Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 15 avril 2021, n° 18/02916

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 7e ch prud'homale, 15 avr. 2021, n° 18/02916
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 18/02916
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

7e Ch Prud’homale

ARRÊT N°

N° RG 18/02916 -

N° Portalis DBVL-V-B7C-OZ3O

SAS VITALLIANCE

C/

M. Z X

Copie exécutoire délivrée

le : 15.04.2021

à : ME BOURGES

Me BAKHOS

1 ccc le 15.04.2021 à Pôle Emploi

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 AVRIL 2021

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Benoît HOLLEAUX, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

GREFFIER :

Madame A B, lors des débats, et Madame Adeline TIREL, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 15 Février 2021

En présence de Madame D-E F, médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Avril 2021, par mise à disposition au greffe, après prorogation du délibéré initialement fixé au 08 Avril 2021 ;

****

APPELANTE :

La SAS VITALLIANCE prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[…]

[…]

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Avocat postulant du Barreau de RENNES et par Me Natacha LE QUINTREC, Avocat plaidant du Barreau de PARIS

INTIMÉ :

Monsieur Z X

demeurant […]

[…]

comparant à l’audience et représenté par Me Lara BAKHOS de la SELARL PAGES – BAKHOS, Avocat au Barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE

M. Z X a été engagé par la SAS VITALLIANCE en qualité d’auxiliaire de vie, à durée déterminée, et a conclu notamment un contrat de travail à durée déterminée à temps partiel le 1 er juin 2013, puis une succession de CDD pour motif de remplacements ou d’usage jusqu’au 30 septembre 2014.

Le 1er octobre 2014, un contrat à durée indéterminée à temps partiel annualisé a été conclu entre les parties, avec une reprise d’ancienneté au 1er juin 2013.

La convention collective nationale applicable était celle des entreprises de services à la personne.

Le 25 avril 2017, M. X a adressé un courrier à son employeur afin de l’interpeller sur l’application de l’accord collectif d’entreprise signé le 12 décembre 2013, notamment sur l’aménagement du temps de travail et le travail de nuit.

M. X, qui avait saisi le conseil de prud’hommes de Rennes le 29 juin 2017 aux fins notamment de résiliation judiciaire de son contrat de travail, a notifié à l’employeur le 17 septembre 2017, la prise d’acte de rupture de son contrat de travail.

***

M. X a formé à l’audience du conseil les demandes suivantes :

— Dire et juger que l’accord d’entreprise est nul et en toute hypothèse inopposable à M. X

— Dire et juger que l’employeur ne pouvait pas mettre en place l’annualisation et en conséquence condamner l’employeur sur un rappel de salaire sur la base mensuelle de travail de 96,42 heures

— Condamner l’employeur à verser à M. X les rappels de salaires suivants :

* Pour l’année 2014

Taux normal 1497,82 € y ajoutant 149,78 € au titre des congés payés

Majoration 10 % : 33,96 € y ajoutant 3,34 € au titre des congés payés

Majoration 25 % : 122,96€ y ajoutant 12,30 € au titre des congés payés.

* Pour l’année 2015

Taux normal 1266,63 € y ajoutant 12,66 € au titre des congés payés

Majoration 10 % : 90,56 € y ajoutant 9,06 € au titre des congés payés

Majoration 25 % : 43 8,72 € y ajoutant 43,87 € au titre des congés payés.

* Pour l’année 2016

Taux normal 1129,39 € y ajoutant 11,30 € au titre des congés payés

Majoration 10 % : 101,88 € y ajoutant 10,19 € au titre des congés payés

Majoration 25 % 1 1026,l1 € y ajoutant 10,26 € au titre des congés payés.

* Pour l’année 2017

Taux normal 1129,39 € y ajoutant 11,30 € au titre des congés payés

Majoration 10 % : 101,88 € y ajoutant 10,19 € au titre des congés payés

Majoration 25 % : 1026,11 € y ajoutant 10,26 € au titre des congés payés.

