Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 14 mars 2018, n° 16/03130

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 2e ch., 14 mars 2018, n° 16/03130
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 16/03130
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Albi, 9 juin 2016, N° 2015001020
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

.

14/03/2018

ARRÊT N°99

N° RG: 16/03130

FP/AA

Décision déférée du 10 Juin 2016 – Tribunal de Commerce d’ALBI – 2015001020

Mr X

A Z

C/

BANQUE POPULAIRE OCCITANE

Confirmation partielle

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2e chambre

***

ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT

***

APPELANT

Monsieur A Z

[…]

[…]

Représenté par Me Lionel PUECH-COUTOULY, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

BANQUE POPULAIRE OCCITANE 33-43 Avenue Georges Pompidou

[…]

Représentée par Me Emmanuel GIL de la SCP BONNECARRERE SERVIERES GIL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Février 2018, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant

F. PENAVAYRE, président, et S. TRUCHE, conseiller, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

F. PENAVAYRE, président

S. TRUCHE, conseiller

M. Y, conseiller

Greffier, lors des débats : J. BARBANCE- DURAND

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par F. PENAVAYRE, président, et par J. BARBANCE-DURAND, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

La société ACM à l’enseigne « Les relais de la fête » a été immatriculée au registre du commerce d’Albi le 26 janvier 2007. Elle est spécialisée dans la vente d’articles de fêtes.

La Banque Populaire Occitane (en abrégé BPO) a consenti à la société ACM deux prêts Equipements, le premier en date du 23 février 2007 à hauteur de 83 000 € destiné à financer l’achat d’un pas-de-porte à Albi et l’aménagement des locaux et le second en date du 11 octobre 2011 destiné à financer l’achat d’un second fonds de commerce et du matériel pour un montant de 56 350 €.

Le gérant de la société ACM, Monsieur A Z, s’est porté caution solidaire de ses engagements par actes des 23 février 2007 et 11 octobre 2011 à hauteur de 99 600 € pour le premier prêt et de 67 620 € pour le second.

Son épouse, B Z est intervenue à l’acte en qualité de conjoint commun en biens.

Les 21 et 30 mai 2013, Monsieur A Z s’est porté avaliste de deux billets à ordre à échéance des 21 juin 2013 et 30 juin 2013 pour un montant total de 60 000 € destiné à garantir les crédits de trésorerie accordés à la société à hauteur de 8000 € et de 52 000 €.

La société ACM a été placée sous procédure de sauvegarde par jugement du 30 juillet 2013,

procédure qui a été convertie par jugement du 21 janvier 2014 en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire par jugement du 22 juillet 2014.

La Banque Populaire Occitane a déclaré sa créance entre les mains du représentant des créanciers le 30 juillet 2014 et a mis en demeure Monsieur A Z de régler le montant de ses engagements par lettre recommandée du 30 juillet 2014.

Par acte d’huissier du 10 mars 2015, la Banque Populaire Occitane a assigné Monsieur A Z devant le tribunal de commerce d’Albi afin d’obtenir sa condamnation à lui payer le montant de ses engagements.

Par jugement du 10 juin 2016, le tribunal de commerce d’Albi a condamné Monsieur A Z à verser à la Banque Populaire Occitane les sommes suivantes :

—  11 226,57 euros et 48 744, 84 euros au titre des sommes restant dues au titre des prêts Equipements, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 juillet 2014,

—  60 000 € en qualité d’avaliste des billets à ordre avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2014,

-1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure.

Le tribunal a également ordonné la capitalisation des intérêts légaux, l’exécution provisoire de la décision et mis les dépens de l’instance à la charge de Monsieur A Z.

Monsieur A Z a interjeté appel de cette décision le 22 juin 2016.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 8 décembre 2017, Monsieur A Z demande à la cour :

— de réformer la décision en toutes ses dispositions,

— de dire que les actes de cautionnement étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus et de dire que la banque ne peut s’en prévaloir en application de l’article L 341'4 du code de la consommation

— de dire que la contre-passation du billet à ordre du 21 mai 2013 vaut paiement et en conséquence de rejeter les demandes formées par la banque à ce titre.

En tout état de cause , il demande :

— de déclarer nuls et de nul effet les billets à ordre des 21 et 30 mai 2013 pour vice du consentement,

— de dire que la banque a apporté un soutien abusif à la société ACM

— de dire que la banque a engagé sa responsabilité et doit être condamnée à lui payer la somme de 60 000 € en réparation du préjudice qu’il a subi du fait de l’émission des billets à ordre,

— de confirmer le jugement en ce qu’il a déchu la banque du droit aux intérêts conventionnels,

— de constater que les sommes de 659,04 euros et 354,87 euros réclamées au titre des intérêts de retard ne sont pas dues,

— de condamner la banque au paiement de la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du

code de procédure civile.

