Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 18 janvier 2022, n° 20/01818

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, 1re ch. sect.civ., 18 janv. 2022, n° 20/01818
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 20/01818
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Troyes, 26 novembre 2020
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°

du 18 janvier 2022


R.G : N° RG 20/01818 – N° Portalis DBVQ-V-B7E-E5SN


S.A. GROUPAMA NORD EST

c/


X


S.A.R.L. SF RENOVATION


S.C.P. SCP D E F


SP


Formule exécutoire le :

à :

la SELARL OPTHÉMIS

la SCP SCP ACG & ASSOCIES

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 18 JANVIER 2022

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 27 novembre 2020 par le Tribunal de Grande Instance de TROYES

S.A. GROUPAMA NORD EST

[…]

[…]


Représentée par Me Anne-laure LE FLOHIC de la SELARL OPTHÉMIS, avocat au barreau de REIMS

INTIMES :

Monsieur Z X

[…] B C

[…]


Représenté par Me Gérard CHEMLA de la SCP ACG & ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS S.A.R.L. SF RENOVATION

[…]

[…]


Non comparante non représentée

S.C.P. D E F ès qualités de mandataire judiciaire de la société SF

RENOVATION

[…]

[…]


Non comparante non représentée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre

Madame Véronique MAUSSIRE, conseiller

Mme Sandrine PILON, conseiller

GREFFIER :

Madame Allison CORNU-HARROIS, greffier lors des débats et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier lors du délibéré

DEBATS :


A l’audience publique du 30 novembre 2021, où l’affaire a été mise en délibéré au 18 janvier 2022,

ARRET :


Réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 18 janvier 2022 et signé par Madame


Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre, et Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *


Suivant devis des 10 et 11 avril 2013, M Z X a confié à la SARL SF rénovation divers travaux

à exécuter sur trois immeubles lui appartenant, situés à Troyes.


Se plaignant de malfaçons, M X a obtenu du juge des référés du tribunal de grande instance de Troyes une expertise, confiée à Mme Y. Il a ensuite fait assigner la SARL SF rénovation le 3 août 2016 devant ce tribunal statuant au fond afin d’être indemnisé de ses préjudices.


Le 10 février 2017, M X a mis en cause la SCP D E F en qualité de mandataire judiciaire de la SARL SF rénovation, placée en redressement judiciaire, puis il a fait assigner la société


Groupama Nord Est le 10 mai 2019 afin d’obtenir sa garantie en qualité d’assureur de la société SF rénovation.


Ces deux instances ont été jointes à la première.
Par jugement du 27 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Troyes a :

déclaré M X recevable en son action en garantie contre la compagnie Groupama Nord Est,

fixé la créance indemnitaire de M X à l’égard de la SARL SF rénovation aux montants suivants :

au titre du chantier sis […] Poerre C : 2 618,31 euros,

au titre du chantier sis 24 rue B C : 4 890,50 euros,

au titre du chantier sis […] : 4 889,31 euros,

fixé la dette de M X à l’égard de la SARL SF rénovation au titre du solde du coût des travaux à la somme de 8 474,40 euros,

en conséquence,

fixé la créance de M X à la procédure de redressement judiciaire de la SARL SF rénovation à la somme de 3 923,72 euros,

condamné la compagnie Groupama Nord Est à garantir M X à hauteur de 3 923,72 euros,

débouté M X du surplus de ses demandes,

condamné la compagnie Groupama Nord Est à payer à M X la somme de 3'000 euros au titre de l’article

700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire,

ordonné l’exécution provisoire,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au dispositif.


Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu qu’en l’absence de réception, il convenait de faire application des règles de la responsabilité contractuelle, l’entrepreneur étant tenu d’une obligation de résultat quant à la conformité de l’ouvrage et d’une obligation de conseil envers le maître de l’ouvrage.


Il a jugé que le délai biennal de l’article L114-1 du code des assurances n’est pas opposable au maître de

l’ouvrage qui exerce une action directe contre l’assureur de responsabilité civile du constructeur et qu’il convient de faire application du délai de cinq ans prévu par l’article 2224 du code civil


Il a en outre estimé que M X n’est pas tenu de se soumettre à la procédure de vérification de sa créance pour faire reconnaître dans son principe et son étendue la responsabilité de l’assuré et demander paiement à

l’assureur par voie d’action directe.


La SAS Groupama Nord Est a relevé appel de ce jugement par déclaration du 21 décembre 2020 en intimant


M X et la société SF rénovation, ainsi que la SCP D E F en qualité de mandataire judiciaire de cette dernière.