— Requalifier le temps de pause en temps de travail effectif et en conséquence dire et juger que M. X est bien fondé à réclamer le règlement des heures de pause selon le détail suivant :

* Mars à septembre 2014 : 1288,32 € y ajoutant 128,83 € au titre des congés payés

* Octobre 2014 : 176,40 € y ajoutant 17,64 € au titre des congés payés

* Novembre 2014 à octobre 2015 : 2450 € y ajoutant 245 € au titre des congés payés

* Dire et juger que l’emp1oyeur a commis du travail dissimulé et en conséquence le condamner à verser la somme de 7874 €.

— Dire et juger que M. X a la qualification de travailleur de nuit et en conséquence condamner l’entreprise au rappel de salaire suivant :

* Mars 2014 à septembre 2014 : 676,37 € y ajoutant la somme de 67,64 € au titre des congés payés

* Octobre 2014 : 92,61 € y ajoutant 9,26 € au titre des congés payés

* Novembre 2014 à septembre 2015 : 1296,54 € y ajoutant

129,65 € au titre des congés payés.

— Dire et juger que M.l\/IARTULZZO n’a pas bénéficié de repos compensateur pour son travail de nuit et en conséquence paiement de la somme de 2000 € à titre de dommages et intérêts

— Dire et juger que l’entreprise n’a pas respecté la convention collective sur le travail de nuit et en conséquence la condamner à verser la somme de 2000 €.

— Dire et juger que le contrat de travail de M. X doit être requalifié à temps plein à compter du 1er juin 2016 et jusqu’au

19 septembre 2017 sur la base de 541,45 € par mois y ajoutant

54,15 € au titre des congés payés ,

— Condamner la société à verser un rappel de salaire de 541,45 € par mois à compter du 1er juin 2016 et jusqu’au 30 août 2017 y ajoutant 54,15 € au titre des congés payés

— Condamner la société à verser un rappel de salaire de 342,92 € pour le mois de septembre

2017 y ajoutant 34,29 € au titre des congés payés

— Dire et juger que la démission de M. X doit produire les effets d’un licenciement

sans cause réelle et sérieuse

— Paiement de la somme de 2972,72 € bruts y ajoutant 297,27 € au titre des congés payés

— Paiement de la somme de 1278,5 9 € au titre de l’indemnité de licenciement

— Paiement de la somme de 12000 € nets de CSG CRDS au titre des dommages et intérêts

— Paiement de la somme de 2000 € en raison de la violation de la convention collective

— Rectification des bulletins de salaire et de l’attestation Pôle Emploi sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 15 ème jour suivant la notification de la décision

— Paiement de la somme de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— Condamner la société aux entiers dépens.

La SAS VITALLIANCE a demandé au conseil de prud’hommes de :

— Juger que M. X n’est pas recevable en sa demande de voir juger nul l’accord collectif d’entreprise

— Juger que M. X n’est pas recevable en sa demande de voir déclarer illégales les dispositions de l’accord collectif d’entreprise sur le travail de nuit et sur l’annualisation du temps de travail

— Juger que les contrats de M. X n’ont pas à être requalifiés de temps partiel à temps plein compte tenu de la validité de l’accord collectif d’entreprise

— Juger que la prise d’acte de rupture de M. X doit s’analyser comme une démission

— Débouter M. X de l’intégralité de ses demandes

— Condamner M. X à payer à la société VITALLIANCE la somme de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— Condamner M. X aux entiers dépens.

Par jugement en date du 29 mars 2018, le conseil de prud’hommes de Rennes a :

— Dit que la prise d’acte de rupture du 17 septembre 2017 produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— Condamné en conséquence la société VITALLIANCE à payer à

M. Z X les sommes suivantes :

* 2 972,72 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

* 297,27 € au titre des congés payés s’y rapportant,

* 1 278,59 € au titre de l’indemnité de licenciement,

* 8 916,00 € nets de CSG et CRDS au titre des dommages intérêts,

* 1 486,00 € en raison de la violation de la convention collective.

