Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 2ème section, 26 juin 2012, n° 11/05334

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 1re ch. 2e sect., 26 juin 2012, n° 11/05334
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 11/05334
Décision précédente : Tribunal d'instance de Boulogne-Billancourt, 30 mai 2011, N° 11-09-792
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51B

1re chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 JUIN 2012

R.G. N° 11/05334

AFFAIRE :

OFFICE PUBLIC DEPARTEMENTAL DE L’HABITAT DES HAUTS DE SEINE

C/

Z A

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Mai 2011 par le Tribunal d’Instance de BOULOGNE BILLANCOURT

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 11-09-792

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES,

Me Caroline COHEN,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT SIX JUIN DEUX MILLE DOUZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

OFFICE PUBLIC DEPARTEMENTAL DE L’HABITAT DES HAUTS DE SEINE

pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

XXX

XXX

représenté par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES (avocats au barreau de VERSAILLES – N° du dossier 1149209 )

assisté de Me Charles BISMUTH (avocat au barreau de PARIS)

APPELANTE

****************

Madame Z A

née le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

Log N° 13

92100 BOULOGNE-BILLANCOURT

représentée par Me Caroline COHEN (avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE)

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 22 Mai 2012 Madame Patricia GRANDJEAN, Conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Charles LONNE, Président,

Madame Patricia GRANDJEAN, Conseiller,

Mme Véronique CATRY, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre QUINCY

FAITS ET PROCÉDURE,

Saisi par l’Office public départemental de l’habitat des Hauts de Seine d’une action tendant à faire prononcer la résiliation du bail consenti à monsieur et madame Y le 31 mars 1998 et ordonner l’expulsion des occupants avec suppression du délai de deux mois au motif que ceux-ci ne jouissaient pas paisiblement des locaux, le tribunal d’instance de Boulogne Billancourt, par un jugement rendu le 31 mai 2011 auquel il convient de se reporter pour un plus ample exposé des faits, a :

— a donné acte du désistement à l’encontre de monsieur Y,

— rejeté les demandes de l’Office public départemental de l’habitat des Hauts de Seine,

— condamné madame A Y aux dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe en date du 7 juillet 2011, l’Office public départemental de l’habitat des Hauts de Seine a relevé appel de cette décision.

Dans des conclusions déposées le 12 avril 2012, il demande à la cour de :

— infirmer la décision entreprise sauf en ce qu’elle a condamné madame A Y sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— prononcer la résiliation du bail,

— ordonner l’expulsion de madame A Y et des occupants de son chef,

— supprimer le délai de deux mois prévu par l’article 62 de la loi du 9 juillet 1991,

— autoriser l’Office à faire transporter les meubles et objets mobiliers garnissant le logement dans un garde-meubles,

— condamner madame A Y à payer une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant des loyers, charges en sus,

— débouter madame Y de ses demandes et la condamner à payer la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le bailleur expose que le fils de madame A Y, B G, qui occupe le logement avec celle-ci a commis des nuisances répétées qui ont nui gravement à la tranquillité des autres occupants de l’immeuble, qu’il a participé à un trafic de produits stupéfiants important et récurrent dans l’immeuble, que les déclarations recueillies par l’huissier de justice commis par le tribunal d’instance confirme le climat de terreur dans lequel vivent les autres locataires auxquels le bailleur doit une jouissance paisible.

Reprochant au premier juge d’avoir statué en équité et non en droit, il soutient que madame A Y est responsable des agissements des occupants de son chef, qu’elle a manqué a son obligation de jouir paisiblement du bien et a engagé sa responsabilité contractuelle.