Dans ses dernières conclusions, transmises le 11 mars 2021, la Caisse régionale mutuelle agricole du Nord


Est, usuellement appelée Groupama Nord Est, demande à la cour d’appel:

à titre principal, d’infirmer le jugement en ce qu’il déclare M X recevable en son action directe et, statuant à nouveau de déclarer irrecevable l’action introduite par M X contre elle et de débouter celui-ci de l’intégralité de ses demandes, à titre subsidiaire :

d’infirmer le jugement en ce qu’il estime que les travaux réalisés par la société SF Rénovation sont bien des travaux de peinture assurés par elle et statuant à nouveau, de dire et juger que s’agissant des frais de remplacement des vitrages, elle ne peut pas intervenir en garantie faute pour la société SF rénovation d’avoir souscrit cette activité dans le cadre de son contrat d’assurance,

de confirmer le jugement en ce qu’il déboute M X de sa demande au titre de la prise en charge du coût de reprise des ouvrages,

de l’infirmer en ce qu’il la condamne au paiement des pénalités liées à l’absence de réalisation des travaux dans le délai imparti et, statuant à nouveau, de le débouter de cette demande,

de confirmer le jugement en ce qu’il rejette la demande de M X aux fins de condamnation à son encontre pour les pénalités de retard,

de le confirmer en ce qu’il rejette la demande de condamnation de M X à son encontre quant au coût de remplacement,

de l’infirmer en ce qu’il la condamne au paiement des dépens en ce compris les frais d’expertise et 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, de fixer la créance de M X quant aux dépens en ce compris les frais d’expertise à la procédure de liquidation judiciaire de SF rénovation ou laisser ces dépens à la charge de M X,

de condamner M X à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.


Elle estime que l’action de M X est prescrite à son égard par application du délai quinquennal prévu par

l’article 2224 du code civil, en considérant que le point de départ de ce délai doit être fixé à la date des factures, soit le 20 décembre 2013 puisque M X a refusé de s’en acquitter intégralement en raison de non façon ou de malfaçon ou, au plus tard, à la date du constat des désordres par un huissier le 25 mars 2014.


Elle estime que le coût de remplacement des vitrages relève de l’activité de façadier, qui n’est pas incluse dans

l’activité de peintre déclarée par son assuré, de sorte qu’elle ne peut intervenir pour ce préjudice. Elle ajoute que le coût de reprise des ouvrages réalisés par la SF rénovation n’entre pas dans les conséquences pécuniaires pour les tiers.


Elle invoque l’exclusion de l’ensemble des garanties de responsabilité civile des pénalités de retard et estime, en tout état de cause, qu’il revenait à la société SF rénovation et non à elle de justifier de la réalisation des travaux dans le délai imparti.


La société Groupama Nord Est refuse de supporter les dépens de première instance et en particulier les frais

d’expertise au motif qu’elle n’est pas la partie succombante et qu’elle n’a pas même eu communication du rapport d’expertise dans la première instance.


Par conclusions transmises le 11 juin 2021, M X demande à la cour d’appel de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner la SA Groupama Nord Est à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’appel, dont distraction au profit de la SELAS ACG.


Il soutient que le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date du rapport d’expertise, avant lequel il ne disposait d’aucun élément lui permettant d’exercer son action en justice, n’ayant pas connaissance de la réalité des désordres, de leur nature et de leur origine, ni donc de leur imputabilité, ni du coût de leur reprise.
M X affirme que l’assureur a succombé en ses prétentions en première instance et qu’il doit, par ailleurs, supporter toutes les conséquences du seul fait de la réalisation du dommage, de sorte qu’il doit supporter la charge des dépens, en ce compris les frais d’expertise.


La SARL SF rénovation et la SCP D E F n’ont pas constitué avocat.


La déclaration d’appel a été signifiée par dépôt à étude à la SARL SF rénovation le 9 mars 2021 et le même jour à la SCP D E F en qualité, non plus de mandataire judiciaire, mais de liquidateur de cette société.


L’arrêt sera donc réputé contradictoire.

MOTIFS


M X sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et la société SF Rénovation n’a pas constitué avocat.


Des désordres et manquements invoqués par M X en première instance, sont donc seuls en cause à hauteur d’appel, ceux pour lesquels la société Groupama Nord Est, appelante, a été condamnée à garantie, soit les désordres atteignant les vitres des fenêtres des immeubles de M X.

Sur la prescription


A hauteur d’appel, les parties conviennent de ce que le texte applicable à la prescription de l’action directe de


M X contre la société Groupama Nord Est est l’article 2224 du code civil, tel que le tribunal l’a retenu.


Ce texte dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent pas cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.


Il convient donc de déterminer, pour fixer le point de départ du délai de prescription, la date à laquelle M


X avait connaissance des désordres qui ont rendu nécessaire le remplacement des vitrages.


