CAA de BORDEAUX, 5ème chambre - formation à 3, 28 août 2018, 15BX03010, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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marches-publics.legibase.fr · 15 octobre 2018
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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 5e ch. - formation à 3, 28 août 2018, n° 15BX03010
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 15BX03010
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Bordeaux, 9 juillet 2015, N° 1204319
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037357741

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Alm Allain, en sa qualité de mandataire du groupement composé d’elle-même et de la société BG2C, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la condamnation du centre hospitalier de Libourne à lui verser la somme de 281 144 euros HT, en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chances sérieuses de remporter le marché conclu avec la société Seg Fayat pour le lot n° 2 « terrassement et gros oeuvre » relatif à la construction d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes à Libourne.

Par un jugement n° 1204319 du 10 juillet 2015 le tribunal administratif de Bordeaux a condamné le centre hospitalier de Libourne à verser à la société Alm Allain la somme de 160 000 euros à titre d’indemnité et a condamné le groupement de maîtrise d’oeuvre représenté par la société civile professionnelle Bégué-Peyrichou-Gérard à garantir intégralement le centre hospitalier de Libourne de la condamnation mise à sa charge.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 septembre 2015 et des mémoires complémentaires enregistrés les 21 octobre, 29 décembre 2016 et 10 février 2017, la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, représentée par Me C…, en sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d’oeuvre composé d’elle-même, de la société Lavalin et de M. A…, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 10 juillet 2015 du tribunal administratif de Bordeaux en ce qu’il la condamne à garantir le centre hospitalier de Libourne des condamnations prononcées à son encontre ;

2°) de déclarer irrecevables, les demandes présentées par la société Alm Allain tendant à l’indemnisation d’un préjudice prétendument subi par la société BG2C ;

3°) dans l’hypothèse où le jugement serait confirmé sur le principe de la responsabilité du centre hospitalier de Libourne, de réduire le montant des condamnations prononcées au bénéfice de la société Alm Allain au seul préjudice personnellement subi par elle ;

4°) de débouter le centre hospitalier de Libourne des conclusions d’appel en garantie dirigées contre le groupement requérant ;

5°) de condamner la SAS SNC Lavalin à la garantir des condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;

6°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Libourne ou de toute partie perdante une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – c’est à tort que le tribunal administratif a considéré que l’action présentée par la société Alm Allain, en qualité de mandataire du groupement d’entreprise composé des sociétés Alm Allain et BG2C, était recevable au motif que la mission du mandataire s’étendait à la représentation des membres du groupement en justice ; en effet, en vertu de l’article R. 431-5 du code de justice administrative, les parties ne peuvent pas se faire représenter en justice par d’autres mandataires que ceux qui sont visés par le texte ; dans ces conditions, alors même que la société BG2C lui en aurait donné mandat, la société Alm Allain ne pouvait représenter la société BG2C en justice et ce même si la société Alm Allain était représentée par un avocat ;

 – sur le fond, la cour devra statuer sur la responsabilité du centre hospitalier de Libourne, et devra de toute façon, réduire le montant de la condamnation prononcée au bénéfice de la société Alm Allain dès lors que cette condamnation comprend l’indemnisation du prétendu préjudice subi par la société BG2C pour laquelle la société Alm Allain n’avait pas qualité pour demander réparation ;

 – en ce qui concerne la responsabilité du groupement de maîtrise d’oeuvre, c’est à tort que le tribunal a retenu sa responsabilité dans le cadre de l’appel en garantie ; en effet, le centre hospitalier a réceptionné sans réserves, le 5 mars 2015, les prestations de maîtrise d’oeuvre en établissant le décompte général définitif sans réfaction ni réserves ; dans ces conditions, le centre hospitalier ne peut rechercher la responsabilité contractuelle des maîtres d’oeuvre à un autre titre qu’un éventuel manquement à leur obligation de conseil lors de la réception des travaux ;

 – la société requérante n’a commis aucune faute, dès lors qu’elle n’a pas contrairement à ce qu’a retenu le tribunal dans son jugement, établi le CCAP des marchés de travaux, le CCAP relevant en effet, des pièces administratives que la maîtrise d’oeuvre n’a pas à établir ; l’arrêté du 21 décembre 1993 portant application du décret du 29 novembre 1993 précise que le dossier de consultation des entreprises est constitué « des pièces administratives et techniques prévues au contrat, ainsi que des pièces élaborées par la maîtrise d’oeuvre » ; c’est le centre hospitalier qui a lui-même procédé à l’établissement du CCAP des marchés de travaux et qui est donc à l’origine des contradictions affectant le CCAP et qui est l’auteur de l’erreur figurant à l’article 8-2 de ce document ; ainsi que le tribunal l’a retenu dans son jugement, c’est le CCAP qui comportait des erreurs et non le CCTP dont les dispositions étaient parfaitement en cohérence avec la mission confiée à la maîtrise d’oeuvre par contrat du 24 juillet 2009 ; c’est donc à tort que le tribunal a retenu la responsabilité du groupement de maîtrise d’oeuvre, à raison de l’erreur commise dans la rédaction du CCAP des marchés de travaux ;

