Cour d'appel de Rouen, Chambre correctionnelle, 11 septembre 2006, n° 05/00521

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. corr., 11 sept. 2006, n° 05/00521
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 05/00521
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Évreux, 18 mai 2005

Sur les parties

Texte intégral

DOSSIER N° 05/00521 N°

ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2006

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE CORRECTIONNELLE

Sur appel d’un jugement du Tribunal de Grande Instance d’EVREUX du 19 Mai 2005, la cause a été appelée à l’audience publique du lundi 12 juin 2006,

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré :

Président : Monsieur PICQUENDAR, Conseiller Faisant Fonction de

Président

Conseillers : Monsieur X,

Madame H-I,

Lors des débats :

Le Ministère Public étant représenté par Monsieur Le Substitut Général BALAYN assisté de Monsieur Y, auditeur de justice

Le Greffier étant Madame J-K

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

Le Procureur de la République près du Tribunal de Grande Instance d’EVREUX

Appelant

ET

A B

né le XXX à XXX

de Maurice et de C D

de nationalité française,

célibataire

vétérinaire sans emploi

demeurant : XXX

XXX

Prévenu, intimé, placé sous contrôle judiciaire depuis le 06 juin 2002

Présent – non assisté

CONTRADICTOIRE

ET

L’ADMINISTRATION DES DOUANES

XXX

Partie civile, appelante

Présente en la personne de Mme Z agent des douanes – non assistée

EN CAUSE

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL

Madame Z a déposé des conclusions, lesquelles datées et contresignées par le greffier ont été visées par le Président puis jointes au dossier.

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

Madame le Conseiller H-I a été entendue en son rapport après avoir constaté l’identité du prévenu,

le prévenu a été interrogé et a présenté ses moyens de défense ,

La partie civile est entendue en ses explications,

Monsieur Y, auditeur de justice a pris ses réquisitions en présence de Monsieur le Substitut Général BALAYN,

le prévenu a eu la parole en dernier,

Puis la Cour a mis l’affaire en délibéré et le Président a déclaré que l’arrêt serait rendu le 11 SEPTEMBRE 2006.

Et ce jour 11 SEPTEMBRE 2006 :

En l’absence du prévenu et de la partie civile, Monsieur le Président PICQUENDAR étant empêché, Madame le Conseiller H-I a signé la minute avec le greffier et a, à l’audience publique, donné seule lecture de l’arrêt en application des dispositions des articles 485 dernier alinéa et 512 du Code de Procédure Pénale en présence du Ministère Public et de Madame L J-K, Greffier.

RAPPEL DE LA PROCÉDURE

Prévention

Par ordonnance d’un des juges d’instruction du Tribunal de Grande Instance d’EVREUX, B A a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel d’EVREUX.

Il lui était reproché d’avoir à PACY-SUR-EURE,

— courant 2002 et jusqu’au 4 juin 2002,

— mis en circulation irrégulière des marchandises soumises à justificatifs d’origine, en l’espèce des médicaments à usage humain, produits anabolisants,

infraction prévue et réprimée par les articles 38-4, 215 bis, 414 et 419 du code des douanes.

— acquis et importé des substances ou préparations classées comme vénéneuses, en l’espèce des produits anabolisants,

infraction prévue et réprimée par les articles L.5132-1, L.5132-6, L.5132-8 et L.5432-1 du code de la santé publique,

— du 5 juin 2002 au 23 juillet 2002,

— mis en circulation irrégulière des marchandises soumises à justificatifs d’origine, en l’espèce des médicaments à usage humain, produits anabolisants,

infraction prévue et réprimée par les articles 38-4, 215 bis, 414 et 419 du code des douanes,

— acquis et importé des substances ou préparations classées comme vénéneuses, en l’espèce des produits anabolisants,

infraction prévue et réprimée par les articles L.5132-1, L.5132-6, L.5132-8 et L.5432-1 du code de la santé publique.

