Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 7 novembre 2019, n° 19/02298

  • Astreinte·
  • Hôtel·
  • Ordonnance·
  • Code de commerce·
  • Liquidation·
  • Injonction·
  • Juge des référés·
  • Document·
  • Mandataire ad hoc·
  • Signification

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 14e ch., 7 nov. 2019, n° 19/02298
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 19/02298
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nanterre, 18 février 2019, N° 2019R00179
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 34F

14e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 NOVEMBRE 2019

N° RG 19/02298 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TDHF

AFFAIRE :

Z X

C/

SARL HOTEL MODERNE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 19 Février 2019 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° RG : 2019R00179

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Julie BARRERE

Me Pierre-antoine CALS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur Z X

né le […] à […]

de nationalité algérienne

[…]

[…]

Représenté par Me Julie BARRERE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 638

assisté de Me Damien CHEVRIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0920 -

APPELANT

****************

SARL HOTEL MODERNE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 408 622 207

[…]

[…]

Représenté par Me Pierre-antoine CALS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 719

assisté de Me Barthélémy LEMIALE, avocat

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 25 septembre 2019 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie LE BRAS, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Nicolette GUILLAUME, président,

Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller,

Madame Marie LE BRAS, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Agnès MARIE,

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL Hôtel Moderne est associée minoritaire de la société KJ, 90% des parts sociales étant détenues depuis le 12 juillet 2016 par M. Z X qui s’en est également vu confier la gérance par délibération de l’assemblée générale des associés du même jour.

Par ordonnance de référé réputée contradictoire du 15 novembre 2017, le président du tribunal de commerce de Nanterre saisi par la SARL Hôtel Moderne :

— a désigné la SELARL AJRS en qualité de mandataire ad hoc avec pour mission de convoquer les associés de la SARL KJ en assemblée générale pour approbation des comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2016,

— a ordonné à M. X de produire les documents repris sous l’article L223-26 du code de commerce, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter du quinzième jour de la signification de la décision,

— a fixé la durée de l’astreinte au 15 janvier 2018, terme au delà duquel il sera à nouveau statué,

— s’est réservé la liquidation de l’astreinte.

Cette décision a été signifiée à M. X par acte remis en l’étude d’huissier le 29 novembre 2017.

La SARL Hôtel Moderne a par la suite saisi le juge des référés aux fins d’obtenir la liquidation de l’astreinte, par assignation délivrée le 14 janvier 2019 à M. X.

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 19 février 2019, le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre a :

— liquidé l’astreinte définitive à la somme de 9 600 euros et a condamné M. X à payer cette somme à la SARL Hôtel Moderne,

— ordonné à M. X la communication des documents listés à l’article L223-26 du code de commerce sous astreinte de 400 euros par jour de retard à compter de la quinzaine suivant la signification de l’ordonnance jusqu’au 20 avril 2019,

— réservé la liquidation de ladite astreinte,

— condamné M. X à payer à la SARL Hôtel Moderne la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné M. X aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 29 mars 2019, M. X a interjeté appel de l’ensemble des dispositions de ladite ordonnance, intimant la SARL Hôtel Moderne.

Dans ses conclusions déposées au greffe le 23 avril 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses moyens et prétentions, M. X demande à la cour au visa des articles L131-2 et suivants du code des procédures civiles d’exécution de :

— infirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise,

en conséquence,

— débouter la SARL Hôtel Moderne de l’ensemble de ses demandes,

— condamner la SARL Hôtel Moderne au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit de Me Chevrier, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions déposées le 21 juin 2019 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses moyens et prétentions, la SARL Hôtel Moderne demande à la cour au visa des articles L131-3 et L131-4 du code des procédures civiles d’exécution, de l’article 223-26 du code de commerce et de l’article 700 du code de procédure civile de :

— confirmer l’ordonnance entreprise,

— liquider l’astreinte définitive à la somme de 9 600 euros et de condamner M. X à lui payer cette somme,

— ordonner à M. X la communication des documents listés à l’article L223-26 du code de commerce sous astreinte de 400 euros par jour de retard,

— condamner M. X au paiement d’une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. X aux dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 septembre 2019.

Par conclusions déposées le 24 septembre 2019, M. X a sollicité la révocation de l’ordonnance de clôture et son report au jour de l’audience afin de lui permettre de produire deux nouvelles pièces, à savoir un extrait Kbis de la société KJ mentionnant l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire et un courrier en date du 19 septembre 2019 du liquidateur judiciaire.

