Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 3 février 2021, n° 18/00693

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Riom, ch. com., 3 févr. 2021, n° 18/00693
Juridiction : Cour d'appel de Riom
Numéro(s) : 18/00693
Décision précédente : Tribunal de commerce de Cusset, 19 mars 2018, N° 2016005296
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 03 Février 2021

N° RG 18/00693 – N° Portalis DBVU-V-B7C-E62D

VTD

Arrêt rendu le trois Février deux mille vingt et un

Sur APPEL d’une décision rendue le 20 mars 2018 par le Tribunal de commerce de CUSSET (RG n° 2016005296)

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. François RIFFAUD, Président

M. François KHEITMI, Conseiller

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

La société dénommée 'SARL Z A'

SARL immatriculée au RCS de CUSSET sous le […]

[…]

[…]

Représentants : Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

(postulant) et la SCP PORTEJOIE & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND (plaidant)

APPELANTE

ET :

La société CHAUMETTE DUPLEIX BAT

SAS immatriculée au RCS de CUSSET sous le […]

[…]

[…]

Représentant : la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMÉE

La société MJ DE L’ALLIER représentée par Me Pascal RAYNAUD

SELARL à associé unique immatriculée au RCS de MONTLUCON sous le […]

[…]

[…]

agissant ès-qualités de mandataire judiciaire de la société dénommée 'SARL Z A',
SARL immatriculée au RCS de CUSSET sous le […], dont le siège social est sis […]

désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de CUSSET en date du 23 avril 2019

Représentants : Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

(postulant) et la SCP PORTEJOIE & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND (plaidant)

INTERVENANTE VOLONTAIRE

DEBATS : A l’audience publique du 02 Décembre 2020 Madame THEUIL-DIF a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 03 Février 2021.

ARRET :

Prononcé publiquement le 03 Février 2021, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le Service Départemental d’Incendie et de Secours de l’Allier (SDIS) a fait réaliser un nouveau centre. Le département de l’Allier a été investi d’une mission de mandataire du maître d’ouvrage.

La maîtrise d’oeuvre d’opérations a été confiée à une équipe constituée de la SCP d’architectes Y B C, architectes associés et mandataire du groupement, et de bureaux d’études spécialisées dont le BET structure de CHEVIRER LE BAHERS.

La réalisation des travaux de gros oeuvre, le lot n°3, a été confié au groupement d’entreprises société CHAUMETTE-DUPLEIX, mandataire, et la SARL Z A, co-traitant pour un montant de 750 001,07 euros HT soit 897 001,28 TTC aux termes d’un acte d’engagement du 10 août 2010.

Le lot gros oeuvre intégrait les prestations nécessaires à la réalisation du génie civil d’une station d’essai des pompes comportant essentiellement une bâche à eau et un puits étanche prévu à 10,50m de profondeur destinés à tester les capacité d’évacuation des matériels de pompage du SDIS. Cette partie des travaux a été réalisée par la société Z A.

En cours de travaux, des difficultés ont été rencontrées avec l’apparition d’une nappe d’eau souterraine, ainsi que pour l’obturation du radier final car les pompes n’arrivaient pas à évacuer cette arrivée d’eau.

Après interruption du chantier, la SARL Z A a, par courrier recommandé en date du 14 juin 2012, indiqué au maître d’ouvrage et maître d’oeuvre que l’absence d’une étude de sol était à l’origine des désordres constatés.

Par un second courrier, elle a indiqué que les travaux ne pourraient être terminés qu’après acceptation des travaux supplémentaires causés par cet imprévu.

Dans ces conditions, le maître d’ouvrage a proposé une réception sans réserve de ce lot avec une réfaction de 30 486,13 euros HT.

Saisi sur requête de la SARL Z A, le juge des référés du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a ordonné, par décision du 27 novembre 2012, l’organisation d’une mesure d’expertise dont le rapport a été déposé le 12 juillet 2013 afin d’établir notamment les causes des désordres.

