Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 16 décembre 2020, n° 19/02561

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, ch. soc., 16 déc. 2020, n° 19/02561
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 19/02561
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Reims, 5 décembre 2019, N° F18/00470
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Arrêt n°

du 16/12/2020

N° RG 19/02561

OB/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 16 décembre 2020

APPELANT :

d’un jugement rendu le 6 décembre 2019 par le Conseil de Prud’hommes de REIMS, section Industrie (n° F 18/00470)

Monsieur Y X

[…]

[…]

Représenté par la SELARL BRUN, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SAS ASTRA ZENECA HOLDING FRANCE

[…]

[…]

Représentée par Me Edouard COLSON, avocat au barreau de REIMS et par la SELAS LPA-CGR, avocats au barreau de PARIS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 4 novembre 2020, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, et , chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 16 décembre 2020.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Monsieur Olivier BECUWE, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE :

Né en 1957, M. X a été engagé à durée indéterminée, le 25 mai 1992, par une société pharmaceutique aux droits de laquelle vient la société AstraZeneca Holding France (la société).

La convention collective applicable est celle, nationale, de l’industrie pharmaceutique résultant de l’accord du 11 avril 2019.

Confrontée à des difficultés économiques liées à la baisse de sa compétitivité sur le marché du médicament, la société a décidé, au début de l’année 2017, de cesser l’activité de la filiale de Reims qui employait 164 salariés et où travaillait le salarié.

Un repreneur a formulé une offre en mai 2017 permettant la reprise de 133 salariés.

Un accord collectif majoritaire portant sur le plan de sauvegarde de l’emploi, incluant un dispositif de départ volontaire, a été signé, le 20 juillet 2017, avant d’être ultérieurement validé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi.

Le salarié a posé sa candidature pour un départ volontaire qui a été accepté par la société.

Le contrat de travail a été rompu d’un commun accord le 18 septembre 2017, avec effet au 30 septembre.

Débutant le 1er octobre, le préavis, qui a été rémunéré, a pris fin le 31 décembre 2017.

Selon l’accord collectif, les salariés ayant opté pour un départ volontaire bénéficiaient des indemnités de volontariat telles que définies à l’article 4, soit l’indemnité de départ volontaire, l’indemnité supplémentaire et l’indemnité complémentaire spécifique.

Estimant qu’un solde lui restait dû sur le paiement de ces indemnités, l’intéressé a saisi, en octobre 2018, le conseil de prud’hommes de Reims d’une demande de condamnation de ce chef contre la société.

Par un jugement du 6 décembre 2019, la juridiction prud’homale l’en a débouté.

Par déclaration du 31 décembre 2019, M. X a fait appel notamment de ce chef de dispositif.

Par des conclusions récapitulatives, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des moyens, l’appelant sollicite l’infirmation du jugement et, réitérant ses demandes, réclame la condamnation de la société à lui payer la somme de 49 205,25 euros à titre d’indemnités de volontariat issues du plan de sauvegarde de l’emploi, outre celle de 1 000 euros pour frais irrépétibles.

Par des conclusions d’appel incident, auxquelles la cour renvoie pour l’exposé des moyens et prétentions, la société demande la confirmation du jugement en ce qu’il déboute le salarié.

MOTIVATION :

M. X sollicite une somme globale mais le mode de calcul des trois indemnités de départ volontaire n’est pas uniforme.

1°/ Sur l’indemnité de départ volontaire et l’indemnité supplémentaire :

Il ressort des fiches 5 et 11 de l’accord collectif portant sur le plan de sauvegarde de l’emploi que le mode de calcul de ces deux indemnités est identique et renvoie expressément aux dispositions de l’article 33-2° de la convention collective précitée relatif à l’indemnité conventionnelle de licenciement.

Les parties s’accordent sur le fait que M. X a droit à tant de mois de salaire, majorations comprises et après application du plafonnement, au titre de la somme totale pour les deux indemnités litigieuses réunies.

Les parties divergent sur la base de calcul et, plus précisément, sur le montant du salaire qu’il convient d’appliquer.

Selon le salarié, le bonus versé en octobre 2017, au titre de cette année-là, doit être intégré au salaire mensuel de référence.

Il se prévaut, pour l’essentiel, des dispositions de l’article 33-2°, 2e alinéa, de la convention collective qui prévoit que, pour le calcul de l’indemnité de licenciement, 'entrent en ligne de compte, outre le salaire de base, les majorations relatives à la durée du travail, les avantages en nature, les primes de toute nature, (…)'.

Il en déduit que le bonus étant une prime, il doit intégrer ladite rémunération de référence.

C’est toutefois à juste titre que la société oppose l’alinéa 1er de ce texte qui dispose que :

'la base de calcul de l’indemnité […] est la rémunération effective totale mensuelle gagnée par le salarié licencié, pendant le mois précédant le préavis de licenciement', cette rémunération ne pouvant 'être inférieure à la moyenne des rémunérations mensuelles des 12 mois précédant le préavis de licenciement'.

Or, le bonus a été payé en octobre 2017, soit lors du préavis et non lors de la période le précédant laquelle est la seule à servir de référence.

Ce bonus ne peut donc être pris en compte sur la base des dispositions conventionnelles.

L’intéressé rétorque néanmoins que le bonus, certes payé en octobre 2017, aurait dû l’être en septembre 2017 comme pour tous les autres salariés dont l’emploi n’était pas supprimé.

Il ajoute, sur ce point, que seuls les salariés s’étant portés volontaires à un départ ont vu le paiement de leur bonus différé d’un mois, la société ayant, selon lui, alors pris conscience de l’impact de cette rémunération reconstituée sur le calcul des indemnités de volontariat.