— Dit que les conditions de validité relatives à la mise en place de 1'annua1isation du temps de travail ne sont pas remplies.

— Condamné en conséquence la société VITALLIANCE à payer à

M. Z X les sommes suivantes :

A titre de rappels de salaires pour l’année 2014 :

—  1 497,82 € et 149,78 € au titre des congés payés s’y rapportant,

—  33,96 € et 3,34 € au titre des congés payés s’y rapportant,

—  122,96 € et l2,30 € au titre des congés payés s’y rapportant.

A titre de rappels de salaires pour l’année 2015 :

—  1 266,63 € et 12,66 € au titre des congés payés s’y rapportant,

—  90,56 € et 9,06 € au titre des congés payés s’y rapportant,

—  43 8,72 € et 43,87 € au titre des congés payés s’y rapportant.

A titre de rappels de salaires pour l’année 2016 :

—  1 129,39 € et 11,30 € au titre des congés payés s’y rapportant,

—  101,88 € et 10,l9 € au titre des congés payés s’y rapportant,

-1 026,11 € et 10,26 € au titre des congés payés s’y rapportant.

A titre de rappels de salaires pour l’année 2017 :

—  1 129,39 € et 11,26 € au titre des congés payés s’y rapportant,

—  101,88 € et 10,l9 € au titre des congés payés s’y rapportant,

-1 026,11 € et 10,26 € au titre des congés payés s’y rapportant.

— Requalifié le contrat de travail à temps partiel du 1er octobre 2014 en contrat de travail à temps plein, à compter du 1er juin 2016.

— Condamné en conséquence la société VITALLIANCE à payer à

M. Z X les sommes suivantes :

—  3 790,15 € à titre de salaires bruts, pour l’année 2016,

—  3 79,01 € au titre des congés payés s’y rapportant,

—  4 602,32 € à titre de salaires bruts, pour l’année 2017,

—  460,23 € au titre des congés payés s’y rapportant ;

— Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la citation et que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du jugement.

— Ordonné à la société VITALLIANCE de remettre à

M. X de nouveaux bulletins de salaire et une attestation Pôle Emploi conformes aux dispositions du présent jugement.

— Condamné la société VITALLIANCE à payer à M. X la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

— Débouté les parties de leurs autres demandes, fins et conclusions.

— Condamné la société VITALLIANCE aux entiers dépens y compris les frais éventuels d’exécution du présent jugement.

***

La SAS VITALLIANCE a régulièrement interjeté appel de la décision précitée par déclaration au greffe en date du 02 mai 2018.

En l’état de ses dernières conclusions transmises par son conseil sur le RPVA le 07 décembre 2020,

la SAS VITALLIANCE demande à la cour d’appel de :

- Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Rennes du

29 mars 2018 en ce qu’il a fait droit aux demandes de

M. Z X, a condamné la société VITALLIANCE et l’a déboutée de ses demandes.

— Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Rennes du 29 mars 2018 en ce qu’il a débouté Monsieur Z X.

En conséquence, statuant à nouveau de :

— Juger que Monsieur Z X n’est pas recevable en sa demande de voir juger nul ou inopposable l’accord collectif d’entreprise,

— Juger que Monsieur Z X n’est pas recevable en sa demande de voir déclarer illégales les dispositions de l’accord collectif d’entreprise sur le travail de nuit et sur l’annualisation du temps de travail,

— Juger que l’accord collectif est légal,

— Juger que les contrats de Monsieur Z X n’ont pas à être requalifiés de temps partiel à temps plein compte tenu de la validité de l’accord collectif d’entreprise,

— Juger que la prise d’acte de rupture de M. Z X doit s’analyser comme une démission,

— Débouter Monsieur Z X de l’intégralité de ses demandes,

— Condamner Monsieur Z X à payer à la société VITALLIANCE la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner Monsieur Z X aux entiers dépens.

