Cour d'appel de Poitiers, 3ème chambre, 18 décembre 2013, n° 12/03066

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, 3e ch., 18 déc. 2013, n° 12/03066
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 12/03066
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Sabres, 19 juillet 2012
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N° 393

R.G : 12/03066

XXX

A

H

C/

X

D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

3e Chambre Civile

ARRÊT DU 18 DECEMBRE 2013

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/03066

Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 20 juillet 2012 rendu par le Tribunal de Grande Instance de SABLES D’OLONNE.

APPELANTS :

1°) Monsieur I A

né le XXX à SAINT-PIERRE-LA-BRUYERE (61)

XXX

XXX

2°) Madame G H épouse A

née le XXX à XXX

XXX

XXX

ayant pour avocat postulant la SCP GALLET-ALLERIT, avocats au barreau de POITIERS

et ayant pour avocat plaidant Me Virginie KLEIN, avocat au barreau de NEUILLY-SUR-SEINE

INTIMES :

1°) Monsieur Z, S, T X

né le XXX à XXX

XXX

85270 SAINT-HILAIRE-DE-RIEZ

ayant pour avocat postulant la SELARL ATLANTIC JURIS VENDEE ANJOU, avocat au barreau des SABLES D’OLONNE

2°) Monsieur C D

XXX

85800 SAINT-GILLES-CROIX-DE-VIE

ayant pour avocat postulant la SELARL LEXAVOUE POITIERS, avocats au barreau de POITIERS

et ayant pour avocat plaidant Me Olivier BOLTE, collaborateur de la SCP CIRIER & Associés, avocats au barreau des SABLES D’OLONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 29 Mai 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Michel BUSSIERE, Président

Monsieur Frédéric CHARLON, Conseiller

Madame Danielle SALDUCCI, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Monsieur Michel BUSSIERE, Président et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******************

LA COUR

Faits et procédure:

I A et G H son épouse sont propriétaires au sein de la Résidence de la Corniche d’Or d’un appartement sis à Saint-Hilaire-de-Riez, et C D était propriétaire d’un bien immobilier contigu nommé « Château Remember », qu’il a cédé en août 2004 à Z X.

Alors qu’il était encore propriétaire de son bien, C D avait fait édifier en 1998 un garage à l’angle nord de son terrain se trouvant, selon les époux A, sur une servitude de cour commune grevant la partie non bâtie de la résidence de la Corniche d’Or. Par ordonnance de référé des 23 mars et 29 juin 1999, ils ont obtenu l’organisation d’une expertise judiciaire confiée à M N, dont le rapport a été déposé le 18 février 2000.

Par acte d’huissier du 14 mars 2011, les époux A ont fait assigner C D et Z X devant le tribunal de grande instance des Sables-d’Olonne aux fins d’obtenir sous astreinte la démolition du garage litigieux, outre des indemnités au titre de leur trouble de jouissance et de leurs frais irrépétibles.

Par jugement du 20 juillet 2012, ce tribunal a dit que l’action n’était pas prescrite mais a débouté les époux A de leurs prétentions et les a condamnés à verser à C D et à Z X, chacun les sommes de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre 1.200 € au titre de l’ article 700 du Code de Procédure Civile

La Cour :

Vu l’appel interjeté par les époux A le 23 août 2012,

Vu les dernières conclusions déposées par les appelants le 6 novembre 2012 suivant lesquelles, poursuivant l’infirmation du jugement, ils demandent que la démolition du garage soit ordonnée sous astreinte de 100 € par jour de retard à valoir quinze jours après la signification de l’arrêt, et que C D et Z X soient condamnés solidairement à leur payer les sommes de 10.000 € au titre de leur trouble de jouissance, 2.500 € au titre de leurs frais irrépétibles, et qu’ils soient condamnés aux dépens sans solliciter leur distraction.

