Cour d'appel de Rennes, 31 mars 2010, n° 09/01847

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 31 mars 2010, n° 09/01847
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 09/01847

Sur les parties

Texte intégral

DOSSIER N° 09/01847

Arrêt N° 448/2010

du 31 mars 2010

COUR D’APPEL DE RENNES

3e Chambre,

ARRÊT

Prononcé publiquement le 31 mars 2010 par la 3e Chambre des Appels Correctionnels,

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

AO K

Né le XXX à XXX

XXX et de AO AT AU

De nationalité française, célibataire, sans profession

XXX

Prévenu, appelant, libre, non comparant

ET :

G T,

XXX

Partie civile, intimé, comparant et assisté de Maître E Yann, R au Barreau de Q

F V,

XXX

Partie civile, intimé, comparant en personne

CPAM DE Q,

dont le siège est rue de Savoie – 29282 Q

Partie intervenante, intimée, non représentée (a écrit)

LE MINISTÈRE PUBLIC

Appelant,

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur X

Conseillers : Madame Y

Monsieur Z

Prononcé à l’audience du 31 mars 2010 par M. X, conformément aux dispositions de l’article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale

MINISTÈRE PUBLIC : représenté aux débats et lors du prononcé de l’arrêt par M. A, R S

en présence de M. B, en stage d’intégration dans la magistrature, qui a assisté aux débats et, avec voix consultative, au délibéré en vertu de l’article 19 de l’ordonnance du 22 décembre 1958

GREFFIER : en présence de Madame C lors des débats et de Mademoiselle D lors du prononcé de l’arrêt

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l’audience publique du 10 février 2010, le Président a constaté l’absence du prévenu qui n’a pas comparu, ni fourni d’excuse valable bien qu’ayant été régulièrement cité à l’adresse déclarée dans l’acte d’appel, la Cour qualifiant alors le présent arrêt contradictoire à signifier en application de l’article 503-1 du code de procédure pénale ;

A cet instant, le conseil de G T, partie civile, a déposé des conclusions ;

Ont été entendus :

Madame Y, en son rapport,

T G et V F en leurs observations,

Maître E en sa plaidoirie pour G T, partie civile,

M. l’R S en ses réquisitions ;

Puis, la Cour a mis l’affaire en délibéré pour son arrêt être rendu à l’audience publique du 31 mars 2010 ;

Conformément aux prescriptions de l’article 462 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale, le Président a avisé les parties présentes de la date de l’audience à laquelle l’arrêt serait rendu ;

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LE JUGEMENT :

Le tribunal correctionnel de Quimper par jugement contradictoire en date du 11 décembre 2008 :

Sur l’action publique :

— a requalifié la prévention de 'violences volontaires sur T G commises en réunion et suivies d’une mutilation ou d’infirmité permanente’ en 'violences volontaires commises en réunion et ayant entraîné une incapacité supérieure à 8 jours, en l’espèce 30 jours, au préjudice de T G';

— a condamné AO K à 4 ans d’ emprisonnement dont 2 ans avec sursis ;

Sur l’action civile :

— a condamné AO K, in solidum avec I J, à verser à F V la somme de 372 € au titre du préjudice matériel, 1.500 € au titre du préjudice moral, 84,68 € au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale,

— a condamné AO K, in solidum avec I J, à verser à G T une indemnité provisionnelle de 10.000 € et 1.000 € au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale et a ordonné une expertise médicale de G T ;

LES APPELS :

Appel a été interjeté par :

M. AO K, le 22 décembre 2008 à titre principal de l’entier jugement,

M. le procureur de la République, le 22 décembre 2008 à titre incident ;

LA PRÉVENTION :

Considérant qu’il est fait grief à AO K :

— d’avoir à Quimper (29), le 13 septembre 2007, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n’emportant pas prescription, volontairement commis des violences :

— sur la personne de T U , avec cette circonstance que les violences ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente,

— sur la personne de V F et W L, n’ayant pas entraîné d’incapacité totale de travail supérieure à 8 jours, avec cette circonstance que ces violences ont été commises en réunion de plusieurs personnes agissant en qualité d’auteurs ou de complice et ce en état de récidive légale compte tenu d’une précédente condamnation prononcée par le tribunal correctionnel de Quimper le 14 décembre 2006 pour des faits similaires ;

Faits prévus et réprimés par les articles 132-10, 222-9, 222-13, 222-44 à 222-47 du Code Pénal ;

* * *

EN LA FORME :

Les appels sont réguliers et recevables en la forme.