À l’audience, avant le déroulement des débats, la SARL Hôtel Moderne ayant donné son accord au report de la clôture et expressément renoncé à discuter les deux dernières pièces produites par l’appelant, l’ordonnance de clôture rendue le 19 septembre 2019 a été révoquée et la procédure a été à nouveau clôturée par mention au plumitif.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- sur la liquidation de l’astreinte :

Pour contester la liquidation de l’astreinte, M. X fait valoir que celle-ci ne peut être qualifiée d’astreinte définitive en l’absence d’astreinte provisoire préalablement ordonnée et qu’elle n’a par ailleurs pas commencé à courir dans la mesure où il n’a pas été rendu destinataire de la signification de l’ordonnance du 15 novembre 2017 qui l’a prononcée.

M. X prétend également ne pas être responsable du retard pris dans la transmission des documents visés à l’article L223-26 du code de commerce pour l’exercice clos au 31 décembre 2016, imputable selon lui à l’ancien gérant, M. Y, par ailleurs gérant de la SARL Hôtel Moderne,

qui était déjà dans l’impossibilité de régler l’expert-comptable compte tenu de l’état de cessation de paiement dans lequel se trouvait la SARL KJ.

Estimant que ces circonstances constituent un cas de force majeure, M. X demande à ce que l’astreinte ne soit pas liquidée et à défaut, que son quantum soit considérablement minoré, voire fixé à un montant symbolique, la SARL Hôtel Moderne n’ayant subi aucun préjudice.

En réponse, la SARL Hôtel Moderne soutient que l’ordonnance du 15 novembre 2017 a été régulièrement signifiée à l’adresse de l’appelant le 29 novembre 2017 et qu’à défaut de communication par ce dernier des documents visés à l’article L223-26 du code de commerce, la liquidation de l’astreinte pour la durée comprise entre le 14 décembre 2017 et le 15 janvier 2018 est parfaitement fondée.

Aux termes de l’article L131-2 du code des procédures civiles d’exécution, l’astreinte est provisoire ou définitive. Elle est considérée comme provisoire à moins que le juge ait précisé son caractère définitif. Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu’après le prononcé d’une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine.

En l’espèce, le juge des référés n’ayant pas précisé la nature de l’astreinte dans le dispositif de l’ordonnance du 15 novembre 2017, celle-ci doit être considérée comme provisoire et non pas définitive comme l’a qualifiée par erreur le premier juge, étant noté que cette qualification erronée est au surplus sans portée, une astreinte définitive étant liquidée comme une astreinte provisoire lorsqu’elle n’a pas été précédée d’une première astreinte provisoire.

Par ailleurs, l’appelant ne peut soutenir que l’astreinte n’a pas commencé à courir. En effet, même si ce dernier n’a pas été touché en personne, l’ordonnance du 15 novembre 2017 a toutefois été régulièrement signifiée à son domicile à Trappes, l’acte de signification ayant été déposé par l’huissier en son étude, après avoir vérifié que l’intéressé était domicilié à l’adresse indiquée et avoir constaté son absence.

Il sera observé que M. X ne formule d’ailleurs aucune critique sur les diligences entreprises par l’huissier de justice et la régularité de la signification et qu’il s’est en outre domicilié à cette même adresse dans sa déclaration d’appel.

L’astreinte a donc bien commencé à courir le 14 décembre 2017, soit le 15e jour suivant la signification du 29 novembre 2017, conformément à la décision du juge des référés.

L’article L 131-4 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. Le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation. L’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient en tout ou partie d’une cause étrangère.

Pour être exonéré de la liquidation de l’astreinte, il incombe à celui contre lequel elle a été prononcée de prouver que l’obligation de faire qui lui a été imposée a été correctement exécutée ou au contraire qu’elle était impossible à exécuter pour des raisons indépendantes de sa volonté, sachant que le comportement du débiteur doit s’apprécier à compter du prononcé de la décision fixant l’injonction assortie de l’astreinte.

En l’espèce, M. X reconnaît qu’il ne s’est pas conformé à l’injonction du juge des référés et n’a donc pas communiqué à la SARL Hôtel Moderne les documents visés à l’article L223-26 du code de commerce.

Pour expliquer sa défaillance, il met en avant l’état de cessation de paiement de la SARL KJ avant même qu’il en assure la gérance et l’impossibilité de rémunérer son expert-comptable.

Il produit pour justifier de sa bonne foi et de la cessation de l’activité de la société, les relevés bancaires de cette dernière pour l’exercice 2016, une attestation de l’expert comptable concernant le chiffre d’affaires réalisé entre janvier et novembre 2016 ainsi que les pièces relatives à l’expulsion de la société KJ des locaux qu’elle louait le 22 février 2018 et l’extrait KBIS de la société portant mention de son placement en liquidation judiciaire à compter du 3 septembre 2019.

