CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 24 novembre 2020, 18BX03419, 18BX03607, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 4e ch., 24 nov. 2020, n° 18BX03419, 18BX03607
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 18BX03419, 18BX03607
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Guadeloupe, 5 juillet 2018, N° 1701272
Dispositif : Satisfaction partielle
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042569556

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Guadeloupe, par déféré, a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d’annuler la délibération du 8 juin 2017 par laquelle la commission permanente du conseil régional de la Guadeloupe a autorisé la société d’économie mixte communale de Saint-Martin (Semsamar) à modifier son objet social afin de l’élargir aux énergies renouvelables et aux actions d’insertion et de formation, et à créer ou prendre des participations dans onze sociétés dans le cadre de cette activité nouvelle.

Par un jugement n° 1701272 du 6 juillet 2018, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé la délibération de la commission permanente du conseil régional de la Guadeloupe du 8 juin 2017.

Procédure devant la cour :

I – Par une requête enregistrée le 10 septembre 2018 sous le n° 18BX03419 et un mémoire en réplique enregistré le 9 octobre 2019, la région Guadeloupe, représentée par Me G…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 6 juillet 2018 ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par le préfet de la Guadeloupe devant le tribunal administratif de la Guadeloupe tendant à annuler la délibération du 8 juin 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

 – il n’est pas suffisamment motivé ;

 – le jugement qui lui a été notifié n’est pas signé ;

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

 – le développement des énergies renouvelables est nécessairement complémentaire à l’activité de la Semsamar qui intervient en matière d’aménagement et de construction. En considérant que l’activité d’énergies renouvelables n’était pas complémentaire à l’objet social de la Semsamar, au sens des dispositions de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), le jugement est entaché d’une erreur de droit ;

 – la prise de participations par la Semsamar dans plusieurs sociétés a uniquement pour but de concrétiser le développement des énergies renouvelables, qui est complémentaire à son activité ; par ailleurs cette prise de participation est autorisée par les textes en vigueur et notamment par l’avant dernier alinéa de l’article L. 1524-5 du CGCT, dès lors que cette opération s’inscrit en complémentarité par rapport à son objet social et que ses collectivités actionnaires ont donné leur accord ;

 – en concluant à l’absence de complémentarité entre l’activité de la Semsamar et celle consistant à initier et développer des actions d’insertion et de formation, le jugement est entaché d’une erreur de droit ;

En ce qui concerne, par l’effet dévolutif de l’appel, des autres moyens de la requête du préfet :

 – les moyens soulevés par le préfet relatifs à l’absence de complémentarité des activités d’énergies renouvelables d’une part et de déploiement d’activité de formation et d’insertion d’autre part seront rejetés ;

 – les dispositions de l’article L. 2253-1 du code général des collectivités territoriales qui s’appliquent aux communes ne sont pas applicables à la Région.

Par mémoires en défense enregistrés le 22 janvier 2019 et le 8 novembre 2019, le préfet de la Guadeloupe conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la région Guadeloupe ne sont pas fondés.

II – Par une requête enregistrée le 8 octobre 2018 sous le n° 18BX03607, un mémoire complémentaire enregistré le 23 octobre 2018 et un mémoire en réplique enregistré le 9 septembre 2019, la société d’économie mixte communale de Saint-Martin (Semsamar), représentée par la SCP d’avocats Celice-Soltner-Texidor-Perrier, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 6 juillet 2018 ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par le préfet de la Guadeloupe devant le tribunal administratif de la Guadeloupe tendant à annuler la délibération du 8 juin 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

 – il ne mentionne pas l’intégralité des mémoires échangés au cours de l’instance ;

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

 – contrairement à ce que le tribunal a retenu, les activités autorisées par la délibération litigieuse étaient bien complémentaires au sens de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales des activités historiques de la Semsamar.

Par mémoires en défense enregistrés le 15 avril 2019 et le 8 novembre 2019, le préfet de la Guadeloupe conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société ne sont pas fondés.