 – par ailleurs contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, le groupement de maîtrise d’oeuvre n’a pas invité les entreprises à confirmer ou modifier leurs offres ;

 – en ce qui concerne l’appel en garantie présenté à l’encontre de la SAS SNC Lavalin, la société Laumont Faure Ingénierie aux droits de laquelle vient la SNC Lavalin, avait la charge de la maîtrise d’oeuvre des lots structures, et ce, depuis l’élaboration des esquisses jusqu’à l’assistance du maître d’ouvrage à la réception des travaux ; or, le lot n° 2 relève des lots structures ; c’est la société Laumont Faure Ingénierie qui a établi le CCTP du lot n° 2 et c’est la SNC Lavalin qui a procédé à l’analyse des offres remises au titre de ce lot, après avoir interrogé les candidats, au sujet des caractéristiques de leurs offres respectives ; les fautes ne pourraient donc qu’être imputées à la SNC Lavalin ;

 – la maîtrise d’oeuvre s’est seulement assurée auprès des candidats du lot n° 2, que leurs offres globales et forfaitaires comportaient bien les installations de chantier, prenaient en considération les résultats du rapport géotechnique et comprenaient les études d’exécution, sans nullement inviter les entreprises à modifier leurs offres ; comme l’indique le rapport d’analyse des offres, c’est la société Fayat, qui a pris l’initiative d’inclure les études d’exécution dans son offre, moyennant un supplément ; la maîtrise d’oeuvre a refusé de prendre en considération la proposition de supplément de prix formulée de son propre chef par la société Fayat en retenant que son offre qui n’incluait pas les études d’exécution devait être considérée comme non conforme ;

 – à supposer même que la maîtrise d’oeuvre ait commis une faute, le préjudice subi par le centre hospitalier du fait des condamnations prononcées à son encontre est exclusivement imputable à ses propres fautes ; en effet, la maîtrise d’oeuvre a proposé d’écarter l’offre présentée par la société Fayat comme non conforme et c’est le centre hospitalier en pleine connaissance de ce que la société Fayat avait complété son offre, qui a décidé de passer outre l’avis de la maîtrise d’oeuvre et de déclarer l’offre de la société Fayat, conforme, le centre hospitalier ayant considéré dans son courrier du 9 février 2011 que le supplément de prix ne constituait pas une modification de son offre initiale, mais une précision ou un complément au sens de l’article 59 du code des marchés publics ;

 – le préjudice sollicité par la société Allain est surévalué dès lors que l’offre de la société Allain était inférieur de 6 % au montant de l’estimation de la maîtrise d’oeuvre, et dès lors le groupement ne pouvait escompter tirer un bénéfice important de la réalisation du marché ; le taux de résultat moyen dont fait état le groupement Alm est surévalué dès lors qu’il ne prend pas en compte le taux des exercices clos les 31 juillet 2012 et les 31 juillet 2013.

Un mémoire enregistré le 13 novembre 2015 a été présenté par M. B… A… sans ministère d’avocat et n’a pas été communiqué.

Par un mémoire en défense, enregistré au greffe le 18 décembre 2015 et des mémoires complémentaires enregistrés les 17 novembre, 21 décembre 2016, 17 janvier 2017 et 13 mars 2017 le centre hospitalier de Libourne, représenté par Me H…, conclut :

1°) au rejet de la requête de la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés ;

2°) au rejet des conclusions présentées par le groupement représenté par la société Alm Allain ;

3°) à ce que soit mise à la charge de la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – les conclusions présentées en appel par le groupement Alm Allain sont irrecevables, dès lors que ces conclusions présentées le 2 janvier 2017 soit au-delà du délai d’appel sont étrangères à celles présentées dans la requête d’appel du 9 septembre 2015 par l’atelier d’architecture Bégué-Peyrichou-Gérard et ces conclusions, tardives, ne peuvent donc être que rejetées ;

 – les demandes présentées par la société Alm Allain devant le tribunal administratif tendant à l’indemnisation d’un préjudice prétendument subi par la société BG2C étaient irrecevables, faute pour le mandataire du groupement d’entreprises composé des sociétés Alm Allain et BG2C de pouvoir valablement représenter les membres du groupement en justice ;

