Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 23 février 2017, n° 15/01144

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 1re ch., 23 févr. 2017, n° 15/01144
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 15/01144
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bayonne, 8 mars 2015
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

PC/AM

Numéro 17/871

COUR D’APPEL DE PAU

1re Chambre

ARRET DU 23/02/2017

Dossier : 15/01144

Nature affaire :

Recours entre constructeurs

Affaire :

SA COLAS SUD OUEST

C/

XXX SAS Y FILS

SELARL MJ SYNERGIE

A B X

Grosse délivrée le :

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRET prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 23 février 2017, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

*****

APRES DÉBATS à l’audience publique tenue le 22 novembre 2016, devant :

Madame SARTRAND, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l’article 785 du code de procédure civile

Madame ROSA SCHALL, Conseiller assistés de Madame VICENTE, Greffier, présente à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

SA COLAS SUD OUEST venant aux droits de la SA SACER ATLANTIQUE

XXX

XXX

XXX

agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice

représentée par Maître Philippe DABADIE, avocat au barreau de PAU

assistée de Maître Daniel DUCO de la SELARL DUCO FABRY-LAGARDE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES :

XXX

XXX

XXX

représentée par son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

représentée par Maître Julie JACQUOT de la SELARL AVOCADOUR, avocat au barreau de PAU

assistée de Maître Philippe REZEAU, avocat au barreau de PARIS

SAS Y FILS

XXX

XXX

XXX

prise en la personne de son représentant légal en exercice

SELARL MJ SYNERGIE

XXX

XXX

prise en la personne de son représentant légal en exercice en sa qualité de mandataire liquidateur de la SAS Y FILS

Monsieur A B X pris en sa qualité d’administrateur de la SAS Y FILS

XXX

42000 SAINT B

assignés

sur appel de la décision

en date du 09 MARS 2015

rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BAYONNE

Courant 2011, la SARL Washop Anglet, maître d’ouvrage, a conclu avec la SAS Y un marché de travaux de génie civil et gros oeuvre pour la construction d’une station de lavage automobile à Anglet.

Le 27 juin 2011, la SAS Y a conclu avec la SA SACER Atlantique (aux droits de laquelle se trouve désormais la SA Colas Sud Ouest) un contrat de sous-traitance concernant le lot VRD, pour un montant de 75 000 € HT.

La SA SACER Atlantique a été acceptée et agréée par la SARL Washop Anglet et, le 9 juillet 2011, a été établi un acte de délégation de paiement prévoyant que le maître d’ouvrage ne procédera au règlement des situations présentées par le sous-traitant que sur ordre de l’entrepreneur principal.

Le 30 septembre 2011, la SA SACER Atlantique a conclu avec la SAS Y un second contrat de sous-traitance pour des travaux supplémentaires, non compris dans le devis global de la société Y et dont la SARL Washop Anglet a procédé directement au règlement à concurrence d’une somme de 15 281,77 € TTC.

Le 16 novembre 2011, la SAS Y a établi une situation de travaux n° 4 intégrant partiellement le montant de la facture de 76 807,12 € TTC éditée par la société SACER que la société Washop Anglet a refusé d’acquitter, en se prévalant de diverses malfaçons.

Exposant n’avoir pu obtenir paiement du solde restant dû des travaux par elle réalisés malgré mise en demeure adressée à l’entrepreneur principal et demande au maître d’ouvrage au titre de l’action directe et de la délégation de paiement, la SA SACER Atlantique a fait assigner la SARL Washop Anglet et la SAS Y devant le tribunal de commerce de Bayonne qui, par jugement du 9 mars 2015, a :

— jugé que la SARL Washop Anglet est fondée à opposer une exception de défense trouvée dans ses relations avec la SAS Y,

— jugé irrecevable la demande de paiement de facture de la SA Colas Sud-Ouest (venant désormais aux droits de la SA SACER Atlantique) contre la SARL Washop Anglet,