AU FOND :

Rappel des faits :

Le 13 septembre 2007, aux environs de 17 heures 20, M. V F se présentait au commissariat de police de Quimper afin de signaler les faits de violences dont lui et son ami T G avaient été victimes durant la nuit précédente et de déposer plainte contre leurs auteurs.

Il relatait : que, sortant vers deux heures d’un bar avec ses amis AQ AR, W L et T G, ils marchaient dans la rue AA AB à Quimper lorsqu’à hauteur de XXX T G avait salué un groupe de jeunes installé sur le rebord de la fenêtre d’un appartement ; que, voyant ces individus quitter leur appartement et les rejoindre dans la rue, ils étaient tous les quatre partis assez rapidement ; qu’il s’était personnellement caché derrière un immeuble ; que AQ AR et W L avaient réussi à s’enfuir, alors que T G était rattrapé par cinq individus ; que, voyant son ami en difficulté, il avait décidé de se porter à sa hauteur et avait été agressé par l’un des individus, qui s’était jeté sur lui, en le faisant chuter au sol ; que c’était à ce moment là qu’il s’était ouvert le bras avec les éclats de verre d’une bouteille d’alcool dont il était porteur ; qu’il s’était protégé en se recroquevillant ; que son agresseur lui avait alors porté des coups de pied à la tête, brisant ses lunettes ; qu’un second individu avait rejoint le premier et lui avait également donné des coups de pied.

Il indiquait que l’agression avait duré deux à trois minutes avant que ses assaillants et les trois individus qui agressaient son ami T G ne prennent la fuite, en entendant la sirène d’un véhicule de police.

Il ajoutait que son ami T était resté allongé au sol en sang et qu’il avait été transporté au centre hospitalier LAENNEC, où il était toujours hospitalisé.

Il remettait un certificat médical faisant état d’une érosion de l’avant bras gauche, d’une contusion frontale droite et des douleurs superficielles du cuir chevelu, ne justifiant d’aucune incapacité totale de travail.

Il reconnaissait sur photographies ses agresseurs en la personne de AS LE AJ et de AC AD, ultérieurement mis hors de cause.

Les enquêteurs lui présentaient le 15 novembre 2007 un album photographique comportant neuf photographies.

V F reconnaissait alors les individus figurant sur les photographies n° deux et trois (à savoir AS LE AJ et J I) comme étant ceux qui lui avaient porté les coups.

Entendu le 14 septembre 2007, M. T G, alors hospitalisé dans le service de traumatologie du centre hospitalier LAENNEC, confirmait qu’il marchait dans la rue avec ses trois camarades lorsqu’il avait salué un groupe de trois individus assis sur le rebord d’une fenêtre, que sa politesse n’avait pas eu l’heur de leur plaire et qu’ils étaient descendus très rapidement.

Il déclarait qu’il n’était pas en mesure de dire avec certitude le nombre des agresseurs, que, selon ses souvenirs, ils étaient au moins trois, que l’un des gars s’était dirigé vers lui et l’avait immédiatement frappé avec son poing droit au niveau de la pommette gauche, que, dans le même temps, il avait vu un autre type s’en prendre à V F, le faire chuter au sol et puis lui décocher un coup de pied, qu’il s’était alors approché pour tenter de raisonner ces personnes, qu’il était en train de leur parler et qu’ensuite c’était « le trou noir ».

Il précisait qu’il avait du prendre un coup, qui lui avait fait perdre connaissance, et qu’il avait ensuite vraisemblablement été frappé au sol mais qu’il ne souvenait de rien et n’était pas en mesure de reconnaître la personne qui lui avait porté le coup.

