Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 23 septembre 2020, n° 18/05204

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. soc., 23 sept. 2020, n° 18/05204
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 18/05204
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Rouen, 5 novembre 2018
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 18/05204 – N° Portalis DBV2-V-B7C-IBJ2

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 23 SEPTEMBRE 2020

DÉCISION

DÉFÉRÉE :

Jugement du TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE ROUEN du 06 Novembre 2018

APPELANTE :

METROPOLE ROUEN NORMANDIE

Le 108

[…]

[…]

représentée par Me Emmanuel WALLE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES :

[…]

[…]

[…]

représentée par Me Maxime DEBLIQUIS, avocat au barreau de ROUEN

URSSAF HAUTE NORMANDIE

[…]

[…]

[…]

représentée par Mme X Y munie d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 01 Juillet 2020 sans opposition des parties devant Madame ROGER-MINNE, Conseillère, magistrat chargé d’instruire l’affaire,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur POUPET, Président

Madame ROGER-MINNE, Conseillère

Madame de SURIREY, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Z A

DEBATS :

A l’audience publique du 01 Juillet 2020, où l’affaire a été mise en délibéré au 23 Septembre 2020

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 23 Septembre 2020, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Monsieur POUPET, Président et par M. A, Greffier.

* * *

Par courrier du 26 novembre 2015, la Métropole Rouen Normandie (la MRN) a informé l’association les Nids, devenue la fondation les Nids (la fondation) qu’elle ne remplissait plus les critères lui permettant de bénéficier de l’exonération du versement destiné au financement des transports en commun prévu par l’article L. 2333-64 du code général des collectivités territoriales (contribution versement transport) à compter du 1er juillet 2016. Par délibération du 23 mars 2016 la MRN a fixé la liste des associations bénéficiant de l’exonération, parmi laquelle ne figurait pas les Nids. Sont concernés les établissements de la fondation suivants : le siège social situé à Mont-Saint-Aignan, la MECS (maison d’enfants à caractère social) située à Duclair, le SEP (service d’éducation et de prévention) et le SPF (service de placement familial) de Rouen, le SEP d’Elbeuf, l’ITEP (institut thérapeutique, éducatif et pédagogique) l’orée du bois de Mont-Saint-Aignan et le centre éducatif de Mont-Saint-Aignan.

Après avoir exercé, le 23 novembre 2016, un recours gracieux à l’encontre du courrier du 26 novembre 2015 qui a été rejeté par « décision » du 20 décembre 2016, la fondation a saisi la commission de recours amiable de l’URSSAF d’une contestation puis le tribunal des affaires de sécurité sociale de Rouen à l’encontre de la décision de rejet implicite de la commission.

Par jugement du 6 novembre 2018, le tribunal a :

— déclaré recevable et bien fondé le recours de l’association,

— dit que l’association et ses établissements de Seine-Maritime remplissaient les conditions exigées par l’article L. 2333-64 du code général des collectivités territoriales pour être exonérés du versement transport,

— condamné la Métropole Rouen Normandie à payer à l’association la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 2 octobre 2019 la juridiction de la première présidente de la cour d’appel de Rouen a ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Par conclusions remises le 30 décembre 2019, soutenues oralement à l’audience, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé de ses moyens, la MRN demande à la cour de :

— la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

— infirmer le jugement,

— dire forclose l’action de la fondation,

— dire irrecevable le recours de la fondation aux fins d’annulation en date du 12 mars 2017,

— débouter la fondation de ses demandes,

— condamner la fondation à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle soutient que les deux courriers dont la fondation demande l’annulation sont insusceptibles de recours au motif que la lettre du 26 novembre 2015 n’avait pour objet que d’informer la fondation de ce qu’elle ne remplissait plus les critères nécessaires à l’exonération de la taxe versement transport et ne constitue pas un acte détachable de la délibération du 23 mars 2016 ; que, de même, le courrier du 20 décembre 2016 rejetant le recours gracieux avait un caractère préparatoire ; que le recours de la société est par suite irrecevable. Elle considère en conséquence que seule la délibération du 23 mars 2016 était susceptible de recours car faisant grief à la fondation qui avait encore le statut d’association et que celle-ci disposait d’un délai de deux mois pour contester cet acte à compter de son entrée en vigueur le 2 avril 2016 à la suite de son affichage, ce qui n’a pas été fait. Sur le fond, elle soutient que la fondation ne remplit pas le critère de l’activité de caractère social pour pouvoir bénéficier de l’exonération du versement transport dès lors que son financement provient majoritairement des prix de journée et qu’elle compte un nombre résiduel de bénévoles par rapport à la masse salariale qui ne participent pas à la mission de protection de l’enfance.

