Cour d'appel de Rennes, 4 février 2014, n° 12/05671

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 4 févr. 2014, n° 12/05671
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 12/05671

Sur les parties

Texte intégral

1re Chambre

ARRÊT N° 64

R.G : 12/05671

M. E A

C/

M. L G

Mme H I épouse G

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 FEVRIER 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,

GREFFIER :

Madame J K, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 09 Décembre 2013

devant Monsieur Xavier BEUZIT, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l’audience publique du 04 Février 2014, date indiquée à l’issue des débats.

****

APPELANT :

Monsieur E A

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Gilles APCHER, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉS :

Monsieur L G

né le XXX à Vannes

XXX

XXX

Représenté par Me Christophe GUEGUEN de l’Association CHOUCQ, LE THUAUT, JOYEUX, GUEGUEN C., avocat au barreau de NANTES

Madame H I épouse G

née le XXX à Pontivy

XXX

XXX

Représentée par Me Christophe GUEGUEN de l’Association CHOUCQ, LE THUAUT, JOYEUX, GUEGUEN C., avocat au barreau de NANTES

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. E A est propriétaire au lieu-dit 'La Revarderie’ à Touvois d’une parcelle cadastrée section XXX, auparavant cadastrée section XXX

M. et Mme G sont eux-mêmes propriétaires d’une parcelle XXX située au sud de la propriété de M. E A, qui était auparavant constituée à l’ancien cadastre des parcelles XXX et 523.

Pour accéder à leur immeuble depuis la voie publique située au Nord, M et Mme G utilisaient un passage existant sur la parcelle 521 ayant appartenu à Mme Z pour rejoindre la voie publique.

Le 18 janvier 1999, Mme Z a vendu la parcelle XXX aux époux C qui le 13 septembre suivant, l’ont échangée avec différentes parcelles appartenant à M. E A.

En décembre 2007, ce dernier a aménagé la parcelle devenue n°74 et y a fait construire un réseau d’assainissement des eaux usées.

Les époux G se sont opposés à cette construction invoquant leur droit de passage sur la partie Est de cette parcelle.

M. Y a été désigné en qualité d’expert par ordonnance du 12 juin 2008 du juge des référés du tribunal de grande instance de Nantes pour déterminer s’il existait des éléments permettant de caractériser une servitude de passage au profit du fonds XXX passant sur le fonds n°74.

Dans son rapport déposé le 13 novembre 2008, M. Y a conclu qu’il n’existait pas de servitude conventionnelle sur les fonds XXX et 521 mais qu’un ensemble de présomptions tendait à montrer qu’il y avait eu dans le passé un usage continu du passage à partir de la parcelle A 521 au profit des immeubles A 523 et 515.

Par jugement en date du 12 juin 2012, le tribunal de grande instance de Nantes a :

Constaté que la parcelle XXX appartenant à Monsieur A supporte une servitude de passage de véhicules et tous réseaux, aériens ou souterrains au profit des parcelles n°515 et 523, propriétés de Monsieur et Madame G ;

Constaté que la parcelle XXX appartenant à Monsieur A supporte une servitude de passage pour la partie de la ruelle située en partie Nord de la parcelle 523 tel que précisé dans le rapport d’expertise, servitude de passage à pied ou tous véhicules ainsi que tous réseaux aériens ou souterrains ;

Ordonné la publication de la décision en marge de l’acte de propriété de Monsieur et Madame G cadastrée section XXX et A n°523 auprès de la conservation des hypothèques et en marge de l’acte de propriété de Monsieur A cadastrée section XXX et section XXX,

Condamné M. E A à verser aux époux G :

Au titre du préjudice moral et psychologique la somme de 2.500 euros ;

Au titre des frais de remise en état du terrain des voisins, la somme de 6.838, 56 euros ;

Débouté les époux G de leur demande de dommages et intérêts ;

Débouté les époux G du surplus de leurs demandes ;

Débouté M. E A de l’ensemble de ses demandes ;

Condamné M. E A aux dépens qui comprendront ceux de la procédure de référé outre l’expertise, ainsi que le coût des constats d’huissiers des 3 janvier 2009 et 26 décembre 2008 respectivement d’un montant de 260 euros et 242 euros, utiles à la présente procédure ;

Alloué à Me GUEGUEN le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamné M. E A à payer aux époux G la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Débouté M. E A de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Appelant de ce jugement par déclaration au greffe du 16 août 2012, M. E A, dans ses dernières conclusions du 5 novembre 2013 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, a sollicité que la cour :