Il ne reconnaissait personne sur l’album photographique présenté par les enquêteurs, expliquant que ses souvenirs étaient beaucoup plus flous qu’il ne le pensait initialement, qu’il faisait nuit, qu’il avait consommé de l’alcool et que la scène s’était déroulée très rapidement.

M. G était examiné sur réquisitions par le docteur H, qui relevait : « le bilan des lésions est essentiellement une disjonction crânio-faciale médiane avec déformation de la pommette et du nez et surtout un effondrement du plancher orbitaire droit responsable d’une diplopie. Cette importante fracture du massif facial nécessite au mieux une prise en charge au CHU de Q. Il est à noter par ailleurs une contusion cervicale sans lésion radiologique motivant la mise d’une minerve à visée antalgique. ITT 30 jours ».

Lors de son audition le 16 septembre 2007, AQ AR affirmait qu’ils avaient été pris à partie par un groupe de quatre ou cinq individus n’ayant pas accepté le salut amical de T G.

Il déclarait que, voyant que les quatre ou cinq individus qui étaient descendus de leur appartement étaient énervés et comptaient en découdre, il s’était mis à courir et que, se retournant à un moment donné, il avait vu qu’une bagarre avait éclaté et qu’une mêlée s’était formée.

Il ajoutait qu’il était incapable de donner des détails, qu’il avait juste vu W L réussir à se dégager, que ce dernier l’avait alors rejoint et qu’ils avaient tous les deux quitté les lieux en courant vers son domicile, pensant que leurs deux camarades avaient aussi réussi à échapper à ce groupe belliqueux.

W L indiquait, quant à lui, que les agresseurs étaient au nombre de quatre.

Il expliquait que l’un des individus était arrivé directement sur lui en lui décochant un coup de poing au niveau de la pommette droite, qu’il s’était défendu et avait répliqué, qu’il avait porté quelques coups à son agresseur lorsque deux des amis de ce dernier étaient arrivés et l’avaient jeté au sol, qu’alors qu’il se trouvait par terre les quatre individus l’avaient savaté et qu’il avait réussi à se dégager et à se sauver, non sans mal, l’un des individus l’ayant poursuivi durant dix à quinze mètres dans XXX, et à rejoindre AQ AR.

Il ne reconnaissait personne sur la planche photographique présentée, soulignant à cet égard qu’il faisait nuit, qu’il avait bu et que les faits s’étaient déroulés rapidement.

Réentendu ultérieurement, M. W L reconnaissait l’individu figurant sur la photographie n° 3 de la planche photographique ( M. J I), précisant qu’il le reconnaissait formellement comme étant celui lui ayant couru après dans la rue et lui ayant donné un ou deux coups de poing et pied quand il essayait de récupérer sa chaussure.

Placé en garde à vue, AS LE AJ prétendait dans un premier temps n’avoir été qu’un témoin auditif de la bagarre.

Il admettait ensuite que, le soir des faits, il se trouvait à la fenêtre avec son ami J I lorsque ce dernier avait insulté des jeunes les ayant salués, qu’ils étaient descendus tous les deux et qu’ils s’en étaient alors pris à trois des jeunes.

Il reconnaissait avoir « mis une grosse patate » à un jeune qui s’en prenait à J I, ajoutant que le jeune était tombé par terre suite au coup reçu.

Il reconnaissait aussi s’être ensuite battu avec un deuxième jeune, pendant que J I se battait avec le troisième.

Il précisait n’avoir porté que des coups de poing au visage faisant tomber l’une des victimes au sol et que J I avait pris sa relève, en rouant ce dernier de coups de poing au visage et au ventre, le laissant KO.

Lors de sa troisième audition, AS LE AJ affirmait que, le soir des faits, ils étaient en réalité quatre, à savoir lui, J I, AE AF et AG AH.

Il maintenait avoir roué de coups l’un des jeunes « le gros costaud avec le pull à rayure », ( T G), déclarant à cet égard : « je l’ai tapé plein de fois, je lui ai mis des coups de poing et de boule, tout ce que j’arrivais à lui placer’Je lui ai mis des coups sans s’arrêter au visage et à la fin une balayette’ il a fini KO par terre. Il était assommé à terre, je lui ai mis deux coups de poing. Il saignait de la bouche ».