 – contrairement à ce que fait valoir l’atelier d’architecture Bégué-Peyrichou-Gérard, l’appel en garantie du 29 janvier 2014 a précédé de plus d’un an la notification du décompte général, qui a été notifié au maître d’oeuvre le 5 mars 2015, de sorte que les obligations contractuelles étaient en cours à la date à laquelle l’appel en garantie a été formé ; l’élément de mission ACT dont elle avait la charge, est caractérisée par une obligation de conseil, sur la base de l’élaboration d’un DCE comportant des éléments exacts ; en l’espèce, la maîtrise d’oeuvre a failli à sa mission en élaborant un DCE contenant des documents incohérents ; le conducteur d’opération n’a préparé qu’un projet de CCAP faisant l’objet d’une validation de la part du maître d’oeuvre mandataire ; la SCP Bégué-Peyrichou-Gérard n’établit pas que le projet de CCAP lui aurait été transmis tardivement ; la responsabilité retenue par les premiers juges est justifiée, se trouvant conforme aux dispositions de l’annexe 1 de l’arrêté du 21 décembre 1993 ; l’élément de mission ACT comporte l’analyse des offres des entreprises et l’élaboration d’un rapport d’analyse de ces offres ; l’atelier d’architecture a failli à sa mission dès lors que l’analyse des offres a révélé une incohérence entre le CCTP et le CCAP, dont il n’a pas informé le maître d’ouvrage, et que l’obligation de conseil imposait au maître d’oeuvre de saisir la maîtrise d’ouvrage de cette difficulté affectant la régularité de la consultation ; au lieu de reconnaitre son erreur, le maître d’oeuvre a incité les entreprises à modifier leur offre sans avertir le maître d’ouvrage des incohérences dans les documents ; le centre hospitalier en sa qualité de maître d’ouvrage, n’a commis aucune faute, la cohérence du DCE relevant de la seule responsabilité du maître d’oeuvre ; le groupement Alm Allain était susceptible d’être déclaré attributaire et l’incohérence du dossier de consultation cumulée avec l’analyse erronée des offres est à l’origine directe et exclusive du préjudice indemnisé.

Par un mémoire enregistré le 19 octobre 2016, la société Seg Fayat, représentée par Me D…, conclut :

1°) à titre principal, à sa mise hors de cause, compte-tenu de ce qu’aucune condamnation n’a été prononcée à son encontre, et qu’aucune conclusion n’est présentée contre elle ;

2°) à titre subsidiaire, à l’irrecevabilité des conclusions présentées en première instance par la société Alm Allain en qualité de mandataire du groupement de maîtrise d’oeuvre, et donc d’annuler le jugement, en tant qu’il a admis la recevabilité de l’action présentée par la société Alm Allain en qualité de mandataire ;

3°) d’annuler le jugement en tant qu’il a considéré que la rectification opérée par la société Seg Fayat avait méconnu le principe d’interdiction de modification des offres ;

4°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – la société Alm Allain n’a pas sollicité l’annulation du marché, qui a été attribué à la société Seg-Fayat, ce marché ayant d’ailleurs été entièrement exécuté et dans ces conditions la société Fayat n’avait aucune raison d’intervenir à l’instance alors que par ailleurs, le centre hospitalier de Libourne avait seulement présenté des conclusions d’appel en garantie ;

 – c’est à tort que le tribunal administratif a considéré que l’action présentée par la société Alm Allain, en qualité de mandataire du groupement d’entreprises composé des sociétés Alm Allain et BG2C était recevable au motif que la mission du mandataire s’étendait à la représentation des membres du groupement en justice ; en effet, en vertu de l’article R. 431-5 du code de justice administrative, les parties ne peuvent pas se faire représenter en justice par d’autres mandataires que ceux qui sont visés par le texte ;

 – contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, l’offre de la société Seg-Fayat, n’était pas irrégulière au regard du code des marchés publics, la jurisprudence admettant par ailleurs la possibilité pour un candidat, de pouvoir modifier son offre ; compte tenu de la prévalence des stipulations du CCAP sur celles du CCTP, qui résulte des termes de l’article 2-1 du CCAP, l’offre de la société SEG-Fayat n’était pas incomplète et respectait parfaitement les exigences formulées dans les documents de la consultation ; en indiquant au maître d’ouvrage que « s’il souhaitait intégrer en option, les études d’exécution du lot n° 1 gros oeuvre, à sa proposition, le montant à prendre en compte en supplément pour cette prestation était de 25 000 euros », la société SEG-Fayat a seulement corrigé son offre et sa candidature ne pouvait donc être évincée ; en ce qui concerne le principe d’intangibilité des offres, la modification de son offre par la société, bien qu’intervenue postérieurement à la date limite de réception des offres, résulte d’une simple erreur matérielle, l’offre ayant seulement été rectifiée à la demande du pouvoir adjudicateur ; l’offre n’a pas été substantiellement modifiée dès lors que la réalisation des plans d’exécution a été chiffrée à hauteur de seulement 25 000 euros, soit 1 % du prix global et forfaitaire du marché public de travaux litigieux ; en toute hypothèse, cette modification doit être considérée comme sans incidence, dès lors que l’offre de la société Fayat restait inférieure à celle de la société Alm Allain ;

