Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 1, 20 décembre 2019, n° 18/01107

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 4e ch. sect. 1, 20 déc. 2019, n° 18/01107
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 18/01107
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Saint-Gaudens, 1er février 2018, N° 17/00042
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

20/12/2019

ARRÊT N° 2019/776

N° RG 18/01107 – N° Portalis DBVI-V-B7C-MFB3

M. Y/K.SOUIFA

Décision déférée du 02 Février 2018 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de SAINT-GAUDENS ( 17/00042)

Section Industrie

Z X

C/

SAS SUD OUEST TECHNOLOGIES

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4e Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT DECEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF

***

APPELANT

Monsieur Z X

[…]

31800 MIRAMONT-DE-COMMINGES

Représenté par Me François ABADIE, avocat au barreau de SAINT-GAUDENS

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 31555/2018/006538 du 09/04/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de TOULOUSE)

INTIMÉE

SAS SUD OUEST TECHNOLOGIES

pont de Valentine

[…]

Représentée par Me Anthony PEILLET, avocat au barreau de TOULOUSE

ayant pour avocat postulant Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Y, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Y, président

C. PAGE, conseillère

C. KHAZNADAR, conseillère

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par M. Y, président, et par C. DELVER, greffière de chambre.

FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. Z X a été embauché le 1er septembre 2011 par la société Sab-Chro-Maint en qualité de technicien d’usinage-monteur, niveau 3, 3e échelon, coefficient 240, suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale de la métallurgie.

Au mois d’août 2014, la société Sab-Chro-Maint est devenue la SARL Sud-Ouest Technologies (SOTEC).

Le 4 avril 2017, le médecin du travail a conclu à l’aptitude du salarié à son poste de travail en précisant que ce dernier devait être revu après obtention des résultats des examens complémentaires sollicités.

Le 19 juin 2017, le médecin du travail a mentionné, dans son avis, 'une contre-indication à la poursuite du travail dans les conditions actuelles'.

Le 21 juin 2017, M. X a été placé en arrêt de travail jusqu’au 21 juillet suivant.

À l’issue de cet arrêt de travail, soit le 21 juillet 2017, le salarié a saisi la juridiction prud’homale

pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail et obtenir le versement de diverses sommes.

Le 25 juillet 2017, le médecin du travail a conclu à l’absence de contre-indication médicale à la reprise du travail.

Le 3 août 2017, M. X a été placé en arrêt de travail

jusqu’au 20 octobre 2017.

Le 25 octobre 2017, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail à effet au 31 octobre suivant.

Le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Saint-Gaudens

le 17 novembre 2017 pour demander que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir le versement de diverses sommes.

Le conseil de prud’hommes de Saint-Gaudens, section industrie, par jugement du 2 février 2018, a prononcé la jonction du dossier RG n° 17/00067 au dossier RG n° 17/00042 et a :

— jugé que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est 'devenue sans objet' ;

— jugé que les manquements reprochés par le salarié à son employeur ne sont pas suffisamment graves pour justifier une prise d’acte de la rupture du contrat ;

— jugé que la prise d’acte de rupture du contrat de travail par M. Z X produit les effets d’une démission ;

— débouté M. Z X de l’ensemble de ses demandes ;

— débouté la société de ses demandes ;

— condamné M. Z X aux dépens de l’instance.

— :-:-:-

Par déclaration du 5 mars 2018 parvenue au greffe de la cour d’appel de Toulouse, M. Z X a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 7 février 2018.

— :-:-:-

Par ses dernières conclusions du 28 novembre 2018, M. Z X demande à la cour de réformer le jugement entrepris et, en conséquence, de juger que la prise d’acte de la rupture est imputable aux faits fautifs de la SARL Sud Ouest Technologies et de la condamner à lui verser les sommes suivantes :

* 2 490 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement ;

* 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

* 1 636,38 euros restant due sur l’indemnité de préavis de deux mois ;

* 163,63 euros au titre des congés payés y afférents ;

* 14 587 euros au titre de la prime de panier impayée ;

* 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

ainsi qu’aux entiers dépens.

Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail, le salarié soutient que l’employeur n’a pas exécuté son obligation de sécurité à son égard et ne lui a pas versé, pendant des années, les accessoires de son salaire.

Sur le manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité, il expose :

— que l’employeur doit régulièrement mesurer l’exposition des travaux aux agents chimiques ;

— qu’il est tenu d’organiser régulièrement des visites médicales d’embauche et périodiques, ce qui n’a pas été le cas puisqu’il a bénéficié de sa première visite médicale en 2013 et d’une deuxième en 2017 ;

— qu’il a été exposé durant son travail à des produits contenant des teneurs en chrome ou en plomb qui sont classés comme produits cancérigènes ;

— que la preuve de sa contamination est établie par les pièces médicales qu’il verse au dossier ;

— que les faits ne sont pas anciens et que le simple constat de l’absence de réaction de l’intervenant en matière de prévention des risques professionnels et du médecin du travail ne peut valablement exonérer l’employeur de sa responsabilité.

Sur les manquements de son employeur aux autres règles d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise, le salarié argue :

— que les locaux disposent de 'WC totalement indécents pour les ouvriers et ne sont pas équipés de douches’ ;

— que les installations électriques ne sont pas protégées et ne sont pas conformes aux normes alors en vigueur ;

— que tous les véhicules de l’entreprise portent le même numéro de contrôle technique, ce qui signifie que l’examen d’un seul a permis d’apposer une validité de conduite sur la totalité.

Sur le manquement de l’employeur au versement de ses indemnités repas, le salarié fait observer que son lieu d’attachement était d’abord situé à Martres Tolosane puis à Mondavezan alors qu’il a travaillé quotidiennement au siège de la SAB Chrominox à Saint-Gaudens et que, malgré ses multiples relances, il n’a jamais perçu les indemnités de repas.

Sur les conséquences de la prise d’acte, le salarié souligne que, dès lors que celle-ci résulte des manquements fautifs de l’employeur, elle doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu’il a subi un préjudice important à ce titre.

***

Par ses dernières conclusions du 27 septembre 2019, la SARL Sud-Ouest Technologies, intimée, demande à la cour :

—  avant toute défense au fond, de juger que la demande relative aux indemnités différentielles de

repas (primes de panier) est irrecevable en ce qu’il s’agit d’une demande réputée abandonnée en première instance ;

— de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que la prise d’acte doit produire les effets d’une démission, débouté M. X de l’ensemble de ses demandes et le débouter, en toute hypothèse, de sa demande de paiement d’indemnité repas ;

— de réformer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de sa demande indemnitaire pour brusque rupture et de condamner M. X à lui verser la somme

de 3 963 euros à titre de dommages et intérêts ;

— de condamner M. X à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur l’irrecevabilité de la demande relative aux indemnités différentielles de repas (primes de panier), la société soutient que M. X a présenté oralement cette demande devant le conseil de prud’hommes, qu’elle ne figurait pas au dispositif de ses dernières conclusions déposées devant celui-ci, que le salarié est donc réputé avoir renoncé à cette prétention et qu’il ne peut en cause d’appel présenter une demande à laquelle il est réputé avoir renoncé définitivement.