Il ajoutait que J I avait frappé « le jeune homme qui était en rouge », qu’AE AF et AG AH s’étaient battus avec « celui qui avait des cheveux et une bouteille à la main » et que, ce dernier s’étant relevé avec le tesson de bouteille qui s’était brisé, il en avait porté un coup à I, qui l’avait alors assommé d’un uppercut avant de le frapper à terre.

Durant sa quatrième audition, AI AJ faisait état de la présence de M. K AO.

Il relatait alors : « Au tout début de la bagarre, D.I a insulté et a été insulté par un jeune porteur d’un pull rouge. Lorsqu’il est arrivé dans la rue, I a porté des coups au jeune en pull rouge et le jeune avec le pull rayé lui a sauté dessus pour défendre son copain. K AO a alors porté plusieurs coups de poing au visage du jeune en pull rayé et plusieurs coups de pied à la tête pour défendre J I en le faisant chuter au sol. Puis lorsqu’il va pour se relever je lui ai mis trois coups de poing au visage au hauteur de la bouche. AE AF a frappé uniquement un troisième jeune avec des cheveux longs qui tenait une bouteille à la main lui mettant un coup de pied circulaire au visage ».

Placé lui aussi en garde à vue, J I déclarait, dans un premier temps, qu’il était descendu dans la rue avec AS LE AJ, tandis que K AO restait dans l’appartement avec AK AL.

Il admettait avoir frappé un premier jeune portant un survêtement rouge (M. L) puis avoir fait tomber celui qui avait les cheveux longs (M. F), qui le menaçait avec une bouteille, précisant que ce dernier était resté par terre inconscient après avoir reçu un coup de poing dans le nez.

Il se montrait réticent à évoquer le rôle des autres intervenants, soulignant ensuite qu’ils étaient trois.

Il soutenait dans un second temps qu’ils étaient descendus tous les quatre, à savoir lui, AS LE AJ, AE AF et K AO et confirmait qu’il avait frappé le jeune avec le survêtement rouge et celui aux cheveux longs.

Interrogé sur le point de savoir quel avait été le rôle des autres, il répondait : « se protéger mutuellement. Je n’ai vu personne taper personne ».

Il concluait : « En tous cas, plus aucun ne bougeait. On y a été comme des barbares, quand on cherche, il faut assumer ».

M. K AO soutenait, lors de sa première audition, qu’il était rentré chez lui aux environs de 23 heures et qu’il n’avait pas assisté à la bagarre.

Durant sa seconde audition, il admettait qu’il était bien présent mais prétendait qu’il n’avait frappé personne, soulignant qu’il était trop saoul pour se battre.

Lors de la confrontation organisée par les services de police, Messieurs I et LE AJ s’accordaient pour déclarer que K AO était présent mais que, trop saoul, il n’avait pas participé à la bagarre. J I prétendait qu’il était le seul à avoir frappé W L et V F, ce que les autres confirmaient. Quant à AS LE BRAS, il s’attribuait l’exclusivité des coups portés à T G.

Mis en examen, AS LE AJ confirmait avoir frappé T G. Il révélait que les protagonistes s’étaient entendus en garde à vue pour présenter une version commune.

Selon sa nouvelle version, la vérité était la suivante : « J s’est embrouillé avec un premier, celui qui avait le pull rouge. Ils ont commencé à se battre arrivés sur la route et à ce moment là, le gars avec le pull rayé a sauté également sur J. K a attrapé le gars avec le pull rayé et lui a mis plein de coups. Il lui a mis des coups au visage, puis il lui a mis une balayette pour le faire tomber au sol et enfin, il lui a mis des coups de pied et des coups de poing lorsqu’il était à terre. Un moment, le gars avec le pull rouge qui se battait avec J s’est retrouvé KO. C’est là où j’ai vu le gars aux cheveux longs qui voulait se battre avec une bouteille à la main. Je l’ai vu ensuite tomber par terre, mais je ne sais pas si c’est J qui l’a fait tomber par terre, même si je pense que c’est lui. La bouteille s’est cassée en tombant par terre. L’individu aux cheveux longs avait le tesson à la main et il a mis un coup à J dans le bras. Le gars avec le pull rayé a commencé à se relever et à ce moment là, je lui ai mis trois pêches dans la joue et dans la bouche. Il est resté assis, puis il s’est allongé. Je n’ai pas frappé les deux autres »

Lors de l’interrogatoire de première comparution, J I maintenait ses précédentes déclarations, reconnaissant s’être montré violent vis à vis de Messieurs F et L.