— débouté la SARL Washop Anglet de sa demande de fixation de créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Y,

— dit que la garantie bancaire fournie par la SARL Washop Anglet n’a plus lieu d’être et ordonné la restitution par la SAS Y de la garantie d’un montant de 54 671,88 € à la société Washop Anglet, – condamné la SA Colas Sud-Ouest à payer à la SARL Washop Anglet la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Au soutien de leur décision, les premiers juges ont considéré en substance :

— que la délégation de paiement intervenue en l’espèce est une délégation imparfaite laissant subsister l’obligation du débiteur initial,

— que la SARL Washop Anglet est donc en droit d’opposer à la société Colas Sud-Ouest un moyen de défense tiré de ses relations avec la société Y et peut prétendre se limiter à ce qu’elle doit à celle-ci,

— qu’en l’espèce une expertise judiciaire a évalué à 102 117,61 € le montant des reprises imputables à la SAS Y,

— que l’article 13 de la loi du 31 décembre 1975 précise que les obligations du maître de l’ouvrage sont limitées à ce qu’il doit encore à l’entrepreneur principal à la date de la réception de la copie de la mise en demeure,

— que la SARL Washop Anglet n’était plus débitrice de la SAS Y à la date à laquelle la société Colas a réclamé le paiement de sa facture,

— que la SARL Washop Anglet n’étant pas débitrice de la société Colas Sud-Ouest, il n’y a pas lieu de fixer sa créance au passif de la SAS Y au titre d’une obligation inexistante.

La SA Colas Sud-Ouest a interjeté appel de cette décision selon déclaration transmise au greffe de la Cour le 31 mars 2015.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 21 octobre 2016.

Dans ses dernières conclusions déposées le 29 juin 2015, la SA Colas Sud-Ouest demande à la Cour, réformant le jugement entrepris :

— de constater qu’elle est titulaire d’une créance au titre des travaux sous-traités et régulièrement facturés d’un montant en principal de 76 807,12 € TTC,

— de dire qu’en application de l’action directe, de la délégation de paiement et du contrat de sous-traitance, la SARL Washop Anglet, en sa qualité de maître d’ouvrage, et la SAS Y sont redevables envers elle de ladite somme,

— de constater l’engagement de payer du maître d’ouvrage, sans réserve, dans son e-mail du 29 décembre 2011,

— de constater l’ordre, en date du 10 janvier 2012, donné par la SAS Y au maître d’ouvrage de payer son sous-traitant,

— de constater que le procès-verbal de réception établi unilatéralement par la SARL Washop Anglet ne fait état d’aucune réserve concernant les travaux réalisés en sous-traitance par la société SACER et objets de la facture du 28 octobre 2011,

— de fixer sa créance au passif de la SAS Y à la somme de 91 807,12 €,

— de condamner la SARL Washop Anglet à lui payer la somme de 76 807,12 € avec intérêts légaux à compter du 29 décembre 2011, outre la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et celle de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de Me Dabadie. Elle soutient en substance :

— à l’égard de la société Y, que les premiers juges ont omis de statuer sur ses demandes contre cette société,

— à l’égard de la SARL Washop Anglet : que l’obligation du délégué (soit la société Washop) envers le délégataire (soit elle-même) est une obligation nouvelle et autonome, s’ajoutant à l’obligation initiale du délégant (la société Y) envers le délégataire,

— qu’il en résulte que la SARL Washop Anglet ne peut lui opposer, en sa qualité de délégataire, aucune exception ni aucun moyen de défense tirés de ses relations avec le délégant ou des relations entre délégant et délégataire.

Dans ses dernières conclusions déposées le 25 août 2016, la SARL Washop Anglet demande à la Cour :

— à titre principal de confirmer le jugement entrepris,

— subsidiairement, de fixer sa créance au passif de la SA Y à la somme de 76 807,12 € TTC,

— en toute hypothèse, de débouter la SA Colas de ses demandes en dommages-intérêts pour résistance abusive et en application de l’article 700 du code de procédure civile et de la condamner à lui payer une indemnité de procédure de 5 000 €, outre les entiers dépens, avec bénéfice de distraction au profit de Me Jacquot.

