CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 28 septembre 2020, 18BX01665, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 3e ch., 28 sept. 2020, n° 18BX01665
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 18BX01665
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Bordeaux, 25 février 2018, N° 1704315
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042381448

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C… F… a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler la décision du 31 juillet 2017 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-ouest a refusé de le recruter en qualité d’adjoint de sécurité pour inaptitude physique et de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1704315 du 26 février 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du 31 juillet 2017 du préfet de la zone de défense et de sécurité sud-ouest et mis à la charge de l’Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 avril 2018, le ministre de l’intérieur demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter la demande de première instance présentée par M. F….

Il soutient que :

 – la décision litigieuse n’est pas entachée d’erreur d’appréciation ;

 – c’est à tort que le tribunal a considéré que la note 4 attribuée à la lettre G en raison de son diabète ne prenait pas en compte la circonstance que son handicap était parfaitement compensé ;

 – en effet, en application de l’article R. 411-4 du code de la sécurité intérieure, la possibilité de compensation du handicap dont bénéficient les agents contractuels de l’Etat ne s’applique pas aux adjoints de sécurité de la police nationale ;

 – en tout état de cause, même si son diabète est contrôlé, il n’est pas possible d’affirmer que son état de santé est parfaitement compensé et qu’il ne sera pas sujet à des hypoglycémies au cours de prochaines années, pouvant entraîner un coma ou des troubles du comportement incompatibles avec l’exercice des fonctions d’adjoint de sécurité telles que décrites à l’article R. 411-5 du code de la sécurité intérieure ;

 – le service médical de la police nationale ayant émis un avis d’inaptitude physique à l’exercice des fonctions d’adjoint de sécurité, l’autorité administrative était tenue de suivre cet avis et de refuser de recruter M. F….

Par des mémoires, enregistrés le 26 juin 2018 et le 14 juin 2019, M. F…, représenté par Me E…, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du ministre de l’intérieur ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – aucun moyen n’est fondé ;

 – le référentiel utilisé par le service médical ne permet pas l’appréciation concrète de l’aptitude médicale de M. F… ;

 – lors de sa visite médicale du 12 juillet 2017, il n’a pas pu faire valoir son état de santé réel et actuel ;

 – en considérant que son diabète était un obstacle à son recrutement, le préfet a commis une erreur manifeste d’appréciation ;

 – la décision en litige présente un caractère disproportionné et discriminatoire.

Vu :

 – les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de la sécurité intérieure ;

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

 – le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004 ;

 – l’arrêté du 2 août 2010 relatif aux conditions d’aptitudes physiques particulières pour l’accès aux emplois de certains corps de fonctionnaires ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme B… A…,