Il confirmait que K AO n’avait pas participé aux faits et contestait l’affirmation selon laquelle ils s’étaient accordés en garde à vue sur une version des faits.

Mis en examen, AI AP réaffirmait n’avoir frappé personne et déniait toute concertation lors de la garde à vue.

Entendu sur commission rogatoire du magistrat instructeur, AE AF déclarait ne pas se souvenir avoir assisté à une bagarre, expliquant qu’il devait être, comme à l’habitude, alcoolisé et sous médicaments.

Interrogé dans les mêmes conditions, AG AH relatait, quant à lui, lors de sa troisième audition :

« J’ai regardé par la fenêtre. J’ai vu J et K taper tous les deux sur un même gars’ il avait l’air assez grand et costaud. K lui mettait des coups de genoux et de poings, J AN. Quand le gars était par terre, j’ai vu AS shooter dedans. Il y avait trois autres gars avec celui qui se faisait taper. Ils essayaient de défendre leur pote en tirant J et K. A ce moment, je suis descendu à mon tour avec AK. J’ai essayé de séparer J et celui avec qui il se battait, un pote à celui qui était par terre ».

Lors de la dernière confrontation organisée par le juge d’instruction, K AO persistait à nier son implication dans les violences et soutenait que seuls AS LE AJ et J I s’en étaient pris aux victimes.

J I modifiait, quant à lui, ses déclarations antérieures, mettant alors clairement en cause K AO dans la commission des violences, précisant que ce dernier était descendu dans la rue avec eux et avait frappé à coups de poing le jeune homme portant le survêtement rouge, avant de s’en prendre à T G en lui portant un coup de poing dans l''il.

AI AP contestait immédiatement les déclarations de M. I, qui, à son tour, indiquait que, lors de la garde à vue, il s’était mis d’accord avec son ami K AO pour ne pas le dénoncer.

AI AJ maintenait ses déclarations selon lesquelles M. AO avait attrapé T G et lui avait porté plein de coups au visage avant de le faire tomber et de lui mettre des coups de pied et de poing lorsqu’il était à terre.

K AO répondait qu’il n’avait mis aucun coup et M. I précisait qu’il avait juste vu AI AP donner un coup de poing sans savoir ce qui s’était passé ensuite.

SUR CE :

Il résulte de la procédure et des débats de première instance que K AO, renvoyé devant le tribunal correctionnel pour « avoir à Quimper le 13 septembre 2007 volontairement commis des violences sur la personne de T G, avec cette circonstance que les violences ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, et sur la personne de V F et W L, n’ayant pas entraîné d’ITT supérieure à huit jours, avec cette circonstance que ces violences ont été commises en réunion de plusieurs personnes agissant en qualité d’auteurs ou de complice, les faits ayant été commis en état de récidive légale compte tenu d’une précédente condamnation prononcée le 14 décembre 2006 par le tribunal correctionnel de Quimper pour des faits similaires », a toujours contesté les faits qui lui sont reprochés, affirmant, dans un premier temps, qu’étant rentré chez lui aux environs de 23 heures il n’avait même pas assisté à la bagarre, avant de déclarer qu’il était bien présent au moment de l’agression mais n’avait frappé personne, étant trop saoul pour se battre, ivresse qui ne l’empêchait toutefois pas de fournir un certain nombre de détails sur la bagarre, qui n’aurait, selon lui, impliqué que AS LE AJ et J I.

Il ressort cependant de l’analyse croisée des déclarations de Messieurs V F, T G, W L et AQ AR que les violences dont les trois premiers ont été victimes ont été perpétrées par au moins trois personnes sur un laps de temps très court.