Puis, la SARL Z A a saisi au fond le tribunal administratif de Clermont-Ferrand de demandes tendant à obtenir la condamnation du SDIS de l’Allier, du Conseil Général de l’Allier et de la SCPA Y B X à lui payer le prix initial du marché, l’indemniser de son préjudice financier et lui payer le coût des travaux supplémentaires. Le tribunal administratif a, par jugement du 4 novembre 2015, rejeté les demandes à l’encontre du SDIS et du département de l’Allier, et s’est déclaré incompétent pour statuer sur les réclamations indemnitaires que la société Z A avait dirigé contre la société CHAUMETTE DUPLEIX, s’agissant d’un litige de droit privé.

Suivant acte d’huissier en date du 25 novembre 2016, la SARL Z A a fait assigner la société CHAUMETTE DUPLEIX devant le tribunal de commerce de Cusset aux fins de la voir condamner à lui payer, à titre principal la somme de 30 486,13 euros et, à titre subsidiaire, celle de 23 486,13 euros.

Par jugement du 20 mars 2018, le tribunal de commerce de Cusset a débouté la SARL Z A de ses demandes et, condamné celle-ci au paiement d’une indemnité de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Suivant déclaration électronique reçue au greffe de la cour le 30 mars 2018, la SARL Z A a interjeté appel de cette décision, visant l’intégralité de ses dispositions.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 26 juin 2018 au moyen de la communication électronique, la SARL Z A, appelante, demande à la cour, de réformer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :

A titre principal,

— dire que la société CHAUMETTE DUPLEIX a manqué à ses obligations de mandataire du groupement ;

— dire que la société CHAUMETTE DUPLEIX est pleinement responsable de son préjudice, soit le

montant de la réfaction effectuée à tort sur le décompte général du lot n°3 ;

— condamner la société CHAUMETTE DUPLEIX à lui verser la somme de 30 486,13 euros HT, soit la somme de 36 461,41 euros TTC ;

A titre subsidiaire,

— condamner la société CHAUMETTE DUPLEIX à lui verser la somme de 23 486,13 euros HT soit 28 182,13 euros TTC, selon le calcul de l’expert judiciaire, déduisant ainsi la somme de 7 000 euros correspondant aux travaux supplémentaires effectués ;

En tout état de cause,

— débouter la société CHAUMETTE DUPLEIX de l’ensemble de ses demandes, fins conclusions ;

— condamner la même à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Elle fait valoir que la société CHAUMETTE DUPLEIX a engagé sa responsabilité en ayant accepté sans réserve la réfaction effectuée à son détriment, alors qu’elle avait expressément fait connaître son désaccord, de sorte qu’elle ne pouvait ainsi plus contester le décompte général.

Elle soutient que contrairement à ce qui est invoqué par l’intimée, elle n’est pas à l’origine des travaux supplémentaires puisque sa méthode de forage a été validée et actée par la maîtrise d’oeuvre d’une part, et que la découverte de la nappe d’eau souterraine résulte de l’absence d’étude de sol, tel que cela ressort du rapport d’expertise.

A titre subsidiaire, elle soutient que même si sa responsabilité a été retenue par l’expert judiciaire, il n’en demeure pas mois que ce dernier a estimé que la valeur contractuelle des travaux réalisés par elle était due

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 24 juillet 2018 au moyen de la communication électronique, la société CHAUMETTE DUPLEIX, intimée, demande à la cour, de confirmer le jugement et de condamner la SARL Z A à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Elle fait tout d’abord valoir que le maître d’ouvrage public avait connaissance des contestations de la SARL Z A sur le projet de décompte définitif.

Sur les fautes de la SARL Z A, elle soutient que cette dernière a commis des carences dans l’exercice de sa mission et qu’elle est entièrement responsable des défauts constatés en ce qu’elle a mis en oeuvre une méthodologie inadaptée, tel que cela ressort du rapport d’expertise.

Sur le montant de la réfaction, elle fait valoir que c’est uniquement le principe de sa responsabilité que la société Z A contestait et non pas le niveau de réfaction opérée par le maître d’ouvrage public.

Dans ce contexte , elle estime n’avoir commis aucune faute en acceptant le décompte définitif qui lui était notifié au nom du maître d’ouvrage par la maîtrise d’oeuvre. Et ce d’autant plus que le maître d’ouvrage était en droit d’exiger la reprise totale de l’ouvrage, ce qui aurait généré un coût d’un montant largement supérieur à la réfaction.