Par des conclusions déposées le 17 novembre 2011, madame A Y sollicite :

— la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu’il l’a condamnée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à payer les dépens et a rejeté sa demande de dommages-intérêts,

— le retrait des débats du procès-verbal dressé par la SCP X-BOUTANOS, huissier de justice,

— la condamnation de l’Office public départemental de l’habitat des Hauts de Seine à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

— subsidiairement, l’octroi de délais pour quitter les lieux,

— la condamnation de l’Office public départemental de l’habitat des Hauts de Seine à lui payer la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que le preneur n’est pas tenu des troubles qui ont cessé à la date où le juge statue et soutient que les troubles invoqués par le bailleur dans le cadre de la présente instance sont anciens et que leur persistance n’est pas démontrée.

Elle conteste la validité du procès-verbal dressé par l’huissier de justice au motif que ce dernier ne pouvait être commis pour procéder à une enquête et ajoute qu’aucune des déclarations recueillies par l’officier ministériel ne met en cause des membres de sa famille.

Elle conteste la véracité du contenu du rapport de gardiennage établi le 9 janvier 2009.

Elle indique que ses voisins ont signé une pétition pour contester la demande d’expulsion fait à son encontre.

Elle note que l’arrêt rendu par la chambre des appels correctionnels de cette cour le 9 décembre 2010 ne concerne pas Kévin qui était mineur à l’époque des faits, que l’appelante ne produit pas le jugement du tribunal pour enfants concernant son fils et évoque un rôle mineur de ce dernier dans le trafic de produits stupéfiants poursuivi.

Madame A Y ajoute qu’elle sollicite depuis 2000 l’octroi d’un nouveau logement, en vain et que B, désormais majeur ne vit plus à son domicile.

Elle s’oppose à la suppression du délai de deux mois prévu par l’article 62 de la loi du 9 juillet 1991, sollicite au contraire des délais pour quitter les lieux et invoque le caractère abusif de la procédure suivie contre elle.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits et prétentions.

L’instruction de l’affaire a été close le 3 mai 2012.

MOTIFS

En application de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 le locataire est obligé d’user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location.

Le locataire est responsable envers le bailleur et envers ses voisins des agissements des occupants de son chef.

Cette responsabilité est engagée par le seul fait de l’existence d’un trouble causé par les occupants du local litigieux.

Si la juridiction saisie doit prendre en compte l’ensemble des éléments de fait qui lui sont soumis et notamment ceux relatifs à la situation dans le temps des troubles dénoncés, la disparition ou la persistance des troubles est de nature à influer sur l’appréciation de la gravité de la faute contractuelle imputée au locataire au regard de la demande de résiliation du contrat mais n’affecte pas le principe même de responsabilité du locataire.

En l’espèce, il ressort des pièces produites que :

— madame A Y est locataire d’un appartement situé au rez-de-chaussée du bâtiment 1 escalier 2 dans l’ensemble immobilier situé 2 square des Moulineaux à Boulogne Billancourt selon un bail signé le 31 mars 1998, qu’elle occupe avec son fils B ;

— le contrat fait référence au règlement intérieur des immeubles qui disposent notamment que les espaces communs doivent être réservés à la stricte circulation des personnes (hall d’entrée, escaliers, abords des bâtiments), que les parents doivent surveiller leurs enfants pour qu’ils n’occasionnent pas de détériorations par leurs jeux;

— un rapport de gardiennage en date du 9 janvier 2009 mentionne que B Y squatte les escaliers et que des salissures et de l’urine ont été vu plusieurs fois après son passage ; le bailleur a adressé à madame A Y le 2 février 2009 une lettre d’avertissement à ce sujet ;

— le 9 juin 2009, une opération de police a eu lieu dans le square de l’Avre et le square des Moulineaux afin de démanteler un trafic de produits stupéfiants ;

— le 9 décembre 2010, la 8e chambre de cette cour d’appel, dans les motifs d’un arrêt confirmant la culpabilité de sept personnes majeures dans un trafic de produits stupéfiants d’une importance certaine ayant été opéré au cours des années 2008 et 2009, mentionne que les surveillances policières décrivent des transactions illicites réalisées entre le mois de mars et le mois de juin 2009 par D E 'le plus souvent avec l’assistance de guetteurs, dont B Y, mineur ;'

— l’échange de correspondances entre divers élus locaux sollicités par madame A Y, courant 2009 et la coupure de presse en date du 9 juin 2009 témoignent du caractère notoire du 'système de terreur’ et de l’insécurité quotidienne dans lesquels vivent les habitants du square des Moulineaux du fait des divers trafics qui s’y déroulent.