Jugement

Par jugement contradictoire en date du 19 mai 2005, le Tribunal a :

— relaxé B A du chef de mise en circulation de marchandises soumises à justificatifs d’origine,

— déclaré B A coupable d’importation et acquisition de marchandises soumises à justificatifs d’origine,

— condamné B A à la peine de 6 mois d’emprisonnement avec sursis simple,

— ordonné la confiscation des scellés,

— déclaré l’action fiscale engagée par l’administration des douanes irrecevable.

Appels

Par déclarations en date du 25 mai 2005, l’administration des douanes a interjeté appel principal des dispositions douanières de ce jugement et le Ministère Public a formé appel incident des dispositions pénales du jugement.

DÉCISION

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi.

Sur la forme

Au vu des énonciations qui précèdent et des pièces de la procédure, les appels interjetés par l’administration des douanes et le Ministère Public dans les formes et délais des articles 498 et suivants du code de procédure pénale sont réguliers et recevables.

B A a été cité devant la Cour pour l’audience du1er décembre 2005 par exploit d’huissier délivré le 19 juillet 2005 à sa personne.

L’administration des douanes a été citée devant la Cour pour l’audience du1er décembre 2005 par exploit d’huissier délivré le 19 juillet 2005 à personne morale.

A l’audience du 1er décembre 2005, l’affaire a été renvoyée au 23 février 2006 puis au 12 juin 2006. A l’audience du 12 juin 2006, le prévenu est présent et l’administration des douanes est représentée par E Z; il sera donc statué contradictoirement à leur égard.

Au fond

Le 4 juin 2002, F G, auxiliaire vétérinaire particulièrement chargé de la gestion du courrier et des stocks de médicaments au sein du Cabinet vétérinaire VETANIM à PACY-SUR-EURE, était interpellé par les agents des douanes de ROUEN en possession de substances classées dans la catégorie des médicaments anabolisants trouvées dans trois enveloppes adressées à B A, son employeur, contenant des produits en provenance de Thaïlande. Placé en rétention douanière, il précisait que l’activité du cabinet vétérinaire portait sur les animaux d’élevage et sur la vente de produits de nutrition ou médicamenteux.

Les agents des douanes accompagnés des services de gendarmerie de la brigade territoriale de PACY-SUR-EURE se transportaient au cabinet vétérinaire. Placé à son tour en rétention douanière, B A reconnaissait que les produits lui étaient destinés, qu’il les avait achetés sur internet, sans facture en vue d’un usage personnel et savait son achat prohibé.

La secrétaire du cabinet vétérinaire leur remettait des factures concernant les achats de produits anabolisants autorisés sur le territoire français.

Les visites domiciliaires et perquisitions effectuées au cabinet vétérinaire et au domicile de B A n’amenaient la découverte d’aucun autre produit.

Les enveloppes saisies contenaient 34 ampoules de SUSTENON 250 mg, 125 cachets de couleur verte contenus dans un sac plastique portant la mention ANABOL TABLETS et 100 cachets de couleur rose ainsi que des feuilles de couleur verte. L’expertise toxicologique mettait en évidence la présence de testostérone, de méthandiénone et d’oxymétholone, extrêmement dangereux pour la santé, classés comme substances vénéneuses nécessitant une prescription médicale et dont la commercialisation était interdite sur le territoire.

A l’issue des mesures de rétention douanière, F G était laissé libre et B A remis aux services de gendarmerie qui le plaçaient en garde à vue.

B A admettait rapidement avoir fait l’acquisition des produits environ trois semaines auparavant en passant commande par internet auprès d’une société dont il ne se souvenait plus du nom ni du site. Il indiquait les avoir payés par mandat cash adressé à une banque de BANGKOK, pour une somme d’environ 675 euros.