En l’état de ses dernières conclusions transmises par son conseil sur le RPVA le 29 janvier 2021,

M. X demande à la cour de :

— Confirmer pour partie le jugement du conseil de prud’hommes de Rennes du 29 mars 2018 en ce qu’il a fait droit aux demandes de Monsieur X, a condamné la société VITALLIANCE et a débouté la société de ses demandes,

— Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Rennes du

29 mars 2018 en ce qu’il a débouté Monsieur X.

En conséquence, statuant à nouveau :

— Dire et juger que l’accord d’entreprise est nul et en toute hypothèse inopposable à M. X.

— Dire et juger que l’employeur ne pouvait pas mettre en place l’annualisation et en conséquence condamner l’employeur sur un rappel de salaire sur la base mensuelle de travail de 96h42.

— Condamner l’employeur à verser à M. X les rappels de salaire suivants :

Année

Taux normal

Majoration 10%

Majoration 25%

2014

1 497,82 € y ajoutant

33,96€ y ajoutant 3,34€

122,96€ y ajoutant 12,30€ au titre

des congés payés

149,78 € au titre des

congés payés

au titre des congés payés

2015

1 266,63 €y ajoutant

126,6 € au titre des

congés payés

90,56€ y ajoutant 9,06€ au titre

des congés payés

438,72€ y ajoutant 43,87€ au titre

des

congés payés

2016

1 129,39€ y ajoutant

113,0€ au titre des

congés payés

101,88€ y ajoutant 10.19€ au titre

des congés payés

1 026,11€ y ajoutant 10,26€ au

titre des

congés payés

2017

/

90,58€ y ajoutant 9,06€ au titre

des congés payés

798,31€ y ajoutant 79,83€ au titre

des

congés payés

— Requalifier le temps de pause en temps de travail effectif et en conséquence.

— Dire et juger que M. X est bien fondé à réclamer le règlement des heures de pause selon le détail suivant :

' Mars à septembre 2014 : 1288.32 euros y ajoutant 128.83 euros au titre des congés payés

' Octobre 2014 : 176.40 euros y ajoutant 17.64 euros au titre des congés payés,

' Novembre 2014 à octobre 2015 : 2450 euros y ajoutant

245.00 euros au titre des congés payés.

— Dire et juger que l’employeur a commis du travail dissimulé et en conséquence le condamner à verser la somme de 7 874 euros,

— Dire et juger que M. X a la qualification de travailleur de nuit et en conséquence condamner l’entreprise au rappel de salaire suivant :

* Mars 2014 à septembre 2014 : 676.37 euros y ajoutant la somme de 67.64 euros au titre des congés payés,

* Octobre 2014 : 92.61 euros y ajoutant 9.26 euros au titre des congés payés,

* Novembre 2014 à septembre 2015 : 1296.54 euros y ajoutant 129.65 euros au titre des congés payés.

— Dire et juger que M. X n’a pas bénéficié de repos compensateur pour son travail de nuit et en conséquence condamner l’entreprise à 3360 euros d’indemnité de nuit,

— Dire et juger que le contrat de travail de M. X doit être requalifié à temps plein à compter du 1 er juin 2016 et jusqu’au

19 septembre 2017 sur la base de 541.45 euros par mois y ajoutant 54.15 euros au titre des congés payés,

— Condamner la société à verser un rappel de salaires de 541.45 euros par mois à compter du 1 er juin 2016 et jusqu’au 30 août 2017 y ajoutant 54.15 euros au titre des congés payés,

— Condamner la société à verser un rappel de salaire de 342.92 euros pour le mois de septembre 2017 y ajoutant 34.29 euros au titre des congés payés.