Par conclusions remises le 17 janvier 2020, soutenues oralement à l’audience, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé de ses moyens, la fondation demande à la cour de :

— rejeter les demandes de l’établissement,

— confirmer le jugement,

— condamner l’établissement à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Elle fait valoir que la MRN fait une confusion entre la décision de l’autorité organisatrice de transport acceptant ou refusant le bénéfice de l’exonération de la taxe et la décision établissant la liste des fondations et associations exonérées ; que l’appelante était compétente pour vérifier les conditions d’exonération du versement transport et que son refus de la lui accorder constitue une décision lui faisant grief et par suite susceptible de recours. Elle considère par ailleurs qu’elle est recevable et bien fondée à solliciter l’annulation de la décision du 20 décembre 2016, dès lors que l’illégalité de cette décision de rejet est une conséquence nécessaire de l’illégalité de la décision objet du recours gracieux. Elle soutient également que la décision du 23 mars 2016 par laquelle lui a été refusé le bénéfice de l’exonération de la taxe revêt le caractère d’une décision individuelle qui aurait dû lui être notifiée pour faire courir le délai de contestation et fait observer que la décision du 25 novembre 2015 n’a pu faire courir le délai, faute de mention des voies et délais de recours. Sur le

fond, elle soutient que la MRN ne pouvait se fonder dans sa décision du 20 décembre 2016 sur la circulaire ministérielle du 31 décembre 1976 qui n’a pas fait l’objet d’une publication et qui a été abrogée à compter du 1er mai 2009 ; que son activité a un caractère social, de même que ses établissements ; que le fait que les activités et les établissements soient financés en partie par des fonds publics ou des subventions ne fait pas nécessairement obstacle à leur caractère social ; que son conseil d’administration est exclusivement composé de bénévoles qui participent à la détermination des orientations de son action et qui apportent un soutien à la fondation et aux établissements ; qu’elle accueille les jeunes dans des établissements qui sont ses propriétés privées, de sorte que leur prise en charge passe par le bénévolat.

Par conclusions remises le 20 novembre 2019, soutenues oralement à l’audience, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé de ses moyens, l’URSSAF demande à la cour de :

— la déclarer hors de cause,

— débouter la fondation de ses demandes,

— à titre subsidiaire, infirmer le jugement et confirmer la décision de la commission de recours amiable.

Elle rappelle qu’elle n’est qu’un organisme payeur chargé du recouvrement de la contribution versement transport et qu’elle n’est pas compétente pour statuer sur le statut des associations éligibles à l’exonération de cette contribution. Elle fait valoir que puisque la MRN a estimé que la fondation ne remplissait pas les critères pour être exonérée du versement transport, elle n’avait pas à faire droit à la demande d’exonération de la fondation.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité du recours :

À défaut d’information individuelle de la fondation de ce qu’elle n’a plus droit à l’exonération de la contribution versement transport avec mention des voies et délais de recours contre cette décision, la forclusion de l’article R. 142-1 du code de la sécurité sociale ne peut être opposée.

Il ressort des pièces du dossier que seul le courrier du 20 décembre 2016 adressé à la fondation, qui maintient la décision tendant au refus d’exonération au titre de la contribution versement transport, précise qu’un recours peut être formé devant la commission de recours amiable dans le délai de deux mois de sa notification.

C’est en conséquence à juste titre que le tribunal a déclaré recevable le recours portant sur le point de savoir si la fondation remplit ou non les conditions pour bénéficier d’une exonération de la contribution, après avoir constaté que la commission de recours amiable de l’URSSAF avait été saisie dans les deux mois de la notification du courrier du 20 décembre 2016 et que la juridiction l’avait été dans le délai de contestation de la décision implicite de rejet.

