Cour d'appel de Rennes, du 18 septembre 2001, 00/01702

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Est punissable au sens de l’article 225-10, alinéas 1et 2, du Code pénal, le responsable d’un établissement ouvert au public qui y tolère de manière habituelle la prostitution, lequel se voit frappé d’une interdiction d’exploiter un établissement ouvert au public, d’y être employé ou d’y participer financièrement durant cinq ans à titre de peine principale, et d’une interdiction d’exploiter un débit de boissons durant cinq ans à titre de peine complémentaire dès lors qu’il a pour le moins toléré, mais en fait organisé, incité et surveillé des activités de prostitution dans son établissement

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 18 sept. 2001, n° 00/01702
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 00/01702
Importance : Inédit
Textes appliqués :
Code pénal, article 225-10, alinéas 1et 2
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006938326
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Texte intégral

COUR D’APPEL DE RENNES

RG:00/01702 Arrêt du 18 SEPTEMBRE 2001 3ème Chambre Prononcé publiquement le 18 SEPTEMBRE 2001 par la 3ème

Chambre des Appels Correctionnels, PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

X… Y… divorcée Z… née le 24 Novembre 1962 à NANTES Fille de X… Joseph et de M… Liliane De nationalité française, mariée, commerçante Demeurant 26 Bd Robert Schumann – 44000 NANTES Prévenue, appelante, libre, déjà condamnée, comparante Assistée de Maître ROSSINYOL, avocat au barreau de NANTES, N… A… épouse B… née le 23 Mai 1958 à NANTES Fille de O… Emile et de P… Carmen De nationalité française, mariée, commerçante Demeurant…, rue C… – … Prévenue, appelante, libre, déjà condamnée, comparante Assistée de Maître RAIMBOURG Dominique, avocat au barreau de NANTES, ET : LE MINISTÈRE PUBLIC Appelant, COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré

: Président

:

Monsieur MOIGNARD, Conseillers

:

Madame C…,

Monsieur D…, Prononcé à l’audience du 18 SEPTEMBRE 2001 par Monsieur MOIGNARD conformément aux dispositions de l’article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale. MINISTÈRE PUBLIC

: représenté

aux débats par Monsieur

AUBRY, Avocat Général et lors du prononcé de l’arrêt par Monsieur VANNIER Avocat Général E…

: en présence de Mlle F… lors des débats et du prononcé de l’arrêt DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l’audience publique du 04 SEPTEMBRE 2001, le Président a constaté l’identité de la prévenue X… Y…, comparant assistée de Maître ROSSINYOL et de la prévenue N… A… épouse B…, comparant assistée de Maître RAIMBOURG ;

A cet instant, les conseils des prévenues ont déposé des conclusions. Ont été entendus : Monsieur D…, en son rapport, Mme B… sur les motifs de son appel et en son interrogatoire, Mme Z… sur les motifs de son appel et en son interrogatoire, L’Avocat Général en ses réquisitions, Maître ROSSINYOL en sa plaidoirie, Maître RAIMBOURG en sa plaidoirie, Les prévenues qui ont eu la parole en dernier,

Puis, la Cour a mis l’affaire en délibéré pour son arrêt être rendu à l’audience publique du 18 SEPTEMBRE 2001 ;

Conformément aux prescriptions de l’article 462 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale, le Président a avisé les parties présentes de la date de l’audience à laquelle l’arrêt serait rendu.

RAPPEL DE LA PROCEDURE : LE JUGEMENT :

Le Tribunal Correctionnel de NANTES par jugement Contradictoire en date du 24 FEVRIER 1999, pour : TOLÉRANCE HABITUELLE DE LA PROSTITUTION DANS UN LIEU OUVERT AU PUBLIC a prononcé à l’encontre de X… Y… épouse Z… l’interdiction d’exploiter un établissement ouvert au public, d’y être employé ou d’y participer financièrement durant 5 ans, à titre de peine principale et l’interdiction d’exploiter un débit de boissons durant 5 ans à titre de peine complémentaire. TOLÉRANCE HABITUELLE DE LA PROSTITUTION DANS UN LIEU OUVERT AU PUBLIC a prononcé à l’encontre de N… A…