 – en ce qui concerne le préjudice, la société Alm Allain, pouvait seulement demander réparation de son propre préjudice, n’étant pas recevable à demander réparation en qualité de mandataire du groupement d’entreprises composé des sociétés Alm Allain et BG2C ; le préjudice subi par la société Allain ne pourrait être déterminé qu’en fonction du seul bénéfice net, que lui aurait procuré le marché si elle l’avait obtenu ; elle ne justifie pas de son bénéfice net, ni de la marge nette qu’elle aurait pu obtenir ; en accordant à la société la somme de 160 000 euros, ce qui correspond à une marge de 7 %, le tribunal a fait une appréciation exagérée du préjudice subi par la société Alm Allain ; le manque à gagner qui pourrait être accordé à la société, ne pourrait être supérieur à 42 000 euros, pour les deux co-traitants Alm Allain et BG2C et la société Alm Allain ne peut être indemnisée que de sa quote-part du marché et à cet égard, la société Alm Allain n’a produit aucun document, tel que la convention de groupement susceptible de déterminer la répartition des travaux entre elle et la société BG2C ; l’indemnité qui pourrait être attribuée à la société Alm Allain ne saurait donc être supérieure à 21 000 euros.

Par un mémoire enregistré au greffe le 2 janvier 2017 et un mémoire complémentaire du 31 janvier 2017, la société Alm Allain, agissant en qualité du groupement Allain composé de la société Alm Allain et de la société BG2C, représentée par Me E…, conclut :

1°) à la réformation du jugement en ce qu’il n’a pas fait droit à la totalité de ses conclusions, et à la condamnation du centre hospitalier de Libourne à verser au groupement la somme de 281 144 euros HT au titre du préjudice découlant de son éviction irrégulière du marché ;

2°) à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Libourne la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – contrairement à ce que soutient le centre hospitalier de Libourne, les conclusions présentées par le groupement sont recevables, dès lors qu’elles constituent un appel incident présenté sans condition de délai ;

 – en ce qui concerne la recevabilité des écritures présentées par la société au nom de la société BG2C, la cour administrative d’appel de Marseille, par un arrêt du 7 mars 2011, Société La Clé du Nettoyage, n° 10 MA00592, a considéré que le groupement solidaire d’entreprises au sens de l’article 51 du code des marchés publics pouvait valablement être représenté en justice par le mandataire du groupement ; en vertu de l’article 7.1 de la convention, « la mission du mandataire s’étend à la représentation en justice des membres du groupement » ;

 – les arguments présentés en appel par la SEG-Fayat, société attributaire du lot n°2, correspondent à ceux qui ont été à juste titre écartés en première instance par le tribunal administratif ;

 – la société avait une chance sérieuse de remporter le marché et elle doit donc bénéficier d’une indemnisation de son manque à gagner du fait de l’absence d’attribution fautive ; l’offre de la société Fayat était en effet incomplète, faute de chiffrage des études d’exécution contrairement à ce que demandait le CCTP gros oeuvre ; son offre ne pouvait donc être retenue par le centre hospitalier ; en ce qui concerne les frais d’installation de chantier, ils étaient prévus par l’article 3.1.2 du CCTP et il résulte de différents articles du plan général de coordination en matière de sécurité, que l’entreprise de gros oeuvre est chargée d’effectuer les branchements des compteurs d’électricité, d’eau et de téléphone et de la mise en place des panneaux de chantier ; l’offre de la société Fayat aurait donc dû être rejetée comme irrégulière ; par ailleurs, cette offre méconnaissait le planning des travaux, le tribunal n’ayant pas répondu sur ce point ;

 – le caractère intangible des offres imposé par l’article 59 du code des marchés publics a été en l’espèce méconnu, le principe étant qu’en matière d’appel d’offres ouvert, la négociation est interdite, ce principe étant garant de l’égalité de traitement des candidats et de la transparence des procédures ;

 – le groupement Alm Allain aurait dû être l’attributaire de ce marché, dès lors que son offre a été classée en première position au terme du rapport d’analyse des offres ; le groupement est dès lors fondé à demander à être indemnisé du manque à gagner constitué par la somme de 281 144 euros HT augmentée des intérêts au taux légal depuis l’attribution du marché, cette somme correspondant au bénéfice net qu’aurait procuré à son groupement l’attribution du marché, à hauteur de 12 % du montant de l’offre de la société, égale à 2 285 725, 55 euros HT.