Elle soutient pour l’essentiel :

— à titre principal :

— subsidiairement :

Me X, ès qualités d’administrateur judiciaire et la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Y Fils, auxquels les conclusions et pièces de l’appelante et de l’intimée ont été signifiées par actes des 21 juillet 2015 et 21 et 22 septembre 2015, n’ont pas constitué avocat.

MOTIFS

I – Sur l’action principale de la SA Colas Sud-Ouest : Le 9 juillet 2011, la SARL Washop Anglet, la SAS Y et la SA SACER Aquitaine ont signé un document qualifié de 'délégation de paiement’ stipulant :

— que l’entreprise principale (Y) délègue le maître de l’ouvrage (Washop) qui l’accepte expressément au sous-traitant (SACER) pour recevoir le paiement des sommes dues au titre du contrat de sous-traitance,

— que cette délégation s’inscrit dans le cadre de l’article 14 de la loi du 31 décembre 1975 et dans les termes de l’article 1275 du code civil,

— qu’elle porte sur l’ensemble des sommes dues au sous-traitant par l’entreprise principale, y compris la révision des prix et les éventuels travaux supplémentaires dans les limites prévues par le contrat de sous-traitance.

Il y a lieu ici de rappeler qu’aux termes de l’article 14 de la loi du 31 décembre 1975, à peine de nullité du sous-traité les paiements de toutes les sommes dues par l’entrepreneur au sous-traitant en application du sous-traité sont garantis par une caution personnelle et solidaire obtenue par l’entrepreneur d’un établissement qualifié, agréé dans des conditions fixées par décret mais que la caution n’aura pas lieu d’être fournie si l’entrepreneur délègue le maître de l’ouvrage au sous-traitant dans les termes de l’article 1275 devenu 1338 du code civil, à concurrence du montant des prestations exécutées par le sous-traitant.

La demande en paiement de solde de travaux de la SA Colas Sud-Ouest s’inscrit dans le cadre fixé par l’article 14 de la loi du 31 décembre 1975 et non dans celui de l’action directe régie par les articles 12 et 13 de ce texte.

Or, à la différence de l’action directe, la délégation de paiement, même imparfaite comme en l’espèce – à défaut de toute mention univoque du contraire dans l’acte du 9 juillet 2011 – ne permet pas au maître de l’ouvrage d’opposer au sous-traitant les exceptions dont il dispose à l’égard de l’entrepreneur principal et son montant ne peut être conventionnellement limité aux sommes restant dues à l’entrepreneur principal par le maître de l’ouvrage au moment de la réclamation du sous-traitant.

Il en résulte que la SARL Washop ne peut opposer à la SA Colas Sud-Ouest l’exception tirée d’une créance par elle prétendument détenue à l’encontre de la SAS Y au titre du coût de réfection des désordres affectant les ouvrages par elle réalisés, hors travaux exécutés par la SA Colas Sud-Ouest.

La facture dont paiement est réclamé n’étant contestée ni dans son principe ni dans son montant et aucune créance réciproque susceptible de compensation n’étant caractérisée au profit tant de la SARL Washop Anglet que de la SAS Y, il convient, réformant le jugement entrepris :

— de condamner la SARL Washop Anglet à payer à la SA Colas Sud-Ouest la somme de 76 807,12 € TTC, augmentée des intérêts au taux conventionnel d’une fois et demi le taux légal, depuis le 24 juillet 2012, date de mise en demeure,

— de fixer la créance de la SA Colas Sud-Ouest au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Y, à la somme de 76 807,12 € TTC augmentée des intérêts au taux conventionnel d’une fois et demi le taux légal, à compter de la mise en demeure du 19 juin 2012, étant précisé que la SAS Y est tenue in solidum avec la SARL Washop Anglet au titre de la somme due en principal et des intérêts courus depuis le 24 juillet 2012.