Par mémoire, enregistré le 9 octobre 2019, la région Guadeloupe, représentée par Me G…, conclut à l’annulation du jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 6 juillet 2018, au rejet de l’ensemble des conclusions présentées par le préfet de la Guadeloupe devant le tribunal administratif de la Guadeloupe et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l’Etat.

Elle soutient que :

 – le jugement est insuffisamment motivé ;

 – les motifs d’annulation de la délibération en litige sont erronés ;

 – la requête du préfet, par l’effet dévolutif de l’appel, doit être rejetée.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

 – le code général des collectivités territoriales ;

 – le code de l’urbanisme ;

 – le code de l’énergie ;

 – le décret 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. F… E…,

 – les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

 – et les observations de Me B…, représentant la région Guadeloupe et les observations de Me A…, représentant la société d’économie mixte communale de Saint-Martin (Semsamar).

Considérant ce qui suit :

1. La société d’économie mixte communale de Saint-Martin (Semsamar) est une société d’économie mixte locale (SEML) composée de trois collectivités publiques qui sont représentées au conseil d’administration à savoir, la région Guadeloupe qui détient 14,46 % du capital, la collectivité unique de Saint-Martin pour 51,16% du capital et la commune de Basse-Terre avec 5 % du capital. Lors de son assemblée générale extraordinaire du 30 juin 2017, la Semsamar a voté la modification de l’article 2 de ses statuts portant sur son objet social afin de l’étendre à deux domaines, l’insertion et la formation d’une part, et les énergies renouvelables d’autre part, et ainsi permettre aux actionnaires, après avoir délibéré sur le sujet, la prise de participation de la Semsamar dans des sociétés à créer, et la création de filiales, dans le domaine des énergies renouvelables. Préalablement, en application des dispositions des articles L. 1521-5 et L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales, les trois collectivités actionnaires avaient délibéré sur l’extension de l’objet social et la création de sociétés. C’est ainsi que par délibération du 8 juin 2017, transmise à la préfecture le 26 juin suivant, la région Guadeloupe avait autorisé la Semsamar à modifier son objet social afin notamment d’élargir son activité aux énergies renouvelables, à l’insertion et la formation et à créer onze sociétés dont deux filiales. Cette délibération a fait l’objet d’un recours gracieux du préfet de la Guadeloupe le 25 août 2017 qui est resté sans réponse. Dès lors, par déféré du 27 décembre 2017, le préfet de la Guadeloupe a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d’annuler cette délibération du 8 juin 2017. Par la requête n° 18BX03419, la région Guadeloupe relève appel du jugement du 6 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a prononcé l’annulation de cette délibération. Par la requête n° 18BX03607, la Semsamar, dont l’intervention en première instance a été admise, relève également appel de ce jugement.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n° 18BX03419 et 18BX03607 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu, dès lors, de les joindre pour qu’il y soit statué par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement :

3.Aux termes de l’article L. 9 du code de justice administrative : « Les jugements sont motivés. ». En l’espèce, il ressort des termes du jugement contesté que pour retenir le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales, les premiers juges, après avoir cité les textes applicables, se sont bornés à affirmer que les activités en litige n’étaient pas complémentaires, sans justifier cette affirmation ni apporter de réponse à l’argumentation longuement développée en défense par la région. Dès lors, la région Guadeloupe est fondée à soutenir que le jugement attaqué n’est pas suffisamment motivé et est ainsi irrégulier.

4. Par suite, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens d’irrégularité invoqués par la région Guadeloupe et la Semsamar, le jugement attaqué doit être annulé.

5. Il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le préfet de la Guadeloupe devant le tribunal administratif de la Guadeloupe.