Il affirmait n’avoir envisagé qu’un usage personnel, et non professionnel, afin de reprendre une activité sportive en septembre 2002, qu’ ayant connu d’importants problèmes personnels et professionnels, il avait été soigné pour dépression et avait perdu beaucoup de poids et que ces médicaments devaient lui servir de soutien avant de reprendre tout travail musculaire. Il considérait que les quantités saisies correspondaient à une cure d’un mois à dose minimale et ajoutait avoir puisé dans ses économies et revendu certains équipements sportifs ainsi qu’un véhicule automobile et une moto pour financer son achat en dépit de difficultés financières certaines puisque les dettes de la société étaient chiffrées à 3 millions de francs, qu’i n’avait plus de découvert autorisé et que la banque avait également saisi ses parts sociales, lui interdisant toute distribution de dividendes et toute association avec un autre vétérinaire.

Il contestait toute idée d’acquisition en vue d’une quelconque revente pour résoudre ses ennuis, invoquant son éthique personnelle d’une part et l’ancienneté de ses problèmes d’autre part ; en outre il ne connaissait aucune filière d’approvisionnement et de revente.

Il confirmait enfin avoir été entendu et mis en examen, en 2001, dans le cadre d’une instruction relative à la prescription d’un aliment animal médicamenteux, mais ne savait pas à quel stade en était la procédure.

Il était conscient que l’acquisition de tels produits était illicite, parfaitement informé de la législation en vigueur eu égard à son activité professionnelle.

Une information judiciaire était ouverte le 6 juin 2002 des chefs de mise en circulation irrégulière de marchandises soumises à justificatifs d’origine et importation, transport, acquisition, détention, offre ou cession de substances ou préparations classées comme vénéneuses.

Lors de son interrogatoire de première comparution, il maintenait l’intégralité de ses déclarations et disait ne pas entretenir de relations avec le milieu du culturisme. Le magistrat instructeur mettait B A en examen de ces chefs.

Les investigations alors entreprises sur commission rogatoire ne permettait pas d’établir un lien récent avec les clubs de culturisme du département de l’EURE.

Entendu le 7 juin 2002, F G indiquait n’avoir jamais constaté la présence de produits suspects ou de provenance étrangère dans les stocks du cabinet et n’avoir reçu ce type de paquet qu’une fois, ce que confirmait La Poste. Il se présentait de nouveau quelques heures plus tard en possession d’une nouvelle enveloppe en provenance de THAÏLANDE contenant 100 cachets verts portant la mention 'ANDROLIC', de même le 11 juin et le 23 juillet 2002, il rapportait deux enveloppes contenant 16 ampoules de 'SUSTENON 250 mg', des cachets de 'WINSTROL 5 mg’ et 'd’ANABOL 5 mg'.

Le 17 mai 2004, B A était mis en examen pour ces nouveaux chefs suite au réquisitoire supplétif en date du 3 septembre 2002. Lors de l’interrogatoire, B A se disait surpris, affirmant n’avoir passé qu’une seule commande pour les quantités saisies initialement lui correspondant. Il arguait d’une éventuelle livraison en plusieurs fois avant de préciser ne plus se souvenir de ces commandes.

Par voie de conclusions développées à l’audience, l’administration des douanes demande à la Cour de déclarer B A coupable du délit douanier de détention sans justificatif d’origine de produits anabolisants, médicaments à usage humain, réputé importation en contrebande, prévu par les articles 38-4, 215 bis, 399 et 419 du code des douanes et de condamner B A au paiement à l’Administration des douanes d’une amende de 600 euros.

Le Ministère Public requiert la réformation partielle du jugement s’agissant de la culpabilité afin de retenir B A dans les liens de la prévention intégrale selon les textes visés, la confirmation de la sanction pénale mais l’infirmation des dispositions douanières afin de faire droit aux demandes de l’administration des douanes.

B A invoque le contexte de l’époque des faits qu’il ne conteste pas, ses difficultés tant conjugales que financières. Il précise être bénéficiaire du revenu minimum d’insertion depuis la liquidation judiciaire de son cabinet vétérinaire et vivre chez sa mère qui le soutient dans ses épreuves.