épouse B… l’interdiction d’exploiter un établissement ouvert au public, d’y être employé ou d’y participer financièrement durant 5 ans, à titre de peine principale et l’interdiction d’exploiter un débit de boissons durant 5 ans à titre de peine complémentaire. LES APPELS : Appel a été interjeté par : Madame X… Y…, le 04 Mars 1999, à titre principal, sur les dispositions pénales ; M. le Procureur de la République, le 04 Mars 1999 contre Madame X… Y…, à titre incident ; Madame N… A…, le 04 Mars 1999, à titre principal, sur les dispositions pénales ; M. le Procureur de la République, le 04 Mars 1999 contre Madame N… A…, à titre incident ; LA PRÉVENTION :

Considérant qu’il est fait grief à Mme Y… X… épouse Z… :

— d’avoir à NANTES, courant 1996, en qualité de propriétaire exploitante des bars « LE SENSSO » et « LE VIKING », établissements ouverts au public, accepté ou toléré habituellement qu’une ou plusieurs personnes s’y livrent à la prostitution ou y cherchent des clients en vue de la prostitution,

faits prévus par l’article 225-10 al.1 2° du Code Pénal et réprimés par les articles 225-10 al.1, 225-20, 225-21, 225-22 et 222-24 du Code Pénal ;

Considérant qu’il est fait grief à A… N… épouse B…

:

— d’avoir à NANTES, courant 1996, en qualité de propriétaire exploitante des bars « LE CAPRICORNE », établissement ouvert au public, accepté ou toléré habituellement qu’une ou plusieurs personnes s’y livrent à la prostitution ou y cherchent des clients en vue de la prostitution,

faits prévus par l’article 225-10 al.1 2° du Code Pénal et réprimés par les articles 225-10 al.1, 225-20, 225-21, 225-22 et 222-24 du

Code Pénal ; * * * EN LA FORME

:

:

Le 18 mars 1998, à l’occasion d’une affaire incidente, les services de police de LA ROCHE SUR YON recueillaient les déclarations de Maria F…, hôtesse dans des établissements de nuit de NANTES, aux termes desquelles elle était amenée, de même que ses collègues à se prostituer sur leurs lieux de travail. C’était ainsi qu’ayant travaillé successivement de décembre 1995 à fin janvier 1996 au bar « Le Viking » puis au mois de février 1996 au bar « Le Capricorne », elle avait été amenée, outre son travail consistant à faire boire les clients, à fournir à ces derniers des prestations de caractère sexuel. En ce qui la concernait elle indiquait que durant son emploi tant au « Viking » qu’au « Capricorne », il lui était arrivé de faire jusqu’à cinq passes par soirée, la moyenne étant de deux ou trois pour des sommes variant entre 200 et 600 francs. Une information était ouverte et l’enquête poursuivie sur commission rogatoire, la prévention étant élargie du même chef à l’encontre d’une bar « Le Sensso ». Les premières vérifications établissaient que le témoin initial avait été inscrite sur les registres du personnel du bar « Le Capricorne » pour la période du 30 janvier 1996 au 6 mars 1996, en revanche il se confirmait qu’elle avait été employée clandestinement auparavant au bar « Le Viking ». Les écoutes téléphoniques diligentées permettaient d’identifier un certain nombre de clients, qui expliquaient que la consommation de bouteilles de champagne ouvrait l’accès à certaines privautés avec les hôtesses qui se retiraient avec les clients dans les alcôves ou boxes aménagés dans ces établissements ou parfois même des rideauxpermettaient de s’isoler.

Les clients expliquaient s’être fait masturber après des attouchements et parlaient même de fellations.

Les auditions des employées confirmaient ces activités de serveuses-hôtesses dans ces bars de nuit, conduisant naturellement à des activités sexuelles.

L’enquête mettait en évidence une grande perméabilité entre les établissements, les « hôtesses » allant de l’un à l’autre en fonction des besoins et nécessités.

Des écoutes téléphoniques permettaient de confirmer l’existence d’activités de prostitution dans ces trois bars de nuit ou une serveuse ne pouvait s’occuper que d’un client à la fois…

A… N… épouse B… se désiste de son appel et admet que le bar « Le Capricorne » qu’elle exploitait à l’époque fonctionnait sur l’ambigu’té du système des « hôtesses » poussant à la consommation tout en faisant languir le client en espérance de contacts sexuels.

Y… X… divorcée Z… conteste les faits expliquant n’avoir jamais accepté dans ses établissements « Le Viking » et « Le Sensso » quelque activité de prostitution que ce soit.

