Cour d'appel de Toulouse, 16 octobre 2012, n° 11/01369

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 16 oct. 2012, n° 11/01369
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 11/01369
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulouse, 11 mars 2010, N° 08/2360

Sur les parties

Texte intégral

16/10/2012

ARRÊT N° 455/12

N°RG: 11/01369

XXX

Décision déférée du 12 Mars 2010 – Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE – 08/2360

Mme Z

B Y

C/

XXX

INFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

3e Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SEIZE OCTOBRE DEUX MILLE DOUZE

***

APPELANT

Monsieur B Y

lieu dit Sudre

XXX

représenté par Me Bernard DE LAMY (avocat au barreau de TOULOUSE)

assisté par Me Nicole SABIANI (avocat au barreau de TOULOUSE)

INTIME

XXX

XXX

XXX

représenté par la SCP DESSART SOREL DESSART (avocats au barreau de TOULOUSE)

assisté par Me IES PEISSE DUPICHOT ZIRAH ET ASSOC (avocat au barreau de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 05 Juin 2012 en audience publique, devant la Cour composée de :

B. LAGRIFFOUL, président

M. A, conseiller

M. O. POQUE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par M. A, conseiller, pour le président, et par D. FOLTYN, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

B Y est propriétaire depuis octobre 2000 d’une villa située à Tarabel .

Se plaignant d’être importuné par les tirs de l’XXX située à proximité il a saisi le président du tribunal de grande instance de Toulouse statuant en référé pour obtenir une expertise qui a été ordonnée par décision du 29/03/2007.

Cette expertise a été déposée le 16/05/2008.

Au vu des conclusions du rapport B Y a , par acte d’huissier du 20/06/2008, fait citer l’XXX devant le tribunal de grande instance de Toulouse pour voir mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour mettre fin aux nuisances constatées et obtenir des dommages et intérêts .

Par jugement du 12/03/2010 le tribunal de grande instance a :

— condamné l’XXX à payer à B Y les sommes de 5600 € à titre de dommages et intérêts et de 1500€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— condamné l’XXX aux dépens

B Y a relevé appel de la décision le 30/03/2011.

L’ordonnance de clôture est en date du 7/05/2012.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions du 22/06/2011 B Y sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a jugé que les troubles étaient anormaux et qu’il n’y avait pas lieu à application de l’article L112-16 du code de la construction et de l’habitation .

Pour le surplus il sollicite l’infirmation du jugement et demande à la cour de:

— ordonner à l’XXX de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour mettre fin aux nuisances constatées et ce conformément à ce que préconisera un bureau d’études spécialisé dans les études acoustiques qui pourra s’adjoindre un spécialiste des parcours de chasse et que la cour commettra spécialement à cet effet

— condamner l’XXX à régler la somme de 48800 € à titre de dommages et intérêts qui sera réactualisée dans le futur jusqu’à ce que l’XXX mette en place des mesures efficaces qui mettront fin à l’anormalité des nuisances qui excèdent les inconvénients normaux de voisinage

— condamner l’XXX à régler les dépens et frais d’expertise

— condamner l’XXX à payer 4500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Il soutient que les nuisances sont caractérisées , qu’elles n’ont pas cessé et qu’une solution technique devra être trouvée . Il expose que dès lors c’est à tort que le premier juge a rejeté sa demande de condamnation de l’XXX à mettre en oeuvre des moyens nécessaires pour faire cesser les nuisances.

Il indique par ailleurs que les dommages et intérêts fixés par le tribunal sont insuffisants par rapport au préjudice subi et demande par conséquent qu’il soit fixé à 48800 €, somme qu’il demandait initialement , et à réactualiser jusqu’à ce que l’XXX mette en place des mesures efficaces destinées à mettre fin aux troubles .

L’XXX réplique dans ses conclusions du 22/08/2011 qu’il convient de réformer le jugement et de débouter B Y de ses demandes .

Subsidiairement il sollicite la réduction des dommages et intérêts à la somme de 1400 € et en toute hypothèse réclame 6000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Elle conteste le rapport d’expertise car d’une part la campagne d’enregistrement n’a pas été réalisée par l’expert dans des conditions météorologiques et matérielles réglementaires et d’autre part la méthodologie retenue pour le mesurage n’est pas conforme aux dispositions de la norme AFNOR NF S 31-010 complétée par le fascicule FDS 31-160 , objet d’un arrêté ministériel en date du 27/11/2008 , estimant qu’une application conforme des normes en vigueur aurait conduit à la constatation du respect des dispositions réglementaires .

Elle fait valoir que son activité n’occasionne aucun trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage , que dès lors B Y n’a subi aucun préjudice , qu’en toute hypothèse cette activité existait depuis 1971, que B Y a pu se rendre compte de son existence au moment de son installation , et que cette activité s’est toujours exercée conformément aux règles en vigueur .

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’article 544 du code civil dispose que ' la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue , pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.'

Toutefois le respect des dispositions légales n’exclut pas l’existence éventuelle de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage.

En l’espèce , l’expert désigné le 29/03/2007, a effectué le mesurage des bruits en appliquant le décret du 31/08/2006 et l’arrêté du 5/12/2006.

Il a conclu que toutes les émergences dépassaient la valeur réglementaire et qu’elles n’étaient donc pas conformes , indiquant que le fait d’entendre très nettement un tir toutes les 3 à 5 secondes ne permet pas de jouir paisiblement du jardin et de la terrasse .Il a précisé que dans un après midi il peut y avoir 4000 détonations équivalentes chacune à un petit pétard tiré à 20 mètres.