— Dire et juger que la démission de M. X doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence condamner l’employeur à verser les sommes suivantes à M. X :

* 2972.72 euros brut y ajoutant 297.27 euros au titre des congés payés,

* 1278.59 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

* 12 000 euros nets de CSG CRDS au titre des dommages et intérêts.

— Condamner l’employeur à 1 486,00 euros en raison de la violation de la convention collective.

— Condamner la société à verser la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile de première instance et confirmer l’article 700 de première instance.

— Condamner la société aux entiers dépens.

***

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du15 février 2021.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l’exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions qu’elles ont déposées et soutenues à l’audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La société Vitalliance fait valoir au soutien de son appel que contrairement à ce que soutient M. X l’accord d’entreprise ne se fonde pas sur la convention collective invalidée par le conseil d’état mais sur la loi ; que l’annulation de certaines dispositions de cette convention collective est donc sans effet quant à l’aménagement du temps de travail et au travail de nuit pour les salariés, et que l’aménagement du temps de travail peut se faire également par accord d’entreprise ; que M. X n’est pas fondé à soutenir que l’accord en lui-même serait nul puisqu’il a été conclu dans le respect des conditions légales régissant sa négociation, que donc seules non l’accord en lui-même mais certaines dispositions pourraient être éventuellement écartées pour nullité, mais qu’il n’y a pas lieu en l’espèce, l’accord ne justifiant pas les mêmes critiques que celles retenues par le conseil d’état ; que l’accord d’entreprise n’est pas davantage nul pour non respect des dispositions légales, en ce qu’il respecte bien la loi du 20 août 2008 ; que l’inapplicabilité soutenue de cet accord en raison du non respect des engagements pris n’est pas davantage fondée, les objectifs énoncés en préambule de l’accord ne constituant pas un engagement ferme ou une condition suspensive à la validité de l’accord.

Cependant, l’extension des dispositions de la convention collective relatives au travail à temps partiel (possibilité d’accomplir des heures complémentaires dans la limite de 33% de la durée du travail du salarié à temps complet), à la possibilité de recourir à un délai de prévenance de 3 jours en cas de modification des horaires en dehors de cas d’urgence, aux conventions de forfait en jours sur l’année et au travail de nuit ont été annulées faute de fixation de garanties, en l’occurrence faute de fixation d’une période minimale de travail continue, de compensations au travail de nuit, de stipulations garantissant le respect des durées maximales de travail et des repos journaliers et hebdomadaires

dans le cadre du forfait, mais également en raison du non respect des mesures exigées par l’article L3122-40 du code du travail.

Force est de constater que l’accord d’entreprise ne prévoit pas davantage de stipulations garantissant le respect des durées maximales de travail et des repos journaliers et hebdomadaires dans le cadre du forfait ; que, s’il prévoit une durée minimale de travail garantie pour les contrats à temps partiel, il ne prévoit pas de garantie de durée minimale continue ; que, s’il prévoit une compensation au travail de nuit, il ne prévoit pas les mesures visées à l’article L3122-40 du code du travail dans sa version alors applicable, concernant notamment l’articulation de l’activité nocturne avec l’exercice de responsabilités familiales et sociales, ou l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment en ce qui concerne l’accès à la formation. Les dispositions de l’accord d’entreprise sont donc nulles comme celles visées par l’accord d’extension de la convention collective pour ce qui est de la convention de forfait annuel, du travail à temps partiel, du travail de nuit et M. X est par conséquent fondé à se prévaloir des dispositions légales sur ces points.