Elle fait valoir les témoignages de serveuses et de clients et conteste l’objectivité de l’enquête qui aurait procédé par amalgame entre les trois bars, voire d’autres.

Elle fait conclure à sa relaxe. * * *

SUR CE :

Il résulte de l’enquête que seuls les clients tels que M. G… parlent des trois bars concernés par la procédure mais les enquêteurs ont très clairement séparés leurs investigations, ne se livrant à aucun amalgame.

De nombreux clients des bars ont été très explicites sur les

activités qui s’y pratiquaient :

— Bruno S…, client du bar « Le Sensso », précisait que l’achat d’une bouteille de champagne permettait l’accès à quelques privautés avec les hôtesses et que c’était ainsi qu’il s’était fait masturber par Séverine R….

— Guy T…, client du bar « Le Sensso » rapportait qu’à une occasion il avait terminé la nuit dans l’hôtel avec une hôtesse du « Sensso » rencontrée dans cet établissement peu avant la fermeture, prestation qu’il avait payé 1.000 francs. Il ajoutait s’être fait masturber par une autre hôtesse prénommée Julie en une autre occasion.

— Joùl P…, client relativement régulier des bars visés à la prévention, indiquait quant à lui avoir bénéficié d’une fellation au bar « Le Capricorne » de la part d’une prénommée Corinne après avoir acheté une bouteille de champagne et ce dans l’un des petits salons. Il ajoutait avoir bénéficié du même type de faveur de la part de A… N…, responsable de l’établissement.

Courant juillet 1996, après l’achat de plusieurs bouteilles de champagne, il avait bénéficié d’une fellation de la part d’une prénommée Gladys. L’intéressé précisait qu’en une autre occasion, alors qu’il se trouvait au « Sensso », l’achat d’une bouteille de champagne lui avait permis de se livrer à des attouchements sur la prénommée Céline, laquelle en avait fait de même à son égard.

Il se rendait ensuite au « Viking » où une autre barmaid originaire des pays de l’Est lui prodiguait les mêmes faveurs.

— Olivier D… expliquait quant à lui s’être rendu au bar « Le Sensso » dans le but d’y avoir des relations sexuelles. Dans cet établissement il lui était explicitement indiqué que la chose nécessitait l’achat d’une bouteille de champagne.

S’étant plié à cette exigence, il avait pu se livrer à des caresses

intimes et en bénéficier de la part d’une hôtesse d’origine slave, puis ayant commandé une autre bouteille, il avait pu bénéficier d’une fellation et de caresses de la part de la prénommée Séverine.

Compte tenu de l’espoir que cette jeune femme avait entretenu chez lui quant à des relations sexuelles complètes, l’intéressé ne commandait pas moins de trois autres bouteilles, dépensant ainsi une somme de 7.000 francs.

— André S… reconnaissait avoir bénéficié de faveurs d’une prénommée Mariola sous forme de caresses sexuelles au bar « Le Sensso ».

— Michel P… confirmait pour sa part que l’achat d’une bouteille de champagne permettait l’accès dans les salons des trois établissements où il avait pu bénéficier de caresses sexuelles et se livrer lui-même à des attouchements.

— Joùl I…, un client du « Sensso », indiquait que bien que n’ayant pas bénéficié des faveurs des employées de ce bar, il savait par des amis que ceux-ci s’étaient fait masturber.

L’ensemble de ces clients précisaient en outre que les hôtesses de ces établissements les relançaient par téléphone afin qu’ils reviennent les voir à l’établissement.

Michel P…, client occasionnel du « Sensso », du « Viking » et du « Capricorne », indiquait que l’achat d’une bouteille de champagne permettait l’accès au salon où il pouvait caresser, embrasser les hôtesses et se faire caresser le sexe.

Les activités de prostitution évoquées par ces différents témoins étaient encore attestées de façon non équivoques par certains passages des écoutes téléphoniques et en particulier par la retranscription de la cassette n° 32, D 34 page 2 où au bar « Le Sensso » on répond à un client : "On n’est pas S.O.S. amitié, hein, il

faut vous déplacer, consommer avec les demoiselles et vous aurez de gros câlins…" la conversations se poursuivant ainsi :

— "On est obligé de rester au bar ä

— Ben oui.