Ainsi, AQ AR a indiqué qu’ils avaient été pris à partie par un groupe de quatre ou cinq individus n’ayant pas accepté le salut amical de T G. W L a déclaré, quant à lui, que les agresseurs étaient au nombre de quatre, expliquant que l’un des individus lui avait décoché un coup de poing au niveau de la pommette droite, qu’il s’était défendu et avait répliqué en portant quelques coups à son agresseur lorsque deux de ses comparses étaient arrivés et l’avaient jetés au sol, avant qu’il ne soit savaté par les quatre personnes. V F a, pour sa part, relaté qu’ayant réussi à se cacher derrière un immeuble, il avait constaté que T G était rattrapé par cinq individus et que, s’étant porté à la hauteur de son ami pour l’aider, il avait été agressé par l’un des individus qui l’avait fait chuter au sol et lui avait porté des coups de pied à la tête, avant d’être rejoint par un second individu, qui lui avait également porté des coups de pied. M. T G, fortement commotionné, n’a conservé que peu de souvenir de l’agression et n’a pas été en mesure de dire avec certitude le nombre exact des agresseurs. Il a cependant réussi à indiquer aux enquêteurs que, selon ses souvenirs, ils étaient au moins trois.

Il est constant : que Messieurs LE AJ, AO et I ont reconnu s’être trouvés la nuit des faits au domicile de AI AJ et être descendus dans la rue après que M. G les ait salués ; que AS LE AJ et J I ont admis avoir porté des coups à M. W L, J I reconnaissant en outre avoir frappé M. V F et AS LE AJ avoir mis trois coups de poing à T G.

Durant sa quatrième audition par les services de police, AS LE AJ a relaté : « Au tout début de la bagarre, D.I a insulté et a été insulté par un jeune porteur d’un pull rouge. Lorsqu’il est arrivé dans la rue, I a porté des coups au jeune en pull rouge et le jeune avec le pull rayé lui a sauté dessus pour défendre son copain. K AO a alors porté plusieurs coups de poing au visage du jeune en pull rayé et plusieurs coups de pied à la tête pour défendre J I en le faisant chuter au sol. Puis lorsqu’il va pour se relever je lui ai mis trois coups de poing au visage au hauteur de la bouche. AE AF a frappé uniquement un troisième jeune avec des cheveux longs qui tenait une bouteille à la main lui mettant un coup de pied circulaire au visage ».

Lors de l’interrogatoire de première comparution, il a déclaré : « J s’est embrouillé avec un premier, celui qui avait le pull rouge. Ils ont commencé à se battre arrivés sur la route et à ce moment là, le gars avec le pull rayé a sauté également sur J. K a attrapé le gars avec le pull rayé et lui a mis plein de coups. Il lui a mis des coups au visage, puis il lui a mis une balayette pour le faire tomber au sol et enfin, il lui a mis des coups de pied et des coups de poing lorsqu’il était à terre. Un moment, le gars avec le pull rouge qui se battait avec J s’est retrouvé KO. C’est là où j’ai vu le gars aux cheveux longs qui voulait se battre avec une bouteille à la main. Je l’ai vu ensuite tomber par terre, mais je ne sais pas si c’est J qui l’a fait tomber par terre, même si je pense que c’est lui. La bouteille s’est cassée en tombant par terre. L’individu aux cheveux longs avait le tesson à la main et il a mis un coup à J dans le bras. Le gars avec le pull rayé a commencé à se relever et à ce moment là, je lui ai mis trois pêches dans la joue et dans la bouche. Il est resté assis, puis il s’est allongé. Je n’ai pas frappé les deux autres ».

M. I a, pour sa part, modifié lors de la dernière confrontation ses déclarations antérieures, mettant alors lui aussi clairement en cause K AO dans la commission des violences, précisant que ce dernier était descendu dans la rue avec eux et avait frappé à coups de poing le jeune homme portant le survêtement rouge avant de s’en prendre à T G en lui portant un coup de poing dans l''il.

Il est exact que Messieurs LE AJ et I n’ont pas été constants dans leurs accusations.