L’ordonnance de clôture avait été rendue le 4 avril 2019.

Or, par jugement du 23 avril 2019 du tribunal de commerce de Cusset, la SARL Z A a été placée en redressement judiciaire. L’ordonnance de clôture a été révoquée.

Par des conclusions notifiées le 23 juillet 2019 au moyen de la communication électronique, la SELARL MJ de l’Allier est intervenue à l’instance es qualités de mandataire judiciaire de la SARL Z A, et s’en est remis à droit quant au bien fondé des demandes.

La nouvelle ordonnance de clôture est intervenue le 8 octobre 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

— Il sera rappelé que la SARL Z A a saisi le 24 février 2014 le tribunal administratif de Clermont-Ferrand aux fins d’obtenir :

— à titre principal, la condamnation solidaire du SDIS, du département de l’Allier et de la société Y-B-X à lui payer les sommes de 36 461,41 euros, 6 925 euros et 42 704,76 euros au titre respectivement du prix initial du marché, du préjudice financier, et des travaux supplémentaires ;

— à titre subsidiaire, la condamnation de la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX à lui payer les mêmes sommes.

Par jugement du 4 novembre 2015, le tribunal administratif a rejeté la requête de la SARL Z A.

S’agissant des demandes indemnitaires formées à l’encontre du SDIS et du département de l’Allier sur le fondement de leur responsabilité contractuelle, le tribunal les a estimées irrecevables car, nonobstant la circonstance, à la supposer établie, que la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX n’aurait pas transmis le projet de décompte général à la SARL Z A, le décompte général devait être regardé comme étant devenu définitif en application des stipulations de l’article 13.4.4 du cahier des clauses administratives générales, à l’égard du maître de l’ouvrage et à l’égard de l’intégralité des membres du groupement solidaire et ne pouvait ainsi être contesté devant le juge du contrat.

Il a rejeté les mêmes demandes indemnitaires fondées sur la responsabilité quasi-contractuelle et sur la responsabilité délictuelle, considérant sur ce dernier fondement que la SARL Z A, qui alors qu’elle se proposait de creuser le puits selon sa propre méthode, n’avait procédé à aucune diligence en vue de s’informer utilement des particularités, notamment hydrologiques, du sol alluvionnaire dans lequel elle s’apprêtait à forer, n’était pas fondée à soutenir que l’émergence de l’eau à partir de 6 mètres de profondeur lors du creusement du puits de la station de pompage aurait présenté un caractère imprévisible ; que les difficultés rencontrées lors de l’exécution des travaux dont elle avait contractuellement la charge ne pouvaient ouvrir droit à indemnisation au titre des sujétions imprévues.

Enfin, le tribunal s’est déclaré incompétent pour statuer sur les réclamations indemnitaires que la SARL Z A avait dirigé contre la SAS CHAUMETTE DUPLEIX, s’agissant d’un litige de droit privé.

— Devant le juge judiciaire, la SARL Z A sollicite à titre principal la condamnation de la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX à lui payer la somme de 30 486,13 euros HT, soit 36 461,41 euros TTC correspondant au montant de la réfaction, sur le fondement d’un manquement de la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX à ses obligations de mandataire du groupement.

Elle estime que le manquement résulte de l’acceptation sans réserve de la réfaction du prix de 30 486,13 euros par la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX alors que la SARL Z A avait fait

connaître son désaccord, ce qui l’a empêché par la suite de contester le décompte général, faisant valoir que la méthode appliquée pour la réalisation du puits a été validée par le maître d’oeuvre et que la découverte de la nappe d’eau n’est que la conséquence de l’absence d’étude de sol. En outre, ses contestations n’auraient pas été transmises par la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX au maître de l’ouvrage.

L’article 1992 du code civil énonce que le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion.

La SARL Z A s’est engagée le 30 novembre 2010 en co-traitance avec la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX, mandataire du groupement, à réaliser les travaux faisant l’objet du lot n°3 'Gros Oeuvre’ liés au transfert du SDIS 03 dans de nouveaux locaux, d’un montant total de 750 001,07 euros HT.