— Y’a un endroit sympa dans le bar ä

— Comment ä

— Un endroit sympathique où on peut être tranquille ä

— Ben… Y a des salons pour les bouteilles de champagne.

— On n’est à la vue de personne ä

— Oui.

— On peut, on peut faire un p’tit peu tout ce qu’on veut… ä

— Ben, écoutez, venez, vous verrez bien, essayer…"

Les premières auditions des employées du « Sensso » et du « Viking » confirmaient ces déclarations et étaient très embarrassantes pour Mme X… alors que par la suite, le silence et les dénégations furent de règle, certaines serveuses ayant déclarées avoir été menacées ou rappelées à l’ordre.

Séverine R…, tout en reconnaissant qu’elle acceptait câlins, caresses et baisers, mais pas au-delà, indiquait que d’autres hôtesses, dont une certaine Y… employée « au noir », se pliaient aux désirs des clients et consentaient des fellations et des masturbations. Elle désignait en outre une certaine Françoise comme acceptant ces pratiques.

Valérie O… déclarait que la prénommée Renée lui avait indiqué « qu’au salon il fallait se montrer gentille et se laisser caresser » ajoutant « qu’elle pouvait se déshabiller ou faire une pipe » et ce afin d’inciter le client à commander un maximum de bouteilles de champagne.

La jeune femme ajoutait que c’était dans ce contexte qu’elle avait

accepté de se déshabiller, de masturber ou de faire des fellations aux clients. Elle terminait en indiquant qu’elle s’était faite réprimandée pour avoir refusé de se piquer des aiguilles autour des seins, le client insatisfait risquant de ne plus revenir.

Par ailleurs, elle indiquait avoir été victime d’une tentative de subornation de témoins avant son audition et de menaces après de la part de deux hommes proches de sa patronne.

Elle soulignait également la totale perméabilité entre « Le Sensso » et « Le Viking » qui étaient tous deux dirigés par Mme X…, les employées passant de l’un à l’autre, dénonçant au passage un travail clandestin généralisé.

Brigitte Y… déclarait qu’au « Viking » où elle travaillait depuis le

5 août 1996 :

« Nous allons dans le salon pour avoir plus d’intimité avec le client, ou les clients et s’ils sont deux on y va à deux filles. Il peut arriver aussi qu’on fasse appel à une fille du »Sensso" si on n’est pas assez nombreuses en fonction des clients. C’est déjà arrivé mais c’est assez rare ;

Il arrive de temps en temps que, une fois dans le salon, le client se montre entreprenant. Je le sais d’avance et s’il m’arrive d’accepter de flirter c’est-à-dire d’accepter des petits bisous avec le client ou des caresses légères, c’est-à-dire sur le buste ou la poitrine mais sans plus, je refuse par contre de le toucher sexuellement.

Il est vrai que les clients me demandent parfois des caresses sexuelles ou des fellations ou des rapports sexuels dans le salon ou dans un hôtel à l’extérieur, mais je refuse systématiquement.

En fait, je les fais marcher le plus longtemps possible, en essayant de les distraire, mais je ne leur accorde jamais rien sauf peut-être

une invitation au restaurant un midi, mais c’est exceptionnel et je n’ai pas de relations sexuelles avec eux après.

Je ne sais pas si les autres employées du bar acceptent des pratiques sexuelles avec les clients. Je ne veux pas le savoir.

Je ne sais pas si Mme X… est au courant de ces pratiques éventuelles."

Cette tolérance de fait était encore confirmée par Myriam A… en ces termes

:

« Cependant, il m’est arrivé occasionnellement d’accepter de masturber des clients qui me le demandaient.

Je l’ai fait soit parce qu’il me proposaient de me payer directement en échange de cette pratique, et en général ils me donnaient directement en espèces 200 ou

300 francs, ou alors je la faisais parce que je sentais ou savais qu’après cela il accepterait de reprendre une ou plusieurs bouteilles et qu’il serait calmé.

Je parle pour moi, je laisse les autres filles s’expliquer sur ce qu’elles font avec leurs clients.

Ni Renée ni Mme X… ne cherchent à savoir ce que le client a pu nous donner en pourboire personnel. Cela n’arrive pas tous les soirs. Cependant il est évident qu’il n’est pas possible de rester toute la soirée avec un client au salon pour une seule bouteille. Si le client ne veut plus consommer on lui fait comprendre qu’on pourra pas rester tout le temps avec lui.

