Cour d'appel de Reims, 13 septembre 2016, n° 14/00151

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, 13 sept. 2016, n° 14/00151
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 14/00151
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Troyes, 21 novembre 2013

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°

du 13 septembre 2016

R.G : 14/00151

XXX

c/

XXX

SCP B C Y

VM

Formule exécutoire le :

à :

SCP VERRY-LINVAL

SCP COUTURIER-PLOTTON-VANGHEESDAELE-FARINE

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2016

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 22 novembre 2013 par le tribunal de grande instance de TROYES,

XXX

XXX

XXX

X, concluant par la SCP VERRY-LINVAL, avocats au barreau de l’AUBE

INTIMEE :

XXX

XXX

XXX

X, concluant par la SCP COUTURIER-PLOTTON-VANGHEESDAELE-FARINE, avocats au barreau de l’AUBE

SCP B C Y, prise en la personne de Maître Z Y ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS CHARPENTES & MENUISERIES JPM

XXX

XXX

XXX

X, concluant par Me Patrick VERRY de la SCP VERRY-LINVAL, avocat au barreau de l’AUBE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame MAILLARD, président de chambre

Madame LAUER, conseiller

Madame MAUSSIRE, conseiller

GREFFIER :

Madame NICLOT, greffier lors des débats et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier lors du prononcé,

DEBATS :

A l’audience publique du 14 juin 2016, où l’affaire a été mise en délibéré au 13 septembre 2016,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 13 septembre 2016 et signé par Madame MAUSSIRE conseiller en l’absence du président régulièrement empêché et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Par exploit d’huissier du 9 décembre 2011, la société JPM Charpentes a assigné la SCI Pierrissimo Troy 05 devant le tribunal de grande instance de Troyes en paiement de factures de travaux et de dommages et intérêts.

Elle a demandé au tribunal :

— de condamner la SCI Pierrissimo Troy 05 au paiement de la somme de 12 722,84 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 24 février 2010,

— de la condamner au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

— de la condamner au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— d’ordonner l’exécution provisoire de la décision,

— de la condamner aux dépens avec distraction.

A l’appui de ses demandes, elle a exposé :

— que le 9 mars 2007, elle a conclu avec cette SCI, maître d’ouvrage, représentée par la société Inter Gestion, un marché de travaux privés portant sur les lots n° 5a « charpente bois » et n° 5c « planchers mezzanine » des travaux de réhabilitation d’un immeuble situé XXX à Troyes pour un prix ttc de 160 934,45 euros selon devis n°473c du 17 janvier 2007,

— que consécutivement au rapport Socotec du 5 février 2008, des travaux supplémentaires ont été réalisés et quatre devis proposés et acceptés,

— qu’un procès-verbal de réception des travaux a été rédigé le 17 octobre 2008,

— que des pénalités de retard ont été mises à sa charge à hauteur de 20 000 euros,

— que le 17 mars 2009, elle a établi deux situations de solde, déduction faite des acomptes perçus et des pénalités retenues que la SCI Pierrissimo n’a procédé qu’à un paiement partiel des sommes réclamées et restait redevable de la somme de 12 722,84 euros,

— qu’elle a adressé plusieurs relances au maître d’oeuvre et à la société Actigere, assistant du maître de l’ouvrage restées sans effet, celle-ci lui ayant répondu que les travaux dont elle demandait le paiement n’avaient jamais fait l’objet d’un accord préalable,

— qu’elle a indiqué par courrier recommandé du 27 septembre 2010 qu’au regard des dispositions du cahier des clauses administratives générales « travaux » fixant les sanctions suite à l’inertie du maître de l’ouvrage n’ayant pas répondu dans le délai imparti, celui-ci était alors réputé avoir accepté la production du décompte global définitif en l’état,

— que la société Actigere lui avait alors fait valoir que les travaux dont il était demandé le paiement n’avaient pas été commandés par ordre de service,

— que les travaux complémentaires facturés avaient bien été commandés ainsi que cela résultait du compte-rendu de chantier n° 18 du 4 avril 2008 et de l’acceptation des devis n° 1087 du 7 février 2008 et 1130 du 13 mars 2008,

— que s’agissant de la demande reconventionnelle présentée par la défenderesse, les parties étaient convenues de fixer le montant des pénalités à 20 000 euros de manière ferme et définitive.