La date des factures ne peut être retenue comme point de départ du délai de prescription ainsi que la société


Groupama Nord Est le demande, dès lors que la circonstance que M X a refusé de s’en acquitter intégralement en raison de travaux non effectués ou mal réalisés, sans plus de précisions, ne suffit pas à démontrer que celui-ci avait connaissance en particulier des désordres affectant les fenêtres, dès la date

d’émission de ces factures.


En revanche, M X produit un courrier du 4 mars 2014 destiné à la société SF rénovation, dans lequel il reproche à celle-ci le fait que la fenêtre PVC et le verre ont été piqués par le sable lors du sablage du dos de la maison ([…] B C à Troyes), objet du devis n°13082 (pièce 1 de M X).


Pour ce désordre, dont la garantie est contestée par l’assureur, le point de départ de la prescription doit donc être fixé à la date du courrier, soit le 4 mars 2014.


Ce désordre figure également dans le procès verbal de constat d’huissier du 25 mars 2014 qui figure à la procédure.


L’huissier a relevé des traces semblables sur plusieurs fenêtre de l’immeuble situé au 24 de la rue B


C à Troyes.


Contrairement à ce que le tribunal a retenu, M X disposait d’une connaissance pleine et entière des manquements de la SF rénovation pour lesquels il sollicite la garantie de la société Groupama dès avant le dépôt du rapport d’expertise.
En effet, il fait lui-même le lien entre les traces présentes sur les vitres de plusieurs fenêtres de son immeuble situé […] B Gauhtier à Troyes et le sablage des façades dans son courrier précité du 4 mars 2014. Et il fait de nouveau ce lien lors des constatations de l’huissier, qui indique dans son procès verbal : «'Monsieur

X me précise qu’un sablage des murs extérieurs de l’habitation a été réalisé. Que lors de sa réalisation, il y a eu des projections sur une des fenêtres de l’habitation. Que malgré le nettoyage des vitres, les traces ne disparaissent pas'».


Il est ainsi établi que M X disposait de tous les éléments concernant les désordres dont il demande la garantie, ainsi que leur cause et donc leur imputabilité, dès le 4 mars 2014 pour son immeuble situé […]


B C à Troyes et en tout état de cause, le 25 mars 2014 pour l’ensemble de ces désordres.


Or le premier acte interruptif d’instance accompli par M X à l’encontre de la société Groupama Nord Est après ces deux dates réside dans l’assignation au fond de cette société devant le tribunal, le 10 mai 2019.


Il s’était alors écoulé plus de cinq années.


La demande de M X en garantie contre la société Groupama Nord Est est donc prescrite.


En conséquence, le jugement doit être infirmé en ce qu’il déclare recevable M X en son action en garantie à l’encontre de la compagnie Groupama Nord Est.

Sur la garantie au titre des pénalités de retard


La société Groupama Nord Est demande l’infirmation du jugement en ce qu’il la condamne au paiement de pénalités liées à l’absence de réalisation des travaux dans les délais impartis;


Cependant, le jugement rejette la demande de garantie formulée par M X à ce titre et ce dernier ne remet pas en cause ce chef de décision, puisqu’il sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.


Le jugement ne peut donc qu’être confirmé de ce chef.

Sur les demandes accessoires


Compte tenu de ce qui précède, le jugement doit être infirmé en ce qu’il condamne la société Groupama Nord


Est au dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.


La société SF rénovation sera condamnée aux dépens de première instance, à l’exception de ceux exposés par et contre la société Groupama Nord Est, qui seront mis à la charge de M X.


Les dépens d’appel seront mis à la charge de M X, partie succombante, dont la demande en paiement au titre des frais irrépétibles doit donc être rejetée.


Il est équitable d’allouer à la société Groupama Nord Est la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article

700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS


La cour, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,


Infirme le jugement rendu le 27 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Troyes en ce qu’il déclare recevable M Z X en son action en garantie à l’encontre de la compagnie Groupama Nord Est et en ce qu’il condamne la compagnie Groupama Nord Est à payer à M Z X la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens ;
statuant à nouveau,


Déclare irrecevable comme prescrite l’action en garantie de M Z X contre la SA Caisse régionale mutuelle agricole du Nord Est usuellement appelée Groupama Nord Est ;


Condamne M Z X à payer à la SA Caisse régionale mutuelle agricole du Nord Est usuellement appelée Groupama Nord Est la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;


Déboute M Z X de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;


Condamne la SARL SF rénovation aux dépens de première instance, à l’exception de ceux exposés par et contre la SA Caisse régionale mutuelle agricole du Nord Est usuellement appelée Groupama Nord Est, qui seront supportés par M Z X ;


Confirme ce jugement pour le surplus ;


Y ajoutant,


Condamne M Z X aux dépens d’appel.


Le greffier La présidente
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