Cour d'appel de Toulouse, 8 avril 2015, n° 15/00041

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 8 avr. 2015, n° 15/00041
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 15/00041
Décision précédente : Tribunal de commerce de Toulouse, 17 décembre 2014, N° 14/00695

Texte intégral

08/04/2015

ARRÊT N° 459

N° RG: 15/00041

XXX

Décision déférée du 18 Décembre 2014 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 14/00695

SARL VIVISOL FRANCE

C/

SAS VENTILEA

SAS RESPIO2

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

3e chambre

***

ARRÊT DU HUIT AVRIL DEUX MILLE QUINZE

***

APPELANTE

SARL VIVISOL FRANCE, prise en la personne de son représentant légal, domicilié es-qualité audit siège

XXX

XXX

Représentée par Me Manuel FURET de la SCP CHARRIER- DE LAFORCADE – FURET, avocat au barreau de TOULOUSE

Représentée par Me Nathalie DREUX, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

SAS RESPIO2

XXX

XXX

Représentée par Me Bertrand DESARNAUTS de la SCP DESARNAUTS, avocat postulante au barreau de TOULOUSE et par Me Gérard VERGNE, avocat plaidant au barreau de PARIS

XXX

SAS VENTILEA : assignée en intervention forcée le 25/02/2015 à personne morale

XXX

XXX

Représentée par Me Bertrand DESARNAUTS de la SCP DESARNAUTS, avocat postualten au barreau de TOULOUSE et par Me Gérard VERGNE, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 Mars 2015, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant J. BENSUSSAN et P. DELMOTTE chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

J. BENSUSSAN, président

P. DELMOTTE, conseiller

A. BEAUCLAIR, conseiller

Greffier, lors des débats : M. L. E

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par J. BENSUSSAN, président, et par M. L. E, greffier de chambre.

Exposé du litige

Vu l’ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de commerce de Toulouse le 18/12/2014, à laquelle il est expressément référé sur l’exposé des faits et de la procédure, qui a débouté la S.A.R.L. VIVISOL FRANCE de sa demande d’expertise fondée sur les dispositions de l’article 145 du code de procédure civile et sur la concurrence déloyale dont elle se disait victime de la part de la S.A.S. RESPIO2, et qui l’a condamnée au paiement d’une somme de 1.500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Par déclaration en date du 5/1/20015, la S.A.R.L. VIVISOL FRANCE a interjeté appel à l’encontre de cette ordonnance.

Aux termes de ses conclusions déposées le 18/2/2015, l’appelante sollicite l’infirmation de la décision déférée, la mise en oeuvre d’une mesure d’expertise confiée à un médecin expert, qui sera autorisé à recueillir toutes informations écrites ou orales des personnes présentes dans les locaux de l’intimée sans que le secret médical ne puisse lui être opposé, aux frais avancés de l’intimée, et la condamnation de cette dernière à lui restituer la somme de 1.500€ versée en exécution de la décision dont appel , ainsi qu’aux dépens.

Elle fait valoir en substance que :

— Monsieur Z, qu’elle avait embauché et qui était soumis à une clause de non concurrence, a violé cette clause en intervenant directement auprès de l’intimée ;

— ces agissements ont été confirmés dans le cadre de cette instance, de sorte que sa demande est fondée afin de lui permettre de quantifier le montant du préjudice subi ;

— l’intimée est responsable de ces faits de concurrence déloyale ;

— l’article 145 du code de procédure civile est applicable, sans qu’il soit besoin de prouver l’urgence ou l’absence de contestation sérieuse ;

— le secret médical ne saurait être opposé à l’expert judiciaire désigné, dès lors qu’en tant que médecin, il est lui même tenu à ce secret ;

— le juge ne peut rejeter cette demande au motif qu’elle ne rapporterait pas la preuve des faits que l’expertise a pour objet d’établir ;

— la demande présentée ne peut se confondre avec celle présentée et qui a donné lieu à l’ordonnance sur requête du 28/8/2014 ;

— la demande est limitée aux arrivées intervenues à compter du 9/9/2013 et a pour seul objet de déterminer le préjudice financier subi, de sorte qu’elle ne constitue pas une demande de mesure générale d’investigation ;

— l’ensemble des éléments recueillis constitue un faisceau d’indices concordants démontrant que Monsieur Z a transmis à l’intimée et à la société VENTILEA les coordonnées des médecins prescripteurs avec lesquels il travaillait lorsqu’il était au service de l’appelante, et qu’il aurait effectué des démarches vers ces derniers afin de les convaincre de recommander à leur patientèle les services de l’intimée ;

— compte tenu de ces éléments, les frais d’expertise doivent être supportés par l’intimée.

Aux termes de leur mémoire déposé le 18/3/2015, la S.A.S RESPIO2, intimée, et la S.A.S.U. VENTILEA, intervenante forcée, concluent à la confirmation de la décision entreprise, au rejet de l’appel et des prétentions de l’appelante et à la condamnation de cette dernière à leur payer à chacune d’elles la somme de 3.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Elles soutiennent pour l’essentiel que :

— il appartient au juge saisi d’une demande fondée sur l’article 145 du code de procédure civile de vérifier que la mesure sollicitée ne revêt pas les caractères d’une investigation générale et qu’elle se transforme en une perquisition civile ;

— la mission sollicitée par l’appelante constitue une demande d’investigation générale illégitime par son objet et par sa nature ;