S’il n’est pas contestable, au regard des pièces produites, ce point n’étant d’ailleurs pas discuté par la SARL Hôtel Moderne, que la SARL KJ était confrontée dès l’année 2016 à d’importantes difficultés financières, il n’en demeure pas moins que M. X pouvait malgré tout se conformer au moins en partie à l’injonction du juge des référés en adressant au mandataire ad hoc et à l’associé minoritaire, certains des documents prévus à l’article L223-26 du code de commerce tels que son rapport de gestion ou l’inventaire qu’il lui appartenait d’établir.

Or, l’appelant ne produit aucun pièce établissant qu’il a communiqué certains des documents attendus ou le cas échéant qu’il a informé le mandataire ad hoc et la partie adverse des difficultés auxquelles il était confronté, alors même que le mandataire ad hoc lui a adressé à son domicile des courriers le 12 mars 2018 et le 25 avril 2019 lui rappelant précisément les documents réclamés.

M. X ne justifie pas non plus des raisons pour lesquelles les comptes annuels n’ont pas été établis par l’expert-comptable, aucune des pièces produites ne confirmant les démarches de M. X pour les obtenir et le prétendu refus de l’expert-comptable de les établir en l’absence de rémunération.

L’appelant échoue ainsi à justifier de circonstances caractéristiques d’une force majeure qui l’aurait empêché d’exécuter l’ordonnance du 15 novembre 2017.

Toutefois, la situation financière et économique difficile de la SARL KJ au jour où M. X en est devenu le gérant, qui à l’évidence n’a fait que s’aggraver avec le temps au regard de l’expulsion des locaux qu’elle occupait en février 2018, a nécessairement généré pour l’intéressé des difficultés pour établir ou recueillir les pièces réclamées au titre de l’exercice 2016, étant rappelé qu’il n’a repris la gérance de la société qu’en cours d’exercice.

Dans la mesure où ces difficultés ont à l’évidence perduré après le prononcé de l’ordonnance du 15 novembre 2017, il convient de réduire le taux d’astreinte fixé par le juge des référés en le limitant à un montant de 50 euros par jour. L’astreinte sera en conséquence liquidée pour la période comprise entre le 14 décembre 2017 et le 15 janvier 2018 à la somme de 1 600 euros. L’ordonnance entreprise sera donc infirmée de ce chef.

- sur le prononcé d’une nouvelle astreinte :

Il est constant que la société KJ a cessé son activité de restauration rapide depuis février 2018, après son expulsion des locaux qu’elle louait. Elle a depuis été placée en liquidation judiciaire par décision du tribunal de commerce du 3 septembre 2019, Maître Legras de Grandcourt ayant été désigné

comme liquidateur judiciaire.

Compte tenu de cette cessation d’activité et de l’intervention du liquidateur, il n’apparaît pas nécessaire d’assortir l’injonction donnée à M. X par l’ordonnance du 15 novembre 2017 d’une nouvelle astreinte.

L’ordonnance du 19 février 2019 sera en conséquence infirmée en ce qu’elle a assorti l’injonction donnée à M. X de communiquer les documents visés à l’article L223-26 du code de commerce d’une nouvelle astreinte de 400 euros par jour à compter de la quinzaine suivant la signification de ladite ordonnance jusqu’au 20 avril 2019.

- sur les demandes accessoires :

M. X n’étant accueilli qu’en partie en son recours, l’ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Il convient en outre de laisser à chaque partie la charge des dépens qu’elle aura exposés en cause d’appel.

L’équité commande par ailleurs de débouter chacune des parties de sa demande indemnitaire sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME l’ordonnance en date du 19 février 2019 SAUF en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance ;

statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

LIQUIDE l’astreinte prononcée par le juge des référés en son ordonnance du 15 novembre 2017 à la somme de 1 600 euros pour la période comprise entre le 14 décembre 2017 et le 15 janvier 2018 ;

CONDAMNE en conséquence M. Z X à payer ladite somme à la SARL Hôtel Moderne ;

DÉBOUTE la SARL Hôtel Moderne de sa demande tendant à la fixation d’une nouvelle astreinte;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

DIT que chaque partie supportera les dépens qu’elle aura exposés en cause d’appel.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en

ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du

code de procédure civile et signé par Madame Nicolette GUILLAUME, président et par Madame

Agnès MARIE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 7 novembre 2019, n° 19/02298