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Juge que la parcelle n°74 n’est grevée d’aucune servitude conventionnelle de passage au profit de la parcelle XXX au sens des articles 686 et suivants du code civil,

Juge que la parcelle n°74 n’est grevée d’aucune servitude légale de désenclavement au titre de l’article 682 du code civil,

A titre infiniment subsidiaire :

Déboute les époux G de toutes leurs demandes, fins et prétentions autres,

Condamne les époux G à payer à Monsieur A la somme de 5.000 euros au titre des tracas engendrés par la procédure,

Condamne les époux G à payer à Monsieur A la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles pour cette instance comprenant une procédure de référé expertise, de première instance et d’appel,

Condamne les époux G aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de Maître Gilles APCHER, avocat au barreau de Nantes.

Par dernières conclusions du 10 janvier 2013 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, M. et Mme G demandent à la cour de :

Débouter M. A de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Nantes dans toutes ses dispositions,

Y additant,

Dire que M. E A devra retirer les pierres et les obstacles qu’il a déposés au sol et qui empêchent le passage avec un camion dans la propriété G et ce sous astreinte comminatoire et définitive de 500 euros par jour à compter de la décision à intervenir,

Condamner M. E A à verser aux époux G une somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive injustifiée,

Le condamner à verser une somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Le condamner enfin aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Christophe GUEGUEN en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

— Sur l’état d’enclave de la parcelle XXX :

Il n’est pas contesté qu’il n’existe aucune servitude de passage constituée par titre au profit de la parcelle XXX sur la parcelle n° 74.

Cependant, il résulte des pièces communiquées aux débats et des constatations de l’expert Y qu’un passage existait depuis la voie publique sur la partie Est de la parcelle n° 74 pour accéder à la parcelle XXX qui a été obstrué en 2007 par M A qui y a fait déposer un volumineux tas de graviers empêchant ainsi les époux G de l’utiliser pour entrer en véhicule dans leur propriété et les contraignant à s’adresser à un voisin, M. X pour être autorisés à emprunter un passage sur les parcelles 70 et 71 appartenant à ce dernier pour accéder à nouveau à la voie publique.

Ainsi, la preuve est rapportée que la cessation de l’état d’enclave invoquée par M. A résulte de sa seule attitude et ne peut être opposée aux époux G, placés devant le fait accompli et qui n’ont bénéficié que d’une simple tolérance de leur voisin M X pour continuer à pouvoir pénétrer en véhicule dans leur propriété.

Le fait qu’un procès-verbal amiable de bornage et de reconnaissance de limites ait été signé le 19 décembre 2011 entre M. X, M. E A et M. et Mme G et qu’ait été annexé un plan signé par les parties au procès-verbal où apparaît un espace bordé de murs sur la partie Nord de la parcelle n° 70, révélant l’existence d’un chemin ou passage ne saurait constituer un titre, l’objet du procès-verbal de bornage étant la seule délimitation des propriétés, en l’absence de convention expresse, constatée par titre, entre les époux G et M. X.

Au surplus la photographie aérienne communiquée par M A (pièce cotée n° 60) permet de vérifier que s’il existe bien un chemin sur les parcelles n° 70 et 71, partant de la voie publique et d’abord bordé de murs puis se poursuivant en diagonale pour aboutir à l’ange Nord Ouest de la parcelle 72 également propriété de M. X, ce chemin de terre constitue avant tout une simple voie traversant jusqu’au fond les parcelles de ce dernier.

Enfin, si l’acte en date du 12 juillet 1978 reçu par Me GUILBART, notaire à Saint-Philibert de Grand-Lieu, par lequel M. et Mme X ont acquis des consorts B les parcelles cadastrées section XXX, 483 et 517 porte mention d’une reconnaissance d’une servitude de passage 'sur le terrain bordant la maison acquise’ et 'profitant à divers', ces mentions ne sont pas suffisamment précises pour, d’une part, connaître l’assiette exacte de cette servitude et, d’autre part, les fonds dominants.

En outre, l’examen de l’extrait de plan cadastral daté du 18 octobre 1991 ne révèle pas l’existence d’un chemin qui selon les représentations habituellement utilisées pour les chemins ne formant pas parcelle et situés dans une parcelle devrait être représenté par deux lignes en pointillés parallèles.