Il apparaît que les observations développées par l’ intimée dans ses conclusions l’ont déjà été lors des opérations d’expertise sous forme de dires auxquels l’expert a répondu en disant que:

* la norme FD S 31-160 revendiquée par l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE est en contradiction avec l’arrêté du 5/12/2006 relatif aux modalités de mesurage des bruits de voisinage

* pendant 95,9% des conditions météorologiques d’une année les émergences dépassent les valeurs réglementaires

* il y a une grande différence technique entre le mode de calcul du bruit ambiant à partir de l’arrêté du 5/12/2006 et le fascicule de documentation FD S 31-160 puisque dans le premier cas il n’est calculé que sur les périodes de présence des tirs et que dans le deuxième cas il est moyenné sur toute la période d’ouverture du ball -trap. Il précise que le fascicule de documentation FD S 31-160 ne prend pas en compte le caractère répétitif du bruit comme le demande le décret du 31/08/2006 et le caractère impulsionnel comme décrit dans la norme NF S 31-010. Il en déduit qu’il maintient sa méthode de calcul du bruit ambiant .

Dans ces conditions l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE est mal fondée à développer à nouveau les mêmes critiques et la cour adoptera l’analyse technique de l’expert.

Ce dernier ajoute que si le fascicule de documentation préconisé par l’intimé s’impose un jour , les émergences du ball-trap seront peut être conformes à ce texte mais en raison du caractère répétitif et impulsionnel des tirs avec un niveau sonore important , ceux ci créeront toujours une nuisance sonore dans le jardin de B Y.

Selon les explications fournies par l’intimée dans ses conclusions il semblerait que celà soit le cas à présent puisque l’arrêté du 27/11/2008 rejoint les dispositions du fascicule FDS 31-160 pour le mesurage des bruits de tir.

En tout état de cause cette modification démontre que lorsque l’expert a effectué ses investigations (son rapport a été déposé le 16/05/2008) c’est à juste titre qu’il a effectué ses mesures par rapport à l’arrêté du 5/12/2006 ce qui met en évidence jusqu’à la fin de l’année 2008 un non respect des dispositions réglementaires par l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE .

Les troubles du voisinage sont dès lors démontrés pour la période couvrant les années 2001 à 2008.

Pour la période postérieure , les calculs établis par l’expert ne peuvent , compte tenu des nouvelles mesures applicables , servir de référence pour démontrer que l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE ne respecte pas les dispositions réglementaires .

Néanmoins les constatations effectuées par l’expert et les témoignages recueillis par B Y sous forme d’attestations ( H.Froment, T.Lesergent , M. X ) démontrent que les troubles anormaux de voisinage sont constitués indépendamment de savoir si l’activité de ball trap s’exerce maintenant , depuis l’arrêté du 5/12/2008, dans le respect des textes légaux et administratifs . En effet ces personnes évoquent des bruits oppressants , agressifs et stressants empêchant le repos et la détente et les ayant incitées à partir.

Il convient dans ces conditions de retenir ,après le 5/12/2008 ,la persistance de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage , nonobstant la modification administrative intervenue .

L’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE prétend que B Y ne serait pas fondé à se prévaloir du dommage causé par son activité au motif que celle ci pré existait à son installation mais c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a écarté ce moyen et la décision sur ce point sera confirmée.

Compte tenu de l’importance de ces troubles il appartient à l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE d’y remédier étant précisé que l’expert a relevé dans son rapport divers moyens techniques pour y mettre fin s’agissant soit de la création d’écran autour des tireurs , soit de la modification des angles de tir, ou encore du déplacement des parcours .

Il apparaît dès lors inutile d’ordonner une expertise ainsi que le sollicite l’appelant , le choix des mesures à prendre et le coût de la réalisation des travaux incombant à l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE .

Conformément à la demande de B Y il convient d’ordonner à l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE de procéder à la mise en place de ces mesures .

Il ressort du rapport d’expertise que les nuisances se produisent le samedi et le lundi de 14h30 à 18h30 pendant 30 semaines par an , étant précisé que c’est en période hivernale que l’activité s’arrête.

Ce fait n’est pas contesté par les parties .

B Y demande l’indemnisation de son préjudice depuis 2001 (il est entré dans les lieux fin 2000) jusqu’à ce que des mesures soient mises en place pour faire cesser les nuisances .

L’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE ne prétend pas avoir remédié aux nuisances .

Il conviendra dès lors de prendre en compte le préjudice jusqu’au dépôt des conclusions de B Y, en juin 2011.

En chiffrant le préjudice à 2000 € par an ( les nuisances concernent 56 demi journées dans l’année) il convient de fixer les dommages et intérêts à la somme de 21000 € .

La décision du premier juge sera dès lors réformée.

L’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE qui succombe supportera les dépens .

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme la décision déférée.

Statuant à nouveau,

Constate l’existence de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage,

Déboute B Y de sa demande d’expertise,

Ordonne à l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE de prendre toutes mesures nécessaires pour remédier aux nuisances subies par B Y,

Condamne l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE à payer à B Y la somme de 21000 € à titre de dommages et intérêts.

Condamne l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE à payer à B Y la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile .

Condamne l’association BALL TRAP CLUB DE PRESERVILLE aux dépens de première instance et d’appel dont distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER P/LE PRÉSIDENT

D.FOLTYN M. A

.

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