Sur la prise d’acte, la société fait valoir que celle-ci doit produire les effets d’une démission. Elle expose ainsi :

— que M. X a fait l’objet d’un suivi régulier par la médecine du travail, que les visites du mois de mai 2013 et du 4 avril 2017 ont bien été organisées à l’initiative de l’employeur, visites au terme desquelles le médecin du travail l’a déclaré apte et qu’il ne justifie d’aucun préjudice sur ce point ;

— que M. X n’a pas été contaminé au chrome ou au plomb puisque ses analyses médicales présentent des taux inférieurs aux valeurs de référence ;

— que le médecin du travail et l’intervenant en prévention des risques professionnels, lors de leur étude de poste le 24 juillet 2017, ont constaté que le poste de travail du salarié ne présentait aucun risque en termes d’hygiène et de sécurité et que ce dernier a été déclaré apte postérieurement ;

— que le salarié ne démontre par aucun élément objectif qu’il aurait dû bénéficier d’un suivi médical renforcé ;

— que les éléments et photographies qu’elle soumet aux débats permettent de vérifier que l’ensemble des normes relatives aux équipements d’hygiène et de sécurité (WC, douches, vestiaires …) a été respecté ;

— qu’au regard des dispositions de l’accord du 26 février 1976, de son lieu de travail et de la distance séparant celui-ci de son domicile, le salarié ne peut valablement solliciter le versement d’indemnités différentielles de repas et qu’en toute hypothèse, il ne peut demander une telle somme puisqu’elle prend en compte les cinq dernières années dont deux sont prescrites et qu’il ne travaillait pas le vendredi après-midi.

À titre d’appel incident, sur la demande indemnitaire pour brusque rupture du contrat, la société souligne qu’elle est en droit de solliciter une indemnité correspondant au préavis non exécuté.

— :-:-:-

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 30 septembre 2019.

MOTIVATION

- Sur la recevabilité de la demande en paiement au titre des 'paniers repas’ :

Il est constant que M. X avait présenté dans sa requête déposée le 21 juillet 2017 une demande relative aux 'paniers repas’ pour un montant de 14 587 euros accompagnant sa demande principale en résiliation judiciaire du contrat de travail et qu’il a repris cette même demande au titre des paniers repas dans sa requête déposée le 17 novembre 2017 aux fins de voir juger sa prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur.

Dans ses dernières conclusions déposées pour l’audience du 15 décembre 2017 et visant l’instance n° 17/00042 (celle initiée le 21 juillet 2017), M. X mentionne dans le dispositif de celles-ci : 'Constater que l’instance introduite par Monsieur X est devenue sans objet, du fait de la rupture du contrat de travail, et de la reprise des demandes de M. X dans le cadre de la seconde procédure. Statuer ce que de droit sur les dépens'.

Il n’est pas discuté qu’il est produit des conclusions visant toujours le dossier n° 17/00042 mais se rapportant manifestement pour leur objet au dossier n° 17/00067 (celui concernant la prise d’acte) et dont le dispositif sollicite expressément la qualification de la prise d’acte en rupture imputable aux faits fautifs de l’employeur ainsi que la condamnation de ce dernier au paiement de diverses sommes sans reprendre la demande présentée au titre des 'paniers repas'.

Le conseil a ordonné la jonction des deux procédures et a débouté M. X de l’ensemble de ses demandes après avoir indiqué dans les motifs que la demande relative aux indemnités repas, mentionnée dans le dossier n° 17/00042 n’avait pas été reprise dans la seconde procédure en considérant qu’en l’absence de mention dans le dispositif des conclusions du demandeur, représenté par avocat, cette demande devait être réputée comme abandonnée.

Si la jonction des procédures ne crée pas une procédure unique et que chacune conserve son autonomie, force est de constater que le salarié a déposé pour la même date deux jeux de conclusions bien différentes se rapportant distinctement par leur objet à l’un ou l’autre de ces dossiers même s’il a visé le même n° de rôle.

L’article R. 1453-5 du code du travail prévoit que le bureau de jugement ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions déposées par les parties représentées ou assistées par un avocat. Les notes de l’audience du 12 janvier 2018 visant les deux dossiers mentionnent qu’il a été débattu principalement de la recevabilité de la demande au titre des 'paniers repas’ sur le fondement de l’abandon de la demande et subsidiairement au titre de sa prescription.