— elle a spontanément fourni toutes précisions sur l’existence d’un contrat de travail qu’elles ont conclu avec Monsieur Z, de sorte que l’appelante est d’ores et déjà en possession des éléments d’information sur ce point ;

— il ne peut être demandé à l’expert de préciser si elles ont commis des actes de concurrence déloyale dès lors que ce point relève de la seule compétence du juge du fond ;

— l’appelante ne peut demander à l’expert de prendre connaissance de ses chiffres d’affaires, la liste nominative des patients et de se prononcer sur la nature des relations commerciales entre les médecins prescripteurs et les intimées ;

— l’appelante ne peut faire grief au premier juge d’avoir considéré que les actes de concurrence déloyale n’étaient pas établis dès lors que ce juge se devait se prononcer sur la légitimité du motif allégué, lequel est à l’évidence illégitime dès lors que le patient dispose du libre choix de son médecin et que l’appelante ne soutenait pas qu’elles auraient appareillé l’un de ses anciens patients ;

— la mesure sollicitée ne saurait porter atteinte au secret médical, dès lors qu’elle ne subordonne pas l’exécution de la mission à l’autorisation préalable du patient concerné.

Motifs

La mission d’expertise sollicitée par l’appelante à hauteur de Cour est définie comme suit :

'- 1) Réunir tous éléments susceptibles d’éclairer les conditions d’intervention de Monsieur C Z auprès de la société RESPIO2 ;

—  2) Rechercher et répertorier tous éléments mentionnant la facturation de services prescrits par les Docteurs MORINET, ATTAIS, ARANDA, Y, X, B,A et GASC ou des relations commerciales entre lesdits médecins et la société (factures et feuilles de soins émises par la société RESPIO2 aux Caisses d’Assurance Maladie, notes de frais remboursées par la société RESPIO2 à Monsieur Z ou aux médecins précités) ;

—  3) Indiquer la part que représentent ces 8 prescripteurs dans le nombre global des prescripteurs de la société RESPIO2 et dans son chiffre

d’affaires ;

—  4) Rechercher et lister les éventuels nouveaux patients pris en charge par la société RESPIO2 pour des traitements d’assistance respiratoire à domicile prescrits par les Docteurs MORINET, ATTAIS, ARANDA, Y, X, B, A et GASC à compter du 9/9/2013 et estimer les gains financiers réalisés du fait de leur arrivée ;

—  5) Examiner les pièces réunies et fournir à la juridiction tous éléments lui permettant d’illustrer et annonces et démarches faites auprès de ces nouveaux clients et réalisées soit à la signature de Monsieur Z soit sous celle de la société RESPIO2 ;

—  6) Chiffrer le montant des préjudices de toute nature subis par la société VIVSOL FRANCE du fait des actes constitutifs de concurrence déloyale commis par Monsieur Z ;

—  7) Autoriser l’expert à accéder aux locaux de la société RESPIO2, situés XXX et l’autoriser à recueillir des informations orales ou écrites auprès de toute personne et à se faire communiquer tout document utile à sa mission, même détenus par des tiers, sans qu’il ne puisse être opposé le secret médical desdites informations ou documents sollicités'.

Or, contrairement à ce que fait valoir l’appelante, il résulte de ce qui précède que la mesure d’investigation sollicitée ne peut caractériser un mode de preuve légalement admissible dès lors qu’elle excède à l’évidence, par sa généralité, les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile, et ce alors que le 1er chef de mission est sans objet et infondé dès lors que l’appelante a été informée par les intimées des conditions et date d’embauche de Monsieur Z.

Ainsi, les chefs d’investigations repris au n° 2, 3, 4 et 5, loin de se limiter aux seules conséquences résultant de l’embauche de Monsieur Z, portent sur l’ensemble de l’activité de la société RESPIO2, et ce alors que l’appelante ne peut utilement soutenir que les médecins prescripteurs cités se trouvaient dans une situation qui leur interdisait de prescrire des soins au profit de leur patientèle auprès d’intervenants autres que l’appelante. En outre, force est de relever que ces chefs de mission portent sur des éléments non datés, non limités dans le temps, dès lors éventuellement antérieurs à l’embauche de Monsieur Z, de sorte que même à supposer la violation par ce dernier de son obligation de non concurrence établie, les investigations dont la mise en oeuvre est sollicitée se trouvent sans lieu avec cette violation mais ont pour seul objet de renseigner l’appelante sur les activités et performances d’une société concurrente.

En outre, le chef de mission sollicité et conduisant l’expert à se prononcer sur le montant des préjudices subis du fait des actes constitutifs de concurrence déloyale ne peut pas plus être retenu dès lors que la détermination d’actes constitutifs de concurrence déloyale relève de la seule compétence du juge et non de celle de l’expert.

Dès lors, la décision entreprise sera confirmée par substitution de motifs en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé expertise et l’appel sera rejeté.

L’appelante qui succombe supportera les dépens de la présente instance. Par ailleurs, l’équité commande de la faire participer aux frais irrépétibles exposés d’une part par la S.A.S. RESPIO2 et d’autre part par la S.A.S.U VENTILEA dans le cadre de la présente instance d’appel à hauteur de 1.300€.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare l’appel non fondé et le rejette ;

Confirme l’ordonnance entreprise par substitution de motifs ;

Condamne la S.A.R.L. VIVISOL FRANCE aux dépens de la présente instance, ainsi qu’à payer d’une part à la S.A.S. RESPIO2 et d’autre part à la S.A.S.U VENTILEA chacune la somme de mille trois cents euros (1.300€) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

M-L E J. BENSUSSAN.

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