En ce qui concerne les actes de caution, il prétend que ses revenus étaient insuffisants pour faire face à son engagement et que la banque ne pouvait prendre en compte les revenus antérieurs des époux Z puisqu’ils venaient de faire immatriculer la société le 26 janvier 2007. De même pour le second prêt souscrit le 11 octobre 2011, les revenus du couple avaient chuté à 16 602 € et il n’y avait pas lieu de tenir compte des revenus escomptés de l’opération garantie.

Il conteste également la valeur du patrimoine retenu compte tenu des autres engagements qu’il avait souscrits (notamment un prêt relais consenti par la Banque Populaire Occitane). Enfin il soutient qu’au moment où il est appelé en garantie, il y a toujours un engagement disproportionné puisqu’il perçoit le RSA et que la valeur de son patrimoine est moins importante que prévu.

En ce qui concerne les billets à ordre qu’il a avalisé, il prétend que :

— la contre-passation du billet à ordre du 21 mai 2013 sur un compte in bonis vaut paiement et que la banque ne peut plus actionner l’avaliste,

— les billets à ordre émis deux mois avant le jugement d’ouverture sont nuls pour vice du consentement dès lors que la banque a commis un dol en créant une illusion de trésorerie et en trompant son cocontractant sur ses intentions,

— que la banque a engagé sa responsabilité pour avoir soutenu abusivement la société ACM.

Enfin il fait valoir que la banque a manqué à son obligation d’information annuelle (la seule production de la copie d’une lettre ne suffisant pas à justifier de son envoi) en sorte qu’elle doit être déchue du droit aux intérêts conventionnels.

La Banque Populaire Occitane a notifié ses conclusions récapitulatives le 30 janvier 2018.

Elle demande :

— de rabattre l’ordonnance de clôture,

— de débouter Monsieur A Z de l’ensemble de ses demandes fins, et prétentions,

— de confirmer le jugement du 10 juin 2016 en toutes ses dispositions sauf à réactualiser les sommes dues,

— de condamner Monsieur A Z à lui régler, en qualité de caution solidaire du prêt Equipement d’un montant initial de 56 350 €, la somme de 24 572,42 euros actualisée au 23 octobre 2017, à parfaire des intérêts au taux légal jusqu’à parfait paiement,

— de condamner Monsieur A Z à lui régler, en qualité d’avaliste des billets à ordre, la somme de 61 606,74€ arrêtée au 23 octobre 2017 avec intérêts au taux légal,

— d’ordonner la capitalisation des intérêts,

— de condamner l’appelant à lui payer la somme de 3000€ au titre de l’article 700 du CPC.

Elle soutient en substance :

— que Monsieur A Z ne rapporte pas la preuve que son engagement était, au moment de la conclusion du contrat, manifestement disproportionné à ses revenus ou lorsqu’il est appelé en

paiement, que son patrimoine lui permet pas de faire face son engagement. Elle rappelle qu’elle n’a pas à vérifier l’exactitude des renseignements fournis par le débiteur en l’absence d’anomalie apparente et que la fiche de renseignements qu’il a fournie le 8 janvier 2007 fait état de revenus cumulés de 66 291 € soit un disponible de 47 427 € et un patrimoine immobilier de 255 000 €,

— qu’en ce qui concerne le prêt de 56 350 € souscrit le 11 octobre 2011, ses revenus étaient suffisants (3000 € par mois pour le couple) ainsi que son patrimoine immobilier qui était évalué à 305 356 €,

— qu’à la date où la caution est appelée en paiement, la disproportion ne peut pas être non plus retenue puisqu’il a vendu son bien immobilier et versé 39 114,26 euros entre les mains de la banque, ce qui a permis de solder le prêt de 2007 et de ramener celui de 2011 à 24 572,42 euros, somme à laquelle elle limite ses réclamations.

En ce qui concerne la nullité des billets à ordre, la banque rappelle que l’avaliste d’un billet à ordre ne peut invoquer les règles du cautionnement sur la disproportion de l’engagement et que compte tenu des règles propres au droit cambiaire,l’aval cambiaire qui repose uniquement sur des règles de forme, ne peut être frappé de nullité pour dol.

Elle fait valoir que sa responsabilité ne peut être engagée pour soutien abusif alors qu’aucune faute n’est établie à son encontre et que les conditions de mise en 'uvre prévues par l’article L650'1 du code de commerce ne sont pas remplies.