Ainsi, cette demande formée au titre des 'paniers repas’ indiscutablement omise dans le dossier n° 17/00067 devait bien être réputée abandonnée en première instance de sorte que les premiers juges n’étaient pas tenus d’y répondre.

La société intimée soulève le caractère nouveau de la prétention formée en appel au titre de ces mêmes 'paniers repas'. Toutefois, l’article 566 du code de procédure civile précise que les 'parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire'.

Force est de constater que la demande en paiement litigieuse est fondée sur le manquement de l’employeur en matière d’indemnités de repas qui est l’un des moyens expressément visés par le salarié pour justifier sa prise d’acte de la rupture du contrat

aux torts de l’employeur et dont la cour est valablement saisie. Ce manquement avait été invoqué en première instance à l’appui de la demande relative à la prise d’acte et devait à tout le moins être

examiné par le premier juge pour apprécier le bien fondé de la qualification de cette prise d’acte aux torts de la société Sud-Ouest Technologies.

Dès lors la présentation en appel d’une demande en paiement des indemnités repas qui découlent de la même obligation que celle dont la méconnaissance est invoquée au soutien de la prise d’acte doit être considérée comme recevable, eut-elle été omise pour des raisons manifestement fortuites des conclusions récapitulatives de première instance.

- Sur la prise d’acte :

La prise d’acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu’il reproche à l’employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail de sorte qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant.

Il revient à celui qui invoque la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur de rapporter la preuve de faits suffisamment graves qu’il reproche à son employeur et il appartient au juge d’examiner les manquements de l’employeur invoqués devant lui par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit. Cette rupture produit les effets soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient soit d’une démission dans le cas contraire.

Le courrier du 25 octobre 2017, par lequel M. X a pris acte de la rupture de son contrat de travail, est ainsi libellé : 'embauché depuis le 01/09/2011 dans votre société, j’ai constaté de votre part des manquements graves inhérents à vos obligations d’employeur. En vertu de l’article L. 1231-1, je prends acte de la rupture du contrat de travail me liant à votre société pour les raisons suivantes :

- manquement à l’obligation de sécurité ainsi qu’aux règles relatives aux visites médicales obligatoires ;

- inégalité de traitement en matière de rémunération (salaire et indemnités) ;

- mise en danger et violation des obligations en matière d’hygiène ;

- pas d’avenant à mon contrat de travail pour travailler comme ouvrier détaché (emploi Sud Ouest Technologies détaché à SAB et Chrominox depuis le début de mon contrat)'.

Aux termes de ses écritures, M. X ne reprend toutefois pas le dernier grief, relatif à l’absence d’avenant à son contrat de travail. En conséquence, les trois griefs suivants doivent être étudiés pour vérifier s’ils reçoivent, ou non, la qualification de manquement suffisamment grave permettant de justifier la prise d’acte, à savoir :

— le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité et de santé ;

— les manquements de l’employeur aux règles d’hygiène ;

— les manquements de l’employeur au regard de l’indemnité de repas.

' Sur l’obligation de sécurité et de santé de la SARL Sud Ouest Technologies :

M. X fait valoir que l’employeur a manqué à ses obligations relatives à sa sécurité et à sa santé en n’organisant pas les visites médicales requises par le code du travail, notamment les visites médicales renforcées lorsque les travaux exposent les salariés à des agents chimiques toxiques ou cancérigènes, ce qui a conduit à une contamination au chrome.

À titre liminaire, il doit être noté que M. X ne formule aux termes de ses écritures aucune demande de dommages et intérêts pour violation de l’employeur à son obligation de sécurité ou pour non-respect de la périodicité des visites médicales.

Il est constant que seules deux visites médicales ont été effectuées. La première s’est déroulée le 24 mai 2013 et la seconde le 4 avril 2017. Lors de cette seconde visite médicale, le médecin du travail a conclu à l’aptitude de M. X sans mentionner aucune réserve et en indiquant uniquement : 'à revoir avec les résultats des examens complémentaires'.