Sur la demande d’exonération :

En vertu de l’article L. 2333-64 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015, les fondations et associations reconnues d’utilité publique à but non lucratif dont l’activité est de caractère social ne sont pas assujetties au versement destiné au financement des transports en commun.

Ainsi que l’a relevé le tribunal, il n’est pas contesté que les deux premières conditions sont remplies. S’agissant de la troisième, il appartient à la fondation qui entend conserver le bénéfice de

l’exonération du versement de transport de rapporter la preuve du caractère social de l’activité de chacun de ses établissements. Le caractère social ne se déduit pas de son seul objet, mais dépend essentiellement des conditions dans laquelle la fondation exerce son activité, au regard notamment du concours de bénévoles, de la gratuité ou modicité des tarifs, du recours à des subventions ou des aides extérieures pour le financement.

La fondation a principalement pour vocation d’offrir un service de prévention, d’éducation, de soins, de médiation et d’insertion au profit des enfants et des familles en difficulté dans les départements de la Seine-Maritime et de l’Eure. Elle propose ainsi des places d’accueil dans plusieurs établissements, met en 'uvre des mesures d’accompagnement éducatives et d’enquête sociale ou d’investigation, assure des missions d’éducation en instituts spécialisés pour les enfants affectés de troubles psychologiques ou de troubles de l’apprentissage, prend en charge des adolescents délinquants dans des centres éducatifs fermés et assurent des missions d’insertion sociale par le logement au bénéfice de jeunes adultes en difficulté.

Il importe peu que les tâches accomplies par les bénévoles aient un caractère administratif dès lors qu’elles participent au fonctionnement de l’association ou de la fondation.

La fondation indique que son conseil d’administration est composé exclusivement de bénévoles qui participent à la détermination des orientations de son action et qui lui apportent un soutien ainsi qu’à ses établissements par l’intervention de type : aide aux devoirs, activité, insertion professionnelle, animation de groupes de réflexions, ambassadeur de l’association, développement de réseaux. Dans sa brochure d’information qui ne concerne pas exclusivement la Seine-Maritime et l’Eure, il est écrit que 18% des bénévoles interviennent au titre du soutien aux établissements et 82% au titre du soutien à l’association. Elle ne conteste pas les données chiffrées fournies par la MNR suivant lesquelles elle dispose de 77 bénévoles pour 890 salariés ; la MECS de Duclair et le SEP d’Elbeuf ne comprennent aucun bénévole, le SEP de Rouen en comprend 12 et les ITEP et centres éducatifs de Mont-Saint-Aignan en comptent 32.

La fondation ne fournit aucun élément permettant d’apprécier établissement par établissement le nombre de salariés et par suite la proportion de bénévoles par rapport aux salariés. Elle ne précise pas davantage si des bénévoles interviennent auprès de la MECS de Duclair et du SEP d’Elbeuf, alors que ces établissements n’en comptent aucun. Le volume représenté par les interventions des bénévoles, notamment au titre de l’aide aux devoirs, n’est pas mentionné.

Il en ressort que la fondation ne rapporte pas la preuve que chacun des établissements concernés par la demande d’exonération a une activité de caractère social au sens de l’article L. 2333-64 du code général des collectivités territoriales, alors que le nombre global de bénévoles par rapport à l’effectif des salariés est faible et qu’il n’est pas établi qu’ils participent au fonctionnement de l’établissement.

Il y a lieu d’infirmer le jugement, de débouter la fondation de sa demande d’exonération, sans qu’il y ait lieu de mettre l’URSSAF hors de cause, de condamner la fondation aux dépens et de la débouter de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile. Il serait inéquitable de laisser à la charge de la MRN l’intégralité de ses frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement en ce qu’il a déclaré le recours de la fondation recevable ;

L’infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau :

Déboute la fondation de ses demandes ;

Dit n’y avoir lieu de mettre l’URSSAF hors de cause ;

Condamne la fondation à payer à la MRN une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la fondation aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Cour d'appel de Rouen, Chambre sociale, 23 septembre 2020, n° 18/05204