Sur le rappel d’heures en raison de l’absence d’annualisation

Le conseil doit être confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande de M. X tendant à la condamnation de l’employeur au paiement d’heures supplémentaires pour la totalité des heures dépassant la durée initiale de son contrat soit 96,42 heures par mois, et d’heures majorées à 10% et 25%, en application des articles L 3123-14, L3123-17, L3123-19du CT, pour les montants non spécifiquement contestés en leur calcul visés au dispositif, sauf à corriger les erreurs de plume relatives au montant des congés payés afférents, qui sont de 10% des sommes versées au titre des rappels de salaire, soit :

A titre de rappels de salaires pour l’année 2014 (période du 29 juin 2014 au 31 décembre 2014) :

—  1497,832 € et 149,78 € au titre des congés payés afférents,

—  33,96 € et 3,39 € au titre des congés payés afférents,

—  122,96 € et 12,29 € au titre des congés payés afférents.

A titre de rappels de salaires pour l’année 2015 :

—  1 266,63 € et 126,66 € au titre des congés payés afférents,

—  90,56 € et 9,06 € au titre des congés payés afférents,

—  438,72 € et 43,87 € au titre des congés payés afférents.

A titre de rappels de salaires pour l’année 2016 :

—  1 129,39 € et 112,93 € au titre des congés payés afférents,

—  101,88 € et 10,19 € au titre des congés payés afférents,

—  1 026,11 € et 102,61 € au titre des congés payés afférents.

A titre de rappels de salaires pour l’année 2017 :

—  90,56 € et 9,06 € au titre des congés payés afférents,

—  798,31 € et 79,83 € au titre des congés payés afférents.

Sur la requalification du contrat de travail en contrat à temps complet

En mai 2016, M. X, qui a effectué 158 heures de travail, a atteint, et même dépassé, la durée légale du travail à temps plein, alors qu’en application de l’article L3123-17 du CT les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail accomplie au niveau de cette durée, de sorte que le conseil doit être confirmé en ce qu’il a requalifié le contrat à temps plein à compter de juin 2016 et condamné, dans les limites de la demande figurant à son dispositif, la société à lui payer à titre de rappel de salaire les sommes de 541,45 € par mois pour la période du 1 er juin 2016 au 30 août 2017, outre 54,15 € de congés payés afférents par mois, et de 342,92 € pour le mois de septembre 2017, outre 34,29€ de congés payés afférents, conformément aux calculs effectués par le conseil.

Sur le rappel de salaire pour le travail de nuit

C’est à juste titre que M. X, dont la qualité de travailleur de nuit n’est pas contestée, fait valoir que, contrairement à ce qu’a jugé le conseil, l’accord d’entreprise est nul et ne peut lui être appliqué, de sorte qu’il appartient au juge de fixer l’indemnisation due au titre du repos compensateur ; celle-ci doit être fixée au niveau qui avait été jugé convenable par les partenaires sociaux de la branche, l’employeur sera en conséquence condamné à payer à ce titre à M. X les sommes : de 92,61 € outre 9,26 € pour le mois d’octobre 2014, de 1296,54 € outre 129,65 € de congés payés afférents pour la période de novembre 2014 à septembre 2015, de 3360 € à titre de rappel d’indemnité de travail de nuit, pour la période de juin 2014 à octobre 2015, en infirmation du jugement. Il sera débouté de sa demande pour la période de mars 2014 à septembre 2014, prescrite pour la période antérieure au 29 juin 2014 et ne justifiant pas de ses calculs pour la période postérieure.

Sur le rappel de salaire au titre des pauses

M. X critique le jugement qui l’a débouté de cette demande. Il fait valoir qu’il restait à la disposition de l’employeur pendant toute la durée d’intervention au domicile de ses patients, dont l’état ne lui permettait pas de prendre de pause.