Le 19 juin 2017, le médecin du travail, alors en possession des résultats aux examens susvisés, a énoncé une contre-indication médicale à la poursuite du travail dans les conditions actuelles.

Par courrier du 28 juin suivant, la société a immédiatement écrit au médecin du travail pour solliciter une étude du poste de travail de M. X afin de connaître ses préconisations. Cette étude de poste a été réalisée le 24 juillet suivant avec la présence de M. B C, intervenant en prévention des risques professionnels.

Par avis du 25 juillet 2017, soit antérieurement à la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié, le médecin du travail a conclu qu’il n’existait aucune contre-indication médicale à la reprise du travail, qualifiant expressément la période d’arrêt de travail de M. X de 'maladie ou accident non professionnel'. Le salarié ne saurait soutenir, aux termes de ses conclusions, qu’un tel avis du médecin du travail doit être écarté des débats en raison de son caractère postérieur à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail dès lors que l’exécution de celui-ci s’est poursuivie, seule la prise d’acte mettant un terme à la relation contractuelle.

Sans qu’il soit nécessaire d’étudier les résultats des analyses effectuées par M. X, il doit être retenu qu’eu égard, d’une part, à l’ensemble des diligences effectuées par l’employeur dès la connaissance d’une potentielle intoxication par des agents toxiques du salarié, notamment en termes de correspondances avec le médecin du travail et d’étude de poste et, d’autre part, à l’aptitude déclarée par le médecin du travail à son poste de travail dès le 24 juillet 2017, il ne subsistait aucun manquement de l’employeur à la date de la prise d’acte de M. X, à son obligation d’assurer la santé et la sécurité du salarié.

' Sur les règles d’hygiène :

Le salarié soutient que les locaux et les véhicules utilisés ne sont pas aux normes.

Sur les équipements sanitaires, le salarié produit des photographies dans le but de démontrer que les normes d’hygiène (toilettes, douches, salle à manger, vestiaires …) et de sécurité (installations électriques et contrôle technique des véhicules) ne seraient pas respectées. Cependant, l’employeur verse pour sa part aux débats un ensemble de photographies permettant de constater l’inverse, ainsi qu’une attestation signée par dix salariés aux termes de laquelle la société SAB et Chrominox, dont il est constant qu’elle partage ses locaux avec la SARL Sud Ouest Technologies, 'dispose d’un vestiaire et d’une salle de repos qui ont été rénovés en 2009, de plus la même année ont été créés des douches ainsi qu’un WC et des lavabos dans l’atelier'.

En outre, il est apporté à la cour les factures permettant de constater la vérification effective par des prestataires indépendants des installations électriques et des extincteurs.

Sur le contrôle technique, il ne ressort pas des missions de M. X qu’il ait eu la nécessité de conduire de tels véhicules et il n’est d’ailleurs pas contesté son absence de permis de conduire. Il ne saurait donc soutenir que l’employeur manque à ses obligations contractuelles à son égard de ce fait.

Enfin les pièces n° 45 et n° 46 que le salarié produit à la cour concernent respectivement, la visite

d’un contrôleur du travail datée du 29 avril 2015 et la vérification des équipements de travail par la société Prevenscop Conseil datée du 16 octobre 2014. Alors que la charge de la preuve des manquements graves et concomitants à la prise d’acte de la rupture repose sur le salarié, ces seuls éléments ne permettent aucunement de vérifier la poursuite des conditions de travail relevées dans ces documents.

' Sur les indemnités de repas :

Aux termes de ses propres écritures, M. X sollicite le versement d’une somme au titre des indemnités différentielles de repas telles que stipulées à l’article 2.3 de l’accord sur les conditions de déplacement du 26 février 1976 annexé à la convention collective régionale des salariés de la métallurgie.