Il n’en demeure pas moins : que, dès la garde à vue, M. LE AJ a fait état de la participation de AI AP et n’est en fait revenu sur ses accusations qu’au moment de la confrontation effectuée par les enquêteurs ; que M. I, bien que se montrant réticent à évoquer le rôle des autres intervenants, a, dès sa première audition par les services de police, souligné qu’ils étaient trois ; qu’il a, dans un second temps toujours en garde à vue, affirmé que AI AP était descendu de l’appartement avec lui, AI AJ et M. AF.

Cette fluctuation dans les déclarations ne saurait, dans ces conditions, ôter toute crédibilité aux accusations portées, alors même que le récit des faits fourni par M. I et LE AJ lors de la confrontation du 27 décembre 2007 recoupe celui donné par les victimes.

Force est en outre de constater que la mise en cause de M. AO par Messieurs LE AJ et I est corroborée par le témoignage de M. AG AH, par celui de M. N et dans une moindre mesure par celui de Mlle AK O.

En effet, entendu sur commission rogatoire, M. AG AH a déclaré : « J’ai regardé par la fenêtre. J’ai vu J et K taper tous les deux sur un même gars’ il avait l’air assez grand et costaud. K lui mettait des coups de genoux et de poings, J AN. Quand le gars était par terre, j’ai vu AS shooter dedans. Il y avait trois autres gars avec celui qui se faisait taper. Ils essayaient de défendre leur pote en tirant J et K. A ce moment, je suis descendu à mon tour avec AK. J’ai essayé de séparer J et celui avec qui il se battait, un pote à celui qui était par terre », rappel étant fait à cet égard que, comme l’ont souligné à juste titre les premiers juges, que les faits se sont déroulés pour l’essentiel au niveau du 21 de la rue AA AB, puis au niveau de l’intersection que forme cette artère avec XXX située à 25 mètres de là, de sorte que c’est à tort que AI AP a tenté de soutenir en première instance que M. AH n’avait pu être témoin des faits depuis les fenêtres de l’appartement de AS LE AJ.

M. N, habitant du premier immeuble de XXX, a, quant à lui, expliqué aux fonctionnaires de police qu’il avait été réveillé, qu’il avait vu huit ou dix jeunes qui se disputaient et en venaient aux mains et qu’il avait aussi vu un homme à terre se prendre des coups de pied par trois ou quatre individus.

De son côté, Mlle O a fini par déclarer au magistrat instructeur que K AO s’était également vanté devant elle d’avoir participé aux violences, en disant : « on l’a bien mangé, on l’a bien défoncé ».

Le docteur P, à qui a été confiée l’expertise de M. T G, a relevé qu’aucune atteinte de la fonction visuelle n’avait pu être notée, que, sur le plan ophtalmologique, M. G présentait principalement une limitation de l’élévation de l''il droit responsable d’une vision trouble dans les regards moyens hauts et qu’il existait également une limitation dans l’ensemble des regards, mais uniquement dans les regards extrêmes.

Il a conclu que « cette limitation verticale et à un moindre égard dans les autres directions du regard est en rapport direct, certain et exclusif avec les fractures des planchers des orbites, principalement de la fracture du plancher de l’orbite droite », qu'« elle est responsable d’un taux actuel d’IPP de 10% » et que « l’incapacité totale de travail est équivalente à son hospitalisation du 13 au 15 septembre à l’hôpital de Quimper puis du 15 au 25 septembre à l’hôpital de Q, soit 12 jours », tout en indiquant que T G n’était pas consolidé sur le plan ophtalmologique.

Il apparaît, dans ces conditions, s’agissant d’une scène unique de violences à laquelle il est établi qu’il a pris une part active, que le tribunal correctionnel a tiré des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s’imposaient en retenant la culpabilité de AI AP pour les faits de violences volontaires en réunion n’ayant pas entraîné d’incapacité supérieure à huit jours sur les personnes de V F et W L et en procédant, les éléments du dossier ne permettant pas de déterminer que les blessures subies par la victime sont à l’origine d’une mutilation ou d’une infirmité permanente, à une requalification s’agissant des faits commis au préjudice de M. T G. Les premiers juges ne pouvaient cependant procéder, sans avoir mis l’intéressé en mesure de se défendre sur la circonstance relevée, à cette requalification en retenant la circonstance aggravante de réunion, qui n’était pas visée dans l’ordonnance de renvoi s’agissant des faits commis au préjudice de M. G.