Au terme de leur engagement, la ventilation du prix devait se faire de la façon suivante :

— SAS CHAUMETTE-DUPLEIX : 51,14 % du marché , soit 389 561,28 euros ;

— SARL Z A : 48,06 %, soit 360 439,79 euros.

Le litige opposant le maître d’ouvrage au groupement vise exclusivement des prestations qui faisaient partie des travaux que devaient réaliser la SARL Z A : les prestations génie civil de la station essai des pompes.

Le CCTP (cahier des clauses techniques particulières) contractuel prévoyait la réalisation d’un puits circulaire de 120 cm de diamètre creusé en deux phases :

— excavation du terrain à la pelle mécanique pour établissement d’une plate-forme au niveau – 3,25 m ;

— mise en place par fonçage (enfoncement au moyen d’une presse hydraulique) d’éléments préfabriqués avec reprise bétonnage entre les éléments et obturation du fond au moyen d’un bouchon en béton coulé au tube plongeur.

La méthode de creusement et d’évacuation des matériaux lors des phases de fonçage n’était pas précisée.

Un étude de sol a été réalisée par la société FONDATEC jusqu’au niveau – 4,50 m, il s’agit d’une mission de reconnaissance géologique destinée au dimensionnement des fondations et voiries, elle ne concerne pas les ouvrages annexes, dont le puits en question. Cette étude détaille la nature du sol jusqu’à une profondeur de 4,50 m et indique au chapitre 'Hydrologie’ : aucune venue d’eau jusqu’à la profondeur de 4,50 m, avec pour réserves : la mission ne permet pas d’estimer les venues d’eau à d’autres périodes de l’année ou lors de fortes pluies, des circulations d’eau superficielles peuvent se produire.

La SARL Z A a opté pour une méthodologie différente :

— terrassement à la pelle mécanique sur la profondeur totale de 12 m ;

— mise en place à la grue d’un élément préfabriqué de section carré de 8 mètres de hauteur ;

— coulage en place de la section supérieure ;

— réalisation du bouchon de fond.

La maîtrise d’oeuvre a validé cette variante sous les réserves suivantes : 'remblais de type Vic remblai, interdiction de présence d’ouvriers dans l’excavation'. Aucune spécification concernant la mise en oeuvre n’a été ajoutée.

Il ressort du rapport d’expertise (ordonnée par le tribunal administratif) établi le 12 juillet 2013 qu’au cours de l’exécution du chantier, l’eau a été trouvée à environ 6 m correspondant au niveau de la nappe phréatique, la rivière Allier étant située à quelques kilomètres du lieu des travaux. La SARL Z A n’est pas parvenue à poursuivre l’excavation et a fait appel à une autre entreprise spécialiste en fondations profondes qui a achevé le creusement par l’intérieur de l’élément préfabriqué jusqu’au niveau prévu (au moyen d’une grue équipée d’une benne preneuse). Les remblais en périphérie ont été réalisés par la SARL Z A, puis la partie supérieure a été coffrée et coulée sur place. Dès cette période, le défaut de verticalité de la partie inférieure pouvait être constaté. Après remblaiement, la SARL Z A a connu de nouvelles difficultés pour réaliser le bouchon étanche d’obturation du fond du puits, ne parvenant pas à éradiquer les venues d’eau et constatant de fortes sous pressions. Après plusieurs tentatives et l’assistance du BET CHEVRIER-LE BAHERS sur la méthodologie à employer pour couler le béton au tube plongeur, elle est parvenue à obturer le fond (pas de venues d’eau significatives dans le puits après vidange et bâchage sur une durée suffisante pendant les opérations d’expertise en février 2013).

Selon l’expert, la méthode retenue par la SARL Z A n’est possible qu’en terrain très compact et en cas de présence d’eau, qu’en terrain insensible aux affouillements. Un moyen de mise en oeuvre permettant de s’affranchir des risques liés à la présence d’eau dans ce terrain alluvionnaire était la méthode du havage avec fonçage des éléments préfabriqués, préconisée initialement par la maîtrise d’oeuvre (finalement reprise par l’entreprise spécialiste en fondations profondes).