Cet article énonce : 'dans le cas où le repas n’est pas assuré sur place par l’employeur ou le client, le salarié en petit déplacement qui sera dans l’obligation de prendre un repas au lieu du déplacement percevra une indemnité différentielle de repas calculée sur la base de 2,50 fois le minimum garanti légal'.

Selon l’article 1.4 intitulé 'définition du déplacement', 'il y a déplacement lorsque le salarié accomplit une mission extérieure à son lieu d’attachement qui l’amène à exécuter son travail dans un autre lieu d’activité – sans pour autant qu’il y ait mutation – et à supporter, à cette occasion, une gêne particulière et des frais inhabituels'.

Deux conditions cumulatives sont ainsi exposées pour définir le déplacement, l’une d’elle étant que le salarié doit supporter 'une gêne particulière et des frais inhabituels'.

Or, le salarié ne démontre aucunement avoir eu à supporter de telles incommodités puisqu’il est constant qu’il a travaillé à Saint-Gaudens, quand son lieu d’attachement était d’abord situé à Martres Tolosane puis à Mondevazan, tout en résidant à Miramont de Comminges. En conséquence, le lieu sur lequel il a été amené à exécuter son contrat de travail se situe à une distance largement inférieure aux lieux stipulés dans son contrat de travail.

Il n’est donc établi aucun manquement de l’employeur à ses obligations conventionnelles eu égard aux indemnités différentielles de repas. Le salarié sera débouté de sa demande de rappels de salaire au titre des indemnités différentielles de repas.

Dès lors qu’au moment de la prise d’acte, aucun manquement fautif de l’employeur à ses obligations légales, conventionnelles ou contractuelles n’est établi, la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par M. X n’est pas justifiée. Celle-ci doit, en conséquence, produire les effets d’une démission. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

- Sur les conséquences financières :

À titre d’appel incident, l’employeur sollicite le versement d’une indemnité en réparation du caractère brutal de la rupture du contrat de travail par M. X assimilée, aux termes mêmes de ses écritures à l’indemnité compensatrice de préavis.

Selon l’article L. 1237-2 du code du travail, la rupture d’un contrat de travail à durée indéterminée à l’initiative du salarié ouvre droit, si elle est abusive, à des dommages et intérêts pour l’employeur.

La prise d’acte de la rupture du contrat qui n’est pas justifiée produit les effets d’une démission. Il en résulte que le salarié doit à l’employeur le montant de l’indemnité compensatrice de préavis résultant de l’application de l’article L. 1237-1 du code du travail.

En outre, il est de principe que l’employeur n’a pas à établir l’existence d’un préjudice résultant de la non-exécution de son préavis.

Le salarié sera, en conséquence, condamné à verser à la SARL Sud Ouest Technologies la somme de 3 963 euros au titre de l’indemnité correspondante à l’indemnité compensatrice de préavis due par le salarié. Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

- Sur les demandes annexes :

M. X, partie principalement perdante, sera condamné aux dépens d’appel.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de la SARL Sud Ouest Technologies les frais non compris dans les dépens et de rejeter la demande présentée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Juge recevable la demande formulée par M. Z X à titre de rappel de salaire pour les indemnités différentielles de repas non versées à hauteur de 14 587 euros.

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Gaudens, section industrie, du 2 février 2018 sauf en ce qu’il a débouté la SARL Sud Ouest Technologies de sa demande d’indemnité au titre de la brusque rupture du contrat de travail.

Et, statuant sur les chefs infirmés :

Condamne M. Z X à verser à la SARL Sud Ouest Technologies la somme de 3 963 euros (trois mille neuf cent soixante-trois euros) à titre d’indemnité pour rupture abusive du contrat de travail.

Et y ajoutant :

Déboute M. Z X de sa demande formulée à titre de rappel de salaire pour les indemnités différentielles de repas.

Condamne M. Z X aux dépens d’appel.

Déboute la SARL Sud Ouest Technologies de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par M. Y, président et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE, LE PRESIDENT,

C.DELVER M. Y

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