Enfin, elle justifie d’avoir satisfait à son obligation d’information annuelle sur l’ensemble de la période mais, compte tenu des circonstances, sollicite la confirmation pure et simple de la décision de ce chef.

Il y a lieu de se reporter expressément aux conclusions susvisées pour plus ample informé sur les faits de la cause, moyens et prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est en date du 12 décembre 2017.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la procédure :

Compte tenu des motifs invoqués par la banque et en l’absence d’opposition de l’appelant, il y a lieu de révoquer l’ordonnance de clôture et procéder à une nouvelle clôture à l’audience de plaidoirie du 6 février 2018.

Sur la disproportion du cautionnement :

Aux termes de l’article L341'4 devenu L332-1du code de la consommation,un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de la caution, au moment où elle est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Le banquier a l’obligation légale de prendre un engagement proportionné et à défaut, il perd le bénéfice de la sûreté.

Il importe peu que la caution soit profane ou avertie et qu’elle ait ou non la qualité de dirigeant social.

Il incombe à la caution qui se prévaut du caractère disproportionné de son engagement d’apporter la preuve de l’existence, lors de la souscription de l’acte, d’une disproportion manifeste entre le montant de la somme garantie et la valeur de ses biens et revenus.

La disproportion s’apprécie au regard du montant total de l’engagement souscrit, des biens et revenus de la caution mais également en prenant en considération son endettement global.

La proportionnalité de l’engagement de caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie.

Si une disproportion manifeste est constatée au moment au moment de la conclusion de l’engagement, le créancier professionnel est déchu du droit de se prévaloir de cet engagement, sauf s’il établit qu’au moment où la caution est appelée, celle-ci est en mesure de faire face à son obligation.

Par ailleurs la caution est tenue de fournir à la banque des informations complètes et loyales sur sa situation patrimoniale.

Le banquier n’a pas à vérifier l’exactitude de la fiche de renseignements, sauf anomalie apparente et la caution qui transmet à la banque des renseignements erronés se prive de la possibilité de se prévaloir d’un engagement disproportionné.

Ainsi contrairement à ce que soutient Monsieur A Z, la BPO n’avait pas à vérifier la réalité des informations déclarées dans les fiches patrimoniales qu’il a certifiée conformes et les renseignements fournis lui sont opposables.

Lors de l’engagement de caution du 23 février 2007 , le Premier juge a considéré qu’il n’y avait pas de disproportion manifeste dès lors que le foyer de la caution déclarait un revenu annuel disponible de 47 427 € au 31 décembre 2006 (après déduction de charges annuelles de 18 864 €) et détenait un patrimoine composé de deux maisons, une résidence principale située à Rivières valorisée à 225 000 € et une maison située à Fleury sur Orne évaluée à 230 000 €, libre de tout crédit, soit un patrimoine global de 250 000 € après déduction du capital restant dû à la Caisse du Crédit Agricole sur la maison de Rivières qui s’élevait à 200 000 €.

L’appelant conteste cette appréciation au motif qu’en réalité le revenu fiscal de référence du foyer pour l’année 2007 s’élevait à 12 812 € soit un revenu mensuel de 533,83 euros par époux.

C’est à la date de l’engagement que la disproportion doit être appréciée et il ne peut être fait aucun grief au banquier d’avoir tenu compte des revenus de l’année 2006 puisque la fiche de renseignements a été souscrite le 8 janvier 2007.

En tout état de cause, il n’avait pas à se livrer à une analyse prospective des revenus que les emprunteurs seraient susceptibles de retirer de leur activité, sauf à s’immiscer dans les affaires de ses clients.

Par ailleurs les revenus déclarés par la caution le 8 janvier 2007 sont conformes à l’avis d’imposition produit aux débats puisque l’appelant a perçu pour l’année 2006 un revenu annuel de 27 744 € et son épouse de

30 138 €, outre des revenus fonciers nets de 2840 €, soit un revenu global de 60 722 €.

En ce qui concerne son patrimoine, Monsieur A Z prétend que les valeurs indiquées sont sur-évaluées car un an à peine après l’engagement de caution, le bien de Fleury sur Orne a été vendu pour seulement 173 000 € et que le bien de Rivières était hypothéqué au profit de la Caisse

Régionale du Crédit Agricole.