Sur l’intervention devant le tribunal administratif de la société Arkolia énergies :

6. La délibération attaquée a, notamment, pour objet d’autoriser la Semsamar à prendre des participations dans des sociétés créées par la société Arkolia énergies. Dès lors, cette dernière a intérêt au maintien de cette délibération et son intervention est, par suite, recevable.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la région Guadeloupe et les sociétés Semsamar et Arkolia énergies :

7. En application de l’article L. 4142-1 du code général des collectivités territoriales le préfet de la Guadeloupe disposait d’un délai de deux mois à compter de la transmission de la délibération attaquée à ses services pour saisir le tribunal d’un déféré.

8. Il est constant que la délibération en litige a été transmise en préfecture le 26 juin 2017 et le délai de recours contre cet acte expirait donc le 27 août suivant. Cette date étant un dimanche, le recours gracieux formé par le préfet de la Guadeloupe, reçu par la région Guadeloupe le 28 août 2017, a valablement interrompu le délai de recours et a fait naitre une décision implicite de rejet le 29 octobre 2017. Par suite, le déféré, enregistré le 27 décembre 2017, n’est pas tardif et la fin de non-recevoir opposée par la région Guadeloupe et les sociétés Semsamar et Arkolia énergies doit être rejetée.

Sur la légalité de la délibération du conseil régional de la Guadeloupe du 8 juin 2017 :

9. Aux termes de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales : " Les communes, les départements, les régions et leurs groupements peuvent, dans le cadre des compétences qui leur sont reconnues par la loi, créer des sociétés d’économie mixte locales qui les associent à une ou plusieurs personnes privées et, éventuellement, à d’autres personnes publiques pour réaliser des opérations d’aménagement, de construction, pour exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial, ou pour toute autre activité d’intérêt général ; lorsque l’objet de sociétés d’économie mixte locales inclut plusieurs activités, celles-ci doivent être complémentaires (…) « . Par ailleurs, aux termes de l’article L. 1524-1 du même code : » (…) A peine de nullité, l’accord du représentant d’une collectivité territoriale, d’un groupement ou d’un établissement public de santé, d’un établissement public social ou médico-social ou d’un groupement de coopération sanitaire sur la modification portant sur l’objet social, la composition du capital ou les structures des organes dirigeants d’une société d’économie mixte locale ne peut intervenir sans une délibération préalable de son assemblée délibérante approuvant la modification. Le projet de modification est annexé à la délibération transmise au représentant de l’État et soumise au contrôle de légalité dans les conditions prévues aux articles L. 2131-2, L. 3131-2, L. 4141-2, L. 5211-3, L. 5421-2 et L. 5721-4. ".

10. Selon l’article 2 des statuts de la Semsamar, cette société d’économie mixte locale a pour objet social de « procéder à l’étude et à la réalisation d’opérations et d’actions d’aménagement au sens de l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme », de procéder également « à l’étude et à la réalisation de projets urbains, notamment la création de quartiers neufs, l’aménagement et l’équipement de secteurs ruraux, la rénovation de quartiers anciens, la réhabilitation de secteurs dégradés, la restauration immobilière et les programmes de résorption de l’habitat insalubre, de procéder à 1'étude et à la réalisation de programme de réhabilitation et de construction d’immeubles collectifs ou individuels de logements, l’étude et la réalisation des ouvrages et bâtiments à usage industriel, commercial, artisanal ou touristique destinés à la vente ou à la location, la gestion ou la mise en place de la gestion, de l’exploitation et de l’entretien d’ouvrages ou installations notamment réalisés à la suite d’opération d’aménagement, de réaliser des prestations d’assistance et de services aux collectivités territoriales ou aux personnes publiques ou privées intervenant dans les domaines de l’aménagement, des services publics, de la construction, des activités touristiques et du développement économique, de gérer la location et la copropriété d’immeubles, de créer et participer à des sociétés favorisant le développement des transports aériens inter-îles des Caraïbes et accomplir toutes opérations financières, commerciales, industrielles, mobilières ou immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l’objet social de la SEML ou susceptible d’en faciliter la réalisation. ».