XXX s’est opposée à la demande et a sollicité, à titre reconventionnel, le paiement de la somme de 22 727,50 euros au titre du solde des pénalités contractuelles de retard, outre le paiement d’une indemnité de procédure.

Elle a exposé :

— que le cahier des clauses administratives particulières qui fait la loi des parties complète ou déroge à certains articles du cahier des clauses administratives générales comme celui-ci l’y autorise ; qu’il résultait de ce document que le décompte définitif fait l’objet d’une vérification par le maître d’oeuvre et ne devient définitif qu’après approbation du maître d’ouvrage ; qu’il est transmis à l’entreprise avec la mention de l’acceptation du maître d’ouvrage et du maître d’oeuvre et que cette approbation ne peut en aucun cas être tacite,

— qu’en l’espèce, non seulement le maître d’ouvrage et le maître d’oeuvre n’ont jamais accepté les situations de solde présentées par la société JPM Charpentes mais l’architecte a, au contraire, retourné celles-ci à l’entreprise avec les rectifications et contestations formulées sur les sommes réclamées par cette dernière,

— que ces contestations, relatives aux travaux supplémentaires facturés à tort par la société JPM Charpentes, ont ensuite été confirmées et très clairement explicitées aux termes d’un courrier adressé par la société Actigere à l’entreprise le 24 septembre 2010,

— que selon le cahier des clauses administratives particulières, les travaux ou prestations supplémentaires doivent toujours être justifiés par l’entrepreneur, même s’ils font l’objet d’un descriptif ou d’un prix unitaire mentionné dans le marché ; qu’ils ne peuvent être engagés qu’après signature de l’avenant par le maître d’ouvrage et qu’en cas de non respect de cette obligation par l’entrepreneur, le maître d’oeuvre ou le maître d’ouvrage se réserve le droit d’en refuser le paiement,

— qu’en l’espèce, non seulement la société JPM Charpentes n’a produit aucun avenant régularisé par le maître d’ouvrage mais les devis relatifs aux travaux supplémentaires produits n’ont été que très partiellement acceptés,

— que c’est donc de manière tout à fait légitime qu’elle a refusé de régler les travaux qui n’avaient été ni acceptés ni commandés,

— que le fait que le devis n° 1087 ait été validé, au demeurant partiellement, ne suffit pas à établir qu’il en irait de même pour les devis n° 1130 et 1197,

— qu’il est indifférent que les travaux visés au devis n° 1197 soient mentionnés dans le compte- rendu de chantier du 4 avril 2008 dès lors que ces travaux étaient compris dans le devis initial,

— que s’agissant de sa demande reconventionnelle, en raison du retard dans la réalisation des lots confiés à la société JPM Charpentes et en application des stipulations du cahier des clauses administratives particulières, des pénalités de retard ont été appliquées à la demanderesse à hauteur de 42 727,50 euros ttc mais que dans un souci de conciliation et afin de parvenir à un accord sur le solde du marché, elle avait accepté de ramener le montant de ces pénalités à 20 000 euros ttc mais que dans la mesure où elle maintenait sa demande tendant au paiement de travaux supplémentaires injustifiées, elle sollicitait le solde des pénalités contractuelles de retard, soit la somme de 22 727,50 euros.

Par jugement du 22 novembre 2013, le tribunal de grande instance de Troyes a débouté la société JPM Charpentes de l’intégralité de ses demandes et l’a condamnée à payer à la SCI Pierrissimo Troy 05 la somme de 22 727,50 euros au titre du solde des pénalités contractuelles de retard, outre le paiement d’une indemnité de procédure, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire.