Il est arrivé aussi qu’on fasse un client à deux. En général cela se fait au bar et c’est souvent plus pour rigoler avec des clients noceurs.

Je me suis toujours limitée à des masturbations. A chaque fois, avant l’éjaculation je vais chercher du papier-toilette dans les W.C. par précaution. On le fait discrètement."

Lucienne U…., « travaillant » au « Sensso » depuis juin 1996 déclarait :

« En fait le salaire est basé sur une commission à la consommation.

Les barmaids touchent 30 francs sur une coupe de champagne à 100 francs et 200 francs sur une bouteille de champagne dont les prix s’échelonnent entre 1.000 et 1.500 francs.

La coupe se boit au comptoir, la bouteille au salon.

Il est évident que dans les salons les clients sont parfois exigeants.

En ce qui me concerne je tente le plus souvent de m’en tenir à la conversation mais pour retenir le client et éviter son mécontentement, il m’est arrivé de me sentir obligée de céder à leur demande et de leur faire des masturbations. Ce n’était pas systématique mais cela est arrivé.

Je ne voulais pas aller plus loin même si cela ne plaisait pas au client.

En ce qui me concerne je ne faisais pas de fellation quand je travaillais au « Sensso » mais j’avais des collègues qui le faisaient. Il y a même des filles qui vont beaucoup plus loin, qui vont jusqu’au bout.

Quand j’étais au « Sensso » il y avait Séverine, Dorota, une polonaise, Stéphanie, Valérie, qui travaillaient aussi au « Viking » et une autre dont j’ai oublié le nom.

Stéphanie et moi essayions de limiter les choses. On en parlait un peu ensemble.

Par contre, j’ai entendu Séverine dire qu’elle allait jusqu’au bout, qu’elle faisait l’amour avec les clients dans les salons. Elle ne s’en cachait pas. Tout le monde était au courant. Il est évident qu’elle faisait aussi des pipes.

Le but est d’inciter le client à la consommation.

Certains clients laissent un pourboire. Moi, je n’en demandais pas. Si le client donne un pourboire, c’est pour la barmaid avec qui il a consommé.

Les clients qui ont envie d’avoir quelque chose de plus une masturbation ou autre, propose de l’argent à la barmaid. Cela m’est arrivé quand je travaillais au « Sensso ».

Il propose en général 200 francs pour une masturbation. Moi je suis un peu gênée je dis au client de donner ce qu’il veut.

Mais c’est vrai qu’il m’est arrivé d’avoir des pourboires quand je faisais des masturbations au client.

Les clients demandent souvent à nous voir à l’extérieur. En ce qui me concerne cela ne m’est arrivé qu’avec un client, un habitué, et j’allais juste au restaurant avec lui.

Dorota était réservée au départ mais après elle s’est mise à boire beaucoup, même dès le matin car elle a vécu trois semaines chez moi et elle se mettait à la Vodka dès le matin.

Elle a changé, est devenue très provocante, allumeuse avec les clients.

Elle m’a dit qu’elle avait fait une fellation et je pense que cela a dû aller plus loin.

Je n’ai plus de nouvelles d’elle.

Valérie devait faire les fellations mais je ne pense pas la totale.

On parlait souvent ensemble et elle me le disait qu’elle faisait des fellations, à contre coeur, mais qu’elle ne faisait pas l’amour. Elle me l’aurait dit si elle l’avait fait car quand elle faisait une fellation elle n’aimait pas cela et elle m’en parlait. C’était vraiment parce qu’elle ne pouvait pas faire autrement.

On parlait pas trop de l’argent des pourboires entre nous. Cela ne regarde pas les autres.

Renée ne fait pratiquement pas de client, elle reste derrière le

comptoir, discute avec les clients et supervise.

Sa fille, Manuella, a aussi travaillé quelque temps au « Sensso » au mois d’août mais on ne se parlait pas beaucoup toutes les deux.

La patronne, Y… X… venait souvent le soir mais de temps en temps on ne la voyait pas.

Elle sait bien comment marche le boulot. Elle, ce qu’elle veut, c’est que l’argent rentre et pour cela il faut faire ce qu’il faut.

Renée, qui est chargée de mettre les filles au courant, est d’ailleurs très directe à ce sujet, elle dit que si on veut que cela marche il faut que le client soit content, donc que la fille fasse ce qu’il demande. Elle dit que si le client veut une pipe, s’il consomme on n’a rien sans rien, donc la fille doit faire ce qu’il demande. Le client est roi.