S’il n’appartient pas à un huissier de recueillir des déclarations au-delà de simples commentaires de constatations matérielles qui, elles, entrent au contraire dans sa mission, les éléments rapportés par un huissier n’en constituent pas moins des éléments de pur fait qui peuvent être soumis à la contradiction.

En l’espèce, le constat dressé par maître X, huissier de justice sur désignation judiciaire, comporte une constatation matérielle portant sur la présence de Kévin Y le 27 septembre 2010 dans l’appartement loué par madame A G.

Il n’y a pas lieu de l’écarter des débats.

Pour le surplus, les déclarations recueillies par l’huissier ne font que confirmer les graves nuisances subies par les habitants de la résidence, déjà largement établies par les pièces précédemment citées et ne comportent aucun élément de fait impliquant nommément la famille Y.

En revanche, s’il est constant (ainsi qu’il ressort notamment du courrier adressé par madame A Y le 19 août 2009 à monsieur le sénateur-maire de Boulogne) que Kévin Y a été incarcéré à l’occasion de la procédure pénale engagée au début de l’été 2009, aucune pièce du dossier n’établit que la responsabilité pénale de l’intéressé a été reconnue dans les faits de trafic de produits stupéfiants à l’origine des troubles subis par les habitants de la résidence, cette détention de quatre mois pouvant correspondre à une période de détention provisoire.

Il n’est pas davantage établi par les pièces produites par le bailleur que le jeune homme ait été condamné pour des faits de même nature pour une période antérieure.

Dans ces circonstances, il n’est pas démontré que les troubles particulièrement graves subis par les habitants du square des Moulineaux et qui résultent notoirement des trafics qui s’y déroulent, soient directement imputables au fait d’un occupant du local pris à bail par madame A Y.

Par ailleurs, les seuls faits rapportés par le gardien le 9 janvier 2009 et imputables de façon certaine à B Y (le fait de squatter dans les escaliers) ne sauraient par leur nature et leur caractère unique, caractériser une violation des obligations du locataire suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat.

Dans ces circonstances, après substitution des motifs qui précèdent à ceux du premier juge, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté l’OPH de ses demandes relatives à la résiliation du bail et à ses conséquences.

Dans un contexte difficile tant pour l’Office public départemental de l’habitat des Hauts de Seine auquel il appartient de veiller à la sécurité et à la sérénité de l’ensemble de ses locataires que pour madame A Y qui sollicite depuis 2005 l’attribution d’un autre logement auprès du bailleur et multiplie depuis 2003 les démarches auprès des élus en évoquant un sentiment d’insécurité lié à son environnement et en insistant depuis 2009 sur son souci de protéger son fils de relations néfastes, il ne saurait être reproché au bailleur d’avoir recouru à justice.

Madame A Y doit ainsi être déboutée de sa demande indemnitaire.

Les mêmes motifs conduisent à laisser à la charge de chaque partie les frais non répétibles et les dépens exposés par chacune en première instance et devant la cour.

Le jugement dont appel sera ainsi infirmé sur ces deux points.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Substituant les motifs qui précèdent à ceux du premier juge,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande de résiliation du bail et les demandes annexes à cette résiliation formées par l’Office public départemental de l’habitat des Hauts de Seine ;

L’infirme pour le surplus et, statuant à nouveau,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Dit que chaque partie conservera la charge des dépens par elle exposés devant le premier juge;

Y ajoutant,

Déboute madame A Y de sa demande indemnitaire ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant la cour ;

Dit que chaque partie conservera la charge des dépens par elle exposés devant la cour.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Charles LONNE, président et par Madame QUINCY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

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Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 2ème section, 26 juin 2012, n° 11/05334