Le tribunal a repris à son compte les moyens de contestation formés par la défenderesse, y compris sa demande reconventionnelle en faisant observer qu’aucune rencontre de volontés n’était intervenue sur la proposition de ramener le montant des pénalités à la somme de 20 000 euros qui était conditionné à un accord écrit de la demanderesse afin de solder le chantier qui n’était pas produit.

Par déclaration du 16 janvier 2014, la société JPM Charpentes a formé appel de la décision.

La SCP B C Y est intervenue à la procédure en raison de la liquidation judiciaire de l’appelante.

Par conclusions du 10 juillet 2015, celle-ci demande à la cour :

— de lui donner acte de son intervention aux fins de régulariser la procédure,

— d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée au paiement de la somme de

22 727,50 euros au titre du solde des pénalités contractuelles de retard,

— de faire application de la norme AFNOR P03-0001,

— de dire et juger la somme de 20 000 euros retenue dans les situations de solde au titre des pénalités excessive et infondée au regard de l’article 9.5 de cette norme,

— d’arrêter à la somme de 173 555,73 euros le montant global du marché de travaux,

— de fixer à la somme de 8 677,78 euros le montant des pénalités de retard,

— en conséquence, de condamner la SCI Pierrissimo Try 05 à lui payer la somme de

34 049,72 euros au titre du solde du marché des travaux, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’assignation,

— de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— de la condamner aux dépens.

Elle soutient :

— que la norme AFNOR, qui est visée dans l’acte d’engagement du 9 mars 2007 et qui prévoit en son article 9.5 le plafonnement des pénalités à hauteur de 5% du montant du marché est entrée dans le champ contractuel et que les pénalités auraient donc du être plafonnées à la somme de 8 677,78 euros , de sorte qu’il en ressort un solde à son profit de 34 049,72 euros,

A titre subsidiaire, elle sollicite la réduction à de plus justes proportions du montant des pénalités de retard fixées à la somme de 42 727,50 euros et représentant 26,5 % du marché de travaux qui sont manifestement excessives.

Par conclusions du 27 novembre 2015, la SCI Pierrissimo Troy 05 demande à la cour:

— de constater que Maître Y es-qualité ne revendique plus à hauteur d’appel le paiement des travaux supplémentaires,

— de dire et juger en conséquence que le jugement présente sur ce point un caractère définitif,

— de confirmer le jugement sur les dispositions attaquées,

— de condamner Maître Y es-qualité au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— de le condamner aux dépens avec distraction.

Elle soutient :

— que la norme qui figure effectivement dans l’acte d’engagement ne présente qu’un caractère supplétif par rapport aux stipulations contractuelles expressément prévues par le CCAP et le CCTP, et qu’elle ne peut dès lors recevoir application qu’en l’absence de disposition contractuelle particulière,

— qu’il existe en l’espèce des dispositions particulières puisqu’il est précisé que les articles du CCAP et du CCTP sont complétés, le cas échéant, par la norme NFP 03-001 des marchés privés,

— que Maître Y ne justifie pas, a fortiori, en quoi les pénalités de retard acceptées en toute connaissance de cause lors de la régularisation du contrat présenteraient un caractère manifestement excessif, étant précisé que la somme de 22 727,50 euros a d’ores et déjà été réglée en vertu de l’exécution provisoire du jugement.

Sur ce, la cour :

A titre liminaire, il y a lieu de constater que le litige à hauteur d’appel ne porte plus que sur les pénalités contractuelles de retard au paiement desquelles la société JPM Charpentes a été condamnée.

L’appelante soutient à titre principal et pour la première fois à hauteur d’appel que la pénalité de 20 000 euros est manifestement excessive au regard de l’article 9.5 de la norme AFNOR NFP 03.001 prévoyant le plafonnement des pénalités à hauteur de 5 % du montant du marché.

La norme AFNOR NFP 03.001 ne peut être mise en oeuvre qu’en l’absence de disposition contractuelle particulière.