Par un mémoire enregistré le 3 février 2017 et un mémoire complémentaire enregistré le 1er mars 2017, la société Edeis, venant aux droits de la SNC Lavallin, représentée par Mes Arroyo et Moncany, conclut à titre principal au rejet de l’appel en garantie formé à l’encontre de la société Edeis par la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, à titre subsidiaire, à la réformation du jugement en ce qu’il a condamné le groupement de maîtrise d’oeuvre à garantir le centre hospitalier de Libourne des condamnations prononcées à son encontre, de rejeter l’ensemble des conclusions présentées à l’encontre de Edeis, et de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – les conclusions d’appel en garantie présentées à son encontre, sont irrecevables pour être nouvelles en appel, la société Atelier Architecture n’ayant formé aucune demande en première instance à son encontre, la société Edeis n’étant d’ailleurs pas partie en première instance ;

 – en tout état de cause, ces demandes sont mal fondées dès lors que comme le fait valoir la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, aucune faute ne peut être imputée au groupement de maîtrise d’oeuvre qui a rédigé les CCTP en respectant les termes de la mission de maîtrise d’oeuvre qui lui a été confiée ;

 – ce marché imposait au groupement titulaire de ce marché d’indiquer dans les CCTP que les études d’exécution seraient à la charge des entreprises titulaires des différents lots ; la faute a été commise par le conducteur d’opération, en indiquant dans le DCE à l’article 8-2, que les études d’exécution ne seraient pas à la charge des entreprises ;

 – en tout état de cause, si faute de la maîtrise d’oeuvre il y avait, cette faute serait uniquement imputable à la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés et non à la société Edeis qui a parfaitement indiqué dans le CCTP du lot n° 2 que les études d’exécution seront à la charge de l’entreprise titulaire du lot ; la société Edeis n’a commis aucune faute, en se conformant au marché de maîtrise d’oeuvre et aux dispositions de l’article 0.1.14 du CCTP du lot n° 0 commun à tous les corps d’Etat rédigé par la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés.

Par ordonnance du 2 mars 2017, la clôture de l’instruction a été fixée au 4 avril 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code des marchés publics ;

-la loi n°85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage et à ses rapports avec la maîtrise d’oeuvre privée ;

 – le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d’oeuvre confiées par des maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

 – l’arrêté du 21 décembre 1993 précisant les modalités techniques d’exécution des missions de maîtrise d’oeuvre confiées par des maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Pierre Bentolila,

 – les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

 – et les observations de Me F…, représentant la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, de Me G…, représentant la société Alm Allain et de Me I…, représentant la société Seg-Fayat.

Une note en délibéré présentée pour l’Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés a été enregistrée le 29 juin 2018.

Considérant ce qui suit :

1. Par contrat du 24 juillet 2009, le centre hospitalier de Libourne a, pour la construction d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), confié une mission de maîtrise d’oeuvre, à un groupement de maîtrise d’oeuvre, constitué par la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, architecte mandataire, du bureau d’étude, la SAS Laumond Faure Ingénierie, aux droits de laquelle est venue la SNC Lavallin, puis la société Edeis, et de M. B… A…, paysagiste. Le centre hospitalier de Libourne a engagé le 2 décembre 2010, pour le lot n°2 « terrassements et gros oeuvre », une procédure d’appel d’offres ouvert. La société Seg Fayat, a été attributaire du lot n° 2 du marché, pour un montant de 2 120 000 euros HT. Le groupement momentané d’entreprises composé de la société Alm Allain et de la société BG2C, candidat évincé, a demandé par l’intermédiaire de la société Alm Allain mandataire du groupement, devant le tribunal administratif de Bordeaux, la condamnation du centre hospitalier de Libourne à verser au groupement la somme de 281 144 euros HT, en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chances sérieuses de remporter le marché. Par un jugement n° 1204319 du 10 juillet 2015, le centre hospitalier de Libourne a été condamné à verser au groupement Alm Allain la somme de 160 000 euros à titre d’indemnité et la société Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés a été condamnée à garantir à hauteur de 100 % le centre hospitalier de Libourne de la condamnation prononcée à son encontre.

2. La SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés demande la réformation du jugement en ce qu’il la condamne à garantir le centre hospitalier de Libourne de sa condamnation et le groupement Alm Allain demande la réformation du jugement en tant qu’il n’a pas fait entièrement droit à ses prétentions indemnitaires.