Dès lors, s’il a été porté sur l’extrait de document cadastral communiqué (pièce n° 9) une surcharge en rouge pour représenter un chemin allant jusqu’à l’ancienne parcelle n° 515, cette surcharge qui émane de M A ne peut à elle seule servir de preuve quant à l’implantation de ce chemin jusqu’à la parcelle anciennement cadastrée section XXX devenue propriété de M. et Mme G.

En conséquence, faute que soit établie l’existence d’un second chemin desservant le fonds G, il convient de constater l’état d’enclave existant de la parcelle XXX et de vérifier si l’assiette et le mode de servitude de passage pour cause d’enclave sont déterminés par trente ans d’usage continu.

— Sur la prescription de l’assiette et du mode de la servitude :

Sur l’extrait cadastral de 1991 figure clairement mention de l’existence d’un chemin en arc-de-cercle, matérialisée par une double ligne de traits en pointillé, partant de la voie communale n° 12 au Nord-Est de la parcelle 521 pour aboutir au Nord de la parcelle n° 523. Ce chemin préexistait ainsi à l’acquisition des parcelles n° 523 et 515 par les époux G en 1997.

Ce passage situé entre deux bâtiments aspectant sur la voie publique dont un n’existe plus aujourd’hui et dont l’autre est constitué par l’immeuble de M. E A, se retrouve sur les extraits de l’ancien cadastre napoléonien et desservait tous les bâtiments situés au Sud de la voie publique.

En conséquence, compte tenu de la très longue période séparant ces plans cadastraux, de la confirmation de l’existence de ce chemin sur les photographies aériennes communiquées aux débats, la preuve est rapportée d’un usage continu plus que trentenaire de l’assiette du passage desservant le fonds G et du mode de cette servitude à tous usages.

En conséquence, il convient de réformer le jugement et de dire qu’en raison de l’état d’enclave de la parcelle XXX, celle-ci bénéficie d’une servitude de passage pour accéder à la voie publique par prescription de l’assiette et du mode de la servitude à tous usages.

— Sur le préjudice subi par M. et Mme G :

En privant brutalement ses voisins de l’usage du passage dont ils bénéficiaient, M. E A leur a causé un préjudice de jouissance et les a obligés à utiliser avec l’accord de M. X la propriété de ce denier pour accéder à leur maison d’habitation.

Cette obligation a généré des frais tels que la remise en état du chemin traversant la propriété X qui n’était pas prévu pour des passages réguliers de véhicules.

Aussi, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné M. A à indemniser les époux G de leurs différents préjudices.

Pour autant, les moyens de défense présentés par M. A ne caractérisent pas un abus de son droit de se défendre en justice.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ses dispositions sur les dommages et intérêts.

— Sur la demande d’enlèvement des pierres et obstacles à l’exercice du droit de passage :

En tant que de besoin, M A sera condamné à enlever tout obstacle à l’exercice de la servitude de passage et ce sous astreinte de 100€ par jour de retard pendant trois mois dans un délai de deux mois çà compter de la signification de cet arrêt.

— Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Il convient de confirmer les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et d’accorder une indemnité supplémentaire à M. et Mme G en appel de 1 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

M. E A qui échoue dans ses prétentions sera condamné aux dépens y compris les frais d’expertise sans que toutefois ceux ci comprennent les frais d’huissier dont les constats n’ont pas été ordonnés par le juge et qui sont pris en compte dans les indemnités pour frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Réformant le jugement du tribunal de grande instance de Nantes rendu le 12 juin 2012,

Statuant à nouveau,

Constate l’état d’enclave de la parcelle cadastrée section XXX située au lieu-dit 'La Revarderie’ à Touvois, appartenant à M. et mme G ;

Dit que l’assiette et le mode de la servitude qui s’exerce à tous usages sur la parcelle cadastrée section XXX appartenant à M. E A est déterminée par trente ans d’usage continu ;

Condamne en tant que de besoin, M. E A à enlever tout obstacle à l’exercice à tous usages de la servitude par les époux G ou tous occupants de leur chef, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter d’un délai de deux mois suivant la signification de cet arrêt, pendant trois mois, délai à l’issue duquel il pourra être à nouveau fait droit ;

Confirme le jugement en ses autres dispositions à l’exception des dépens.

Y ajoutant,

Condamne M. E A à verser à M. et Mme G la somme de 1 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour leurs frais irrépétibles en cause d’appel ;

Condamne M. E A aux dépens de première instance et d’appel, y compris les frais d’expertise de M. Y sans que ces dépens incluent les frais de constat d’huissier et dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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