Cour d'appel de Versailles, 14ème chambre, 10 novembre 2010, n° 09/09254

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 14e ch., 10 nov. 2010, n° 09/09254
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 09/09254
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 22 octobre 2009, N° 08/5531
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56C

14e chambre

ARRET N°

contradictoire

DU 10 NOVEMBRE 2010

R.G. N° 09/09254

AFFAIRE :

S.A.S. TELEPERFORMANCE FRANCE venant aux droits de la SA TELEPERFORMANCE FRANCE

C/

S.A. LABORATOIRES LOGISSAIN SA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Octobre 2009 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° Section :

N° RG : 08/5531

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP LISSARRAGUE-

DUPUIS BOCCON-GIBOD

SCP DEBRAY-CHEMIN,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NOVEMBRE DEUX MILLE DIX,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S. TELEPERFORMANCE FRANCE venant aux droits de la SA TELEPERFORMANCE FRANCE

XXX

XXX

représentée par la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS BOCCON-GIBOD – N° du dossier 0947155

assistée de Me Sophie PASTURAUD (avocat au barreau de Bordeaux)

APPELANTE

****************

S.A. LABORATOIRES LOGISSAIN SA

XXX

XXX

représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN – N° du dossier 09001005

assistée de Me Matthieu MALNOY (avocat au barreau de Paris)

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN – N° du dossier 09001005

assistée de Me Matthieu MALNOY (avocat au barreau de PARIS)

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 Octobre 2010 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Ingrid ANDRICH, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jean-François FEDOU, président,

Madame Ingrid ANDRICH, conseiller,

Monsieur Philippe BOIFFIN, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre LOMELLINI,

FAITS ET PROCÉDURE,

Le 20 juin 2007, la société TELEPERFORMANCE FRANCE a confié à la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA, la désinfection de ses locaux par un traitement contre les puces.

La société LABORATOIRES LOGISSAIN SA a réalisé son intervention par pulvérisation d’insecticide et fumigènes dans la nuit du 20 au 21 juin 2007.

Le 21 juin 2007 au matin, plusieurs salariés travaillant dans ces locaux ont été victimes de malaise. Sur intervention des services de secours et de la Mairie de Belfort, le site a été fermé durant la journée du 21 juin 2007.

Le cabinet SARETEC, mandaté par la SA GAN ASSURANCES IARD, assureur de la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA a évalué le montant de la perte d’exploitation à

XXX

Arguant d’un manquement de la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA à ses obligations d’information et de conseil, la société TELEPERFORMANCE a fait assigner cette dernière et son assureur aux fins de paiement.

Par jugement du 23 octobre 2009, le tribunal de grande instance de Nanterre a :

— déclaré recevables les attestations établies par Monsieur X et Monsieur Y,

— débouté la SA TELEPERFORMANCE FRANCE de ses demandes.

La société TELEPERFORMANCE a interjeté appel de la décision.

Elle soutient que la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA a manqué à son obligation d’information et de conseil en ne la prévenant pas des nuisances occasionnées par son intervention et en ne lui indiquant pas les risques envisageables ce qui lui aurait permis de mettre en oeuvre un plan de prévention.

Elle ajoute que la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA ne l’a pas prévenue de la nécessité d’aérer les locaux, qu’elle ne rapporte pas la preuve de l’exécution de son obligation de conseil et d’information et que les attestations de Monsieur X et Monsieur Y ne justifient pas de cette obligation.

Elle relève un préjudice pour la perte d’exploitation des journées du 21, 22 et 23 juin 2007.

Elle demande à la cour d’appel de :

— infirmer le jugement et

— dire irrecevables les attestations de Monsieur X et Monsieur Y,

— de juger que la Société LABORATOIRES LOGISSAIN SA a manqué à son obligation de renseignement et de conseil, constitutive d’une faute de nature contractuelle, et la déclarer responsable de son entier préjudice,

— juger qu’elle n’a pas commis de faute exonératoire de responsabilité,

— débouter la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et son assureur de l’ensemble de leurs demandes,

— condamner in solidum la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et son assureur au paiement de la somme de 85 646,93 € au titre de son préjudice d’exploitation assorti des intérêts légaux à compter de la délivrance de l’assignation,

— condamner la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et son assureur in solidum à lui verser la somme de 10 000 à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— condamner la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et son assureur à lui verser la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La Compagnie GAN ASSURANCES et la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA opposent que l’intervention s’est effectuée en urgence la nuit, mais qu’ils justifient d’attestations qui prouvent que la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA a bien informé la société TELEPERFORMANCE de la nécessité d’aérer les locaux.

Ils ajoutent qu’il appartient au chef de l’entreprise utilisatrice d’une prestation de service d’assurer la coordination générale des mesures de prévention en matière de sécurité et que la société TELEPERFORMANCE a manqué à cette obligation.

Ils soutiennent qu’en toute hypothèse, il aurait fallu prévoir une fermeture d’une journée et que dès lors la société TELEPERFORMANCE a été placée dans la situation qui aurait été la sienne sans qu’elle démontre un préjudice.