 – et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. F… s’est présenté au concours d’adjoint de sécurité de la police nationale pour la première session 2017. Par un courrier du 19 mai 2017, il a été informé de son inscription sur la liste d’aptitude, sous réserve de justifier, entre autres conditions, de son aptitude physique. A l’issue de la visite médicale effectuée le 12 juillet 2017, il a été émis un avis d’inaptitude à ces fonctions. En conséquence de cet avis, par une décision du 31 juillet 2017, le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-ouest a refusé de recruter M. F… pour inaptitude physique. A la demande de M. F…, le tribunal administratif de Bordeaux a par un jugement du 26 février 2018 annulé la décision du 31 juillet 2017. Le ministre de l’intérieur relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l’article R. 411-5 du code de la sécurité intérieure : " Les adjoints de sécurité concourent aux missions du service public de la sécurité assurées par les fonctionnaires des services actifs de la police nationale sous les ordres et sous la responsabilité desquels ils sont placés. / Ils sont chargés de renforcer ces services pour faire face aux besoins non satisfaits en matière de prévention, d’assistance et de soutien, particulièrement dans les lieux où les conditions de la vie urbaine nécessitent des actions spécifiques de proximité. / A cet effet, ils ont pour tâches, notamment dans le cadre de la police de proximité : / 1° De participer aux missions de surveillance générale de la police nationale ; / 2° De contribuer à l’information et à l’action de la police nationale dans ses rapports avec les autres services publics nationaux et locaux ; / 3° De faciliter le recours et l’accès au service public de la police, en participant à l’accueil, à l’information et à l’orientation du public dans les services locaux de la police ; / 4° De soutenir les victimes de la délinquance et des incivilités, en les aidant dans leurs démarches administratives, en liaison avec les associations et les services d’aide aux victimes ; / 5° De contribuer aux actions d’intégration, notamment en direction des étrangers ; / 6° D’apporter une aide au public sur les axes de circulation, à la sortie des établissements d’enseignement, dans les îlots d’habitation et dans les transports en commun ; / 7°D’exercer des missions de police judiciaire dans les conditions fixées par l’article 21 du code de procédure pénale. / Ces missions sont exercées dans le respect des principes républicains et du code de déontologie de la police nationale et de la gendarmerie nationale prévu au chapitre IV du titre III du présent livre. / Les adjoints de sécurité ne peuvent pas participer à des missions de maintien de l’ordre. « . Aux termes de l’article R. 411-7 du même code : » En fonction des missions qu’ils sont susceptibles d’exercer, les adjoints de sécurité peuvent être dotés d’une arme de service (…) « . Aux termes de l’article R. 411-8 du même code : » Nul ne peut être recruté en qualité d’adjoint de sécurité : (…) / 5° S’il ne satisfait aux critères d’aptitude physique fixés par un arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé de la fonction publique. « . Aux termes des dispositions de l’article 2 de l’arrêté du 2 août 2010 relatif aux conditions d’aptitudes physiques particulières pour l’accès aux emplois de certains corps de fonctionnaires : » Les conditions d’aptitude physique particulières pour l’accès aux emplois de certains corps de fonctionnaires visés à l’annexe I ne peut porter que sur la capacité de chaque candidat, estimée au moment de l’admission, à exercer les fonctions auxquelles ces corps donnent accès (…) « . Aux termes de l’article 3 du même arrêté : » Outre les conditions d’aptitude physique pour l’admission aux emplois publics (…), les candidats doivent remplir les conditions d’aptitude physiques particulière suivante : 1° Pour l’accès aux emplois de fonctionnaires actifs des services de police nationale visés à l’annexe 1, les candidats doivent remplir les conditions d’aptitude physique mentionnées à l’annexe II du présent arrêté. Ces conditions d’aptitude physique particulières, déterminées par le SIGYCOP, incluent également l’aptitude au port et à l’usage des armes (…) ". L’annexe 2 fixe le profil médical requis qui regroupe sept sigles identifiés par des lettres (SIGYCOP), affectées d’un coefficient variant de 1 à 6 pour les sigles S, G, Y, O et 1 à 5, pour les sigles C et P. Le sigle G correspondant à l’état général et le coefficient requis pour occuper un emploi d’adjoint de sécurité ne peut être supérieur à 2 pour la lettre G.

3. Il ressort des pièces du dossier qu’à la suite de la visite médicale du 12 juillet 2017, M. F… a été déclaré inapte à l’emploi d’adjoint de sécurité, par application de la classification « Sigycop », ainsi que le rappelle le courrier du 29 septembre 2017 du médecin inspecteur régional de la zone de défense et sécurité Sud-Ouest. En application de cette classification, M. F… a eu le coefficient 1 à tous les sigles et le coefficient 4 pour le sigle G (état général), qui correspond à l’état général du candidat exempt de tout entraînement et impose des restrictions importantes d’activités, précisées par le médecin, selon les écritures mêmes de l’administration. Il ressort de l’avis médical précité que ce coefficient rend « de facto » M. F… inapte à intégrer la police nationale. Cependant deux certificats médicaux versés au dossier, l’un, établi le 16 septembre 2016 par le chef du pôle diabétologie à l’hôpital de Bayonne effectuant le suivi de M. F… et l’autre établi le 29 septembre 2016 par le médecin président de la station de Bayonne de la Société nationale de sauvetage en mer, pour laquelle M. F… effectue des missions en qualité d’équipier sauveteur, indiquent que M. F… souffre d’un diabète qui est tout à fait stabilisé. Si le ministre de l’intérieur verse en appel le courriel du 30 mars 2018 du chef de service de médecine interne du centre hospitalier universitaire de Montpellier-Nïmes qui répond de « manière abstraite et sans connaître le dossier » à la question des risques d’hypoglycémie lorsqu’un diabète est stabilisé, cet élément ne permet pas de justifier l’inaptitude retenue par l’avis émis par le médecin inspecteur. Dans ces conditions, en prenant la décision du 31 juillet 2017, le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-ouest, qui n’est pas tenu de suivre l’avis médical, a entaché sa décision d’erreur d’appréciation.

4. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’intérieur n’est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette décision.

Sur les frais d’instance :

5. Il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. F… au titre de ses frais d’instance.

DECIDE :


Article 1er : La requête du ministre de l’intérieur est rejetée.


Article 2 : L’Etat versera une somme de 1 500 euros à M. F… en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’intérieur et à M. C… F….


Délibéré après l’audience du 31 août 2020 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,
Mme D… G…, présidente-assesseur,
Mme B… A…, premier conseiller,


Lu en audience publique, le 28 septembre 2020.


Le rapporteur,


Déborah A… Le président,


Dominique NavesLe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

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N° 18BX01665

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