Vu les dernières écritures déposées par C D le 28 décembre 2012 aux termes desquelles, sollicitant la confirmation du jugement, il demande que les appelants soient condamnés à lui payer les sommes de 5.000 € pour appel abusif, 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, et qu’ils soient condamnés aux dépens dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Poitiers. Il précise que la présence du garage ne fait aucune obstruction à la servitude de cour commune dont se prévalent les appelants et qu’il ne crée aucun trouble du voisinage.

Vu les dernières écritures déposées par Z X le 3 janvier 2013 aux termes desquelles, sollicitant la confirmation du jugement, il demande que les appelants soient condamnés à lui payer une indemnité de 5.000 € pour appel abusif, 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et qu’ils soient condamnés aux dépens dont distraction au profit de la SELARL Atlantic Juris Vendée Anjou. Il sollicite à titre subsidiaire sa mise hors de cause pour le cas où il serait fait droit en tout ou partie aux demandes des époux A et demande que C D soit condamné à lui payer une indemnité de 3.700 € au titre de ses frais irrépétibles.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour l’exposé complet des demandes et observations des parties, aux dernières conclusions visées ci-dessus.

Motifs et décision :

Le moyen tiré de la prescription n’étant pas repris en cause d’appel, il n’y a pas lieu de statuer sur ce point.

Sur le fond, les appelants soutiennent que le garage édifié sur la propriété X dite Le Manoir, qui ne fait pas partie de la copropriété la Corniche d’or, viole la servitude de cour commune consentie à ladite copropriété.

La servitude dont se prévalent les époux A et qui figure au titre de propriété X prévoit d’une part que chacun des trois groupes de bâtiments (ilot A, ilots B et C et le Manoir), bénéficieront et seront réciproquement grevés d’un libre droit de circulation pour piétons sur les cheminements aménagés à cet effet et de passage de toutes canalisations et de câbles de desserte en eaux potable ou usée, électricité, téléphone, nécessaires à leur aménagement. Il est également précisé que ce même immeuble est partiellement grevé en sous-sol d’une servitude de tréfonds pour l’emprise des garages des copropriétés.

Le même titre de propriété rappelle d’autre part que le permis de construire délivré pour le programme immobilier la Corniche d’or et le certificat d’urbanisme imposent que la partie non bâtie de l’immeuble soit grevée d’une servitude dite de cour commune, répondant aux conditions formulées par l’administration, et dont il résulte que les accès pour les véhicules ne pourront s’exercer que par les aménagements prévus à cet effet (garages en sous-sol) pour les copropriétés de la Corniche d’or, et les raccordements des réseaux de distribution devront être réalisés à partir de ceux existants sur les copropriétés.

Les époux A considèrent qu’en édifiant un garage sur la partie non bâtie de la cour, C D a enfreint cette servitude particulière qui est prévue par le code de l’urbanisme (article L 471-1) et qui constitue une charge perpétuelle destinée à aménager un espace libre entre des édifices voisins pour éviter toute gêne, et que cette servitude ne saurait se limiter à une simple servitude pour piétons ou passage de réseaux.

Pour que l’atteinte à la servitude de cour commune soit constituée, encore faudrait-il que le Manoir soit assujetti aux conditions particulières formées par l’administration et rappelées ci-dessus, qui obligent d’emprunter les seuls aménagements prévus pour l’accès aux garages en sous-sol, et de réaliser les raccordements à partir de ceux existants sur les copropriétés. Or ces obligations ne concernent pas le Manoir mais exclusivement les copropriétés de la Corniche d’or comme l’indique expressément l’acte de propriété, et aucun élément ne permet de considérer que l’édification du garage sur la propriété X empêcherait l’exercice de ces conditions.

Par ailleurs, l’article L 471-1 du code de l’urbanisme auquel se réfèrent les appelants dispose que lorsqu’en application des dispositions d’urbanisme, la délivrance du permis de construire est subordonnée, en ce qui concerne les distances qui doivent séparer les constructions, à la création, sur un terrain voisin, de servitudes de ne pas bâtir ou de ne pas dépasser une certaine hauteur en construisant, ces servitudes, dites de cours communes, peuvent, à défaut d’accord amiable entre les propriétaires intéressés, être imposées par la voie judiciaire dans des conditions définies par décret.

