Cour d'appel de Rouen, Chambre premier président, 1er septembre 2021, n° 21/00130

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. premier prés., 1er sept. 2021, n° 21/00130
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 21/00130
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Évreux, 18 juillet 2021
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 21/00130 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I3G4

COUR D’APPEL DE ROUEN

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 01 SEPTEMBRE 2021

DÉCISION CONCERNÉE :

Décision rendue par le tribunal de commerce d’Evreux en date du 19 juillet 2021

DEMANDERESSE :

Sas MDI TECHNOLOGIES

[…]

[…]

représentée par Me Vincent MOSQUET de la Selarl LEXAVOUE NORMANDIE, avocat postulant du barreau de Rouen et Me Eléonore LAB SIMON, avocat plaidant du barreau de Rouen

DÉFENDEURS :

Monsieur A Y Maître A Y, ès qualités de liquidateur des sociétés MDI PROCESS et MDI TECHNOLOGIES

[…]

[…]

représenté par Me Camille PERCHERON de la Scp STREAM AVOCATS AND SOLLICITORS, avocat au barreau du Havre

Selarl FHB prise en la personne de C X, ès qualités d’administrateur judiciaire des sociétés MDI PROCESS et MDI TECHNOLOGIES

[…]

[…]

représentée par Me Camille PERCHERON de la Scp STREAM AVOCATS AND SOLLICITORS, avocat au barreau du Havre

PARQUET GENERAL

[…]

[…]

auquel l’affaire a été régulièrement communiquée

DÉBATS :

En salle des référés, à l’audience publique du 17 août 2021, où l’affaire a été mise en délibéré au 01 septembre 2021, devant Mme Christine FOUCHER-GROS, présidente de chambre à la cour d’appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont attribuées,

Assistée de Mme Catherine CHEVALIER, greffier,

DÉCISION :

Contradictoire

Rendue publiquement le 01 septembre 2021, par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

signée par Mme FOUCHER-GROS, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.

*****

Par jugement 28 juin 2018, le tribunal de commerce d’Evreux a ordonné la cession de l’activité de la société AMG Technologies au profit de la Sas Fininco ou toute personne morale substituée. Au jour de la signature de l’acte de cession, la société Fininco s’est substituée la société MDI Process.

La société MDI Process est une Sas créée par cinq actionnaires dont la société MDI Technologies.

Par jugement du 10 juin 2021, le tribunal de commerce d’Evreux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la Sas MDI Process, et nommé M. E F en qualité de juge commissaire, Me A Y en qualité de mandataire judiciaire et la Selalr FHB représentée par Me X administrateur judiciaire.

Par acte du 30 juin 2021, la Selarl FHB a fait assigner la Sas MDI Technologies devant le tribunal de commerce d’Evreux aux fins d’extension de la procédure de redressement judiciaire.

Par jugement du 19 juillet 2021, ce tribunal a converti en liquidation judiciaire la procédure de redressement judiciaire.

Par jugement du 19 juillet 2021, le tribunal de commerce d’Evreux a, entre autres dispositions, étendu la liquidation judiciaire de la Sas Midi Process à l’encontre de la Sas Midi Technologies.

La société MDI Technologies a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 23 juillet 2021.

Par acte du 29 juillet 2021 la Sas MDI Technologies a fait assigner la société FHB, Me Y et le ministère public aux fins de voir :

— suspendre l’exécution provisoire de droit attachée au jugement rendu le 19 juillet 2021 par

le tribunal de commerce d’Evreux;

— condamner la Selarl FHB ès qualités à lui payer la somme de 1 500 ' sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la Selarl FHB ès qualités aux dépens, qui seront employés en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire de la société MDI Process.

Dans ses conclusions développées à l’audience, elle soutient que :

* le tribunal a statué ultra petita en étendant la liquidation judiciaire alors qu’il n’était saisi que d’une demande d’extension de la procédure de redressement judiciaire ;

* il a retenu des moyens de fait qui n’avaient pas été débattus contradictoirement ;

* l’assignation à l’audience du 15 juillet 2021 a été signifiée le 30 juin précédent, de sorte que le délai de quinze jours francs prévu à l’article 856 du code de procédure civile n’a pas été respecté ;

* le jugement ne caractérise pas le caractère fictif de la société MDI Process et a retenu à tort l’existence de flux anormaux;

* les conséquences de l’exécution provisoire conduiront à court terme à la disparition de la société MDI Technologie.