Sur ce,

Il est établi par la procédure et non contesté par B A qu’en deux temps de prévention, et par des commandes faites sur internet à son intention trois semaines environ avant la réception des paquets sous enveloppes, que le prévenu a procédé à l’importation mais également à la mise en circulation ou au transport et la détention de médicaments à usage humain s’entendant de produits anabolisants, classés comme substances vénéneuses et soumis à justificatifs d’origine, adressés par la Poste qui ont été reçus le 4 juin 2002 mais également les 7 juin, 11 juin et 23 juillet 2002 pour des quantités qui dépassent largement la simple cure d’une mois à dose minimale comme le démontre l’expertise toxicologique diligentée.

Il est admis par B A, du reste vétérinaire de profession, qu’il avait une parfaite connaissance des risques pour la santé de ces substances et du caractère prohibé de leur commercialisation sur le territoire français.

La Cour relève qu’en application de l’article 215bis du code des douanes bien visé dans la prévention , ceux qui détiennent ou transportent des marchandises telles que des anabolisants ( mentionnés à l’article 38 -4 du code des douanes) doivent à la première réquisition des agents des douanes produire toute justification de leur origine, qu’aux termes de l’article 419 du code des douanes également visé à la prévention, les marchandises mentionnées à l’article 215 du même code sont réputées avoir été importées en contrebande lorsqu’aucun justificatif de leur origine n’a pu être produit. La Cour retient que B A, seul intéressé à la fraude en sa qualité de commanditaire et destinataire des marchandises et donc initiateur de l’importation, doit être déclaré coupable du délit improprement qualifié de mise en circulation irrégulière de marchandises soumises à justificatif d’origine qui, au vu des articles visés, correspond en réalité dans son intitulé au délit douanier de détention sans justificatif d’origine de produits anabolisants, réputé importation en contrebande.

Le jugement déféré sera donc confirmé sur la déclaration de culpabilité du chef d’acquisitions et importations de produits anabolisants mais infirmé partiellement s’agissant de la relaxe prononcée afin de déclarer B A coupable du délit de détention sans justificatif d’origine de produits anabolisants, réputé importation en contrebande.

Au vu de la nature et du degré de gravité des infractions commises, des renseignements recueillis sur la personnalité et sur les situations personnelles comme professionnelles précaires de B A, la Cour, estimant la peine prononcée par le Tribunal adaptée aux circonstances de la cause et à la personnalité du prévenu, confirme la sanction pénale de 6 mois d’emprisonnement avec sursis.

Il convient de confirmer par ailleurs la mesure de confiscation des substances saisies et placées sous scellés.

Sur l’action douanière

Dés lors que B A est déclaré coupable du délit douanier d’importation en contrebande réprimé par l’article 414 du code des douanes, il convient d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré l’administration des douanes irrecevable en ses demandes et de condamner B A à une amende de 600 euros correspondant à la valeur des marchandises de fraude.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement

Sur la forme

Déclare les appels de l’administration des douanes et du Ministère Public recevables.

Au fond

Confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité de B A du chef d’importation et acquisition de marchandises soumises à justificatifs d’origine, sur la sanction pénale et la mesure de confiscation des scellés,

L’infirmant sur la relaxe et les dispositions douanières,

Déclare B A coupable du délit de détention sans justificatif d’origine de produits anabolisants, réputé importation en contrebande,

Reçoit l’administration des douanes en son action fiscale,

Condamne B A à payer à l’administration des douanes une amende de 600 euros.

La procédure est assujettie à un droit fixe de 120 euros dont B A est redevable.

EN FOI DE QUOI LE PRÉSENT ARRÊT A ÉTÉ SIGNE PAR MADAME LE CONSEILLER H-I ET LE GREFFIER, Madame L J-K.

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Cour d'appel de Rouen, Chambre correctionnelle, 11 septembre 2006, n° 05/00521