Mais cet article, qui se réfère aux servitudes de cour commune prévoyant des interdictions de bâtir ou de dépasser certaines hauteurs, n’est pas applicable au cas d’espèce dès lors que de telles interdictions ne figurent pas dans les actes et pièces produits aux débats.

Il ressort en outre de l’expertise judiciaire réalisée en 2000 que la construction du garage a fait l’objet d’un permis de construire auquel aucun obstacle n’a été opposé par les services de l’urbanisme sur cette zone, si bien que la servitude de cour commune figurant sur le titre de propriété X, qui ne comporte aucune interdiction de bâtir ne concerne, contrairement à l’analyse qu’en font les appelants, que les questions de passage de véhicules, de piétons ou encore de canalisations et à cet égard, il n’est ni démontré ni soutenu que la présence du garage serait de nature à limiter ou à empêcher l’usage de la servitude telle qu’elle est mentionnée sur l’acte de propriété de M. X.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté les époux A de leur demande de démolition du garage sur le fondement de la violation de la servitude de cour commune.

S’agissant des troubles anormaux dont se prévalent à titre subsidiaire les appelants, il ressort de l’expertise judiciaire que l’édification du garage a privé les appelants d’une partie de leur vue sur mer et de l’ensoleillement. Si cette privation de vue et d’ensoleillement a été qualifiée de minime par l’expert, il ressort des photographies issues du constat d’huissier produit par les appelants que le garage litigieux, qui n’est pas inesthétique s’agissant d’un ouvrage revêtu de tuiles rouges respectant le style des constructions voisines, occulte cependant assez nettement la vue sur la mer lorsqu’on est debout sur le balcon de l’appartement A, la vue disparaissant presque totalement en position assise.

La présence de ce garage obstrue donc la vue dans des proportions suffisamment importantes et gênantes pour que le trouble anormal soit caractérisé, étant rappelé que la responsabilité pour trouble anormal du voisinage est une responsabilité sans faute, si bien que contrairement aux allégations de C D, il n’y a pas lieu de démontrer l’existence d’une faute. En outre, l’ancienneté de l’expertise et le fait que l’action ait été intentée par les époux A dix ans après l’expertise n’enlève en rien le caractère anormal de ce trouble qui n’a jamais cessé. L’indemnité réclamée à hauteur de 10.000 € sera toutefois ramenée à une somme de 5.000 €, et seul C D qui est l’auteur du trouble sera condamné à verser cette somme aux appelants, étant observé que Z X a acquis le bien après l’édification du garage, et qu’il n’a pas été informé de l’existence de la procédure de référé menée à l’encontre de son auteur, aucune mention ne figurant à ce titre dans l’acte de vente.

S’agissant des demandes indemnitaires formées par les appelants comme par les intimés pour procédure abusive, il sera rappelé que l’exercice d’une action en justice constitue en son principe un droit qui ne dégénère en abus pouvant donner lieu à des dommages et intérêts que s’il caractérise un acte de mauvaise foi ou une erreur grossière équipollente au dol. Or en l’espèce, les parties ne démontrent ni l’existence d’une telle attitude de la part de leurs adversaires rendant abusif tant la procédure de première instance que l’appel interjeté, ni même l’existence d’un dommage. Il convient en conséquence d’infirmer le jugement sur ce point et de rejeter cette demande formée par les appelants.

C D qui succombe sera condamné aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière civile, en dernier ressort et contradictoirement

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté les époux A de leur demande de démolition du garage,

L’infirme en ses autres dispositions et statuant à nouveau des seuls chefs infirmés

Condamne C D à payer à I A et G H épouse A une indemnité de 5.000 € (cinq mille euros) pour trouble anormal du voisinage

Déboute les parties de leurs demandes indemnitaires pour procédure abusive

Condamne C D à payer d’une part à I A et G H épouse A la somme de 2.000 € (deux mille euros) et d’autre part à Z X la somme de 2.000 € (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne C D aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Atlantic Juris Vendée Anjou.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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