L’expert relève par ailleurs que l’étude de sol n’a pas identifié la présence d’eau jusqu’à un niveau de – 4,50 m, mais que des réserves importantes y figuraient. En outre, il estime qu’il n’est pas imaginable qu’une entreprise locale spécialisée dans la réalisation de forages n’ait eu aucun doute sur la présence d’une nappe dans la plaine alluvionnaire de la rivière Allier dont le lit se situe à quelques kilomètres du site.

La SARL Z A pouvait retenir une autre méthode puisque le CCTP mentionnait : 'Nota : La méthode d’exécution est donnée à titre indicatif, l’entrepreneur pourra donner une autre méthodologie de réalisation de cet ouvrage'. La méthode a été validée par la maîtrise d’oeuvre qui a établi de nouveaux plans, mais aucune méthode de mise en oeuvre n’a été préconisée par celle-ci, notamment pour l’excavation.

Aussi, la SARL Z A qui a sollicité cette variante, était entièrement maîtresse de la mise en oeuvre de l’ouvrage, tout en restant engagée vis-à-vis des obligations générales décrites au CCTP. S’il n’est pas contestable qu’aucun élément précis de reconnaissance du sous sol et du niveau de nappe à l’endroit du futur puits n’a été communiqué à la SARL Z A par la maîtrise d’oeuvre, la SARL Z A a pourtant établi une offre, sans aucune demande d’étude complémentaire et en proposant une méthode différente de celle préconisée.

Elle est donc seule responsable de l’ensemble des difficultés rencontrées dans l’exécution des travaux du puits. Elle s’est révélée défaillante dans l’exécution de son marché en mettant en oeuvre une méthodologie inadaptée.

— Il convient dans un second temps d’analyser les positions de chacun des protagonistes intervenus dans ce marché au moment où la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX a accepté la réception sans réserve avec réfaction du prix du puits de 30 486,13 euros.

Le 23 mai 2012, la SARL Z A a adressé un mail à la société Y-B-X, maître d’oeuvre, pour exposer les difficultés rencontrées pour réaliser le puits et se prévaloir de

l’absence d’étude de sol pour les justifier. Elle l’a informée de l’arrêt des travaux concernant le génie civil pour la station d’essai des pompes et qu’elle allait lui facturer les travaux supplémentaires.

Puis le 14 juin 2012, le conseil de la SARL Z A a écrit au BET structure de CHEVIRER LE BAHERS avec copie notamment au Conseil Général, et M. Y architecte, pour rappeler les éléments sus-mentionnés, et solliciter son accord sur les travaux complémentaires à exécuter et leur chiffrage.

Le 23 août 2012, le Conseil Général a fait parvenir au groupement CHAUMETTE-DUPLEIX – Z A la décision de non réception du lot 3 'Gros oeuvre’ avec la mention suivante :

'Station des pompes non achevée.

A réaliser avant le 7 sept 2012. Si à cette date aucune intervention de votre part n’a été entreprise, il sera procédé à un état des lieux contradictoire ce même jour…'.

Une annexe 1 était jointe à ce document mentionnant : 'ouvrages non conformes aux spécifications du marché public, imperfections ou malfaçons (conformément à l’article 41.7 du CCAG travaux).

Station d’essai des pompes non-conformes et non achevée

Remblais non-conformes au pourtour du puits (essais non réalisables au vu du terrain meuble)

Remise en état du terrain au pourtour du puits à reprendre entièrement.'

Par courrier du 7 septembre 2012, le Conseil Général a indiqué au groupement CHAUMETTE-DUPLEIX – Z A qu’il avait été constaté le 7 septembre l’absence d’intervention et le souhait du groupement de ne pas poursuivre la réalisation de l’ouvrage 'avant la rencontre de Mr Z A avec son assureur qui aura lieu le 11 septembre 2012'. Dans ces conditions, le Conseil Général a proposé de ne pas achever l’ouvrage et de réceptionner le lot avec une réfaction sur les prix du marché s’élevant à 30 486,13 euros HT correspondant au montant indiqué dans l’offre pour effectuer cette prestation. Il a été demandé de préciser par retour, si le groupement acceptait cette proposition ou s’il décidait de reprendre la poursuite de ces travaux en indiquant les conditions de leur exécution (conditions devant être validées par le maître d’oeuvre). En l’absence de réaction avant le 13 décembre 2012, la poursuite des travaux serait ordonnée aux frais et risques du groupement, et la résiliation du marché décidée en application de l’article 48.2 du CCAG travaux.

