUR CE,

Il résulte de l’article 524 premier alinéa 2° du code de procédure civile, dans sa version applicable aux instances introduites devant les juridictions du premier degré avant le 1er janvier 2020, que, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, le premier président statuant en référé peut l’arrêter si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les conséquences manifestement excessives s’apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d’infirmation.

Il sera précisé, en tant que de besoin, que la présente juridiction n’est pas juge d’appel de la décision rendue en première instance et n’a donc aucunement à apprécier si la décision frappée d’appel comporte des erreurs de droit ou de fait ni à apprécier les chances de réformation dans le cadre de l’appel interjeté, les observations sur le fond du litige important donc peu.

En l’espèce, à titre liminaire, il sera rappelé que la société demanderesse évoque à la fois les dispositions de l’ancien article 524 du code de procédure civile et celles du nouvel article 517-1, issues du décret du 11 décembre 2019.

Or, l’instance a été ici introduite devant le tribunal de grande instance de Paris, devenu tribunal judiciaire, le 21 août 2017, de sorte que c’est bien l’ancien article 524 du code de procédure civile applicable aux instances introduites avant le 1er janvier 2020, dans sa version rappelée ci-avant, qui s’applique au présent litige.

Il s’en déduit aussi que les développements des parties relatifs aux relations entre les parties ou au fond du litige, en ce inclus le calcul des sommes réellement dues ou encore les moyens soulevés en appel, demeurent inopérants, le premier président ne devant statuer ici, pour rappel, au regard du droit applicable, que sur le risque de conséquences manifestement excessives en cas de maintien de l’exécution provisoire.

A cet égard, il sera relevé :

— que le bail litigieux concerne le deuxième étage de l’immeuble, pour une superficie d’environ

110 mètres carrés ;

— que la société Juris Pharma loue également d’autres locaux dans le même immeuble, situés au premier étage (50 mètres carrés) et au troisième étage (100 mètres carrés) ; qu’elle a, par le passé, pris à bail d’autres lots qui ont fait l’objet de résiliations ;

— qu’elle indique que son expulsion des locaux du deuxième étage, qu’elle loue depuis plus de 26 ans, aurait de graves conséquences sur son activité, la poursuite de l’activité dans les deux autres lots étant inopérante et non fonctionnelle, dans la mesure où le deuxième étage comprend le local technique et est le point de départ des installations permettant à tous les postes de travailler ainsi que du réseau filaire intérieur du cabinet ;

— que, cependant, il n’est pas établi par la demanderesse, requérante à l’arrêt de l’exécution provisoire et sur laquelle repose donc la charge de la preuve, que la nouvelle configuration des locaux ne lui permettrait pas une poursuite d’activité selon d’autres modalités, aucune pièce produite ne venant démontrer cette impossibilité, pas plus qu’elle n’étaye son affirmation selon laquelle l’expulsion d’un étage la conduirait à des mesures de chômage ;

— que le caractère moins opérationnel des bureaux ou les éventuelles difficultés de circulation entre deux étages, qui peuvent certes être pénibles, ne suffisent pas, pour autant, à démontrer un préjudice irréversible au sens de l’article 524 du code de procédure civile ;

— qu’au demeurant, elle n’établit pas non plus qu’elle serait dans l’impossibilité de louer de nouveaux locaux, alors même que son activité d’avocats, exercée à Paris dans le huitième arrondissement, dans un quartier d’immobilier d’affaires, peut s’exercer dans tout autre immeuble où se trouvent des bureaux disponibles ;

— que, de même, elle ne saurait tirer argument de la crise sanitaire pour dire qu’elle ne pourrait pas respecter les règles de distanciation dans de nouveaux locaux, affirmation qui ne repose sur aucun fait précis ;

— que la SELARL Juris Pharma ne peut non plus être suivie lorsqu’elle expose que le secret professionnel des avocats exerçant en libéral ne serait plus garanti en cas d’expulsion d’un étage, alors même qu’elle ne verse sur ce point aucune pièce ni ne prouve qu’elle serait dans l’incapacité de trouver de nouveaux locaux lui permettant de respecter les dispositions applicables à l’exercice de la profession d’avocat ;

— que, dès lors, c’est à juste titre que les défenderesses observent que la demanderesse ne démontre pas que la mesure d’expulsion constituerait une atteinte irréversible qui lui interdirait de poursuivre son activité professionnelle ;

— qu’il n’appartient enfin pas à la SCI du […], contrairement à ce qu’indique la demanderesse, de démontrer qu’elle serait dans l’incapacité, en cas d’infirmation, de remettre en état les locaux du deuxième étage pour assurer à nouveau la continuité entre les trois étages, étant observé en toute hypothèse que la surface financière de la SCI, propriétaire de sept étages de l’immeuble sur rue et de cinq étages sur cour dans un quartier de prestige, apparaît à l’évidence importante.

Ces éléments commandent donc de rejeter la demande d’arrêt de l’exécution provisoire.

La demanderesse devra en outre verser la somme fixée au dispositif en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Rejetons la demande en arrêt de l’exécution provisoire du jugement rendu le 7 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Paris ;

Condamnons la SELARL Juris Pharma à verser à la SCI du […] la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la SELARL Juris Pharma à verser à la SCP Rouet et Maget la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la SELARL Juris Pharma aux dépens ;

O R D O N N A N C E r e n d u e p a r M . T h o m a s R O N D E A U , C o n s e i l l e r , a s s i s t é e d e Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Conseiller

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 5, 17 décembre 2020, n° 20/14074