Sur les conclusions présentées par le groupement d’entreprises Alm Allain / BG2C :

3. La société Alm Allain, par un mémoire du 2 janvier 2017, demande la condamnation du centre hospitalier de Libourne à lui verser la somme de 281 144 euros HT demandée en première instance en réparation du préjudice subi, le tribunal administratif n’ayant fait droit à ses conclusions indemnitaires qu’à hauteur de 160 000 euros. Le centre hospitalier de Libourne oppose en défense l’irrecevabilité de ces conclusions dès lors qu’elles seraient étrangères à celles présentées dans la requête d’appel du 9 septembre 2015 par la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés. Le jugement du tribunal administratif a été notifié au groupement Alm Allain / BG2C le 10 juillet 2015, si bien que les conclusions du 2 janvier 2017 présentées en appel par le groupement Alm Allain sont intervenues au-delà de l’expiration du délai d’appel. Ces conclusions ne peuvent non plus être regardées comme recevables pour constituer un appel incident dès lors que les conclusions indemnitaires du groupement Alm Allain / BG2C soulèvent un litige distinct de celui faisant l’objet de l’appel principal présenté par la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, qui porte non sur la condamnation du centre hospitalier de Libourne au profit du groupement Alm Allain / BG2C, lequel n’a pas entendu faire appel de sa condamnation, mais uniquement sur la condamnation de la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés à garantir le centre hospitalier des condamnations prononcées à son encontre. Le centre hospitalier de Libourne est dès lors fondé à opposer au groupement Alm Allain / BG2C, l’irrecevabilité de ses conclusions présentées en appel.

Sur l’appel de la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés :

4. En premier lieu, la société requérante, condamnée par le tribunal administratif à garantir le centre hospitalier de Libourne de l’intégralité de sa condamnation au profit du groupement Alm Allain/ BG2C, fait valoir l’irrecevabilité des conclusions d’appel en garantie présentées par le centre hospitalier de Libourne à son encontre. Elle soutient que, dès lors que le centre hospitalier a réceptionné sans réfaction ni sans réserves, le 5 mars 2015, les prestations de maîtrise d’oeuvre en établissant le décompte général définitif n’intégrant pas la contestation relative à l’appel en garantie présenté en défense devant le tribunal administratif dans son mémoire du 29 janvier 2014, elle ne serait plus recevable à présenter un tel appel en garantie et que dans ces conditions, le centre hospitalier ne peut rechercher la responsabilité contractuelle des maîtres d’oeuvre à un autre titre qu’un éventuel manquement à leur obligation de conseil lors de la réception des travaux. Toutefois, si, après la transmission au titulaire du marché du décompte général qu’il a établi et signé, le maître d’ouvrage ne peut, nonobstant l’engagement antérieur d’une procédure juridictionnelle, réclamer à celui-ci, au titre de leurs relations contractuelles, des sommes dont il n’a pas fait état dans le décompte, il peut néanmoins présenter à son encontre des conclusions en garantie. Par suite, la circonstance que le décompte général intervenu entre le groupement de maîtrise d’oeuvre et le centre hospitalier de Libourne est définitif ne saurait faire obstacle à la recevabilité des conclusions d’appel en garantie présentées par le centre hospitalier de Libourne à l’encontre de la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés.

5. En deuxième lieu, en ce qui concerne le montant de l’indemnisation mise à la charge du centre hospitalier de Libourne par le tribunal administratif au profit du groupement Alm Allain et emportant condamnation de la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés dans le cadre de l’appel en garantie, la SCP oppose le fait que le tribunal administratif aurait dû rejeter comme irrecevables les demandes présentées par la société Alm Allain au nom du groupement d’entreprises constitué avec la société BG2C. Il résulte de l’instruction que dans sa requête présentée devant le tribunal administratif, le 7 décembre 2012, la société Alm Allain a présenté des conclusions au nom du groupement d’entreprises Alm Allain / BG2C, demandant la condamnation du centre hospitalier à verser au groupement d’entreprises la somme globale de 281 144 euros HT, et le tribunal administratif a prononcé une condamnation du centre hospitalier de Libourne à verser la somme de 160 000 euros au profit du groupement. Ainsi que l’ont considéré à juste titre les premiers juges, la société Alm Allain représentée devant le tribunal administratif par un avocat, avait été habilitée, par lettre de candidature du 17 janvier 2011, à être mandataire du groupement composé des sociétés Alm Allain et BG2C et en vertu de l’article 7.1 de la convention de groupement conclue entre ces deux sociétés, la mission du mandataire s’étendait à la représentation des membres du groupement en justice. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés aux conclusions présentées en première instance par le groupement Alm Allain / BG2C doit être écartée.