11. Par la délibération du 8 juin 2017 en litige, la commission permanente du conseil régional de la Guadeloupe a autorisé la Semsamar à modifier son objet social afin d’y ajouter deux nouveaux domaines d’activités : « initier et déployer des actions d’insertion et de formation », d’une part, et « concevoir des projets d’énergies renouvelables, organiser la maintenance des installations et matériels, fournir toutes prestations et conseils en la matière et prendre toutes participations dans des sociétés ayant ces objets et activités », d’autre part.

12. En premier lieu, le préfet de la Guadeloupe soutient que les activités nouvelles d’insertion et de formation d’une part, et de développement des énergies renouvelables d’autre part, ne sont pas complémentaires avec les autres activités prévues dans l’objet social de la Semsamar, contrairement à ce qu’imposent les dispositions de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales.

13. Il résulte des dispositions précitées de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales, d’une part, que les sociétés d’économie mixte locales (SEML) peuvent légalement exercer, outre des activités d’aménagement, de construction ou de gestion de services publics, toute activité économique sur un marché concurrentiel pourvu qu’elle réponde à un intérêt général et, d’autre part, que cette activité complémentaire au sens de l’article L. 1521-1 doit être une activité prolongeant la mission exercée par la SEML, définie par ses statuts.

14. En l’espèce, s’agissant tout d’abord, de l’activité « initier et déployer des actions d’insertion et de formation », la région Guadeloupe et la Semsamar soutiennent qu’elle serait complémentaire de l’activité d’assistance et de prestations de services aux collectivités locales intervenant dans les services publics et le développement économique. Toutefois, cette activité de mission et d’assistance aux collectivités, effectivement prévue aux statuts de la société, doit être regardée comme se rapportant exclusivement aux activités principales précédemment énumérés dans lesdits statuts. Par suite, dès lors que la nouvelle activité envisagée de formation et d’insertion ne présente qu’un rapport trop lointain avec les missions principales d’aménagement et de construction et de développement des transports aériens inter-îles des Caraïbes exercées par la Semsamar, elle ne peut être regardée comme leur étant complémentaires. Dès lors, le préfet est fondé à soutenir que la délibération attaquée en tant qu’elle autorise la modification des statuts de la Semsamar afin d’y intégrer l’activité nouvelle d’insertion et de formation méconnait les dispositions précitées de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales.

15. Aux termes de l’article L. 100-1 du code de l’énergie : " La politique énergétique : (…) 5° Garantit la cohésion sociale et territoriale en assurant un droit d’accès de tous les ménages à l’énergie sans coût excessif au regard de leurs ressources ; 6° Lutte contre la précarité énergétique ; 7° Contribue à la mise en place d’une Union européenne de l’énergie, qui vise à garantir la sécurité d’approvisionnement et à construire une économie décarbonée et compétitive, au moyen du développement des énergies renouvelables, des interconnexions physiques, du soutien à l’amélioration de l’efficacité énergétique et de la mise en place d’instruments de coordination des politiques nationales. « . Aux termes de l’article L. 100-4 du même code : » La politique énergétique nationale a pour objectifs : (…) 8° De parvenir à l’autonomie énergétique dans les départements d’outre-mer à l’horizon 2030, avec, comme objectif intermédiaire, 50 % d’énergies renouvelables à l’horizon 2020. « . Par ailleurs, l’article L. 221-7 du code de l’énergie dispose également que : » Le ministre chargé de l’énergie ou, en son nom, un organisme habilité à cet effet peut délivrer des certificats d’économies d’énergie aux personnes éligibles lorsque leur action, additionnelle par rapport à leur activité habituelle, permet la réalisation d’économies d’énergie sur le territoire national d’un volume supérieur à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de l’énergie. Sont éligibles : (…) 6° Les sociétés d’économie mixte exerçant une activité de construction ou de gestion de logements sociaux. « . Enfin, l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme dispose : » (…) Toute action ou opération d’aménagement faisant l’objet d’une évaluation environnementale doit faire l’objet d’une étude de faisabilité sur le potentiel de développement en énergies renouvelables de la zone, en particulier sur l’opportunité de la création ou du raccordement à un réseau de chaleur ou de froid ayant recours aux énergies renouvelables et de récupération ".