Même si l’on prend en compte le prêt relais de 135 000 € qui a été consenti le 8 janvier 2007 par la BPO en attendant la vente de la maison de Fleury sur Orne, il apparaît que le prix de vente de ce bien dont la valeur représentait près du double de son engagement, lui permettait de remplir ses obligations en cas de défaillance de l’emprunteur principal, étant rappelé que la valorisation de la maison de Rivières était non pas à 25 000 € comme précisé par le Premier juge mais à 47 780 € selon le calcul suivant :

230 000 – 179 218 € (au titre du capital restant dû).

En ce qui concerne le second engagement de caution en date du 11 octobre 2011 d’un montant de 67 620 €, le tribunal de commerce a retenu que même si les revenus du couple ne s’élevaient plus qu’à 3000 € par mois (1500 € pour chaque co-gérant),le patrimoine de la caution était suffisant à cette date puisque selon la fiche patrimoniale,il avait une valeur de 305 000 € et comprenait la maison de Rivières pour une valeur nette de 90 000 € (250 000 € -160 000 € au titre du capital restant dû) ainsi que les parts de la société ACM qui ont été évaluées en fonction de la valeur du fonds de commerce exploité par la société valorisé à 215 566 € après déduction des prêts en cours.

Il y a lieu d’approuver cette motivation après avoir rappelé que ces valeurs étaient cohérentes et que rien ne permettait à la banque de suspecter une quelconque sur-évaluation.

Dès lors, Monsieur A Z qui ne fournit aucun autre élément permettant d’apprécier la valeur des parts sociales de la société ACM à la date de référence alors même que la société projetait d’effectuer des investissements en achetant un second fonds de commerce, n’est pas fondé à remettre en cause l’appréciation effectuée par les premiers juges.

S’il est exact que la disproportion doit s’apprécier au regard de l’endettement global de la caution et notamment en prenant en compte les autres cautionnements existant au moment de l’engagement de la caution, soit au cas d’espèce l’engagement de caution du 23 février 2007 qui était valable jusqu’au 2016, pour autant l’appelant ne démontre pas en quoi la charge de cet engagement antérieur est susceptible de modifier l’appréciation précédemment portée compte tenu de la valeur du patrimoine qui a été décrite.

La disproportion de l’engagement de la caution au moment où les contrats ont été souscrits n’étant pas établie, il n’y a pas lieu d’examiner si le patrimoine de la caution lui permet d’y faire face au moment où elle est appelée.

Compte tenu des dernières informations fournies par la banque qui indique que les époux Z ont procédé à la vente de leurs biens et réglé la somme de 39 114,26 euros qui a permis de solder le prêt de 2007 et de ramener celui de 2011 à la somme de 24 572,42 euros, somme à laquelle elle entend limiter ses réclamations envers la caution, il y a lieu de condamner A Z à lui verser la somme sus- indiquée.

Il y a lieu de donner acte à la banque qu’elle renonce à contester la déchéance des intérêts conventionnels qui a été prononcée par le Premier juge en application de l’article L341'6 du code de la consommation.

Le jugement du 10 juin 2016 sera donc confirmé sur ce point.

Sur les billets à ordre :

A Z a avalisé deux billets à ordre les 21 et 30 mai 2013 d’un montant respectif de 8 000€ et de 52 000 € qui sont revenus impayés à l’échéance des 21 et 30 juin 2013.

Il prétend que la banque ne peut plus actionner l’avaliste pour le billet à ordre de 8000€ du 21 mai 2013 dès lors qu’elle a contre-passé l’effet sur le compte de la société ACM, que les billets à ordre doivent être annulés pour vice de consentement car la banque a commis un dol en créant une illusion de trésorerie et en trompant son cocontractant sur ses intentions et enfin qu’elle a engagé sa responsabilité en lui faisant souscrire des effets de commerce à moment où la situation de la société ACM était irrémédiablement compromise en sorte qu’elle ne pouvait ignorer qu’en lui faisant souscrire un billet à ordre, elle le privait de la possibilité d’obtenir la provision à l’échéance.

La banque a déclaré une créance de 60 000 euros au titre des billets à ordre, outre les intérêts à hauteur de 193,66 euros, somme qui a été admise à titre définitif au passif de la société ACM, faute de contestation.

Dès lors Monsieur A Z n’est plus recevable à soutenir que le billet à ordre de 8000 € a été contre-passé sur les comptes de la société, ce qui vaudrait paiement puisque la société était in bonis à cette date.

Si l’aval constitue un engagement cambiaire gouverné par des règles propres au droit du change, il peut néanmoins être annulé pour vice du consentement, si l’avaliste établit qu’il a été trompé sur la nature de son engagement.

Il incombe à l’appelant d’établir les man’uvres pratiquées par la banque pour l’amener à garantir l’opération précitée.