La Selarl FHB prise en la personne de Mme X et Me Y demandent à la juridiction de :

— déclarer « l’appel » (sic) formé par la société MDI Technologies irrecevable comme étant fondé sur un texte inapplicable à la cause ;

— dire que les frais et dépens de l’instance seront employés en frais privilégiés de procédure ;

Subsidiairement ;

— débouter la société MDI Technologies de sa demande ;

— dire que les frais et dépens de l’instance seront employés en frais privilégiés de procédure.

Dans les conclusions développées à l’audience ils soutiennent que :

* la demande a été présentée sur le fondement de l’article 514-3 du code de procédure civile inapplicable à l’espèce ;

* la question de l’extension de la liquidation judiciaire aux lieu et place de l’extension de la procédure de redressement a été débattue à contradictoirement ;

* le jugement n’est aucunement motivé sur la base de pièces qui n’auraient pas été débattues contradictoirement ;

* l’absence de respect du délai de quinze jours est un vice de forme qui n’a pas causé de grief à la société MDI Technologies ;

* c’est sans commettre d’erreur que le tribunal a retenu l’existence de flux anormaux et le caractère fictif de la société MDI Process.

Le ministère public a requis l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement du 19 juillet 2021.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de l’assignation :

Aux termes de l’article 514-3 du code de procédure civile : « En cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.(…) »

Aux termes de l’article R661-1 du code de commerce: « Les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire sont exécutoires de plein droit à titre provisoire.

Toutefois, ne sont pas exécutoires de plein droit à titre provisoire les jugements et ordonnances rendus en application des article L622-8, L626-22, du premier alinéa de l’article L642-20-1, de l’article L651-2, des articles L633-1 à L663-4 ainsi que les décisions prises sur le fondement de l’article L663-1-1 et les jugements qui prononcent la faillite personnelle ou l’interdiction prévue à l’article L653-8.

Les dispositions des articles 514-1 et 514-2 du code de procédure civile ne sont pas applicables.

Par dérogation aux dispositions de l’article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d’appel, statuant en référé, ne peut arrêter l’exécution provisoire des décisions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article que lorsque les moyens à l’appui de l’appel paraissent sérieux.

L’exécution provisoire des décisions prises sur le fondement de l’article L. 663-1-1 peut être arrêtée, en outre, lorsque l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. Dès le prononcé de la décision du premier président arrêtant l’exécution provisoire, le greffier de la cour d’appel en informe le greffier du tribunal. »

Le jugement du 19 juillet 2021 est exécutoire de plein droit, et la demande d’arrêt de l’exécution provisoire ressortit des dispositions de l’article R661-1 du code de commerce. Mais dès lors que la société MDI allègue dans son assignation l’existence de moyens sérieux de réformation ou d’annulation du jugement, ainsi qu’il est exigé par l’article R661-1 de ce code, son assignation est recevable, nonobstant l’erreur sur le texte visé.

Sur l’arrêt de l’exécution provisoire :

Sur les moyens de procédure :

La nullité de l’acte introductif d’instance pour avoir été délivré au mépris du délai de quinze jours prévu à l’article 856 du code de procédure civile a été soulevée devant le tribunal qui a

répondu qu’il s’agissait d’un vice de forme et qu’il n’était justifié d’aucun grief.

L’absence de respect du délai de quinze jours n’est pas au nombre des vices de fond énumérés limitativement à l’article 117 du code de procédure civile. Il ressort du jugement du 19 juillet 2021 que la société MDI Technologies était présente, représentée par M. Z, lui même présent, et qu’ils ont exposé leurs moyens de défense sur les faits invoqués au soutien de la demande d’extension. Dès lors, le moyen tiré de cette nullité de procédure n’est pas un moyen sérieux.

Dans l’exposé des demandes, il est rappelé que, compte tenu de la conversion en liquidation judiciaire de la Sa MDI Process devant intervenir concomitamment à la décision statuant sur la demande d’extension Me X a sollicité l’extension de la liquidation judiciaire de la Sas MDI Process à la société MDI Technologies. Ainsi, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait statué ultra petita n’est pas un moyen sérieux.