A défaut de justification d’un préjudice distinct de celui causé par le retard de paiement, déjà compensé par l’octroi des intérêts de retard à compter des mises en demeure, la SA Colas Sud-Ouest sera déboutée de sa demande en dommages-intérêts complémentaires.

II – Sur l’appel en garantie formé par la SARL Washop Anglet contre la SAS Y :

Soutenant être, au titre des divers désordres et malfaçons affectant l’ouvrage, titulaire à l’encontre de la SAS Y d’une créance d’un montant supérieur aux sommes réclamées par la SA Colas Sud-Ouest et avoir versé à la SAS Y une somme excédentaire par rapport aux travaux réalisés par la SA Colas Sud-Ouest, la SARL Washop Anglet sollicite à titre subsidiaire, la reconnaissance à son profit d’une créance contre la société Y, d’un montant équivalent aux sommes dues à la société Colas.

Si la Cour n’est pas saisie d’une demande d’apurement des comptes entre les sociétés Washop Anglet et Y, il y a lieu de constater que l’expert Z, commis pour vérifier l’existence des désordres affectant l’ouvrage réalisé par la société Y, dans son rapport définitif du 26 juin 2014 (pièce n° 19 produite par la SARL Washop), a retenu, compte tenu du montant des travaux de réfection des désordres affectant l’ouvrage, l’existence d’une créance de 127 718,36 € TTC au profit de la société Washop, en ce inclus le montant des sommes dues à la société Colas.

Il convient dès lors de fixer la créance de la SARL Washop Anglet au passif de la liquidation judiciaire de la société Y à la somme de 76 807,12 € TTC.

III – Sur les demandes accessoires :

L’équité commande, réformant le jugement entrepris, de condamner la SARL Washop Anglet à payer à la SA Colas Sud-Ouest, en application de l’article 700 du code de procédure civile, la somme globale de 3 000 € au titre des frais irrépétibles par elle exposés tant en première instance qu’en cause d’appel.

La SARL Washop Anglet sera condamnée aux entiers dépens d’appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de Me Dabadie.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et en dernier ressort :

Vu le jugement du tribunal de commerce de Bayonne en date du 9 mars 2015,

Réformant le jugement entrepris et statuant à nouveau :

— Condamne la SARL Washop Anglet à payer à la SA Colas Sud-Ouest la somme de 76 807,12 € (soixante seize mille huit cent sept euros et douze centimes) TTC, augmentée des intérêts au taux conventionnel d’une fois et demi le taux légal, depuis le 24 juillet 2012,

— Fixe la créance de la SA Colas Sud-Ouest au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Y, à la somme de 76 807,12 € (soixante seize mille huit cent sept euros et douze centimes) TTC augmentée des intérêts au taux conventionnel d’une fois et demi le taux légal, à compter du 19 juin 2012, étant précisé que la SAS Y est tenue in solidum avec la SARL Washop Anglet au titre de la somme due en principal et des intérêts courus depuis le 24 juillet 2012,

— Déboute la SA Colas Sud-Ouest de sa demande en dommages-intérêts complémentaires,

— Fixe la créance de la SARL Washop Anglet au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Y à la somme de 76 807,12 € (soixante seize mille huit cent sept euros et douze centimes) TTC,

— Condamne la SARL Washop Anglet à payer à la SA Colas Sud-Ouest, en application de l’article 700 du code de procédure civile, la somme globale de 3 000 € (trois mille euros) au titre des frais irrépétibles par elle exposés tant en première instance qu’en cause d’appel,

— Condamne la SARL Washop Anglet aux entiers dépens d’appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de Me Dabadie, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme Sartrand, Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Sandra VICENTE Christine SARTRAND

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