Selon les informations fournies, des billets à ordre de 8000 et 52 000 € ont été émis en contrepartie d’une ouverture de crédit accordée à la société ACM qui a été régulièrement renouvelée chaque mois depuis le mois de juillet 2012 jusqu’à ce que les billets litigieux reviennent impayés à l’échéance de juin 2013.

Aucune disposition légale ne prohibe la mise à disposition d’un crédit de trésorerie sous forme de tirage de billets à ordre avalisés par le dirigeant de l’entreprise bénéficiaire et Monsieur A Z, en sa qualité de gérant, ne peut prétendre avoir ignoré la finalité de ce mécanisme qui s’apparente à un crédit d’exploitation alors qu’il a été régulièrement renouvelé pendant plusieurs mois.

En tout état de cause, il n’établit pas l’existence d’une tromperie de ce chef dès lors que selon les informations fournies, la ligne de trésorerie n’était accordée qu’à titre exceptionnel et pour une durée déterminée, dans l’attente de la cession du droit au bail du local de Puygouzon en sorte qu’aucun préjudice n’est établi à son détriment.

Monsieur A Z recherche également la responsabilité de la BPO au motif qu’elle aurait soutenu abusivement la société dont la situation était irrémédiablement compromise.

L’avaliste d’un billet à ordre peut opposer au bénéficiaire qui lui réclame le paiement sa mauvaise foi, conformément à l’article L511'12 du code de commerce.

C’est au moment de l’acquisition du titre par le porteur que la mauvaise foi doit être appréciée. La preuve peut être rapportée par tous moyens

La mauvaise foi est caractérisée dès lors que la banque qui a procédé à l’escompte du billet à ordre, a conscience de causer un dommage au débiteur cambiaire, notamment parce qu’elle sait que la provision ne pourra pas être fournie par le souscripteur à l’échéance.

Par contre la simple connaissance par le créancier de la situation financière obérée du débiteur cambiaire ne suffit pas à caractériser sa mauvaise foi.

Le tribunal de commerce Albi a à bon droit rejeté l’argumentation de l’appelant de ce chef et considéré qu’il ne pouvait être reproché à la banque un soutien abusif car à la date où la société a été placée sous sauvegarde de justice le 30 juillet 2013, sa situation n’était pas irrémédiablement compromise, la date de cessation des paiements n’étant intervenue que six mois plus tard, soit le 21 janvier 2014.

Il y a lieu d’approuver ces motifs après avoir constaté que selon le rapport de l’administrateur judiciaire du 17 janvier 2014, la situation de la société n’était pas irrémédiablement compromise en juillet 2013 puisqu’il a préconisé la poursuite de la période d’observation jusqu’en janvier 2014 et que ce n’est qu''à cette date, qu’il est apparu que les efforts de redressement des dirigeants de la société ne permettaient pas de maintenir l’activité et qu’il était nécessaire de convertir la procédure en redressement judiciaire afin de rechercher d’éventuels candidats à la reprise.

Par ailleurs c’est à bon droit que la banque fait valoir que faute pour l’appelant d’établir l’existence d’une fraude, d’une immixtion fautive ou d’un concours disproportionné, sa responsabilité ne peut être engagée en l’espèce en application de l’article L 650'1 du code de commerce.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu débouter Monsieur A Z de ses contestations et de confirmer la décision des premiers juges sauf à réactualiser la créance de la banque au titre de l’engagement de caution souscrit le 11 octobre 2011 dans les termes du dispositif.

Compte tenu des circonstances et en considération de motifs d’équité, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la banque partie des frais irrépétibles qu’elle a exposés pour assurer sa représentation en justice en cause d’appel.

La partie qui succombe doit supporter les dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant après en avoir délibéré,

Révoque l’ordonnance de clôture, admet les dernières conclusions communiquées par la BPO et procède à une nouvelle clôture à l’audience du 6 février 2018,

Confirme le jugement du tribunal de commerce d’Albi en date du 10 juin 2016 sauf sur le montant des condamnations prononcées au titre de l’engagement de caution souscrit le 11 octobre 2011,

Et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne Monsieur A Z à payer à la Banque Populaire Occitane en sa qualité de caution solidaire du prêt équipement d’un montant initial de 56 350 €, la somme de 24 572,42 euros arrêtée à la date du 23 octobre 2017, outre les intérêts au taux légal jusqu’à parfait paiement,

Rejette le surplus des demandes et les prétentions contraires,

Dit n’y avoir lieu à prononcer de condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,

Condamne Monsieur A Z aux entiers dépens de l’instance.

Le Greffier, Le Président,

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