Il en conclut que la société avait, en réalité, pris l’engagement, lors de la réunion du 4 juillet 2017 avec les organisations syndicales, de bel et bien verser en septembre 2017 ce bonus lequel doit, en conséquence, être réintégré au salaire de référence.

En marge des dispositions conventionnelles, le salarié se prévaut ainsi d’un engagement unilatéral de l’employeur.

Il est exact, sur ce point, qu’à l’occasion de la réunion du 4 juillet 2017, l’employeur a indiqué, en page 3 du procès-verbal, que le bonus pour l’année 2017 serait, en ce qui concerne tout salarié qui,

comme en l’espèce, partait volontairement sans congé de reclassement, payé, au prorata des 9/12e , en septembre 2017.

Cette précision s’explique par le fait que la société ne souhaitait pas faire supporter au repreneur la charge du bonus de l’année 2017 lequel aurait dû, en principe, être réglé, en mars de l’année suivante, chaque bonus étant payé au mois de mars de l’année qui suit celle qui l’a généré.

Même si, contrairement aux salariés repris pour qui l’entier bonus pour l’année 2017 devait être payé en septembre 2017, les salariés partant volontairement n’avaient droit qu’à un bonus au prorata, il n’empêche que, contrairement à ce que soutient la société, celle-ci avait bien pris l’engagement, lors de la réunion du 4 juillet 2017, d’affecter partie de ce bonus au salaire de référence, ce qu’elle n’a donc pas fait.

Mais, comme elle l’explique à bon droit, l’accord collectif portant sur le plan de sauvegarde de l’emploi, et qui incluait un dispositif de départ volontaire, signé, le 20 juillet 2017, et validé par l’autorité administrative, ne prévoit absolument pas une telle modalité de calcul.

Or, lorsqu’un accord collectif ayant le même objet qu’un engagement unilatéral de l’employeur est conclu entre celui-ci et une ou plusieurs organisations représentatives de l’entreprise, cet accord a pour effet de mettre fin à cet engagement unilatéral, peu important que celui-ci ait été ou non préalablement dénoncé, comme la Cour de cassation l’a d’ailleurs déjà jugé (Soc., 10 mars 2010, n° 08-44.950).

En l’espèce, l’accord collectif incluait, en son objet, la question du calcul des indemnités de départ et de l’indemnité supplémentaire afférente.

Cet accord collectif ne fait que fait renvoyer, sur le point en litige, à l’article 33-2° de la convention collective lequel ne permet pas, ainsi qu’il l’a été dit précédemment, la prise en compte du bonus querellé, payé hors la période de référence.

Telle était d’ailleurs l’intention ultérieure des partenaires sociaux, ainsi qu’il résulte du compte rendu, d’une part, de la commission du plan de sauvegarde de l’emploi du 11 septembre 2017 et, d’autre part, de la réunion du comité d’entreprise du 22 septembre 2017.

Il ressort clairement de ces deux comptes rendus que le bonus au titre de l’année 2017 serait réglé en octobre 2017, et non en septembre 2017, pour un salarié quittant volontairement, selon les modalités de l’espèce, l’entreprise.

Il s’ensuit que le bonus ne pouvait servir de base de calcul au règlement de ces deux indemnités.

Le jugement sera confirmé.

2°/ Sur l’indemnité complémentaire spécifique :

Selon l’accord collectif du 20 juillet 2017, 'l’ensemble des salariés dont le contrat de travail est rompu pour motif économique dans le cadre d’un départ volontaire intervenant avant le 25 septembre 2017 bénéficie [de cette indemnité] d’un montant équivalent à 11 mois de salaire moyen brut (salaire de base + ancienneté + prorata/bonus contribution)'.

Là également, les parties sont d’accord sur le fait que M. X a droit à tant de mois de salaire au titre de l’indemnité litigieuse mais ne le sont pas sur l’intégration, au 'salaire moyen brut’ de référence, du bonus versé, en octobre 2017, au titre de cette année-là.

Comme précédemment, M. X se prévaut du compte rendu de la réunion du 4 juillet 2017.

Mais, à la différence du calcul de l’indemnité de départ volontaire et de l’indemnité supplémentaire, le calcul de l’indemnité complémentaire spécifique inclut, ainsi qu’en justifie la société, le bonus versé en mars 2017 qui est relatif à l’année 2016, le bonus étant payé en décalage.

Formellement, cette intégration d’un seul bonus, en l’occurrence celui relatif à une année écoulée et parfaitement acquitté en mars 2017, respecte le mode de calcul indiqué par l’accord collectif qui s’est substitué sur ce point à l’engagement unilatéral pris le 4 juillet 2017.

Le jugement sera confirmé.

3°/ Sur les dommages-intérêts pour procédure abusive :

Ce chef de demande n’étant pas repris par la société dans le dispositif de ses conclusions, la cour ne pourra que constater qu’il doit être, conformément à l’article 954 du code de procédure civile, réputé abandonné.

4°/ Sur les frais irrépétibles :

L’équité commande de ne pas condamner de ce chef M. X qui sera lui-même débouté ayant succombé en son appel.

5°/ Sur les dépens :

Le jugement sera infirmé de ce chef, la partie succombante au principal devant supporter la charge des entiers dépens de première instance et aussi d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour d’appel statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi :

— constate que le chef de demande de la société AstraZeneca Holding France relatif à la procédure abusive est considéré comme abandonné ;

— pour le surplus, confirme le jugement rendu le 6 décembre 2019, entre les parties, par le conseil de prud’hommes de Reims, sauf en ce qu’il déclare que chacun conservera la charge de ses propres dépens ;

— statuant à nouveau sur ce point, condamne de ce chef M. X aux entiers dépens de première instance ;

— rejette le surplus des prétentions.

— condamne M. X aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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