Elle n’a donc qu’un caractère supplétif par rapport aux stipulations contractuelles expressément prévues par le CCAP et le CCTP.

Or, il ressort de l’acte d’engagement signé par les parties le 9 mars 2007 en son article 8 que "les contestations relatives aux conditions techniques et financières du Marché, les formes et conditions de résiliation du Marché sont soumises aux articles du Cahier des Clauses Administratives et Particulières (CCAP et CCTP) complétées, le cas échéant, par la norme NFP 03-001 des Marchés Privés.

Le contrat prévoit donc des pénalités de retard dont le principe d’application n’est par ailleurs pas discuté par la société JPM Charpentes compte-tenu des retards survenus sur le chantier qui sont imputables à cette société.

Le moyen soulevé de ce chef sera donc rejeté.

L’appelante soutient ensuite à titre subsidiaire que la clause pénale est manifestement excessive.

L’article 1152 du code civil dispose que lorsque la convention porte que celui qui manquera de l’exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.

La clause pénale est la sanction contractuelle du non-respect de ses obligations par l’une des parties et s’applique du seul fait de cette inexécution.

Pour apprécier le caractère manifestement excessif de la clause pénale, le juge doit comparer le préjudice effectivement subi par le créancier et le montant de l’indemnité prévue.

En l’espèce, les pénalités de retard ont été fixées à la somme de 42 727,50 euros, ce qui représente 26,5 % du marché de base.

La date de fin de travaux était initialement fixée à la fin septembre 2007; il ressort d’un constat d’huissier dressé le 8 février 2008 que les travaux n’étaient toujours pas terminés à cette date.

La SCI Pierrissimo 05 a opéré une retenue de 20 000 euros sur les situations de solde et a appliqué des pénalités correspondant à 135 jours de retard mais a proposé à la société JPM Charpentes, dans un souci de conciliation, la réduction de la clause à 20 000 euros afin de parvenir à un accord pour solder le chantier, accord qui n’est jamais intervenu dans la mesure où cette société a assigné en paiement son cocontractant.

Il ne s’agit certes que d’une proposition amiable ; pour autant, la SCI ne démontre d’aucune manière l’ampleur de son préjudice et n’apporte pas la preuve que ce dernier a atteint un montant de 42 727,50 euros tel qu’il a été contractuellement fixé.

Compte-tenu de ces éléments, il y a lieu de considérer que la clause pénale présente un caractère manifestement excessif et de la réduire à 15 % du montant du marché de base (160 934,45 euros), soit la somme de 24 140 euros.

La somme de 20 000 euros ayant été retenue, il convient de fixer la créance de la SCI Pierrissimo 05 à la somme de 4 140 euros au titre du solde des pénalités contractuelles de retard.

La décision de première instance sera donc infirmée de ce chef.

L’article 700 du code de procédure civile :

La décision sera confirmée en ce qu’elle a statué sur ce point. L’équité justifie qu’il ne soit pas fait droit aux demandes formées à ce titre par les parties.

Les dépens :

La décision sera confirmée en ce qu’elle a statué sur les dépens.

La société JPM Charpentes, prise en la personne de son mandataire liquidateur, Maître Y, sera condamnée aux dépens de l’instance d’appel avec recouvrement direct par application de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire ;

Infirme dans ses dispositions attaquées le jugement rendu le 22 novembre 2013 par le tribunal de grande instance de Troyes.

Statuant à nouveau ;

Fixe la créance de la SCI Pierrissimo 05 à la liquidation judiciaire de la société JPM Charpentes, prise en la personne de son mandataire liquidateur, Maître Y, à la somme de 4 140 euros au titre du solde des pénalités contractuelles de retard.

Le confirme pour le surplus de ses dispositions.

Y ajoutant ;

Déboute les parties de leur demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société JPM Charpentes, prise en la personne de son mandataire liquidateur, Maître Y, aux dépens de l’instance d’appel avec recouvrement direct par application de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

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