16. En ce qui concerne l’activité consistant à concevoir des projets d’énergies renouvelables, produire et vendre des énergies renouvelables, organiser la maintenance des installations et matériels, fournir toutes prestations et conseils en la matière et prendre toutes participations dans des sociétés ayant ces objets et activités, cette activité, qui répond à un objectif d’intérêt général rappelé notamment par les dispositions précitées des articles L. 100-1 et L. 100-4 du code de l’énergie et L. 300-1 du code de l’urbanisme, est liée et complémentaire aux missions dévolues à la Semsamar consistant à réaliser des opérations d’aménagement et de construction, notamment par la construction, la rénovation, la gestion de logements et de projets urbains qui doivent désormais prendre en compte les objectifs énergétiques nationaux incluant le développement des énergies renouvelables. Dès lors, l’intervention de la Semsamar dans le domaine des énergies renouvelables, dans le but de les promouvoir, constitue une activité complémentaire au sens de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales, de sa mission d’aménagement et de construction et de nature notamment à faciliter la réalisation d’installation de sources d’énergies renouvelables sur les bâtiments édifiés lors d’opérations d’aménagements qu’elle supervise. Par suite, le préfet n’est pas fondé à soutenir que la délibération attaquée, en tant qu’elle autorise l’extension des statuts de la Semsamar à l’activité relative aux énergies renouvelables, méconnaitrait les dispositions de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales.

17. Par ailleurs, et en conséquence, le préfet n’est également pas fondé à soutenir que l’autorisation donnée par la délibération attaquée à la Semsamar de créer ou prendre des participations dans onze sociétés dans le cadre de cette activité « énergies renouvelables », qui est, comme cela a été dit au point 16, une activité complémentaire des activités actuelles de la Semsamar, serait contraire à ces mêmes dispositions.

18. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales : « (…) Toute prise de participation d’une société d’économie mixte locale dans le capital d’une société commerciale fait préalablement l’objet d’un accord exprès de la ou des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires disposant d’un siège au conseil d’administration, en application du premier alinéa du présent article. ». Par ailleurs aux termes de l’article L. 4211-1 du même code : « La région a pour mission, dans le respect des attributions des départements et des communes et, le cas échéant, en collaboration avec ces collectivités et avec l’Etat, de contribuer au développement économique, social et culturel de la région par : (…) 14° La détention d’actions d’une société anonyme ou d’une société par actions simplifiée dont l’objet social est la production d’énergies renouvelables par des installations situées sur leur territoire. »

19. Le préfet fait valoir qu’en application des dispositions précitées la prise de participations de la Semsamar dans des sociétés anonymes ne pourrait être autorisée que dans la mesure où l’intervention de ces sociétés serait circonscrite au territoire de la Guadeloupe. Cependant, les dispositions précitées de l’article L. 4211-1 sont relatives à la prise de participations directe de la Région dans le capital d’une société commerciale mais ne concernent pas, comme en l’espèce, les prises de participation des SEML dans d’autres sociétés. Or, la délibération en litige n’a pas pour objet d’autoriser la prise de participations de la région Guadeloupe dans une société commerciale, mais d’y autoriser la Semsamar, conformément à l’article L. 1524-5 avant dernier alinéa du code général des collectivités territoriales, qui ne prévoit aucune limite géographique. Par suite, et alors qu’aucune disposition législative ou règlementaire n’impose que de telles prises de participations revêtent un caractère exceptionnel, le moyen doit être écarté.

20. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 2253-1 du code général des collectivités territoriales : « Sont exclues, sauf autorisation prévue par décret en Conseil d’Etat, toutes participations d’une commune dans le capital d’une société commerciale et de tout autre organisme à but lucratif n’ayant pas pour objet d’exploiter les services communaux ou des activités d’intérêt général dans les conditions prévues à l’article L. 2253-2. / Par dérogation au premier alinéa, les communes et leurs groupements peuvent, par délibération de leurs organes délibérants, participer au capital d’une société anonyme ou d’une société par actions simplifiée dont l’objet social est la production d’énergies renouvelables par des installations situées sur leur territoire ou sur des territoires situés à proximité et participant à l’approvisionnement énergétique de leur territoire. ».

21. Le préfet de la Guadeloupe fait valoir que l’activité relative à la production d’énergie renouvelable que la Semsamar souhaite exercer ne serait pas circonscrite à la Guadeloupe et serait ainsi contraire aux dispositions précitées de l’article L. 2253-1 du code général des collectivités territoriales. Toutefois, d’une part, cet article concerne les communes et non les régions. D’autre part, cet article est relatif à la prise de participations directe d’une commune dans le capital d’une société commerciale, mais ne concerne pas les prises de participation des sociétés d’économies mixtes dans d’autres sociétés. Or la délibération en litige n’a pas pour objet d’autoriser la prise de participations de la région Guadeloupe dans une société commerciale. Le moyen tiré de la violation de l’article L. 2253-1 du code général des collectivités territoriales doit donc être écarté.

22. Enfin, le préfet soutient que la prise de participations de la Semsamar dans des sociétés anonymes serait illégale car contraire au droit de la concurrence et au droit de la commande publique. Toutefois, une société d’économie mixte locale peut prendre des participations dans le capital d’une autre société commerciale ou créer une société commerciale, dès lors que cette opération s’inscrit en complémentarité par rapport à son objet social et que ses collectivités actionnaires ont donné leur accord. Il ressort d’ailleurs des écritures du préfet, que de telles prises de participations ainsi que la création de filiales sont autorisées notamment par l’article L. 1524-5 précité du code général des collectivités territoriales sous réserve de l’accord préalable des collectivités actionnaires de la SEM. Par ailleurs, si le fait pour une SEML de confier la réalisation d’un projet à une société, peut, dans certains cas, entraîner l’application des règles de la commande publique, tel n’est pas le cas de la prise de participations, qui n’implique aucune relation contractuelle entre les deux sociétés. En l’espèce, l’objet de la délibération attaquée n’est pas d’autoriser la Semsamar à confier la réalisation d’un projet déterminé à une société, et donc de conclure un contrat avec des sociétés intervenant dans le domaine des énergies renouvelables, mais uniquement de l’autoriser à prendre des participations dans ces sociétés. Par suite, et à supposer comme le soutient le préfet que les futurs contrats conclus par la SEM avec les sociétés créées seront soumis au droit de la commande publique, le moyen doit être écarté.

23. Il résulte de tout ce qui précède, que le préfet de la Guadeloupe est seulement fondé à demander l’annulation de la délibération du 8 juin 2017 de la commission permanente du conseil régional de la Guadeloupe en tant qu’elle autorise la Semsamar à modifier son objet social afin de l’élargir à l’activité d’insertion et de formation.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce de faire application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat les sommes demandées par la région Guadeloupe et la Semsamar.

DECIDE :


Article 1er : Le jugement n°1701272 du 6 juillet 2018, du tribunal administratif de la Guadeloupe est annulé.


Article 2 : L’intervention de la société Arkolia Energies est admise.


Article 3 : La délibération du 8 juin 2017 de la commission permanente du conseil régional de la Guadeloupe en tant qu’elle autorise la Sensamar à modifier son objet social afin de l’élargir à l’activité d’insertion et de formation est annulée.


Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté


Article 5: Le présent arrêt sera notifié à la région Guadeloupe, à la société d’économie mixte communale de Saint-Martin (Sensamar), à la société Arkolia énergies et au préfet de la Guadeloupe.


Délibéré après l’audience du 20 octobre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme D… C…, présidente,
M. F… E…, président-assesseur,
M. Normand, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2020.

La présidente,


Evelyne C…

La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

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N° 18BX03419, 18BX03607

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