Le jugement déféré sera donc réformé. AI AP sera déclaré coupable de violences volontaires ayant entraîné une ITT supérieure à 8 jours sur la personne de T G et de violences volontaires n’ayant pas entraîne d’ITT supérieure à 8 jours commises en réunion sur les personnes de V F et W L.

Les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende, de même que les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant entraîné aucune incapacité de travail lorsqu’elles sont commises par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice.

Il importe à cet égard de relever que AI AP a agi en état de récidive légale pour avoir été condamné le 14 décembre 2006 par le tribunal correctionnel de Quimper pour des faits de violence avec usage ou menace d’une arme et de port d’arme prohibé de catégorie 6 commis au mois de novembre précédent.

L’article 132-10 du code pénal prévoit que « lorsqu’une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un délit, commet, dans le délai de cinq ans à compter de l’expiration ou de la prescription de la précédente peine, soit le même délit, soit un délit qui lui est assimilé au regard des règles de la récidive, le maximum des peines d’emprisonnement et d’amende encourues est doublé ».

L’extrême gravité des faits commis, s’agissant de violences très appuyées totalement gratuites, et la personnalité du prévenu, déjà condamné pour des faits similaires, justifient que soit fait une application stricte de la loi pénale et rendent nécessaires le prononcé d’une peine d’emprisonnement sans sursis d’une durée très significative, toute autre sanction étant manifestement inadéquate.

Le tribunal correctionnel a condamné AI AP à la peine de quatre ans d’emprisonnement dont deux ans assortis du sursis. La gravité exceptionnelle des faits commis en état de récidive légale impose toutefois de prononcer une peine plus significative. M AO sera donc condamné à la peine de cinq ans d’emprisonnement.

Il y a lieu enfin de délivrer un mandat d’arrêt à son encontre afin de permettre l’exécution de la peine d’emprisonnement prononcée et d’éviter le renouvellement de l’infraction.

Sur l’action civile :

Les premiers juges ont fait une exacte appréciation de l’indemnité provisionnelle allouée à M. T G et des dommages et intérêts accordés à M. V F. La décision entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions civiles, y compris en ce qu’elle a ordonné une expertise médicale de M. G.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. G les frais non répétibles qu’il a exposés en cause d’appel. Il convient dès lors, ajoutant au jugement déféré, de condamner AI AP à lui verser la somme de 500 euros au titre de l’article 475-1 du Code de procédure pénale pour la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à signifier à l’égard de AO K, G T, F V et par défaut à l’égard de la CPAM DE Q,

EN LA FORME

REÇOIT les appels,

AU FOND

Sur l’action publique :

RÉFORME le jugement entrepris,

DÉCLARE AI AP coupable de violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours sur la personne de T G et de violences volontaires n’ayant pas entraîne d’incapacité totale de travail supérieure à 8 jours commises en réunion sur les personnes de V F et W L,

CONDAMNE M. AO K à la peine de cinq ans d’emprisonnement,

DÉCERNE à son encontre, en application de l’article 465 du Code de procédure pénale, un mandat d’arrêt.

Sur l’action civile :

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions civiles,

Y ajoutant,

CONDAMNE AI AP à payer à M. G la somme de 500 € au titre de l’article 475-1 du Code de procédure pénale pour la procédure d’appel.

En vertu de l’article 800-1 du Code de Procédure Pénale et de l’article 1018 A du Code S des Impôts, la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure dont est redevable le condamné d’un montant de 120 euros, réduit de 20 % (soit 96 euros) en cas de règlement dans un délai d’un mois.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

F. D A. X

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Textes cités dans la décision

  1. Code pénal
  2. Code de procédure pénale
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Cour d'appel de Rennes, 31 mars 2010, n° 09/01847