Le 12 septembre 2012, le conseil de la SARL Z A a répondu au Conseil Général qu’il ne pouvait pas exiger la reprise des travaux du puits en l’état, tant qu’une solution technique n’aurait pas été définie ; que depuis ses mails et courriers de mai et juin 2012, aucune diligence n’avait été réalisée ni demandée.

Le 21 septembre 2012, un procès-verbal des opérations préalables à la réception était signé : il était mentionné que les ouvrages étaient conformes à l’exception de ceux indiqués à l’annexe 1 (il s’agissait de la même annexe que celle mentionnée ci-dessus). La SARL Z A portait sur le procès-verbal, la mention suivante :

'L’entreprise Z A, co-traitante de l’entreprise CHAUMETTE-DUPLEIX, refuse et conteste la réfaction du puits'.

Le 26 septembre 2012, le mandataire du groupement, la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX a accepté de signer la proposition du maître d’oeuvre la société Y-B-X, à savoir prononcer la réception en retenant pour l’achèvement des travaux, la date du 13 septembre 2012,

réception prononcée sans réserve avec réfaction acceptée par le mandataire du groupement d’un montant de 30 486,13 euros HT.

Il sera tout d’abord constaté qu’en qualité de représentant du groupement, la SAS CHAUMETTE-DUPLEIX pouvait contractuellement procéder à la signature du procès-verbal de réception avec réfaction du prix. Elle signait toutefois à ses risques et périls et il convient de déterminer si cette décision était conforme à l’intérêt du groupement au moment où la réfaction a été acceptée.

Il a été démontré que la SARL Z A contestait à tort sa responsabilité dans les difficultés rencontrées lors de la réalisation des travaux du puits.

Par ailleurs, contrairement à ce qu’elle soutient, il a également été démontré par l’exposé des différents échanges intervenus que le maître de l’ouvrage avait parfaitement connaissance des contestations de la SARL Z A sur le projet de décompte définitif : cette dernière sollicitait le paiement de la prestation ainsi que les travaux supplémentaires.

L’expert a conclu que le montant des travaux de remise en état et d’achèvement du puits pouvait être estimé à 7 000 euros HT : à l’issue de la réalisation de ces travaux, le puits pourrait être fonctionnel, le défaut de verticalité subsistant n’apparaissant pas préjudiciable à l’usage normale de l’ouvrage.

Toutefois, au moment où la SAS CHAUMETE-DUPLEIX a accepté la réception sans réserve avec réfaction du prix du puits, les travaux de remise en état et d’achèvement n’étaient pas finis, le maître d’ouvrage pouvait imposer la réfection totale de l’ouvrage à cette date. L’ouvrage n’étant ni livré, ni achevé, la SARL Z A avait failli à son obligation de résultat. Le rapport d’expertise a été déposé après que le marché ne soit soldé. La SAS CHAUMETTE-DUPLEIX a accepté la réfaction évitant ainsi une procédure de la part du maître de l’ouvrage dont l’issue était incertaine, alors que le montant concédé était connu.

En acceptant cette réfaction, elle a ainsi agi de manière raisonnable, sachant que le marché global portait sur 750 001,07 euros HT et a ainsi préservé la réputation des deux entreprises membres du groupement.

Elle n’a donc pas commis de faute dans l’exécution de son mandat, le jugement entrepris sera en conséquence confirmé par motifs en partie substitués, en ce qu’il a rejeté toutes les demandes de la SARL Z A.

Partie succombante, la SARL Z A sera condamnée aux dépens d’appel, et à payer à la SAS CHAUMETTE DUPLEIX la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme, par motifs en partie substitués, le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SARL Z A à payer à la SAS CHAUMETTE DUPLEIX la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Z A aux dépens d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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  2. Code civil
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