Sollicitant la confirmation du jugement entrepris, ils demandent à la cour d’appel de débouter la société TELEPERFORMANCE de l’ensemble de ses demandes et de la condamner à verser la somme de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L’ARRÊT,

Considérant qu’il est établi que les locaux de la société TELEPERFORMANCE, employant sur le site de Belfort trois cents personnes, ont dû être évacués et fermés au personnel pendant la journée du 21 juin 2007 pour permettre leur aération complète et la disparition de toute effluve des produits insecticides utilisés au cours de la nuit précédente ;

Considérant que le fait que l’intervention de la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA ait revêtu un caractère urgent, le fait que cette intervention se soit déroulée de nuit dans des locaux accueillant pendant la journée du personnel, ne sauraient libérer l’entreprise qui a réalisé la désinfection des locaux de son obligation de conseil et d’information à l’égard de la société TELEPERFORMANCE ;

Que cette dernière avait, à l’occasion de sa demande de devis d’urgence, spécialement demandé si le personnel devait être absent ;

Que la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA ne justifie d’aucune réponse ni d’aucune indication précise, donnée à la société TELEPERFORMANCE, alors même qu’elle a en sa possession l’ensemble des éléments techniques et les caractéristiques des produits qu’elle utilise pour réaliser sa prestation, produits qui, s’ils ne sont pas toxiques, se sont avérés irritants ;

Considérant que l’éventuelle faute de la société TELEPERFORMANCE qui consisterait à n’avoir pas mis en place ou adapté un plan de prévention comme l’article R 4512-6 du code du travail le lui impose en cas d’opérations classées comme dangereuses par arrêté ministériel, suppose pour sa démonstration que la société TELEPERFORMANCE se soit abstenue, malgré une information sur la dangerosité des produits utilisés, effectivement reçue ;

Que si, à l’évidence, l’utilisation d’un insecticide quelconque suppose après une période de confinement nécessaire à l’efficacité, une aération, il appartenait à la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA d’exécuter son obligation d’informer et de renseigner sa cliente avant son intervention ;

Qu’en sa qualité de prestataire de service, elle était tenue à l’égard de la société TELEPERFORMANCE d’un devoir de conseil et d’information et elle devait également s’assurer avant tous travaux de la possibilité de ventiler de façon efficace les lieux après son intervention ;

Qu’ainsi, la panne de la ventilation et de la climatisation qu’elle se borne à alléguer sans la démontrer ne peut l’exonérer de ses obligations ;

Que les affirmations du directeur de cette société et d’un employé de celle-ci, contenues dans des attestations qui ne sont affectées d’aucun motif d’irrecevabilité, ne peuvent être retenues comme pertinentes pour justifier l’exécution de l’obligation d’informer et de renseigner ;

Considérant que l’obligation dans laquelle s’est trouvée la société TELEPERFORMANCE d’évacuer l’ensemble de son personnel pendant la journée du 21 juin 2007 trouve son origine dans le défaut d’information incombant à la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA ;

Que la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA ne peut prétendre que la société TELEPERFORMANCE aurait été, en toutes hypothèses, contrainte de fermer au personnel les locaux pendant une journée entière nécessaire à la disparition de toute effluve des produits insecticides répandus par fumigations dès lors qu’il n’est pas avéré que la société TELEPERFORMANCE avait la possibilité de programmer l’intervention de la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA, une veille de jour non travaillé, ou de recourir à un autre mode d’extermination des puces ;

Considérant que la perte d’exploitation subie par la société TELEPERFORMANCE est en relation directe avec la faute de la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA que cette dernière doit réparer ;

Considérant que le préjudice de la société TELEPERFORMANCE peut être évalué à la somme globale de 69 730,59 € correspondant au total de la perte d’exploitation de l’activité dédiée à la direction générale des impôts et à la perte d’exploitation de l’activité dédiée à la société SFR pour la journée du 21 juin 2007 ;

Qu’il ne peut être retenu que les pertes ressenties au cours des journées du 22 et même du 23 juin 2007 liées à un absentéisme important sont en relation avec l’intervention de la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA ;

Considérant qu’à la réparation de la perte d’exploitation doit s’ajouter celle du préjudice commercial résultant de l’atteinte à l’image et à la confiance, qu’il y a lieu de fixer à la somme de 10 000 € ;

Que la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et son assureur doivent être condamnés in solidum au paiement de 79 730,59 € de dommages et intérêts ;

Considérant que, contrairement à ce que la société TELEPERFORMANCE avance, le mandatement d’un expert amiable et le dépôt du rapport de ce dernier procédant à une évaluation du dommage sont exclusifs de toute reconnaissance de responsabilité et expressément faits sous cette réserve, que dès lors l’absence d’offre d’indemnisation postérieurement au dépôt du rapport de l’expert amiable ne saurait caractériser une résistance abusive ;

Considérant que la société TELEPERFORMANCE a été obligée d’exposer des frais qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge, que la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et son assureur doivent être condamnés in solidum à verser la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS ;

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu entre les parties le 23 octobre 2009 par le tribunal de grande instance de Nanterre ;

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et la société GAN ASSURANCES à verser à la société TELEPERFORMANCE FRANCE :

—  79 730,59 € (soixante-quinze mille sept cent trente euros et cinquante-neuf centimes) de dommages et intérêts ;

—  5 000 € (cinq mille euros) en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société TELEPERFORMANCE FRANCE de ses plus amples demandes ;

Condamne in solidum la société LABORATOIRES LOGISSAIN SA et la société GAN ASSURANCES aux entiers dépens de l’appel, autorisation étant donnée aux avoués en la cause, de les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Jean-François FEDOU, président et par Madame LOMELLINI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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Cour d'appel de Versailles, 14ème chambre, 10 novembre 2010, n° 09/09254