Cependant, l’accord collectif contient une disposition relative au temps de pause, indiquant qu’il appartient au salarié de prendre son temps de pause durant la séquence de son travail, et il ne peut en effet être déterminé à l’avance le moment de la prise de pause, qui peut varier en fonction des nécessités de la prise en charge au domicile des patients, hors la présence de l’employeur, le salarié étant seul avec la personne prise en charge. Elle a établi des fiches de présence incluant la mention des temps de pause et demandant au salarié d’alerter, au cas où il ne lui a pas été possible de prendre sa pause, en en précisant notamment les raisons. En l’espèce, M. X a signé les fiches de présence et n’a fait état d’aucune difficulté quant à la prise de ses pauses. En outre, l’état des patients décrit, même si ceux-ci sont atteints de pathologies lourdes, n’implique pas pour autant l’impossibilité de prendre une pause, d’autant que le temps de pause peut être fractionné comme le rappelle à juste titre la société qui produit par ailleurs des attestations de salariés collègues de M. X confirmant que les pauses peuvent être prises, qu’ils peuvent même dormir, n’étant ainsi pas à disposition permanente de l’employeur durant leur service, même avec des patients à pathologie lourde évoqués par l’intimé, lesquels peuvent eux-mêmes, ce qui ressort de l’ensemble des pièces produites aux débats, à certains moments dormir, se reposer ou regarder la télévision ou leur ordinateur. Au regard de l’ensemble des pièces versées aux débats il est établi par l’employeur que M. X a pris ses pauses. Le conseil doit être confirmé en ce qu’il a débouté M. X de sa demande de rappel de salaire sur ce fondement.

Sur l’indemnité pour travail dissimulé

M. X soutient que l’intention coupable de l’employeur peut être établie lorsqu’il a sciemment

omis de mentionner les heures supplémentaires sur les bulletins de paie, ou des circonstances des heures supplémentaires. Cependant

le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire de la seule application d’une convention de forfait illicite, et en l’espèce l’intimé ne rapporte pas la preuve d’une intention de dissimulation de ses heures de travail. Le conseil doit être confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé.

Sur les dommages et intérêts pour violation de la convention collective

M. X fait valoir que la convention collective prévoit des dispositions plus favorables que celles de l’accord d’entreprise sur le travail à temps partiel et que l’employeur ne l’a pas respectée, il approuve le conseil qui a retenu, comme il l’affirmait, que l’employeur ne démontre pas que l’accord avait été renégocié pour être adapté aux nouvelles dispositions. Cependant il indique lui-même qu’un nouvel accord a été négocié et, comme le fait valoir la société appelante, il ne caractérise aucun préjudice au titre du non respect de l’accord collectif, d’autant que celui-ci avait été régulièrement approuvé par les syndicats et la Direccte. Il doit donc être débouté de sa demande indemnitaire, en infirmation du jugement.Celui-ci doit par contre être confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande indemnitaire pour non respect par l’employeur des dispositions conventionnelles sur le travail de nuit, en l’absence de préjudice démontré.

Sur la qualification de la rupture

Il appartient au juge prudhomal de se pronconcer sur la seule prise d’acte, en appréciant les manquements de l’employeur invoqués par le salarié tant à l’appui de sa demande de résiliation judiciaire devenue sans objet qu’à l’appui de sa prise d’acte.

La société Vitalliance critique le conseil en ce qu’il a estimé que le refus persistant de payer les heures complémentaires et l’absence de toute fourniture de travail à partir du 1 er septembre 2017 constituaient un manquement grave aux obligations contractuelles empêchant la poursuite du contrat de travail, alors qu’elle n’avait pas à payer ces heures puisque l’accord d’entreprise est valable, et que par ailleurs c’est M. X lui-même qui n’a plus souhaité travailler pour elle car il avait trouvé un emploi similaire dans une autre entreprise, que le seul manquement pouvant lui être imputable tenait au repos compensateur mais qu’il avait été régularisé et ne pouvait justifier la rupture.