6. En troisième lieu, aux termes du I de l’article 59 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable au litige : « Il ne peut y avoir de négociation avec les candidats. Il est seulement possible de demander aux candidats de préciser ou de compléter la teneur de leur offre » et selon le III de l’article 53 du code des marchés publics : « Les offres (…) irrégulières (…) sont éliminées (…) ». Il résulte de ces dispositions, qu’ainsi que l’ont estimé à bon droit les premiers juges, si, dans les procédures d’appel d’offres, l’acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires dont l’offre est irrégulière à la régulariser, la régularisation ne peut avoir pour effet d’en modifier les caractéristiques substantielles, le prix global de l’offre devant notamment demeurer inchangé. Il résulte de l’instruction, que l’offre initiale de la société Seg Fayat était de 2 095 000 euros HT, mais la société, afin de prendre en compte la somme de 25 000 euros HT correspondant à la prise en charge par la société des études d’exécution, a porté son offre à la somme de 2 120 000 euros HT. Dans ces conditions, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé sur le fondement des dispositions précitées du code des marchés publics que l’offre de la société Seg Fayat ayant été irrégulièrement modifiée, cette offre devait être éliminée et que l’attribution du marché était dès lors entachée d’illégalité. La SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés demande, de réduire le montant des condamnations prononcées au bénéfice du groupement Alm Allain au seul préjudice personnellement subi par cette société. Mais comme il vient d’être indiqué, le groupement d’entreprises Alm Allain / BG2C était en droit de présenter des conclusions indemnitaires à la fois en son nom propre mais également au nom de la société BG2C. La SNC Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés soutient par ailleurs que le préjudice sollicité par la société Alm Allain est excessif dans la mesure où l’offre de la société Alm Allain était inférieure de 6 % au montant de l’estimation de la maîtrise d’oeuvre, et que dès lors le groupement ne pouvait escompter tirer un bénéfice important de la réalisation du marché. La SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés soutient que le taux de résultat moyen dont fait état le groupement Alm Allain / BG2C est surévalué dès lors qu’il ne prend pas en compte le taux des exercices clos les 31 juillet 2012 et les 31 juillet 2013, années au cours desquelles devait s’exécuter le marché. La société Alm Allain avait produit devant le tribunal administratif les comptes de résultat des deux sociétés membres du groupement qu’elle représente, pour la période du 1er août 2008 au 31 juillet 2010. Le tribunal administratif a relevé que le groupement Alm Allain soutenait que la marge nette à retenir était de l’ordre de 11,99 % pour la société Alm Allain et de 12,60% pour la société BG2C. Le tribunal, après avoir indiqué que le centre hospitalier de Libourne faisait valoir qu’il convenait de retenir le taux de 6,61% pour la société Alm Allain, correspondant à son taux de rentabilité en 2012, et de ne pas indemniser la société BG2C, en déficit depuis 2012, en retenant un manque à gagner du groupement Allain égal à 160 000 euros, soit un taux de marge sur le marché dont le groupement avait été privé, rapporté à l’offre du groupement d’un montant de 2 285 725,22 HT, de l’ordre de 7 %, n’a pas fait une appréciation exagérée du préjudice subi par le groupement.

7. En ce qui concerne en quatrième lieu, les fautes ayant entrainé la présentation par la société Seg Fayat d’une nouvelle offre, il résulte de l’instruction que les documents contractuels du marché des entreprises sont entachés d’erreurs fautives tenant à la contradiction de rédaction entre l’article 1.10 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot gros oeuvre qui indique, à juste titre, que les études d’exécution sont à la charge de l’entreprise et l’article 8-2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) qui indique à tort que les études d’exécution sont à la charge du maître d’oeuvre alors que l’article 1-5-2 du CCAP, ne mentionne pas les études d’exécution au nombre des études à la charge du maître d’oeuvre. L’acte d’engagement de la maîtrise d’oeuvre du 24 juillet 2009, indique en annexe 1-1, les missions confiées à la maîtrise d’oeuvre, et au nombre de ces missions, se trouve la mission ACT, qui constitue le 4° « assistance apportée au maître de l’ouvrage pour la passation du contrat de travaux » de l’article 7 de la loi du 12 juillet 1985. L’article 2 du décret du 29 novembre 1993, indique que les éléments de la mission sont indiqués dans l’acte d’engagement et selon l’article 6 du même décret : « … l’assistance apportée au maître de l’ouvrage pour la passation du ou des contrats de travaux sur la base des études qu’il a approuvées a pour objet :a) De préparer la consultation des entreprises, en fonction du mode de passation et de dévolution des marchés… ». L’arrêté du 21 décembre 1993 portant application du décret du 29 novembre 1993, précise que le dossier de consultation des entreprises est constitué « des pièces administratives et techniques prévues au contrat, ainsi que des pièces élaborées par la maîtrise d’oeuvre ». En vertu de l’annexe I 4. de cet arrêté : " L’assistance apportée au maître de l’ouvrage pour la passation du ou des contrats de travaux, sur la base des études qu’il a approuvées, a pour objet de : préparer, s’il y a lieu, la sélection des candidats et analyser les candidatures obtenues ;préparer la consultation des entreprises de manière telle que celles-ci puissent présenter leurs offres en toute connaissance de cause, sur la base d’un dossier constitué des pièces administratives et techniques prévues au contrat ainsi que des pièces élaborées par la maîtrise d’oeuvre, correspondant à l’étape de la conception choisie par le maître de l’ouvrage pour cette consultation. Le dossier est différent selon que la dévolution est prévue par marchés séparés ou à des entreprises groupées ou à l’entreprise générale … ". Il s’évince de ces dispositions que la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés était contractuellement tenue à l’accomplissement de la mission ACT, laquelle comportait la constitution du dossier de consultation des entreprises (DCE), et qu’au nombre des documents dont la rédaction incombait à la maîtrise d’oeuvre, se trouvait la rédaction du CCAP des marchés de travaux. Au surplus en vertu de l’annexe n° 1 de l’article 4-2 du cahier des clauses particulières du contrat de maîtrise d’oeuvre, le maître d’oeuvre devait s’assurer de l’absence de contradiction entre les différentes pièces et de la cohérence entre les documents écrits et les documents graphiques. Dans ces conditions, le caractère erroné et contradictoire du CCAP de travaux, lequel est en relation de causalité avec la présentation par la société Seg Fayat d’une offre ne comprenant pas les études d’exécution, puis d’une nouvelle offre se trouvant entachée d’irrégularité a été constitutif d’une faute de la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés. En revanche, contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, la transmission par la SNC Lavallin, appartenant au groupement de maîtrise d’oeuvre, de deux messages électroniques adressés les 7 février et 8 février 2014 à la société Seg Fayat, lui indiquant que les études d’exécution étaient à la charge de l’entreprise et lui demandant si elle maintenait son offre au prix indiqué incluant les études d’exécution, ne peut être considérée comme fautive, dès lors qu’elle n’incitait pas la société Seg Fayat à déposer une nouvelle offre pour un montant supérieur à celui de son offre initiale. Dans ces conditions, la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés est fondée à soutenir qu’en la condamnant à garantir le centre hospitalier de Libourne de la totalité des condamnations prononcées à l’encontre du centre hospitalier, le tribunal administratif a fait une appréciation excessive des fautes commises par elle. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu compte tenu des fautes commises par le centre hospitalier de Libourne, lequel comme le relève la SCP Bégué-Peyrichou-Gérard dans sa requête d’appel, contrairement à la proposition faite par la maîtrise d’oeuvre, d’écarter l’offre présentée par la société Seg Fayat comme non conforme, a décidé de passer outre à l’avis de la maîtrise d’oeuvre, de déclarer l’offre de la société Seg Fayat conforme et de lui attribuer le lot n° 2 en litige, de ramener à 40 % la part de garantie par la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés de la condamnation du centre hospitalier de Libourne et de réformer le jugement en ce sens.