Dans les motifs de sa décision, après avoir rappelé que M. Z a prétendu qu’il existe des conventions de trésorerie entre les sociétés MDI Process et MDI Technologies mais qu’il n’avait pu les obtenir de l’expert comptable ; que Me Y a indiqué en avoir fait la demande à l’expert comptable mais sans succès, le tribunal a retenu qu’à supposer que ces conventions existent, elles doivent se trouver entre les mains des sociétés concernées. Il n’apparaît pas, au stade du référé, qu’en statuant ainsi, le tribunal a manqué au respect du contradictoire. Par ailleurs, il ne ressort pas des motifs du jugement que le tribunal ait fondé sa décision sur la plaquette des comptes 2019, produite à l’audience sans avoir été débattue contradictoirement. En tout état de cause, la société MDI Technologies avait la possibilité de demander au tribunal d’écarter cette pièce, ce qu’il n’a pas fait. Il résulte de tout ceci que le moyen tiré du non respect du principe du contradictoire n’est pas sérieux.

Sur les moyens de fond :

En application de l’article L621-2 alinéa 2 du code de commerce, la procédure collective ouverte peut être étendue à une ou plusieurs personnes en cas de confusion, de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale.

La confusion du patrimoine suppose que soit démontrée l’imbrication des comptes et des patrimoines ou l’existence de relations financières anormales correspondant à des transferts patrimoniaux effectués par action ou par abstention, l’anormalité résidant notamment par l’absence de contrepartie aux transferts patrimoniaux.

Le tribunal de commerce a retenu dans son jugement du 19 juillet 2021 que la société MDI Process était dépourvue d’autonomie économique et financière et qu’il existait des relations financières anormales entre MDI Technologies et MDI Process.

La société MDI Technologies soutient que :

— elle est présidente de la société MDI Process ;

— elle a repris la clientèle de la société MDI Process de façon transitoire car celle-ci ne répondait pas, dans le secteur de l’industrie de pointe aux conditions de référencement des sous traitants ;

— les virements intervenus au cours des mois d’avril à juin 2021 ont été effectués par la société holding MDI Technologies au bénéfice de sa filiale MDI Process.

La Selarl FHB, en qualité de d’administrateur judiciaire de la société MDI Process produit les

relevés du compte bancaire de cette société pour la période du 31 mars au 30 juin 2021 qui font apparaître que ce compte a été approvisionné principalement, voire exclusivement par les virements réguliers de MDI Technologies, à l’exception des virements des services fiscaux, de Pôle Emploi, et de trois virements de MDI Energie.

Les statuts de la Sci MDI Process ont été déposés le 16 juillet 2018. Il ressort du Grand livre des comptes généraux de cette société qu’elle a commencé son activité le 1er juillet 2018. La société MDI Technologie en est la présidente et admet en être le seul client. Au stade du référé, il apparaît de ces explications que la société MDI Process, a été créée pour reprendre l’activité de la société AMG Technologies mais qu’elle n’avait pas la possibilité de conserver personnellement les contrats à défaut d’avoir trois années d’exercice, et que de ce fait, la clientèle a été reprise temporairement par MDI Technologies. Mais la société MDI Technologies ne justifie ni d’une convention de nature à démontrer l’existence d’une reprise temporaire, ni de dispositions prises pour la restitution de clientèle en vue de la cession du fonds de commerce de la société en liquidation.

Elle produit les comptes et bilans de MDI Process pour l’année 2020 mais sans aucune certification et ne produit pas ses propres comptes. Le Grand livres des comptes généraux provisoires de la société MDI Technologies ne donne pas d’explication sur les contreparties des virements faits à MDI Midi Process. La facture de management fees de janvier à décembre 2020 fait état d’un solde de 40 806,70 ' « selon convention du 01.07.2018 », mais la société MDI Technologies ne produit pas cette convention. Par ailleurs il n’est justifié d’aucune convention de trésoreries entre les deux sociétés.

Il appartiendra à la cour, saisie de l’appel, d’apprécier le bien fondé des moyens ainsi développés au regard de l’ensemble des éléments qui lui seront soumis. Mais au stade du référé, il n’apparaît pas que la qualité de présidente de la société MDI Technologies permette à elle seule de justifier ces mouvements financiers, et les moyens n’apparaissent pas suffisamment sérieux pour justifier l’arrêt de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par ordonnance rendue publiquement et contradictoirement ;

Déclarons recevable l’action de la Sas MDI Technologies diligentée par l’assignation du 29 juillet 2021 ;

Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire attaché au jugement du du 19 juillet 2021 ;

Disons que les dépens de la présente ordonnances seront employés en frais privilégiés de procédure de liquidation judiciaire de la société MDI Process ;

Déboutons la société MDI Technologies de sa demande au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE DE CHAMBRE,

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