Cependant, le non paiement d’heures supplémentaires, résultant d’une annualisation irrégulière, malgré plusieurs demandes d’explications de la part du salarié, constitue un manquement grave empêchant la poursuite du contrat de travail, rendant justifiée la prise d’acte de rupture, qui doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en confirmation du jugement. Le premier juge doit être confirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à payer à M. X l’indemnité de préavis et les congés payés afférents, l’indemnité de licenciement, dont les montants ne sont pas spécifiquement contestés. Le préjudice que la rupture lui a occasionné doit être réparé, sur le fondement de l’article 1235-3 du CT, compte tenu de l’effectif de l’entreprise et de son ancienneté, de son âge (né en 1979) et des éléments produits pour justifier de son préjudice, par la condamnation de l’employeur à lui payer la somme de 12 000 € nets, sans préjudice des cotisations sociales et fiscales applicables, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en infirmation du jugement sur le quantum retenu, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt pour la partie de la somme excédant 8916 € . Il y a lieu d’ordonner le remboursement des indemnités de chômage versées par Pôle Emploi, dans la limite de 6 mois, en tant que de besoin, le jugement sera complété en ce sens. Il sera confirmé en ses dispositions relatives aux intérêts légaux des condamnations et en ce qu’il a ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés.

Il est inéquitable de laisser à M. X ses frais irrépétibles d’appel pour un montant de 1500 €, qui sera, en sus de la somme allouée en première instance, mis à charge de la société appelante,

laquelle, sucombante, sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement par arrêt mis à disposition au grefe

INFIRME le jugement entrepris sur les sommes allouées à titre de rappels de salaires et congés payés afférents se rapportant aux heures supplémentaires, en ce qu’il a condamné la SAS Vitalliance à payer à M. C X la somme de 8916 € nets de CSG-CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 676,37 € au titre de rappel d’indemnité pour travail de nuit, ainsi que la somme de 1486 € à titre de dommages et intérêts en raison de la violation de la convention collective, et en ce qu’il a débouté M. C X de toute demande au titre de l’indemnité de repos compensateur pour travail de nuit et de l’indemnité de travail de nuit ;

LE CONFIRME en ses autres dispositions ;

STATUANT à nouveau sur les chefs infirmés, et Y AJOUTANT :

'CONDAMNE la SAS Vitalliance à payer à M. C X :

— la somme de 12 000 € nets, sans préjudice des cotisations sociales et fiscales le cas échéant applicables, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt pour la partie de la somme excédant 8916 €.

— A titre de rappels d’heures supplémentaires les sommes de :

pour l’année 2014 (période du 29 juin 2014 au 31 décembre 2014) :

—  1497,832 € et 149,78 € de congés payés afférents,

—  33,96 € et 3,39 € de congés payés afférents,

—  122,96 € et 12,29 € de congés payés afférents.

pour l’année 2015 :

—  1 266,63 € et 126,66 € de congés payés afférents,

—  90,56 € et 9,06 € de congés payés afférents,

—  438,72 € et 43,87 € de congés payés afférents.

pour l’année 2016 :

—  1 129,39 € et 112,93 € de congés payés afférents,

—  101,88 € et 10,19 € de congés payés afférents,

—  1 026,11 € et 102,61 € de congés payés afférents.

pour l’année 2017 :

—  90,56 € et 9,06 € de congés payés afférents,

—  798,31 € et 79,83 € au titre des congés payés afférents.

— A titre de l’indemnité de repos compensateur de travail de nuit les sommes de :

—  92,61 € outre 9,26 € pour le mois d’octobre 2014,

—  1296,54 € outre 129,65 € de congés payés afférents pour la période de novembre 2014 à septembre 2015.

— A titre de rappel d’indemnité de travail de nuit, pour la période de juin 2014 à octobre 2015, la somme de 3360 €.

'ORDONNE, en tant que de besoin, le remboursement par la SAS Vitallaince à Pôle emploi des indemnités chômage versées à M. Z X dans la limite de 6 mois.

'CONDAMNE la SAS Vitalliance à payer à M. C X la somme de 1500 € au titre des frais irrépétibles d’appel.

'DEBOUTE M. C X du surplus de ses demandes.

'DEBOUTE la SAS Vitalliance de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS Vitalliance aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 15 avril 2021, n° 18/02916