8. La SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés demande à être garantie par la société Edeis, venant aux droits de la SNC Lavallin des condamnations qui seraient prononcées à son encontre. Toutefois, ainsi qu’il est indiqué au point 3 la SNC Lavallin en adressant deux messages électroniques les 7 février et 8 février 2014 à la société Seg Fayat lui indiquant que les études d’exécution étaient à la charge de l’entreprise et lui demandant si elle maintenait son offre au prix indiqué incluant les études d’exécution, ne peut être considérée comme fautive, dès lors qu’elle n’incitait pas la société Seg Fayat à déposer une nouvelle offre pour un montant supérieur à celui de son offre initiale. Dans ces conditions, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Edeis aux conclusions d’appel en garantie présentées par la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, ces conclusions d’appel en garantie doivent être rejetées.

9. Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de ramener à 40 % la part de garantie par la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés de la condamnation du centre hospitalier de Libourne, et de réformer le jugement en ce sens.

Sur les conclusions présentées par la société Seg Fayat tendant à être mise hors de cause :

10. Ainsi que la société Seg Fayat le fait valoir, elle n’a pas fait l’objet d’une condamnation en première instance, aucune conclusion n’ayant été présentée à son encontre, aucune conclusion n’étant au demeurant non plus présentée en appel à son encontre. La société Seg Fayat est dès lors fondée à demander sa mise hors de cause dans la présente instance.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La société Seg Fayat est mise hors de cause.

Article 2 : La SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés est condamnée à garantir le centre hospitalier de Libourne à hauteur de 40 % de la somme de 160 000 euros, correspondant à la condamnation du centre hospitalier de Libourne au profit du groupement Alm Allain / BG2C.

Article 3 : Le jugement n° 1204319 du 10 juillet 2015 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu’il est contraire à ce qui précède.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5: Le présent arrêt sera notifié à la SCP Atelier d’architecture Bégué Peyrichou Gérard et associés, au centre hospitalier de Libourne, au groupement Alm Allain / BG2C, à la société Edeis, à la société Seg Fayat et à M. B… A….

Délibéré après l’audience du 26 juin 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
Mme Frédéric Faïck, premier conseiller,


Lu en audience publique, le 28 août 2018.


Le rapporteur,

Pierre Bentolila

Le président,

Elisabeth Jayat

Le greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt

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N° 15BX03010

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CAA de BORDEAUX, 5ème chambre - formation à 3, 28 août 2018, 15BX03010, Inédit au recueil Lebon