Le but c’est qu’il remette des bouteilles".

Stéphanie ZERINO, embauchée en août 1996 au « Viking », déclarait :

« C’est la patronne, Y… X…, qui m’a reçue.

Dès le début je savais en quoi consistait le travail, Valérie m’avait prévenue, à savoir qu’il faut avant tout faire consommer le client, le plus de bouteilles de champagne possible, en allant au salon, et pour ce faire « être gentille » avec le client et le tenir en haleine. Valérie m’avait dit que c’était à moi de mener la danse, de me débrouiller au mieux avec le client. J’avais dit dès le départ que je ne coucherais pas avec le client.

En revanche, j’ai su dès le départ qu’il fallait accepter de me faire caresser par le client et qu’il fallait accepter de leur faire des masturbations, voire des fellations.

Jamais la patronne, ni son cousin, Frédéric, ne m’ont directement dit ce qu’il fallait faire, mais cela va de soit. C’est Renée, la responsable du « Sensso » qui m’a expliqué qu’il fallait faire

consommer le client au maximum en étant gentille avec lui et qu’il fallait qu’il ne soit pas déçu et qu’il ait envie de revenir au bar pour me revoir…

… Comme mes collègues j’ai fait des masturbations à certains clients en revanche j’ai refusé de faire des fellations.

Je sais que certaines collègues font des fellations. On m’a fait des remarques comme quoi je n’étais pas assez performante, même de la part de mes collègues quand on faisait des clients à deux…

… Catherine X… sait parfaitement en quoi cela consiste « être gentille » avec le client. Rien n’est dit vraiment clairement mais cela coule de source.

Une fois que je n’avais fait qu’une bouteille avec un client, Fred m’a dit que j’avais mal joué, que je n’avais qu’à être plus entreprenante, que je toucherais rien dessus".

Cette tolérance et même organisation et incitation à la prostitution dans les établissements à l’enseigne « Le Sensso » et « Le Viking » est encore établie par des écoutes téléphoniques, notamment en cote D63 de la procédure où il est question de « s’arranger » avec un interlocuteur qui recherche trois partenaires pour « faire l’amour ».

Ainsi, tout comme A… N… confondue par les dépositions telles qu’analysées par les premiers juges pour le bar « Le Capricorne », Y… X… ne peut contester avoir pour le moins toléré mais en fait organisé, incité et surveillé des activités de prostitution dans ses deux établissements à l’époque considérée.

Le jugement sera donc confirmé sur la culpabilité.

Des déclarations de certaines employées et des traces d’appels téléphoniques relatifs à des paiements par cartes bleues confirment les dépositions des témoins quant aux sommes très importantes payées par ceux-ci.

Les activités dont s’agit étaient donc de très bon rapport.

Ces faits sont graves et les sanctions ne peuvent être atténuées que par l’ancienneté de ceux-ci.

Une peine d’emprisonnement apparaît nécessaire pour Y… X… qui peut toutefois bénéficier du sursis.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l’égard de X… Y… divorcée Z… et N… A… épouse B…, EN LA FORME

Constate le désistement d’appel de A… N… épouse B…; Reçoit les appels de Y… X… divorcée Z… et du Ministère public ;. AU FOND

Confirme le jugement sur la culpabilité des deux prévenues et sur la peine prononcée contre A… N… épouse B…

Statuant à nouveau sur la peine contre Y… X… divorcée Z…, condamne celle-ci à 6 mois d’emprisonnement avec sursis et prononce à son encontre :

— une interdiction d’exploiter un établissement ouvert au public, d’y être employé ou d’y participer financièrement durant 5 ans,

— une interdiction pour 5 ans d’exploiter un débit de boisson.

Constate que l’avertissement prévu à l’article 132-29 du Code Pénal n’a pu être donné à Y… X… divorcée Z… absente lors du prononcé de l’arrêt,

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d’un montant de 800 Francs (121,96 Euros) dont est redevable chacune des condamnées,

Le tout en application des articles susvisés et de l’article 800-1 du Code de Procédure Pénale. LE E…,

LE PRÉSIDENT,

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Textes cités dans la décision

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  2. Code de procédure pénale
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Cour d'appel de Rennes, du 18 septembre 2001, 00/01702